•  

     

     

    Dans la nuit entre le samedi 30 juin et le dimanche 1er juillet 2001… dans le lit de Nico…

     

    La peau mate, douce, chaude du beau brun… sa plastique parfaite… le relief magique de ses pecs bombés… le parfum envoûtant, un mélange de déo, de gel douche et de transpiration légère qui se dégage de son torse… son regard de braise… son attitude de macho tout entier focalisé sur son propre plaisir pendant qu’il baise… son corps ondulant sous le mouvement de ses coups de reins… la raideur de sa queue coulissant entre ses fesses… les expressions incontrôlées de son visage affichant les vagues successives de son plaisir de mec…

    La peau à peine un peu moins mate de Thibault… sa plastique imaginée, inventée, devinée au travers des confidences visuelles dévoilées par ce gendre de vêtements plutôt « bavards » au sujet de la beauté masculine que sont les t-shirts un peu ajustés… (oui, les t-shirts, si éloquents au sujet de la beauté d’un torse masculin, bavards mais jamais assez… ou bien… juste assez, laissant place au plaisir de l’imagination)… son attitude de mec puissant mais doux qu’on lui imagine bien pendant l’amour… son corps ondulant sous le mouvement des coups de reins… la raideur de sa queue coulissant entre ses fesses… les expressions incontrôlées de son visage affichant les vagues successives de son plaisir de mec…

    La peau basanée, qu’on devine, qu’on sait d’une douceur extrême sur ce genre de gars bien typé… le fameux étalon pur sang arabe… sa plastique pas si difficile à détailler grâce à un t-shirt blanc bien trop moulant pour laisser beaucoup de place à l’imagination… cette plastique dont il reste quand même bien des choses à découvrir, la curiosité et le désir au paroxysme… le regard excessivement viril… son attitude de macho tout entier focalisé sur son propre plaisir pendant qu’il baise… une virilité imprégnée d’un coté sauvage et conquérant qui n’appartient qu’à ce genre de mec et qu’on devine débordante, inévitable… une virilité à laquelle, il le sait bien, il ne saurait pas s’opposer, une virilité à laquelle il n’aurait aucun mal à se soumettre… son corps ondulant sous le mouvement des coups de reins… la raideur de sa queue coulissant entre ses fesses… les expressions incontrôlées de son visage affichant les vagues successives de son plaisir de mec…

    Au final, cette nuit là dans le lit de Nico s’était révélée bien mouvementée… et qu’importe si son corps était seul sur son matelas 140 cm… son esprit ne l’était pas… à partir du moment où il avait éteint la lumière et qu’il s’était calé sous les draps, ces trois fantasmes avaient été appelé (in)volontairement à la rescousse pour pimenter une nouvelle branlette épique… ce plaisir solitaire qui, certes, ne remplace pas celui de mélanger son corps et son désir avec ceux d’un bogoss bien chaud, mais qui permet quand même de calmer l’esprit et de détendre le corps pour trouver plus rapidement le sommeil…

    Oui, pour Nico le sommeil était venu rapidement après la jouissance rapidement amenée par la présence à ses cotés des ces trois beaux fantasmes, de ces trois déclinaisons du charme masculin toutes plus sensuelle les unes que les autres… le sommeil était venu mais ce n’est pas pour autant que ces fantasmes étaient partis… ils étaient restés là à flotter autour de lui, comme des fantômes, pour hanter son sommeil au travers de la porte du rêve…

    Et voilà que, dans les rêves qui avaient peuplé sa nuit, les trois fantasmes, les trois étalons, les deux français et le pur sang arabe, étaient revenus à la charge, se présentant devant lui dans les meilleures dispositions qui soient, leurs corps se mêlant au sien et se mêlant entre eux suivant l’ordre et la logique qui devaient paraître les bons au Nico rêveur…

    Oui, Nico était seul dans son lit, mais pas du tout dans ses rêves… ce fut une nuit bien animée dans son lit, dans ses draps… des draps que le matin suivant se souviendront de bien des choses…

     

    Précédemment dans 50 nuances de la vie de Nico : une rencontre fortuite avec un labranoir et son maître après une épreuve du bac avait mis un peu de baume au cœur et amené un peu de tendresse dans la vie de Nico ; à la suite du débordement d’effusions de l’animal, un verre avait été proposé et accepté dans l’appartement d’un charmant Stéphane ; dans le quartier de la Halle au Grains, des câlins avaient été échangés… Nico avait vécu le premier orgasme de sa vie provoqué par la main d’un autre garçon… la fin du bac dans les chiottes du lycée avec une baise dégradante avec Jérém avait poussé Nico à s’isoler à Gruissan avec Elodie pendant plusieurs jours… pendant ce séjour Nico avait souvent pensé à ce garçon qui en une seule rencontre l’avait tant marqué, ce garçon qui l’avait touché mais qui, hélas, allait partir en Suisse dans très peu de temps…

    A la piscine Nakache, Stéphane avait fait son apparition de façon inattendue provoquant chez Jérémie une jalousie tout aussi inattendue…

    Le soir même, un sms avait été envoyé depuis le quartier St Michel pour proposer un rendez vous… rendez vous qui avait été confirmé depuis le quartier de la Halle aux Grains pour le lendemain soir…

    Mais voilà que le lendemain soir, une demie heure avant ce rendez vous, un sms impromptu de la part du beau brun « Vien au vestiaire rugby tout desuite » avait provoqué l’annulation du rendez vous de la Halle aux Grains…

    Une semaine s’était écoulée depuis, une semaine de belles surprises… Jérém embauché en tant que serveur rue de Metz, la découverte de Thibault et d’une amitié possible, l’impatience de retrouver le beau brun et le beau mécano lors de la soirée au KL le samedi soir…

    Une semaine pleine d’espoirs et terminée, hélas, avec une soirée pleine de mauvaises surprises, de déceptions, d’amertume…

    Une semaine bien remplie en somme, une semaine pendant laquelle Nico n’avait trouvé ni le temps ni le courage de relancer ce charmant Stéphane…

    Heureusement Elodie, en quittant Nico après la rude soirée au KL, avait trouvé le moyen de mettre les points sur les « i »…

    « Mon cousin, t’aurais pas par hasard un 06 en attente de rendez-vous ? Je sais pas… genre un mec à qui t’as posé un lapin en début de semaine et avec qui tu aurais envie de passer un bon moment pour te consoler ? ». 

     

    Lorsque je quitte Elodie après un nouveau câlin dans ses bras, ma montre indique 4h03. J’ouvre la porte de la voiture et… je manque de me la prendre dans la figure en retour… putain de vent d’autan qui sillonne toujours les rues de la ville rose… j’arrive quand même à m’extraire de l’habitacle et à souhaiter la bonne nuit à ma cousine.

    J’avance sur le trottoir, la tête saturée d’images, comme hébété, incapable de réfléchir. C’est tard et je tombe de fatigue. Les émotions de la soirée sont passées sur moi comme un rouleau compresseur. Je suis HS. Et rentrant chez moi, j’ai tout juste la force de me déshabiller et de me brosser les dents… je dois me faire un peu violence pour prendre une douche, mais cela s’impose… j’ai l’impression de puer partout l’odeur du tabac froid et j’ai horreur de ça… je mets mes habits au sale… je ne supporte même pas leur présence dans ma chambre… l’odeur de la boite est comme une cuite… on s’y plonge sans la voir venir, mais qu’est ce que c’est désagréable à posteriori…

    Une fois au lit, les images de la soirée remontent à mon esprit… c’est ainsi que je commence à me branler en repensant à ce reubeu qui m’a tant attiré et tant effrayé... l’image de son t-shirt si blanc se mélangeant à celle d’autres t-shirts, un orange, un autre gris… je me branle en imaginant, en fantasmant sur la nudité de ce beau reubeu, sur sa sexualité, sur ses envies, sur ses besoins, sur ses possibles attitudes au lit avec moi, sur ma soumission totale à sa virilité… sur le coté dominant que je lui imagine… ce qui ne m’empêche pas, au même temps, de repenser à l’image du beau et con Jérém en haut de l’estrade devant la piste de danse, à son attitude de mec conquérant, à son insupportable beauté, à son irrésistible effronterie, à son charme hors normes ; de repenser au physique musclé, à la gentillesse et au charme ravageur du beau Thibault… et de revivre le départ de la boite des « quatre fantastiques », d’imaginer les deux coéquipiers en train de baiser côte à côte, la nuit durant …

    Certes, les images excitantes ne manquent pas, elles sont si nombreuses qu’elles se bousculent dans ma tête… je suis tellement épuisé que je tombe comme une pierre un instant après avoir joui dans mes draps…

    Je m’endors vers 4h25 pour me réveiller un peu plus tard ce matin là, à l’aube de 10h15. Au fur et à mesure que mes sens et mon esprit sortent de l’engourdissement du sommeil, je retrouve les souvenirs de la nuit d’avant. Dans ma tête, tout est clair et confus à la fois… je vois clairement ce qui s’est passé… je retrouve mon humiliation devant les mots de Jérém « Vas donc te branler aux chiottes, ce soir je n’ai pas envie de te baiser », des mots qui résonnent, qui cognent dans ma tête et me torturent sans répit… la honte, cuisante, indélébile pour toutes les cochonneries que je me suis laissé aller à balancer dans son oreille croyant lui faire plaisir… la jalousie devant son double plan drague conduit sous mes yeux éberlués… une nouvelle humiliation lorsque j’avais croisé son regard pendant qu’il embrassait sa pouff… le sentiment de trahison de la part de Thibault prenant partie à ce plan à la con… le départ précipité de la boite, la peur de me faire agresser par un beau reubeu, une nouvelle humiliation, celle de devoir fuir devant mon désir…

    Je suis tellement mal que je n’ai vraiment pas envie de quitter les draps… j’ai envie de disparaître sous terre, de disparaître de la vue de tout le monde… de disparaître à jamais… je me cache entièrement sous ma couette, en boule, je cherche le noir…

    Je ne sais pas quelle va être la suite des événements… vais-je revoir Jérém ? Et Thibault ? Comment les retrouver après ce qui vient de se passer ? Ai-je seulement envie de les retrouver ? De toute façon il y a la question du départ de Jérém à la rentrée… ça de toute façon c’est réglé… maintenant ou dans deux mois, on sera à des centaines, voire à des milliers de bornes de distance l’un de l’autre...

    Alors, quoi faire de l’avis de ma cousine qui pense que je perds mon temps avec Jérém mais qui me conseille d’accepter malgré tout l’amitié de Thibault si je veux avoir une chance de prolonger un peu ma relation avec le beau brun… mais à quoi bon ? A quoi bon me donner tant de mal pour lui, à quoi bon tenter de garder une relation si c’est pour me faire traiter de cette façon ? « Vas donc te branler aux chiottes, ce soir je n’ai pas envie de te baiser »… qu’est-ce qu’ils brûlent au fond de moi ces mots… à chaque fois que j’y pense, c’est comme une blessure ouverte sur laquelle on jetterait du sel… et comme j’y pense en continu, ça brûle en continu… petit con de petit con, va… après m’avoir baisé comme un malade à la piscine et au vestiaire de rugby en début de semaine, après que je me sois dévoué à lui offrir un plaisir de plus en plus puissant, voilà comment je me fais traiter… jamais je ne comprendrai ce con de mec !

    Je suis tellement déçu et amer que j’ai envie de tout envoyer chier, de profiter de la fin du lycée et du début de ma nouvelle vie d’étudiant bordelais pour faire table rase de tout ça, pour tourner la page et essayer de vivre ma vie autrement… j’en ai marre de toute cette souffrance, de ces petits, immenses moments de bonheurs physique noyés dans tant de peine, d’humiliation et de frustration…

    Ce matin là j’ai envie de tout envoyer valser… plus rien ne me semble bon pour moi, à part, peut-être, la « question » Stéphane… oui… Stéphane… lorsque enfin je me détache de mes pensées douloureuses et que je songe à lui, c’est comme si un rayon de soleil venait illuminer une journée bien grise… lui, pour le coup, j’ai vraiment envie de le revoir… il y a juste un petit problème… comment reprendre contact après avoir annulé un rendez vous à la toute dernière minute et l’avoir laissé une semaine sans donner de mes nouvelles ? Certes, lui non plus il ne m’en a pas données… il doit m’en vouloir… et il aurait raison de m’en vouloir… ou alors il attend que je me manifeste… j’ai honte… j’aurais du le relancer pendant la semaine… quel goujat je fais… le rayon de soleil semble se cacher devant un nouveau nuage soudainement apparu dans mon ciel intérieur… je sens que je ne vais pas oser…

    J’attrape mon portable sur la table de nuit, j’ai envie de textoter un peu avec Elodie et lui demander conseil. Je sais qu’elle va se moquer de moi et qu’elle va me pondre une solution aussi simple qu’une évidence… « Appelle-le, espèce de con de cousin »… ou alors… « Envoie-lui un sms style J-ai-envie-de-te-voir… faut tout te dire, cousin, c’est désespérant »… j’ai l’impression de l’entendre d’ici…

    Mais contre toute attente, ce matin là je n’aurais pas besoin d’elle pour trouver réponse à ma question. L’écran de mon portable affiche l’icône d’un sms non lu. Le message date de la veille, à 20h26… mon portable étant resté à la maison pendant ma soirée et ignoré à mon retour dans la nuit, je n’y ai pas fait attention avant…

    « Je suis libre ce dimanche. Tu peux passer si ça te dit. ».

    Stéphane… ooohhh… je suis touché… il est trop gentil ce mec… alors il n’est pas fâché… et non seulement ce message me fait comprendre qu’il ne m’en veut pas, mais qu’il a carrément envie de me voir. Je suis soulagé. Je suis heureux. J’ai envie d’être avec lui, de passer un bon moment. De revoir Gabin. De me sentir bien chez lui, avec lui.

    « Et comment ! » ce sera ma réponse enjouée. 

    Lui : « ;-) 14h chez moi ? ». 

    Moi : « Parfait. Merci. A tout ». 

    Lui : « A tout ». 

    Oui, ce matin là j’ai enfin quelque chose de positif auquel m’accrocher, un rayon de soleil destiné à chasser de façon durable la chape de nuages jusqu’à là amoncelés dans mon ciel intérieur : je sais que cet après-midi là je vais revoir Stéphane… l’idée de ce rendez vous me calme, m’apaise, me rend tout guilleret… mon esprit est tellement occupé à imaginer ce bonheur proche, que j’arrête de penser à la déception de cette nuit, à cette humiliation si cuisante… je me lève en balançant mes draps et ma couette, je reprends une douche, je descends prendre un café et je remonte brancher mon casque pour écouter à fond les treize titres de pur bonheur que composent l’album Ray of light… je monte le son à fond, tout en surfant sur Internet à la recherche de photos et de commentaires sur les dernières date du Drowned World Tour… le 12 juillet approche et je m’impatiente…

    Assis devant mon ordi, je suis partagé entre deux envies, comme chaque fois que je suis confronté à quelque chose que j’attends avec impatience : un livre, un film, un événement que j’ai une irrésistible envie de lire, de voir, de vivre… le désir, l’attente sont tellement bons, aussi bons que l’événement lui-même que je suis à chaque fois partagé entre l’envie de lire, d’y aller, d’y être tout de suite et l’envie de faire durer le plaisir de l’attente, la surprise, de repousser la découverte le plus longtemps possible…  

    Hélas pour un concert je n’ai pas grand pouvoir de faire durer l’attente, car si Madonna a dit qu’elle est libre le 12, il faut y aller le même soir qu’elle de préférence… on ne pose pas un lapin à Madonna… elle ne saurait pas quoi en faire, elle est végétarienne… à contrario, si Madonna nous met deux heures de retard dans le pif en nous abandonnant à un DJ à la con qui ne passe même pas ses chansons, on ne lui en veut même pas… car l’attente c’est déjà du Madonna… non, cette attente n’est pas pénible, au contraire elle permet de savourer ce temps qui précède le moment où elle sera enfin au milieu de son public et à ne pas penser que ce moment sera trop court et que la fin du spectacle arrivera forcement trop vite…  

    To have and not to hold, Little star et Mer Girl s’enchaînent pour mon plus grand bonheur… la musique s’arrête… il est tout juste 11h40, il me faut occuper mon temps jusqu’au déjeuner… j’ai le temps d’écouter un autre cd… quelle grande invention ces mp3… même plus besoin d’attraper un cd pour changer de cd… j’ouvre un nouvel dossier et je balance l’album Music à toute puissance… la chanson Music et un pur bonheur, Impressive instant est mon coup de cœur… 

    J’ai du mal à tenir en place à l’approche de mon rendez vous… c’est un peu la même sensation que pour le concert de Madonna… ainsi, si le compte à rebours a commencé dans ma tête, si je suis tout excité à l’idée d’y être, à bien regarder les choses l’attente n’est pas pénible, au contraire elle permet de savourer ce temps qui précède le moment où je serai chez Stéphane, et à ne pas penser que ce moment sera trop court et que la fin de notre rencontre arrivera forcement trop vite…  

    L’heure du déjeuner arrive enfin et ma mère fait irruption dans ma chambre, après m’avoir visiblement appelé plusieurs fois en vain à cause de mon casque et du volume complètement délirant de la musique que mon ordi lui envoie… elle m’engueule sur les premières notes d’American Pie… cette magnifique reprise de Madonna qui n’a pour autant pas sa place sur un opus aussi à part que Music…  

    « J’arrive maman » je lui balance, bien décidé a arriver à la fin du bonheur sonore que constitue par ailleurs cette chanson… 

    Trois minutes plus tard je descends… un grand saladier avec des spaghettis à la sauce tomate trône au milieu de la table… je mange en vitesse, en essayant de jongler entre les questions typiques du dimanche midi… « T’es rentré à quelle heure ? », « Vous étiez ou ? », « T’as bu ? »… j’arrive quand même à placer l’info qui me tient à cœur, à savoir que l’après-midi même je vais sortir à nouveau… ce qui entraînera des réflexions de la part de ma mère sur mes sorties excessives… 

    Elle me saoule mais je me fous un peu de ses remontrances… oui, je sors beaucoup, mais en même temps j’ai le droit, le bac est fini… 

    Une demi heure plus tard je suis de retour dans ma chambre, mon terrier… je m’allonge sur le lit et j’essaie de respirer à fond pour me calmer… l’heure du rendez vous avec Stéphane approche et je suis un peu inquiet de comment vont se faire ces retrouvailles… j’ai envie de passer un bon moment, j’ai envie d’oublier tout ce qui s’est passé la veille… je ne veux surtout pas lui parler encore de Jérém, je veux plutôt en savoir un peu plus sur lui, j’ai envie de m’évader… 

    Je me demande de quoi on va parler… je me suis toujours trouvé inintéressant, et je n’ai jamais su de quoi causer aux gens, et encore moins aux garçons qui me plaisent… sous cet aspect, il faut admettre que Jérém m’était d’un grand secours… pas de discussions avec lui, que de la baise… 

    Mais Stéphane n’est pas du tout pareil… il aime discuter… il aime me faire parler… je sais que notre petite relation n’a pas d’avenir car il part à mille bornes dans quelques jours à peine… mais n’empêche, je n’ai pas pour autant envie de passer pour un grand couillon qui n’a pas de conversation mis à part ses peines de cœur ridicules… 

    Je me demande si en arrivant on va se faire des câlins direct, s’il va avoir envie de coucher tout de suite, s’il a envie et si j’ai envie d’aller plus loin que la première fois… 

    13h25… il faut m’habiller, me faire beau autant que cela se peut, il faut y aller… à 13h50 je suis dans la rue après avoir précisé à mes parents que j’allais voir Dimitri… tiens, je me demande bien où il est passé celui là après que je lui ai montré tout mon intérêt pour sa conversation en lui tournant carrément le dos au KL… je me demande ce qu’il a bien pu penser de moi, avant de se tirer sans un mot… je me demande s’il s’est rendu compte de mon manège, s’il s’est rendu compte de mon regard ravi et aimanté, perdu devant les agissements d’un super-mega-bogoss… mais peu importe, rien à cirer… tant pis si ça jase… je suis homo et un jour il faudra bien que cela se sache… de toute façon je vais partir à Bordeaux, je vais changer de vie… et d’amis… d’amis ou plutôt de connaissances… car ici à Toulouse, à part Elodie, je n’ai pas vraiment d’amis… 

    Le vent d’autan est toujours là, il commence à faire chier… je lui en veux pour ce qu’il m’a apporté la veille… ce que je ne sais pas à ce moment là, c’est qu’à l’avenir il aura encore beaucoup de choses à me dire, des plus enchanteresses aux plus déchirantes… mais cet après midi là, le vent d’autan ne semble avoir aucun message à me délivrer… j’avance tranquillement dans la rue direction le quartier de la Halle aux Grains, plutôt confiant d’aller passer un bon moment… 

    J’arrive devant la porte de l’immeuble et je sonne à l’interphone.  

    « Salut, c’est Nico… » j’annonce. 

    « Ah… » je l’entends plaisanter « je croyais que c’était Bono de U2… ». 

    Hummmm un beau message subliminal au passage je trouve…. 

    Je ne peux pas me retenir de sourire. Surtout lorsque j’entends en arrière plan sonore dans l’interphone les « waf waf » puissants de mon pote le labranoir. 

    « Gabin a mal aux oreilles à cause de tes bêtises… » je lui réponds. Je l’entends rigoler à son tour. Ça me fait drôlement plaisir d’entendre sa voix et son rire charmant. 

    « Avance, toutes les portes sont ouvertes… ». 

    En effet, la porte donnant sur la rue est ouverte, et la porte fenêtre de l’autre coté du vestibule l’est aussi… j’ai tout juste le temps de la refermer derrière moi que je vois débouler une masse noire remuant vigoureusement une queue bien touffue… Gabin m’accueille les pattes grandes ouvertes… 

    Je caresse le beau brun… un beau brun à quatre pattes… pour le coup il est debout sur deux pattes, les antérieurs posées sur mon t-shirt, le museau essayant d’aller le plus loin possible pour atteindre mes oreilles… il est comme moi, il adore les oreilles… je le caresse généreusement, son poil est trop doux, son affection trop touchante… 

    « Gabin, au pied… » j’entends Stéphane le réprimander. Trop tard. Mais qu’importe. C’est trop mignon l’affection d’un labra. 

    Je me suis parfois fait la réflexion que s’il me faut un mâle, il me faut carrément le mâle parfait… brun, musclé, puissant, fougueux, câlin, gentil, fidèle… à ce moment précis je me dis qu’en fait, ce n’est pas un mec qu’il me faut, c’est un labrador noir…

    Je finis par avancer vers le maître des lieux, malgré la fougue que Gabin met à accaparer mon attention.  

    « Bonjour… » je lui lance simplement. 

    « Salut » il me répond « Gabin a l’air content de te voir… » 

    Je lui souris. Il est beau. Simplement habillé avec une chemisette bleu foncé, d’un short marron de randonneur avec plein de poches d’où dépassent des jambes poilues et plutôt musclées ; d’une paire de baskets blanches ainsi que de son sourire charmant et bienveillant… je me fais la réflexion qu’il y a dans ce garçon quelque chose qui me renvoie à un autre gars pour qui j’avais un temps eu beaucoup d’estime et que jusqu’à la veille je trouvais charmant et attachant au delà du raisonnable… un certain Thibault…

    Dans le doute sur la tenue à avoir, je lui serre la main… je sens la prise ferme de la sienne et je vois son petit sourire s’ouvrir dans un grand sourire… un geste inattendu et rapide de son bras m’approche soudainement de lui, nos torses se frottent, nos visages se frôlent… il me claque la bise et il me chuchote à l’oreille : 

    « Il n’y a pas que Gabin qui est content de te voir… » 

    Je retrouve sa gentillesse. L’impression, la démonstration que ça lui fait plaisir de me revoir. Et toujours je retrouve avec bonheur l’accent chantant des toulousains, cet accent qui sent bon le sud, les briques chaudes des immeubles de Toulouse en plein été, le vent d’autan, le rugby. J’ai l’impression que ce gars est vraiment à l’image de sa ville… chaleureux, accueillant, solaire… l’impression qu’il est vraiment un enfant du pays… c’est mon ressenti, un ressenti qui, plus tard ce jour là, se révélera infondé, mais qu’importe…

    « Moi aussi je suis content d’être là… » je lui réponds. 

    « Ca a été laborieux… » il plaisante pendant qu’on franchit le seuil de l’apart. 

    « Après le bac je me suis fait embarquer à Gruissan par ma cousine et quand on est revenus sur Toulouse elle ne m’a pas lâché les baskets… » je tente d’expliquer ma dérobade pendant qu’il referme la porte derrière nous. 

    Je culpabilise quand même un max pour mon annulation du lundi.  

    « Désolé encore pour l'autre soir, je n’étais pas bien… » j’ajoute en m’enfonçant avec regret dans un mensonge hélas nécessaire. 

    « C'est pas grave… si tu as annulé, c’est que tu avais une bonne raison… et puis on n’est pas mariés… n’en parlons plus, l’important c’est que tu sois là maintenant… » rigole-t-il. 
    Il est adorable. Je me contente de sourire, touché par ses mots.

    « Tu veux boire un truc ? »

    « Une bière blanche ? » je me lance.

    « Je dois avoir ça… installe toi, j’arrive ».

    Pendant que Stéphane trifouille dans le frigo, je prends place dans le canapé devant la table basse. Gabin ne tarde pas à approcher, pour s’asseoir en chien porte journaux, le dos lourdement appuyé contre ma jambe… la tête se relève, son regard cherche le mien… il veut des câlins… je ne résiste pas à son regard gentil, alors je lui en fais des câlins, je lui en fais un max, mes mains ne se lassent pas du contact super agréable avec son pelage doux, mes yeux ne se cessent de s’attendrir devant sa demande inépuisable de câlins… je me dis que ce chien… on dirait moi, moi en permanence en demande de câlins… sauf que moi j’en ai que très rarement, presque jamais, et le peu qui viennent sont toujours payés au prix fort… ce que je ne sais pas encore, c’est que cet après midi là je vais en avoir des câlins, et bien au delà de mes espoirs…

    Stéphane revient avec deux bières blanches. Il s’installe sur le canapé à coté de moi.

    « Alors, t'as été à la mer ? »

    « Oui, une semaine avec ma cousine... »

    « C’est sympa Gruissan… »

    « J’adore ce coin » je lui confirme.

    « Ca a du te faire du bien après le stress du bac… » il relance, le regard illuminé d’un petit sourire bienveillant.

    « Oui, j'en avais plutôt besoin… » j’admets.

    Evidemment, je m'abstiens de lui dire que le plus grand stress dans ma vie de jeune homme n'était pas le bac, mais un certain brun qui me parait si loin à l'heure qu'il est…

    Pendant que je lui raconte quelques anecdotes politiquement correctes de mon séjour à Gruissan, pendant que je lui parle de ma cousine, de nos déconnades, de nos balades interminables sur la plage, Stéphane s’approche petit à petit de moi et sa main droite se faufile dans mon dos, sous mon t-shirt.

    Je suis surpris par le contact inattendu de sa main avec ma peau, surpris par son initiative, et pendant un instant mes mots marquent une pause… il me sourit, je lui souris, il continue ses caresses dans mon dos, je continue mon récit…

    Le contact de sa main dans le dos est super agréable… surtout lorsqu’elle finit par remonter dangereusement vers cette région hyper sensible et hyper sensuelle chez moi qu’est la zone comprise entre mes omoplates, la base de mon cou, l’arrière de mon cou et le coeur de cible, le bas de ma nuque… si sa main se pousse jusqu’à là, je ne vais plus être maître de mes actions… je sens la chaleur de sa main, la douceur de ses doigts, la caresse sur ma peau… je ressens des petits frissons picoter tout au long de ma colonne vertébrale… c’est super bon ça…

    J’ai du mal à réfléchir, à organiser mes mots, à les prononcer… je regarde vers la table basse, je suis perdu dans ce bonheur sensuel… sa main monte de plus en plus… je sens ses doigts franchir la frontière haute de mon dos, en direction de ma nuque où l’essai va se transformer en feu d’artifice… les frissons sont comme des étincelles qui crépitent partout sous ma peau… ma respiration se fait ample et profonde… c’est bizarre comme sensation cette caresse est si apaisante… si réconfortante… je me sens vraiment bien… j’ai presque envie de pleurer… je me tourne vers lui, je croise son regard, il est vraiment super charmant, sans compter le fait que ses doigts me font un de ces effets… j’ai de plus en plus de mal à parler alors j’écourte mon récit et je décide de le faire parler à ma place.

    « Et toi, t’as fait quoi ces deux dernières semaines ? »

    « Je n’ai rien fait de spécial… » sera sa réponse pendant qu’il pose son verre sur la table basse « … mais je sais ce que j’ai souvent eu envie de faire… »

    « C'est-à-dire ? »

    Il sourit, gentil, adorable.

    « C'est-à-dire… ça… »

    Et sans plus attendre, il récupère le verre de ma main, il le pose sur la table basse à coté du sien, il s’élance vers et il pose ses lèvres sur les miennes… une fois, deux fois, trois fois… tout doucement… mes lèvres s’ouvrent, elles vont à leur tour à la rencontre des siennes… il me serre contre lui et il commence à me couvrir de baisers… sur mon front, sur mes joues, sur mes yeux, dans le creux de mon cou… ses mains se baladent lentement mais fermement dans mon dos… ses paumes parcourent ma peau et leur passage me donne des frissons de dingue…

    Quelques instants plus tard, me voilà allongé sur le canapé… Stéphane me regarde avec des yeux doux, adorables… il se penche sur moi, il m’embrasse à nouveau, ses mains se portent des deux cotés de mon cou, de mon visage, elles me caressent les cheveux, les oreilles, reviennent à la base de ma nuque… je suis comblé de bonheur, j’ai envie de pleurer de bonheur devant ce mec encore presque inconnu qui m’offre tant de tendresse en quelques simples gestes, alors que j’en suis indigne, alors que pas plus tard que le lundi précèdent je lui ai posé un lapin pour aller me faire baiser par un mec qui en vaut vraiment pas la peine…

    Je suis comblé de tendresse et ce câlin me fait un bien de fou, je suis au bord des larmes, j’essaie de me retenir… je n’y arrive pas, elles coulent sur mes joues… je suis touché, ému… car cette tendresse… cette tendresse c’est tout ce que j’ai cherché depuis toujours sans jamais le trouver… c’est tout ce que j’ai cherché et c’est si bon… c’est si naturel et si bon… alors qu’on me l’a toujours refusée, me traitant presque de dingue, comme si je demandais un truc carrément impossible ou tout bonnement stupide…

    Je savais bien que j’avais besoin de cela… je savais bien que ça me ferait du bien… devant tant de bonheur, le malheur et la déception de m’être tant de fois fait jeter remonte en moi avec une virulence absolue… je pleure devant le bonheur que ce câlin m’apporte, je pleure pour le bonheur de me sentir bien, à ma place, de ne pas devoir culpabiliser d’avoir besoin de cela, de chaleur humaine, d’affection, de tendresse… je pleure, je me vide du malaise que j’ai cumulé jusqu’à là en prenant sur moi…

    Oui, sous la vibration déclenchée en moi par ce câlin, tout semble ressortir, mon cœur se vide de ce malaise pour se remplir de ce bonheur nouveau… le bonheur de me dire que j’ai le droit de recevoir cette tendresse, que je suis normal, que je ne demande pas la lune…

    Quelque chose lâche en moi, comme un barrage qui reteint des larmes trop longtemps stockées… les tensions se relâchent, ça sort enfin, ça fait mal et ça fait bien à la fois…

    Sous ses caresses, je ressens tous mes muscles se décrisper, je prends des respirations de plus en plus profondes… si seulement j’avais su que ça se passerait ainsi, lundi dernier je n’aurais jamais annulé… que vaut le sexe quand il n’est que baise, si jouissive soit-t-elle, comparé à ce bonheur simple, le bonheur de se trouver dans les bras d’un garçon qui n’a pas peur de ce qu’il ressent, un garçon devant lequel on a n’a pas besoin de faire semblant, un garçon avec qui on peut être entièrement nous même…

    « Excuse moi… » je finis par lui chuchoter.

    « Laisse toi aller… » ce seront ses seuls mots.

    Stéphane est un mec en or. Il me laisse pleurer en silence, sans me demander d’explications. Il sait que j’ai besoin de ça, de recevoir ses caresses, de me laisser aller. Que j’ai besoin de me détendre et d’être mis en confiance. Il finit par s’allonger à son tour sur le bord du canapé, par se blottir contre moi, par me serrer dans ses bras et poser un petit chapelet de bisous légers dans le cou… la chaleur de son corps et l’odeur de sa peau, de son gel douche, m’apaisent et me font sentir bien… sacré Stéphane… ça c’est un mec… un mec qui s’assume et qui me fait sentir bien !  

    Entre temps, un événement inattendu s’est produit : Gabin est monté sur le canapé et s’est installé entre nos jambes. Ce qui a le pouvoir de m’attendrir et de me faire rire. Sous l’effet du contact rassurant de l’étreinte des bras du maître et écrasé par le poids affectueux du labra, je finis par me calmer et par essuyer mes larmes…

    Stéphane se rends compte que ça va mieux et me relance avec une blague :

    « Je vais t’offrir un chiot labrador… ça c’est un véritable anti-dépresseur… ces chiens ce sont des clowns…»

    Je rigole à mon tour, faisant des câlins au noiraud.

    Stéphane se lève et j’en fais de même, obligeant le labra à descendre à son tour du canapé. Je me sens gêné pour ce qui vient de se passer… pleurer dans les bras d’un mec au deuxième rancard… ça fait pauvre mec, non ? Je ne sais pas quelle opinion il doit désormais avoir de moi… et j’ai peur de le découvrir… j’ai peur de l’avoir déçu, saoulé… j’ai peur d’avoir foiré cette belle journée… qui aurait envie d’aller plus loin avec un cas soc pareil ?

    Je cherche dans ma tête quelque chose de drôle à dire pour faire oublier mon moment de faiblesse, pour me tirer de l’embrasser de cet instant mais je ne trouve rien… heureusement pour moi, le charmant Stéphane se chargera de cela…

    « Dis… » me lance-t-il en me rendant mon verre de coca à peine entamé « ça te dirait une petite balade ? Il fait si beau cet après midi, il me semble qu’il faudrait en profiter... ».

    « Pourquoi pas… » je réponds trop heureux qu’il envisage de passer du temps avec moi, même si l’idée d’aller me balader quelque part où l’on croiserait forcement des gens, alors que mon visage doit encore être marqué par le passage de mes larmes, m’enchante moyen. De plus, je ressens une fatigue montante engourdir mes membres, une fatigue due au nombre d’heures de sommeil largement insuffisant de la nuit précédente ainsi qu’à cette brusque et intense montée d’émotions.

    Je viens tout juste de terminer ma réplique et déjà je me dis que j’aurais quand même pu me montrer un peu plus enthousiaste… d’autant plus que c’est vrai,il fait beau, et il n’y a rien de mieux que marcher un peu pour se changer les idées.

    « J'ai envie d'aller faire un tour au jardin des Plantes... » m’explique-t-il.

    J’ai un très bon souvenir de ce lieu, même si ça fait un bail que je n'y ai pas mis les pieds... dans mon souvenir d’enfant, ce lieu est un petit Paradis en plein milieu de la ville… je me souviens y être allé avec mes grands parents, plus rarement avec mes parents... je me souviens des canards flottant sur les plans d'eau, des paons en liberté appelant sans cesse Léon... je me souviens des grands arbres, des pelouses, des fleurs, de la musique joué par des musiciens de rue...

    A ce moment précis, je trouve que ce Stéphane est définitivement un garçon plein de bonnes idées.

    « Ca roule pour moi… » je consens, soudainement emballé par l’idée de cette petite balade « … ça me fera plaisir d'y retourner, depuis le temps… »

    « Gabin va être content de gambader... » rajoute Stéphane.

    Gabin en laisse, sagement au pied de son maître, nous voilà marchant dans la rue des Potiers direction le Grand Rond... car il est usage, pour accéder au Jardin des Plantes, de passer par le Grand Rond, ce grand espace vert posé au milieu de la ville, ce jardin comme tombé du ciel qui surprend le visiteur à chaque coup, comme un avant goût de ce jardin enchanteur que nous allons visiter.

    Oui, à l'entrée sud du centre ville de Toulouse, se trouve un énorme rond point rempli de verdure, clôturé par une enceinte en fer battu style XIX comme le domaine d'une grande demeure... c'est un oasis de verdure, de calme et de beauté protégé qui se retrouve aujourd’hui placée à l'intersection de quelques uns des axes principaux de la ville.

    Nous y arrivons par l'entrée nord, et nous nous engageons dans l'allée en passant entre les deux statues de Rouillard, posées en vis-à-vis, d'une part la chienne enchaînée avec ses chiots, en face, le loup avec un des chiots affolés qu'il vient de lui voler... sur notre gauche le kiosque à musique, en face, au milieu du jardin, le fameux jet d'eau du Grand Rond...

    A chaque fois qu’on en franchit les grilles, ça fait une drôle de sensation... on vient de traverser des passages piétons régis par des feux de ville, les voitures viennent de recommencer à circuler dans notre dos dès qu’on a atteint le trottoir d’en face…

    Et hop, on rentre dans le Grand Rond et on a l'impression de changer de dimension... à l’extérieur c’est la ville, le rush, la course contre la montre… alors que dans l'enceinte, c'est le calme, la détente... tout autour, au delà des grilles la ville gouille de sa circulation qui tourne tourne tourne autour de ce Grand Rond comme des abeilles autour d'une tête de tournesol, alors qu’à l'intérieur, même si le bruit des voitures arrive à se faufiler, on a l'impression que le temps tourne au ralenti, on a l’impression d'être en vacances...

    Il fait vraiment bon en ce dimanche de début d'été et c'est agréable de se balader avec Stéphane... car non seulement ce garçon est très charmant, mais en plus il est très intéressant, intarissable sur l'histoire de la ville, qu'il semble connaître par coeur... c'est ainsi que j'apprends que le Grand Rond est en effet un jardin public crée en plein milieu du XVIII siècle, que son surnom de Boulingrin vient de l'anglais Bowling-green en référence aux pelouses sur lesquelles les Toulousains venaient jouer au jeu de boules à l’époque… qu’après la Révolution, le lieu fut baptisé « Grand Rond » à la suite d’une course hippique...

    Vraiment ce Stéphane… plus je le regarde, plus je le côtoie, plus je dois admettre qu'il me fait vraiment envie... c'est un garçon tellement simple et nature, tellement radieux que j'ai l'impression que avec lui tout doit être simple et plaisant... je me surprends à le regarder avec une très forte envie de me retrouver dans ses bras, de nous échanger des câlins et de nous donner du plaisir...

    Notre balade se poursuit sous le soleil, j'ai l'impression que le vent d'autan s'est enfin un peu calmé.

    Gabin, quant à lui, est vraiment d'une sagesse irréprochable. Il ne bouge même pas une oreille lorsque on croise d'autres chiens. Bon, à part une petite « saloperie » de Jack Russel qui lui gueulera dessus sans raison, attaque auquel le labranoir ripostera avec un "boup", un seul, mais tellement puissant que le petit morveux n'osera pas surenchérir...

    On arrive devant l’accès de la passerelle métallique qui conduit au Jardin des Plantes en surplombant les trois voies qui tournent autour du Grand Rond... nous l’empruntons et je remarque que la circulation est plutôt calme en ce dimanche de début d’été... car si les habitants de la ville rose sont de sortie, il le sont davantage à pied qu'en bagnole...

    Nous voilà donc au Jardin des Plantes. C’est vraiment plaisant d’avoir en plein centre ville des lieux comme celui-ci, un poumon vert avec ses allées bordées de grands arbres superbes, pour certains plusieurs fois centenaires, capables d’offrir de l’ombre et de la fraîcheur aux allées sillonnées par les toulousains...

    Ce lieu est une vraie bulle au milieu de la ville, un véritable plaisir pour les yeux ; avec ses points d’eau où des canard colvert, des oies et des cygnes flottent sans prêter attention aux nombreux visiteurs, ni même aux cris des enfants... avec ses petits sentiers en terre battue pour se balader à l'ombre, ses petits ponts, une jolie cascade ; avec ses pelouses, de grandes surfaces vertes en plein soleil ou ombragées où les visiteurs se prélassent, discutent, picorent, rigolent, lisent, font la sieste, jouent de la musique, profitent, aussi bien seuls qu’en famille, en charmante compagnie ou entre amis, de cet avant goût de grandes vacances...

    Des vrais poneys pour de petites balades pour les enfants, des manéges pour occuper les plus jeunes tout en étant en contact avec la nature, un petit train, des musiciens de rue, un vendeur ambulant de glaces et de crêpes... un muséum, des serres, un resto sympa… et pile comme dans mon souvenir d’enfant, des paons évoluant en toute liberté que l'on entend de loin bien avant de les voir surgir de nulle part et se mettre soudainement à appeler le pote Léon… tout ça c’est le Jardin des Plantes à Toulouse… de quoi bien occuper un bel après midi de début d’été, surtout quand on est, comme je le suis, en charmante compagnie…

    Quand je repense à ce dimanche de calme et de détente, quand je revois dans mes souvenirs tous ces gens qui profitaient du petit bonheur de cet après-midi ensoleillé, je suis triste de me dire qu’ils étaient à des années lumière d’imaginer qu’à la fin de cet été là deux événements majeurs et inattendus, l’un très lointain mais avec un retentissement mondial, un autre à l’échelle bien plus locale, mais d’une gravité dévastatrice, allaient bousculer les vies de tout un chacun… qu’en l’espace de quelques heures, le monde que nous connaissions allait nous apparaître sous un tout nouveau jour.

    Hélas, la vie est ainsi faite… il faut profiter de chaque instant de bonheur, comme si c’était le dernier… il faut profiter, sans penser à demain… il faut vivre, vivre tant qu’il en est temps…

    On marche depuis un bon petit moment et on a presque fait le tour du Jardin.  

    « Mes parents m’amenaient souvent ici quand j’étais enfant… » me raconte Stéphane. 

    « Moi c’était mes grands-parents, mes parents ont toujours été très occupés par le taf… » 

    « Peut-être que l’on s’est déjà croisés ici, alors… » 

    « Peut-être bien… » 

    « On rentre ? » me propose Stéphane avec un sourire adorable. 

    « On rentre… » je lui confirme. 

    Un quart d’heure plus tard nous sommes à l’apart. Je passe la porte et j’avance doucement vers le séjour… je me sens attiré vers cette pièce accueillante… je ne sais pas trop comment l’expliquer mais je me sens bien dans son apart, je trouve que tout est plaisant, l’agencement des lieux, les couleurs, l’empreinte olfactive, ce léger parfum de cuisine qui flotte dans l’air, la présence d’un garçon doux et rassurant, les pas cadencés d’un labrador noir qui se précipite pour boire bruyamment dans sa gamelle d’eau; oui, à l’image de ses deux habitants, ce lieu est pour moi une oasis de bonheur qui me permet d’arrêter de penser à ce beau brun, Celui-dont-je-n-ai-même-plus-envie-de-prononcer-le-nom…  

    J’entends Stéphane fermer la porte d’entrée juste derrière nous. Je n’ai pas arrêté d’avancer et je suis presque arrivé dans le séjour… soudainement je sens les pas précipités non pas de Gabin mais de Stéphane dans mon dos. Je sais ce qui va se passer… je sais que Stéphane a des beaux projets pour la suite… j’ai hâte de les découvrir, mais une fois de plus je savoure également cette petite attente…  

    C’est sciemment que je choisis de ne pas me retourner, de continuer à avancer tout doucement en attendant de me faire rattraper… j’ai envie d’être surpris, j’ai envie qu’il me montre ce dont il a envie… 

    En un instant il m’a rejoint… je sens ses deux mains se poser délicatement sur mes épaules ; je sens sa bouche se poser sur mon cou, dans le creux de mon cou, ses lèvres caresser ma peau et y poser un petit chapelet de bisous légers… je sens ses mains descendre et soulever mon t-shirt… sans vraiment me rendre compte comment, je me retrouve torse nu… je sens ses mains se poser à nouveau sur mes épaules, amorcer un double geste coordonné destiné à me faire pivoter… 

    Je cède à son invitation silencieuse… on est face à face… nos regards se croisent… le sien est clair, gentil, ses yeux noisette sont doux, on dirait ceux de Gabin qui nous regarde assis sur ses pattes arrière, l’air intrigué… je me dis qu’un mec qui possède un labrador si mignon ne peut pas être mauvais… d’ailleurs, je crois que tout le monde devrait une fois dans sa vie faire l’expérience de côtoyer un labrador pour comprendre ce qu’est la tendresse, la douceur, et un regard aimant… 

    Je me sens vraiment bien avec ce garçon… je n’ai aucune crainte, je sens, je sais que je peux lui faire confiance, je sais que je vais passer un bon moment… je me sens à l’aise, je sais que je peux enfin être moi-même et que cela ne va pas me retomber dessus, que ça ne va pas se terminer dans un rejet et une humiliation… 

    Je le regarde, il me fait de plus en plus envie ce mec… plus je le découvre, plus je me sens violemment attiré par lui, je le trouve incroyablement, infiniment séduisant… c’est une attitude qui transpire de chacune de ses fibres, un ensemble de choses qui vont de son regard charmant à sa peau douce… séduisant c'est un détail, comme une barbe bien taillée… séduisant c’est le triangle de peau de deux boutons ouverts d'une chemise qui donne envie de découvrir davantage, d'aller plus loin avec les yeux, les lèvres, les doigts… 

    Quand je pense que la première fois que je l’avais vu je l’avais trouvé « joufflu »… définitivement, il est des beautés qui ne se révèlent pas entièrement au premier regard, des beautés qui ont besoin d’un petit laps de temps pour nous apprivoiser, pour faire que l’œil, enfin captivé, s’habitue et s’attache à ceux qu’on a d’abord pris pour des petits défauts et qui se révèlent au final être des détails charmants qui font qu’on est conquis petit à petit et inexorablement…

    Et là, devant ce garçon attentionné, me voilà conquis, vraiment conquis…

    Cette fois-ci c’est moi qui l’embrasse… mon cou avance tout seul et mes lèvres se collent aux siennes… nos langues se mélangent… ses mains se sont animées pour déboutonner sa chemise… mes mains s’animent à leur tour, j’ai envie de la lui défaire moi-même… dès que nos doigts se rencontrent, ses mains de retirent, laissent place aux miennes… sa chemisette est vite ouverte… et vite tombée…  

    Oui, ce gars est définitivement, terriblement séduisant… séduisant c’est aussi un torse finement mais régulièrement velu sur une peau légèrement mate, un torse doux et agréable au toucher, que ce soit au toucher de mes lèvres, de mes doigts ou de mon torse encore pratiquement imberbe… 

    Stéphane revient vers mes lèvres, nous sommes tous les deux torse nu, difficile, impossible de résister à la tentation de coller nos torses l’un contre l’autre… j’ai trop envie de le serrer contre moi, de sentir la chaleur de sa peau contre la mienne… dès que nos bras se mélangent dans nos dos pour serrer nos corps l’un contre l’autre, dès que nos peaux se touchent, dès que la chaleur de son corps irradie dans le mien, dès que la douceur du léger duvet de poils recouvrant son torse caresse le mien, dès que ses mains se baladent dans mon dos jusqu’à caresser mes cheveux à la base de la nuque, voilà, je me sens bien… très bien, trop bien, plus que bien… 

    Je suis soudainement projeté dans un univers de bien être physique et mental… c’est comme si tous mes muscles et mes tensions se relâchaient d’un coup… je sens un frisson puissant parcourir mon corps… c’est tellement géant, plus encore que tout à l’heure sur le canapé, que j’ai à nouveau envie de pleurer… cette fois ci je me retiens de justesse… 

    Il me serre très fort, alors que sa main n’a cesse de caresser la base de ma nuque… j’adore, ce contact me fait un de ses effets… je ne peux même pas l’exprimer… et ce qui me met dans cet état, ce qui m’enchante et me trouble à la fois, c’est de recevoir autant de tendresse d’un seul coup, me rendre compte que cela est normal et possible, alors que j’en ai terriblement langui jusque là… 

    J’ai à la fois envie de continuer à lui faire des câlins tout doux et de partir dans des caresser un peu plus sensuelles… j’ai envie de lui donner du plaisir, de lui donner tout en douceur… je cherche sa ceinture, je commence à lui défaire tout doucement… 

    « Viens, on va dans la chambre, on sera mieux… » me propose-t-il juste avant que je m’attaque à sa braguette. 

    « Allonge-toi » m’invite-t-il « j’ai envie de m’occuper de toi d’abord… ». 

    Je le vois défaire sa braguette, se débarrasser de son short mais garder son beau boxer DIM orange et blanc. C’est beau aussi un beau mec avec juste un beau boxer sur lui… 

    Il s’approche de moi… il vient m’embrasser à nouveau, longuement… lorsque ses lèvres quittent les miennes, c’est pour descendre sur mon torse, pour m’embrasser doucement un peu partout… ses doigts parcourent ma peau, sa langue agace mes tétons, ses caresses, ses baisers parcourent lentement mon torse vers le bas… il arrive à mon nombril… il est à la lisière de l’élastique de mon boxer qui dépasse légèrement de mon short sans ceinture… il commence à défaire la zip lentement… il ôte mon short… il laisse le boxer… il pose les lèvres sur le tissu fin… il commence à jouer avec mon gland gonflé à bloc, avec ma queue déjà raide et de plus en plus à l’étroit dans mon boxer…  

    C’est une scène qui me procure une étrange sensation de déjà vu, mais que je vis sous un autre angle que celui auquel je suis habitué… de l’autre coté non pas de la force (car que l’on soit actif ou passif, lorsqu’on couche avec un garçon, on est forcement « du bon coté de la force ») mais « de l’autre coté du bonheur », le bonheur masculin… car ce jour là je découvrirai avec bonheur quelque chose que j’avais déjà commencé à entrevoir lors de la première petite galipette avec Stéphane, à savoir qu’il existe tout un revers du plaisir auquel je suis habitué, celui ce faire jouir un beau garçon, et que ce revers est le plaisir de ce garçon, un plaisir que je vais le découvrir, je suis en mesure de prendre moi aussi… 

    Ce jour là je vais découvrir qu’il n’est écrit nulle part que je serai toujours un mec soumis à un mec dominant, un mec passif pour faire le bonheur d’un mec actif, que je peux prendre mon pied juste avec ma queue et ressentir un plaisir « de mec » en regardant un garçon s’occuper de moi, de ma queue… que je peux faire un peu mon… mon Jérém à moi, quoi… 

    Lorsque je regarde Stéphane poser ses lèvres sur mon gland au travers du tissu fin, je ne sais pas encore que ce ne sera pas la dernière fois cet après midi là que j’aurais cette sensation de déjà vu, mais « de l’autre coté du bonheur »… oui, cette après midi là, tout un nouveau monde de jouissance me sera dévoilé, avec une nouvelle conscience de la jouissance masculine, une conscience encore plus puissante, encore plus brûlante, car non plus seulement basée sur le fantasme et sur des réactions observées mais enfin étayée par l’expérience, une expérience vécue à la première personne… ce jour là je commencerai à vraiment comprendre comment Celui-dont-on-ne-doit-pas… jouit, ce qu’il ressent dans son corps, dans sa queue, dans sa tête… 

    Ce ne sera qu’un début, d’autres garçons par la suite m’apprendront sous différents angles ce qu’un alpha male ressent dans sa jouissance, dans sa fierté de male, devant un gars qui le fait jouir… l’expérience avec d’autres garçons m’apprendra bien de choses au sujet de l’évolution, ou plutôt de la dégradation des rapports entre le beau brun et moi… 

    Mais cela sera pour un autre jour… 

    Pour l’instant je suis avec Stéphane et il semble bien parti pour bien s’occuper de moi… il excite ma queue bien raide encore emprisonnée dans le tissu élastique de mon boxer pendant quelques instants… je sais qu’il veut me faire un truc que personne ne m’a jamais fait… je le sais car il le voulait déjà la dernière fois, si seulement je n’avais pas joui si vite dans sa main… il me tarde de savoir quelle sensation ça fait… à en croire au bonheur que cela semble procurer à mon beau brun, et si on se fie aux racontars des gars qui y ont goûté, ça doit être un truc de tonnerre… 

    Stéphane fait glisser mon boxer au long de mes cuisses jusqu’à mes chevilles… me voilà complètement nu, la queue bien droite, devant un mec qui va me tailler la première pipe de ma vie… ses lèvres se posent doucement sur mon gland… déjà ce simple contact me fait vibrer… et lorsque sa langue commence à y glisser dessus, à s’y enrouler, je ressens des frisson inconnus et puissant se propager dans mon ventre et dans tout mon corps… et lorsque mon gland disparaît à l’intérieur de sa bouche pendant que sa langue s’affaire à des choses bien plaisantes autour de mon sexe, j’ai l’impression de m’envoler… 

    Jusqu’à là je savais que j’adorais sucer un mec pour le voir prendre son pied… ce jour là je découvre que j’aime également me faire sucer… et pas qu’un peu… de plus, Stéphane est vachement attentif… dès notre première rencontre il a décelé la sensibilité extrême de mes tétons… et il ne l’a pas oubliée depuis ! Ses doigts les caressent avec la bonne pression, la bonne cadence, ce qui a le don de démultiplier mon plaisir sexuel… c’est tous simplement géant comme sensation… comme des feux d’artifice qui se croisent, se combinent, se donnent réciproquement de l’ampleur… ce n’est plus du plaisir, c’est proche de l’extase… 

    « C’est trop bon… » je laisse échapper. 

    « J’ai très envie de te faire plaisir… » me chuchote-t-il, sa main remplaçant momentanément sa bouche sur ma queue… il relève le torse et revient vers mes lèvres pour m’embrasser à nouveau ; et il ajoute « tu es vraiment beau garçon et en plus t’as une très jolie queue… ». 

    « Merci… ». Personne ne m’avait jusqu’à là fait tant de compliments. Et surtout pas Celui-dont-on-ne-doit-pas… 

    Et il continue « … t’as une belle queue faite pour prendre ton pied et pour faire plaisir au gars qui a la chance d’y goûter… t’es vraiment un bon petit mec qu’on a envie de faire jouir…». Là non plus on ne m’avait jamais présenté les choses de cette façon là. Il m’était arrivé de dire des choses dans ce ton à Celui-dont-on-ne-doit-pas…, certes… mais de les entendre à mon adresse, ça me fait tout drôle… mais il faut admettre que ça me flatte un bon peu… ça me met du baume au coeur d’être considéré « beau garçon », ou « un bon petit mec qu’on a envie de faire jouir »… j’ai l’impression de commencer à comprendre un peu ce que ressent Celui-dont-on-ne-doit-pas… quand je lui balance ce genre de mots… j’ai l’impression de voir les choses de son point de vue… 

    Oui, c’est la première fois qu’on me présente les choses de cette façon là… jusque là ma queue avait joué un rôle tout à fait secondaire dans l’expression de ma sexualité… et là, ce charmant Stéphane semble suggérer avec les mots et à me montrer avec les actes qu’on pourrait bien prendre du plaisir à me sucer comme un vrai mec… ça, rajouté au fait de me rendre compte que je prends du plaisir à ce que l’on s’occupe ainsi de moi, à ce qu’on s’occupe d’elle, ça en fait de découvertes plaisantes en une seule fois… 

    Un instant plus tard les lèvres de Stéphane s’attardent sur mon cou pour le couvrir de petits baisers sensuels… sa bouche redescend ensuite au long de mon torse, jusqu’à que sa langue arrive à hauteur de mes tétons… et pendant que sa main enserre délicatement ma queue et continue à la branler tout doucement, je ressens dans tout mon corps des sensations plaisantes à un point inimaginable… la stimulation simultanée de ma queue et de mes tétons me met dans un état d’excitation indescriptible…  

    J’ai l’impression que j’approche à grands pas de l’orgasme, l’impression que je vais jouir très vite… j’ai à la fois très envie d’aller au bout de ce plaisir inconnu qui s’annonce puissant, débordant et magique… j’ai à la fois envie de jouir et de faire durer l’attente, de laisser Stéphane me conduire, tel Virgile dans la Foret Obscure, dans la découverte de ce pays magique qu’est le véritable plaisir masculin… la découverte du plaisir intime, puissant et mystérieux de tous ces mecs qui me font fantasmer et que j’ai un jour rêvé de soulager, et par-dessous tous, le plaisir que ressent Celui-dont-on-ne-doit-pas… quand je le fais jouir… j’ai hâte de jouir, d’arriver au bout de la découverte du fait que j’ai le droit de jouir moi aussi, comme eux, avec ma queue… 

     

    [Cet épisode est dédié à tous les lecteurs qui suivent les « aventures » de Jérém et de Nico. Il l’est, comme tous les autres. Car c’est grâce à vous que cela existe. Sans votre support et sans l’intérêt que vous portez à cette histoire, je pense qu’elle ne serait pas allée aussi loin… je pense que je ne serais pas allé si loin (je parle aussi des nombreux épisodes à venir)]. 


    3 commentaires
  •  

    Dimanche 1er juillet 2001, apart des Minimes, 24 heures après la nuit commencée à quatre et terminée à deux dans le lit rue de la Colombette…  

     

    Une main puissante se pose sur un sexe bien tendu… il est tard et le sommeil tarde à venir pour le beau mécano… les doigts commencent à caresser lentement la queue… tout garçon, hétéro ou homo qu’il soir, le sait bien, rien de mieux qu’une bonne branlette pour faire dodo vite et bien… Thibault ne déroge pas à la règle… et pendant que l’excitation monte, la fantaisie vague, le fantasme a bon train, les envies qu’on essaie d’ignorer deviennent visibles et des souvenirs anciens qu’on essaie d’oublier refont surface… au final, c’est juste nos envies profonde, si refoulés soient-elle, qui viennent à nous lors d’un petit plaisir solitaire… car c’est non… non, on ne peut pas se mentir à soi même pendant une branlette… 

    Souvenirs anciens… ses doigts qui se posent sur mon sexe… une main qui saisit ma queue et qui entame des mouvements lents de va et viens… une langue qui me procure les plus délicieuses des sensations… c’est lorsqu’elle glisse sur mon gland… (glisse… gland… remarquable assonance, voilà des mots qui vont très bien ensemble)… une bouche qui avale ma bite, des lèvres qui la caressent sur toute sa longueur… sentir mon gland dans sa bouche, cet endroit chaud et humide… sentir son entrain, ses allers retours, comme ma main pendant la branlette, mais en mille fois mieux… ma première fois, le sexe partagé, après les « entraînements en solitaire » dans ma chambre d’ado… le plaisir qui monte, prêt à exploser… 

    La bouche qui lâche ma bite, terrible frustration, la main qui reprend aussitôt les va et viens… sentir venir la vague du plaisir, monter, monter, monter encore, atteindre le point de non retour… me sentir partir, happé par une puissance qui me submerge, qui me déborde, qui m’aspire… et… jouir… jouir très fort sous les caresses de sa main… plaisir interdit, et terriblement excitant…  

    Sentir mon jus retomber par à coups sur mon torse… la main qui s’arrête… reprendre le souffle… avoir envie de lui rendre la pareille… ma main qui à son tour saisit son manche raide… sensation intense et terriblement excitante… le branler, l’entendre respirer fort… bien le branler… se laisser guider par ses gémissement silencieux… voir tout son corps frissonner, se crisper… son plaisir qui monte, comme le mien, aussi puissant… je sais désormais ce que ça fait, grâce à lui, et je veux lui donner le même bonheur… d’autant plus que c’est sa première fois à lui aussi… ma main inexperte qui donne tout ce qu’elle peut… sa queue qui jouit rapidement… le voir venir, l’entendre venir… sensation de bonheur dépassant l’entendement…  

    Souvenirs anciens, qui se mêlent à d’autres bien plus récents…  

    Le frisson du premier contact avec sa peau, avec ses épaules… inattendu, puissant… est-ce que Jéjé a ressenti la même chose ? Les têtes se tournent discrètement, presque au même instant ; les regards se cherchent, se croisent… les épaules nues se frôlent encore, encore et encore… les hanches se touchent, les cuisses se frottent, les genoux se caressent, les doigts s’effleurent…  

    Regarder Jéjé en train de prendre son pied tout en prenant le mien… excitant, terriblement excitant, et plus encore que je ne l’aurais imaginé… c’est bien pour cela que j’ai accepté ce plan à quatre, le genre de plan sur lequel je n’ai jamais vraiment fantasmé, mais qui devient nécessaire car Jéjé est de la partie… oublier la nana que je suis en train de baiser, n’avoir envie que de le mater, lui, mon pote... son plaisir, mon plaisir… nos deux corps moites qui se touchent, se caressent… nos excitations qui se mélangent, alchimie explosive… et lorsque Jéjé jouit, je viens aussi, comme si on était connectés…  

    Le silence après l’orgasme est lourd, gênant… le torse dessiné de Jéjé ondulant au rythme d’une respiration encore haletante, son front dégoulinant de sueur… qu’est ce qu’il est sexe ce mec… c’est terriblement beau et excitant de voir un garçon à poil en train de prendre son pied… et c’est sacrement craquant qu’un beau garçon qui vient de jouir… surtout lorsqu’il s’agit de mon Jéjé… 

    Le joint en terrasse arrive à nous donner un semblant de contenance… le malaise devant sa demande sans appel de prendre les nanas par derrière… c’est à cause de sa façon de balancer ses mots, avec son assurance culottée de ptit coq… le malaise de faire ça « avec » lui… devant lui… ce truc que je n’ai encore jamais fait de ma vie… son sourire sexy et coquin lorsque les nanas cèdent… 

    C’est trop bandant regarder la blonde qui suce Jéjé en terrasse dans la pénombre… le voir s’impatienter et  son envie de jouir encore… et l’entendre balancer : « Maintenant on baise ! »… croiser son regard… son sourire en guise d’encouragement… et ses mots : « Tu vas voir comment c’est bon… »… 

    La sodomie, un truc que j’ai accepté d’essayer pour lui faire plaisir… un truc que je finis par aimer très vite… pour le plaisir physique déjà… c’est si serré un petit trou, ça fait des sensations si différentes par rapport à une chatte… ensuite, pour son coté « interdit »… et surtout, surtout, surtout… car cette pratique évoque pour moi des fantasmes refoulés depuis si longtemps… 

    et puis, à bien regarder, l’aspect le plus excitant de cette position, c'est le fait de nous permettre, maintenant que les nanas ne peuvent plus nous voir, de nous sentir plus libres dans les regards, dans le contact de nos corps… les épaules se frôlent avec plus de facilité, les hanches se frottent avec plus d’intensité, les cuisses se caressent, les genoux s’appuient l’un contre l’autre, les doigts se rencontrent… des contacts qui ce coup-ci n’ont plus rien d’accidentel, comme des envies silencieuses se dévoilant avec de moins en moins de retenue… 

    Le plaisir monte, la jouissance approche… le corps et l'esprit secoués par ce plaisir inédit et intense, j’en frissonne, j’en tremble presque… lorsque Jéjé me regarde (et il ne s’en prive pas), je trouve ça incroyablement excitant…  

    Je me sens violemment attiré par lui… j’ai envie de le serrer dans mes bras, de le caresser, envie de sentir mon torse contre le sien, les tétons se frôler, les bassins se rencontrer, les queues se mélanger, envie de me perdre dans cette intimité de mecs… 

    Repenser à un dimanche après un match, à cet « accident » troublant… l’attention toute consacrée à la déconnade, Jéjé ôte la serviette autour de sa taille avant de commencer à s’habiller… sans vraiment y prêter attention, à un moment je pivote pour attraper mes affaires… au même moment, tout en discutant avec un autre coéquipier, Jéjé se déplace sans prêter attention… et là, ma main effleure accidentellement le bout de sa queue… très gêné, je m’excuse discrètement, tout en laissant traîner un long regard… et son regard à lui, mi surpris, mi… je n’en sais rien… il me lance un petit sourire, beau au possible…

    C’est trop bon de le mater en train de prendre son pied… je sens l’orgasme approcher… et c’est là qui arrive ce truc incroyable, ce geste inattendu… le bras de Jérém se lève, sa main se pose sur mon cou à la base de ma nuque, ses doigts s’enfoncent dans mes cheveux comme une caresse douce, sensuelle et excitante a la fois ; ah, si c’est bon cette caresse… sa main chaude à la base de ma nuque, c’est bon, incroyablement bon… son regard terriblement sensuel, un regard de mâle en rut… altération de conscience dans l’attente du plaisir…  

    J’ai l’impression de sentir en moi sa propre excitation, son propre plaisir… j’ai l’impression que nos désirs se rencontrent, se reconnaissent, l’impression que nos corps et nos plaisirs se mélangent… je ferme les yeux et pendant un instant… ce n’est plus une nana que je suis en train de limer… putain qu’est ce que j’ai envie de jouir… j’ai envie de jouir avec lui… j’ai envie de… j’ai envie de l… j’ai envie de jouir… en l… altération de conscience dans l’attente du plaisir…  

    J’essaie de me maîtriser, j’essaie de chasser des images terriblement excitantes mais terrifiantes… comment imaginer un seul instant des trucs pareil ? Je rouvre les yeux, je mate les cheveux blond de la nana que je suis en train de limer… je n’arrive pas à fixer mon attention sur elle… mon plaisir monte… le contact de sa main sur mon coup se prolonge, ses doigts m’offrent une multitude de petites caresses légères… je frissonne, j’en ai la chair de poule… c’est trop trop bon… jamais je n’ai ressenti un truc pareil… et je sais, je ne sais que trop bien que la main de Jéjé y est pour beaucoup… 

    Alors j’ai envie de lui montrer à quel point j’aime, envie d’essayer de lui apporter le même frisson… alors, après la surprise de ce geste, après une petite hésitation, mon bras se lève à son tour pour se poser sur son cou… nos bras se touchent sur toute leur longueur et, dès le contact établi, dès que me doigts se posent dans cette région merveilleusement sensible à la base de ses beaux cheveux bruns, j’assiste à un spectacle d’une beauté saisissante… à l’instant même, je vois ses paupières retomber, sa respiration devenir profonde et bruyante, j’assiste à un changement de rythme de ses coups de rein… jolie notification, en son et images, des sensations que ce contact lui procure…  

    Ce double contact, ce contact réciproque fait des étincelles… sur nos peau, dans nos cerveaux, dans nos organes de mecs… double contact, le circuit est fermé… le courant passe plein pot… échange d’énergie pure… énergie… sexuelle… le courant de nos excitations respectives monte en puissance, c’est beau, c’est bon… je vois qu’il est prêt de jouir… je le vois et je le sens, c’est comme si je le sentais en moi grâce à ce double contact… je sens les prémices de l’orgasme me submerger… une intense chaleur qui monte de cette région entre le nombril et le sexe, qui se répand entre les fesses, qui remonte mon sexe et qui explose dans le gland… 

    Quelques coups de reins encore, un échange de regards complices, excités au possible, et je ne peux pas me retenir plus longtemps… je jouis… je jouis très fort… je jouis comme jamais j’ai joui… si fort que je crois m’évanouir… si fort, si incroyablement beau… si puissant… d’autant plus fort que cette fois c’est mon orgasme qui précipite celui de Jéjé… comme si on était connectés… au fait, on est connectés, sensuellement connectés, physiquement connectés… 

    Prendre notre plaisir « ensemble », capter son regard qui m’avait semblé chargé de désirs non exprimés, les mêmes que les miens… comme si cette idée de Jéjé de faire un plan à quatre ce n’était qu’une astuce pour un rapprochement entre garçons… mais là encore, assurément, altération de conscience dans l’attente du plaisir…  

    Une fois de plus connaître le bonheur de prendre ensemble notre plaisir de mecs… un bonheur découplé par le contact de nos bras, de nos doigts caressant nos cous… on jouit presque au même instant… et lorsque je vois sur son visage les grimaces de l’orgasme qui est en train de le secouer, j’ai vraiment l’impression de sentir en moi son plaisir… c’est beau à un point que ça me donne presque envie de pleurer… cette image est à cet instant à mes yeux le plus beau spectacle du monde… 

    Hélas, une fois le plaisir venu, passé, l'excitation retombée, le contact de la main de Jéjé s’évapore instantanément… et ce contact de peau va bien vite me manquer
    Jérém qui me propose de rester dormir… j’hésite… je me dis que si jamais nos corps se frôlent dans le lit, ça ne va pas être facile de trouver le sommeil… je finis par accepter mais une fois les nanas parties, le sentiment de malaise s’installe entre nous… le silence devient gênant… 

    Le sommeil finira par nous gagner, mais le réveil sera troublant pour moi…c’est lorsque je me rends compte que mes bras, mon torse, mes jambes sont en train d’enlacer le corps chaud de Jéjé, que l’agréable et douce chaleur que je ressens dans mon ventre vient du contact avec le dos de mon pote… que la sensation de douceur que je ressens sur ma joue, vient du contact avec ses cheveux bruns… 

    Long moment d’angoisse pour tenter de me retirer de cette position embarrassante sans réveiller Jéjé… je la joue fine, un geste après l’autre j’arrive à me dégager, Jéjé n’a pas quitté sa respiration calme et régulière… ouf, il est toujours dans les bras de Morphée… 

    Mais comment ça a-t-il pu arriver ? Je ne l’ai pas voulu… mais il faut bien admettre que cet épisode semble exprimer une envie bien présente en moi et longtemps refoulée…

    oui, en y repensant à tête froide, une fois la panique évacuée, je dois admettre que, par-dessus tout j’ai adoré ressentir contre moi la chaleur de son corps, ainsi que le contact avec ce bon paquet de muscles qui constitue son torse… de ma peau contre la sienne… et, au delà de son nouveau parfum, de cette nouvelle fraîcheur qui fait vibrer mon odorat, c’est la sensation apaisante et enivrante de sentir l’odeur de sa peau au delà de tout parfum; c’est son odeur de « mec », une sorte de fragrance masculine naturelle se dégageant de son corps, cette odeur qui possède quelque chose de familier et de rassurant  et qui me fait sentir bien, à ma place, en accord avec les envies de mon être profond... c’est une sensation de bien être absolu qui relève d’un besoin de contact et de partage avec l’intimité d’un corps et d’un esprit qui ressemblent au mien… c’est une sensation de bien être absolu qui relève d’un besoin de contact et de partage avec l’intimité du corps et de l’esprit de mon Jéjé…  

    Je me surprends à éprouver une profonde tendresse en écoutant sa respiration dans le sommeil, en regardant ce beau garçon dormir… 

    Pas facile le lendemain matin, se retrouver au petit déjeuner… le bruit de la télé aide à camoufler un manque de conversation embarrassant, des non dits lourds à assumer. Pas la moindre allusion à ce qui s’est passé avec les deux nanas et encore moins à ce qui s’est passé au petit matin… il faut croire qu’il ne s’est vraiment rendu compte de rien… ouf, je me sens soulagé, soulagé et… frustré… j’aimerais tellement qu’il se soit rendu compte de cela et qu’il ait aimé, qu’il se soit retourné pour me faire un câlin à son tour… hélas, cela n’arrivera jamais… 

    Souvenir ancien, l’été de nos 13 ans, souvenir récent, la veille au soir… l’excitation monte… le plaisir explose enfin, emportant tout sur son passage… des giclées denses et chaudes s’abattent sur mon torse… le corps détendu, chaud, repu… la tête vide, mon esprit ressemble à une page blanche… je sens les paupières tomber et  je tombe vite dans le sommeil, l’esprit trouve l’apaisement dans cette petite mort qui m’aidera à traverser une nuit peuplée de fantasmes et d’envies inavouables…

    Plaisir du corps suivi de tristesse… nostalgie… frustration… dépit… car ce que je voudrais qui se passe avec Jéjé, n’arrivera hélas jamais… 

     

    Vendredi 6 juillet 2001, fin d’après midi… 

     

    « Salut toi… » me lance le beau mécano sur un ton presque enjoué, lorsqu’il met le pied sur le trottoir.

    « Salut » je lui réponds pendant qu’il me serre la main avec sa prise puissante de mec… et lorsqu’il balance un nouveau sourire qui donne tout leur éclat à ses yeux vert marron magnifiques, je suis conquis et je sais déjà que j’ai perdu tous mes moyens… je ne saurais pas lui reprocher quoi que ce soit… je suis vraiment trop sensible au charme masculin… et là c’est bien ainsi, car je n’ai pas à lui reprocher quoi que ce soit… j’ai surtout besoin de l’apprivoiser et d’en faire un pote, et un allié… 

     « Alors, t’as fini ta journée ? » j’arrive à enchaîner, malgré l’onde de choc provoquée par son sourire ravageur, doux et charmant à la fois, et par sa poignée de main… un contact visuel et un autre physique, l’un comme l’autre, ferme, marquant.

    « Ma journée et ma semaine… » il relance « j’adore ce taf mais quand le week-end arrive, je suis HS… ». 

    « C’est dur comme taf… » je commente. 

    « Ca va, mais ce n’est pas de tout repos non plus… » il répond. 

    « C’est le taf que t’as toujours voulu faire ? » j’enquête, m’enfonçant dans une question qui baigne dans l’évidence. On le voit bien qu’il est tombé dans le chaudron du cambouis magique lorsqu’il était petit, et qu’il est comme un poisson dans l’eau… on voit qu’il adore ça… un vrai taf de petit mec… je le regarde et soudainement une image s’affiche dans ma tête, une image « imaginaire » mais que je sens assez plausible…  le petit Thibault, pas plus grand que la hauteur de deux pommes, qui joue aux legos et au mécano sous les yeux enchantés et fiers de son papa qui est en train de penser « il sera mécano plus tard »… 

    « Un jour j’aimerais ouvrir ma propre boite… » je l’entends dire pendant que l’image de Thibault enfant imaginée et celle du Thibault jeune étalon que j’ai sous les yeux se mélangent dans mon esprit, rendant le « personnage » d’autant plus craquant à mes yeux… 

    Je souris. Ça c’est vraiment un bon gars. Bosseur, passionné.  

    « Tu veux boire un truc ? » il me balance de but en blanc.

    Ah, il fallait s’y attendre à celle là… je réalise que franchement je n’ai pas envie de retraverser la moitié de la ville pour aller me planter en terrasse rue de Metz et me retrouver en présence de Jérém qui va certainement me regarder de travers… et puis, je n’ai franchement pas envie de me retrouver à discuter avec les deux mecs qui se sont tapés un plan à quatre pendant que je cuisais dans mon humiliation… un à la fois ça va, mais pas deux, et surtout pas le « cerveau » de ce plan que je n’ai toujours pas vraiment « digéré »… pas encore…

    « Eh bien… » je m’avance, sans trop savoir comment présenter la chose « … c'est-à-dire que je n’ai pas trop le temps d’aller jusqu’à… ».

    « On n’a pas besoin d’aller rue de Metz… » il me coupe, lisant littéralement dans mes pensées « il y a des bars sympa par ici… ».

    Je crois que Thibault a compris que je n’ai pas envie de voir Jérém, et je crois qu’il a même compris pourquoi. En tout cas, c’est mignon de sa part de tenir compte de mon ressenti.

    « Alors je te suis… » je lui réponds, rassuré et un peu plus à l’aise.

    Nous marchons quelques minutes jusqu'à que ce charmant Thibault s’arrête devant la petite terrasse d’un bistrot avec des parasols pour donner de l’ombre.

    « C’est ici… » m’annonce-t-il « ça ira ? »

    « Parfait ! » je lui réponds.

    Nous nous installons à une table et nous commandons. Nos bières arrivent rapidement. Oui, j’ai commandé une blanche. On ne peut pas discuter d’« affaires importantes » en tournant au Coca. Ca ne fait pas sérieux…

    « Alors, ce bac… mention ou pas mention ? » me branche-t-il, dès que le serveur s’éloigne.

    « Mention très bien… » je lui réponds, un peu gêné de passer une fois de plus pour le bon élève coincé de service.

    « Félicitations… Jérém me l’avait dit que t’étais une tronche… ».

    Allez, ma réputation n’est plus à faire. Eux les mecs… moi la tronche… nos planètes nous séparent…

    « Tu lui a parlé cette semaine ? » je me renseigne.

    « Oui, lundi en début d’après midi. Il était plutôt content de l’avoir eu… je crois qu’il n’y croyait pas vraiment… »

    Ainsi il a été lui aussi à l’affichage… évidemment… tout simplement il y a été un peu plus tard que moi...

    « Je le crois aussi… » je commente « en tout cas, je suis content qu’il l’ait eu… »

    « C’est un peu grâce à toi… » il me lance.

    Oui, Thibault, c’est grâce à moi qu’il est arrivé au bac les burnes bien vides, prêt pour se concentrer… car c’est à ça qui servaient nos révisions…

    Pendant qu’il parle, assis pile en face de lui, à un mètre à peine de son visage, j’ai l’occasion de mater sans ménagement ses beaux yeux verts marrons à la lumière du jour… et ils sont encore plus beaux que dans mon souvenir… des yeux magnifiques d’où se dégage un regard à la fois puissant, un vrai regard de mec mais doux, gentil… 

     « Oui, un tout petit peu grâce à moi… » je finis par lui répondre. 

    Je bois une gorgée de bière pour essayer de trouver le bout par lequel commencer, mais rien ne me vient… j’ai envie de lui poser mille questions… tu t’es bien amusé avec ton pote, espèce de saligot ? C’était comment ? Vous avez fait quoi ? Vous avez joui comment ? Combien de fois ? T’as bien pris ton pied ? Il a bien pris le sien ?

    Oui, j’ai envie de lui poser mille questions, mais son regard vert et transparent, la douceur de sa voix, m’empêchent de franchir le pas… et puis je me dis qu’au fond, de lui poser toutes ces questions, en admettant qu’il veuille bien y répondre, ça ne servirait à rien à part me faire du mal… alors à quoi bon ? 

    Le silence commence à s’installer entre nous, gênant. Je ne sais plus bien pourquoi j’ai voulu le voir. Je ne sais pas exactement ce que j’attends de lui. Peut-être qu’il me dise que Jérém est secrètement amoureux de moi et qu’il me donne la recette pour accéder à son cœur… et quoi encore… le tiercé gagnant pour la prochaine course à l’hippodrome de la Cépière ? Je suis con, je n’aurais pas du aller brancher Thibault, ça ne sert à rien… 

    Vite finir ma bière et trouver une excuse pour me sortir de ce pétrin. 

    C’est lui qui brise le silence. En mettant carrément les pieds dans le plat. 

    « Ca a été ta soirée au KL?... je ne t’ai plus revu après qu’on s’est parlé, tu es parti de bonne heure, non ? ».

    Bah, oui, c’était une très bonne soirée, une magnifique, somptueuse soirée de merde… le genre de soirée que j’affectionne tout particulièrement au point de la vivre jusqu’au bout, dans mon coin… et non, je n’étais pas encore parti quand vous êtes tirés pour aller tirer les deux pouffes, j’ai bien assisté à toute la scène, tapi dans l’ombre, si tel est le sens de ta question, mon grand…

    « Ouais, ça a été » je lui réponds en prenant sur moi, mais laissant traîner quand même une petite accroche pour une mise au point qui me taraude « je suis parti après vous… »…

    Est-ce que je me trompe ou c’est bien un petit malaise que je décèle dans son regard à ce moment là ? Je profite du blanc que mon propos a causé (non ce n’est pas un ange qui passe, mais bien un petit malaise) et je ne peux m’empêcher de céder à la tentation de mettre les pieds dans le plat à mon tour :

    « Vous êtes partis accompagnés… » je laisse échapper en regrettant mes mots au moment où ils sortent de mes lèvres…

    Putain, Nico, tu ne pourrais pas te taire ? Désolé, Nico, ça a été plus fort que moi, fallait que ça sorte… ça montait tellement en moi, la tension était tellement insupportable c’était comme un orgasme émotionnel, il fallait que ça explose pour me calmer… il fallait qu’il sache, il fallait que je lui dise…

    Il me regarde dans les yeux, l’air un peu surpris. Le blanc qui suit mes mots commence à être long. Je commence à avoir du mal à soutenir son regard… et puis il sourit… ah putain… le sourire… qu’est-ce qu’il est beau ce mec quand il sourit… ça alors, ce genre de mec est comme une bombe à retardement… mal maîtrisé, ou maîtrisé à des fins malhonnêtes, ce genre de sourire peut faire des dégâts d’une ampleur imprévisible… sans compter l’aspect « fonte de la banquise », dans l’intérêt de l’ordre public, ça devrait être interdit des sourires pareil… tu ne peux pas t’énerver après eux, ce n’est pas possible… plus fort que l’immunité diplomatique, c’est l’immunité du bogoss impuni… car leur sourire leur donne accès à tout, à tout…

    « Oui… » il finit par répondre sobrement.

    Ah, putain, il passe aux aveux. Il se met à table. Je vais le cuisiner. J’ai à nouveau envie de lui poser mille questions… alors, c’était comment, espèce de petit voyou ? Vous avez baisé comme des lapins toute la nuit ? Jérém était comment ? Il a fait son macho excessivement viril, insolemment sexy? Tu l’as bien maté en train de prendre son pied ? T’as aimé, hein ? Il a bien pris son pied avec ces deux pouffes ? Autant qu’avec moi ?

    Je sens une légère, grandissante, intense contrariété, doublée d’une certaine colère, ou plutôt d’une colère certaine, avancer à grand pas dans mon esprit et me mettre en pétard… j’ai envie de lui rentrer dedans (au sens figuré, certes… car au sens propre, faut bien avouer que c’est plutôt l’inverse qui me fait envie) et de lui demander pourquoi… pourquoi il m’a fait ça, alors qu’on commence à être potes… ce sont les mots de ma cousine retentissant dans mes oreilles qui m’empêchent d’aller plus loin dans mon questionnement…

    Mieux que ça, ils ont le pouvoir de faire retomber ma colère de plusieurs crans… je repense notamment aux arguments avec lesquels elle a tenté d’apaiser ma colère, ma tristesse et mon désarroi pendant le retour du KL, en m’expliquant que malgré ce qui venait de se passer…

    … « Ca n’empêche pas que Thibault soit un très bon gars… et je pense vraiment qu’il a envie de devenir ton pote… et à ta place, moi j’accepterais son amitié sans réserves…» 

    Car… 

    « … si tu veux avoir une chance de garder un peu plus longtemps ton con de brun, t’as tout intérêt à saisir la main que Thibault est en train de te tendre… Thibault est peut-être la personne qui connaît le mieux Jérém au monde, et apparemment il ne se fait pas prier pour te faire profiter de son savoir… là tu tiens un allié de taille pour mieux cerner ton serveur… de plus, je suis sure qu’il sait tout de vous deux et que tu peux dès maintenant lui parler franco… à contrario, si tu te fâches avec lui à cause de ce genre de conneries, je suis sur que tu vas passer à coté de quelque chose et tu vas le regretter…  

    Alors je ne vais pas sévir devant son « aveu » car, péché avoué, à moitié pardonné… et l’autre moitié du pardon tenant à son sourire… alors je continue, pudiquement…

    « Je vous ai vus partir… ».

    « Ah… » il s’étonne.

    Je ne trouve plus rien à dire. Soudainement je me sens triste. J’ai beau essayer de prendre du recul par rapport à tout ça, le fait d’en parler me remue les tripes. Thibault s’en rend compte.

    « C’était pas prévu, tu sais… ».

    « T’as pas à te justifier… » j’essaie de me dédouaner.

    « Je vois bien que ça te pose problème… ».

    « Et pourquoi ça me poserait problème ? ».

    « Nico… »

    « Quoi Nico? » je commence à m’échauffer…

    « Je vois bien que ce qui s’est passé samedi soir… ça t’embête… ».

    « Mais pas du tout… » je mens.

    Il sourit. Il se moque de moi. Il est beau à craquer. Il est charmant à ne pas pouvoir l’exprimer. Et en plus il touche juste. Il m’énerve. Je vais le tuer.

    « Nico… Jérém est mon ami… ».

    « Oui, et alors ? » je tente l’esquive car j’entrevois très bien où cette conversation va nous mener…

    « Je le connais un peu… » m’informe-t-il.

    « Oui… » je réponds à mi voix, en redoutant un brin ce qui va suivre. Je ne me trompe pas…

    « Alors je sais depuis longtemps que toi… et lui… ».

    Je me tais, je suis officiellement démasqué. Je ne sais pas comment réagir. Je garde les yeux rivés sur mon verre autour duquel mes doigts s’enroulent nerveusement.

    Soudainement je me rends compte que je viens de faire mon premier coming out… certes Elodie est au courant depuis un certain temps… mais Elodie ne compte pas, elle est hors compétition, on pourrait tenter de lui cacher un truc sur Mars qu’elle le capterait… alors, oui, en ce jour de juillet 2001, je viens de faire mon premier coming out… et rien de moins qu’auprès du meilleur pote de Jérém…

    C’est un coming out "en douceur", comme une évidence, puisque c'est Thibault lui-même qui m’a amené à me livrer. Il a juste su me mettre en confiance. Bien sur, il le savait déjà, ça n'a été qu'une simple "évidence" de le dire ce jour-la, a ce moment-la, car ça devait être dit tout simplement.

    Je savais que ce moment allait arriver, mais maintenant que c’est fait, j’ai l’impression que cela marque un tournant dans ma vie… le signe que quelque chose s'est terminé, comme si une page d'un livre collée aux autres venait de se tourner, qu'une étape est franchie et que désormais rien ne sera plus comme avant.

    C'est un sentiment étrange: un soulagement d'abord, et un sentiment bizarre de nostalgie pour ma vie "secrète" d'avant, quand personne ne savait. Cette vie secrète qui me rendait malheureux du fait de ne pouvoir me confier à personne, mais qui était aussi mon jardin secret, une partie de moi à qui je m’étais habitué tant bien que mal et à qui je tenais au fond… certes, j’ai rêvé de ne plus devoir me cacher, de pouvoir être moi-même, de me moquer du regard des autres…

    Et voilà que quand le moment tant attendu de me dévoiler arrive, je me surprend à éprouver cette sensation bizarre, une sensation qui me ferait presque regretter « mon monde d’avant », fait de cachotteries envers la terre entière... c’est comme si ce « truc », ce quelque chose de si différent en moi, ce truc qui était la partie la plus sombre de moi, la partie que je me suis employé pendant tout ce temps à cacher de toutes mes forces… oui, c’est comme si ce truc, une fois sorti de l’ombre et porté en pleine lumière, perdait toute sa valeur et ressemblait à quelque chose de tellement commun et banal… est donc si terrible d’être pd ? Ca valait dont tous les efforts produits et la solitude intérieure endurés pendant tout ce temps ?

    A ce moment, je me dis que j’ai franchi un cap et que je ne pourrais plus faire marche arrière, et que mon histoire avec Jérémie aussi va prendre une direction en quelque sorte inéluctable. Thibault est désormais dans la confidence et ça va forcement changer beaucoup de choses…

    Je ressens un mélange de gêne et de soulagement… peu à peu ce dernier prends le dessus, j’ai l’impression que dans ma vie quelque chose arrive enfin a son terme, a sa conclusion logique…

    « Nico… » je l’entends dire pendant que je suis saisi par l’agréable et touchante surprise de sentir la chaleur du contact de sa main sur la mienne, contact qui m’oblige à lever le regard et à rencontrer le sien ; et il continue : « t’as pas à être gêné… avec moi… ».

    Oui, je suis démasqué. Quelque part j’avais désirée cette conversation… je l’avais crainte… mais maintenant que c’est parti, je me sens soulagé. L’espace d’une seconde, j’ai basculé dans une nouvelle dimension où Thibault est devenu un confident, un ami. A qui j’ai envie de me livrer.

    « C’est pas facile, tu sais… » je finis par lâcher, comme sortant d’une apnée émotionnelle qui avait trop duré.

    « Je sais que c’est pas facile, ni pour toi, ni pour lui… » il tente de me rassurer.

    Ah, Thibault a l’air de savoir des choses… je m’emballe très vite…

    « Il t’a parlé, il t’a dit quoi ? » je m’enquête, curieux et impatient.

    « Il ne m’a rien dit… mais je sais pour vous… » precise-t-il

    « Comment tu sais ? » je demande, intrigué mais m’attendant quelque part à la réponse qui allait suivre.

    Il me regarde droit dans les yeux et… putain… il a vraiment des yeux à se perdre dedans… alors je m’y perds et à force de les regarder, un petit détail finit par frapper ma conscience… je l’ai déjà remarqué en d’autres circonstances, mais lorsqu’il sourit, on dirait que les paupières inférieures dessinent de charmants petits bourrelets tous mignons sous les yeux… c’est un truc gracieux que l’on voit le plus souvent chez les enfants ou les ados, lorsqu’ils sourient… ce petit détail donne quelque chose d’enfantin à son visage par ailleurs bien viril, avec une mâchoire carré et un duvet de barbe bien sombre, malgré qu’il soit en permanence rasé de près… et il est à craquer !!! 

    « Je l’ai su la première fois que je t’ai croisé sur son palier un soir que tu venais réviser chez lui… je me souviens d’avoir eu l’impression qu’il était très impatient que tu arrives, que ça lui tardait que je parte… et quand je t’ai vu arriver comme une furie, je me suis dit que tout cet entrain ne pouvait pas être que pour des révisions… par la suite, sans que Jéjé me parle vraiment de toi, à part du fait que vous révisiez ensemble, j’ai quand même eu l’impression assez nette que ta présence dans sa vie lui apportait quelque chose de positif… c’était bien la première fois que je voyais Jéjé prendre des études au sérieux… ».

    Pendant qu’il parle et que je bois ses mots, des mots que je reçois comme une caresse sur mon esprit ému, je réalise un truc que j’avais déjà remarqué par moments mais que à cette occasion, dans cette conversation loin du bruit de la boite de nuit, j’arrive à capter plus régulièrement… le beau mécano a un tout léger défaut de diction : c’est léger mais on l’entend quand même, comme si sa langue se posait tout le temps trop au fond du palais… ça se rapproche de l’expression « avoir un cheveux sur la langue » mais c’est très très léger et, une fois de plus, très mignon… je me fais la réflexion que les petits défauts de ce genre ont le pouvoir de rendre ce style de mec encore plus craquant… d’autant plus que, à coté de ça, sa voix est puissante, son débit de parole est celui d’un petit mec affirmé mais tout en retenue, le tout saupoudré d’une gentillesse de chaque instant… alors voilà, ce petit défaut lui donne un coté mignon, touchant et fragile en contraste avec sa virilité de jeune mâle… et ça, ça fait définitivement un mélange explosif…

     « Ensuite… » il continue «… j’ai commencé à te voir apparaître en boite lors de nos sorties… je t’ai vu parfois partir seul avec lui… je me souviens tout particulièrement du soir sur le parking de l’Esmé… je ne savais pas ce qui s’était passé ce soir là dans les chiottes, pourquoi il s’était battu, mais le fait qu’il ne veuille pas m’en parler m’a fait me poser plein de questions… ».

    J’ai l’impression que sa dernière phrase est autant une affirmation qu’un questionnement à mon adresse. Allez, le mec est en train de jouer cartes sur table, je lui dois bien ça…

    « Ce soir là… » je le coupe avec un petit sourire « … il est arrivé au bon moment… il y avait un mec bourré qui me cherchait des noises… il était plein comme une barrique et il voulait une gâterie… moi je ne voulais pas et si Jérém ne l’avait pas remis à sa place, il m’aurait cogné… il a été génial… fallait voir comment il l’a envoyé valser ce gros nul… il n’a même pas eu de mal… le sang sur son t-shirt venait du rapprochement entre le nez du mec et d’une porte de chiottes… ».

    « D’accord… » fait Thibault en affichant un air satisfait de connaître enfin la réponse à ses questions sur ce sujet.

    « Après… » continue le beau mécano «  … j’ai eu l’occasion de te côtoyer un peu… et j’ai senti à quel point Jéjé compte pour toi… j’ai vu comment t’as couru le voir à son job juste après qu’on s’est croisés la semaine dernière… je t’ai vu essayer de te cacher dans l’abribus pour le mater de loin… j’ai trouvé ça super mignon… et j’ai vu aussi Jérém heureux de te voir débarquer lors de son premier jour de travail… tout comme ça lui a fait plaisir quand samedi soir je lui ai annoncé sur la route du KL que très probablement tu allais être là… car je savais que tu allais y être… ».

    Ah, ce charmant Thibault… je réalise à ce moment ce qu’il a du ressentir le soir sur le parking de l’Esmé, lorsqu’il nous a regardé partir tous les deux… et, qui plus est, même pas pour un plan à quatre… ce soir là Thibault savait pertinemment que son pote et moi nous allions coucher ensemble… et je m’imagine bien ce qu’il a du ressentir, surtout si l’envie de partager une petite galipette avec son pote lui chatouillait l’esprit… je me rends compte que je n’ai pas de raison de lui en vouloir pour samedi dernier, car il n’a fait que côtoyer Jérém pendant une bonne baise… du moins c’est ce que j’espère… en tout cas ce garçon me touche… profondément…

    D’autant plus que ce jeune mec possède une qualité très rare à son âge, la capacité d’être en permanence à l’écoute des autres… son regard est sensible, pénétrant… j’ai l’impression que rien de ce qui se passe autour de lui ne lui échappe, son esprit est fin, perspicace… oui, ce mec voit tout, et c’est pour en faire le meilleur usage… tout dans son attitude est bienveillance, le mec semble naturellement attentif et attentionné vis-à-vis de son prochain, quel qu’il soit ce prochain… que ce soit Jérém (il est comme un frère avec lui), un pote (je l’ai vu avec des potes en soirée) ; que ce soit une connaissance comme je le suis, ou que ce soit un inconnu, j’imagine…, ce mec est toujours gentil, aimable, avenant, avisé, réfléchi, serviable… il sais observer, s’intéresser et s’adapter à chacun, il sait mettre à l’aise… il a toujours dans son escarcelle le sujet de conversation qui va bien… et un gars comme ça, ça vaut plus que son pesant d’or…

    En attendant, me voilà démasqué. Que faire maintenant ? Continuer à cartes sur table ou respecter le fait que son meilleur pote n’ait pas voulu lui parler de notre relation ? Je n’en sais rien… je meurs d’envie de me confier à lui… et puis de toute façon il sait déjà presque tout, alors je craque :

    « On ne peut rien te cacher à toi… » je finis par lâcher avec un petit sourire un peu intimidé en pièce jointe.

    Il sourit, l’air amusé de m’entendre mettre cela sur le ton de la rigolade… c’est un sourire qui a quelque chose de léger et enfantin, un sourire qu’il laisse gentiment rouler au fond de sa gorge, un sourire qui devient alors une pure caresse pour les oreilles et pour l’esprit… j’ai déjà dit que ce mec a quelque chose de profondément touchant ?

    « Depuis que vous… » il cherche ses mots, avec un léger malaise.

    « Depuis qu’on révise… » je l’aide.

    « Oui » il percute et enchaîne instantanément sur ma petite formule politiquement correcte « depuis vos révisions Jérém a changé… même s’il ne m’en a pas parlé, j’ai bien vu qu’il y avait du nouveau dans sa vie… je trouve que depuis quelques mois il a l’air mieux dans ses baskets… disons que sa vie est… comment dire… un peu plus rangée… du moins autant que ça peu l’être pour un mec dans son genre… j’aime autant le voir rentrer avec toi que le voir picoler toute la nuit… à coté de ça, je vois bien qu’il a du mal à composer avec ce qui lui arrive… je crois que ce qui se passe entre vous, il ne l’a pas vu venir… ça lui est tombé sur la tête et il en est encore un peu assommé… le fait qu’il n’ait jamais eu envie de m’en parler, alors qu’il m’a toujours tout dit, me laisse penser qu’il doit vraiment avoir du mal avec tout ça… ».

    Je ne me lasse pas d’entendre le son de sa voix et de recevoir la tendresse de ses mots. Ah que ça me fait plaisir d’entendre à travers la bonne parole de Thibault, que j’ai apporté quelque chose dans la vie de Jérém, même si ce dernier n’arrive ni à le formuler ni à l’assumer.

    Ah, ce petit, charmant Thibault… un petit mec de tout juste 19 ans, pourtant il émane de sa personne un charisme et une autorité qui s'expriment dans le moindre de ses gestes… alors, j’ai vraiment envie de croire à ses mots…

    « Je voudrais vraiment pouvoir penser que je représente quelque chose pour lui… » je finis par lâcher.

    « Il t’aime bien, Nico, je pense juste qu’il a du mal à l’admettre… ».

    « J’en sais rien… moi, tout ce que je vois, c’est qu’il m’appelle quand ça l’arrange et qu’il me jette quand ça lui chante… »

    « Tu ressens quoi pour lui ? » me demande-t-il à brûle pourpoint sans apparemment prêter attention à mes mots.

    Aaaahhh… voilà la question qui tue, simple, claire, sans détours, directe à l’essentiel, du pur Thibault… comment répliquer à cette question… ? Y répondre, équivaut à aller chercher et à raviver un ressenti que je tente d’enfouir depuis une semaine…  répondre à cette question va m’obliger à replonger dans « Le monde de Jérémie » à clore définitivement « La parenthèse inattendue avec Stéphane »… un bien, un mal, je ne sais pas…

    Tout ce que je sais c’est que, maintenant que j’ai mis le doigt dans l’engrenage, je vais être aspiré. Je vais devoir affronter mes démons, mon magnifique démon Jérémie… j’ai beau essayer de ne pas penser à mon beau brun, tant que je serai sur Toulouse, tant qu’il sera sur Toulouse, et maintenant que Stéphane sera loin, la proximité physique entre nos deux corps fera que je ne pourrais pas passer à autre chose… tiens, rien que cette ruse ridicule de passer et repasser en bus devant son taf juste pour le mater… si c’est pas con ça, ça donne quand même l’ampleur de ma maladie…

    Et encore, comment répondre à la question posée par Thibault, comment négocier pour sauver la chèvre et le chou, quand je repense aux mots d’Elodie… « … il y a juste un truc qui pourrait clocher… Thibault va être ton allié, à moins qu’il en pince lui aussi pour son pote… ». 

    Allez, Nico, balaie tout ça de ta tête et essaie d’avancer… répond à sa question, et sois franc avec ce mec… sois franc avec toi-même… 

    « Je ne sais pas par où commencer… » je concède. 

    « Tu es amoureux de lui ? »  

    Droit au but, juste, sans fioritures, comme une action de rugby. Le mec veut transformer l’essai. Oui, du pur Thibault. Encore. J’adore. Je respire profondément… j’ai du mal à me laisser aller…  

    « Je ne sais pas si je peux parler de ça avec toi… je pense que si Jérém ne t’en a pas parlé, c’est qu’il n’est pas prêt… tu es son meilleur ami, il t’adore… mais… ».

    « Je te demande juste ce que tu ressens… toi… pour lui… » il tranche net, le ton ferme, calme, rassurant, sa main se resserrant un peu plus fermement sur la mienne.

    Présenté comme ça, ça me parait déjà mieux… je sens que la tempête dans ma tête se calme un peu, que mes pensées se posent, arrêtent de s’entre choquer… oui, ma langue est prête à se délier… et au fond, elle n’attend que ça…

    « Je… » je n’irai pas plus loin, car son portable sonne. Le contact de sa main avec la mienne est rompu, et j’ai l’impression que la magie est partie. Le contact de ses mains puissantes me manque déjà… surprenante sensation qui n’est pas sans m’en rappeler une semblable sous certains aspects, la sensation d’abandon qui me saisit lorsque Jérém se dégage de mon intimité après avoir joui en moi…

    « Excuse-moi, je dois répondre, c’est important… » me lance-t-il tout en décrochant.

    « Allo… ». Affirmé mais cordial. Je pense qu’un de ces jours je vais l’appeler juste pour le plaisir d’entendre cet « Allo ! ». Hélas, lorsque je l’appellerai quelques semaines plus tard, ce ne sera pas pour de pareils bêtises, mais pour un sujet bien plus grave.

    Il parle avec un pote, ils parlent rugby, de la finale du tournoi, contre Blagnac, prévue pour le dimanche d’après. Il sourit, il blague, son visage s’illumine sous l’effet du bien être inconscient mais bien réel que lui apporte cette entente entre potes, cette complicité qui ressort même d’une conversation au tel dont je n’entends que la moitié des répliques… je vois, j’entends, je ressens deux potes qui se captent au quart de tour… et je trouve ça beau…

    Pendant qu’il est au téléphone, je profite pour encore mieux le détailler… décidemment sous son marcel gris qui a du connaître pas mal de passages à la machine, son torse massif ressort vraiment d’une façon plutôt spectaculaire… sans parler de ces quelques poils qui pointent au dessus de l’arrondi assez profond du marcel… et qu’est-ce que c’est beau aussi ces épaules découvertes se prolongeant dans des biceps à la musculature saillante, ces derniers supportant des bras puissants, aux veines apparentes, des avant bras à la peau finement poilue… et lorsque mon regard glisse jusqu’à sa main posée sur la table, il se laisse impressionner par sa grosse paluche de droite abandonnée à coté de sa bière, la gauche appuyant fermement le portable à son oreille… 

    Et cette main puissante et harmonieuse, nonchalamment abandonnée sur la petite table, cette main qui me fait penser à celle du David de Miquel Ange, résume pour moi à elle seule la morphologie carrée et puissante du personnage… un physique tout en puissance mais en retenue, animé par un naturel gentil, sensible, touchant, voilà qui résume Thibault en quelques mots… 

    Je repense à la blague de ma cousine lorsqu’elle m’a conseillé d’aller me confier à Thibault en me demandant si ça ne me « plairait pas de pleurer dans les bras musclés de Thibault plutôt que dans les bras frêles de ta cousine… »… ah, si Elodie, je confirme, j’aimerais bien me retrouver un de ces jours enserré dans ses bras puissants… 

    Et puisque mon regard subjugué s’attarde sur sa main portant encore quelques traces légères de cambouis, je finis par remarquer une vieille cicatrice sur l’extérieur de l'index courant sur presque toute la longueur du doigt… ça, à mes yeux, c’est le genre de détail capable de rendre un garçon encore plus charmant, car un peu plus… mystérieux… oui, qu’est ce qui t’es arrivé, beau Thibault, ce jour là ? De quand date-t-elle cette cicatrice ? Un tout petit détail, parmi les nombreuses choses que j’ignore et que j’aimerais savoir de lui…

    La conversation au téléphone continue, le mot « Jéjé » est lâché à maintes reprises dans des phrases traitant de jeu de rugby que je ne comprends qu’à moitié… Jéjé… ainsi c’est sous ce petit diminutif que mon Jérém est connu de ses coéquipiers… ce n’est pas qu’un truc propre à Thibault… Jéjé est le mot de passe de mon beau brun dans la grande meute de leur équipe… Jéjé est le titre du mâle alpha… c’est un des éléments de leurs relations de mecs, d’une complicité que j’entrevois et qui me laisse rêveur…

     « Attend mec, j’attrape de quoi écrire » je l’entends dire à un moment. Et, ce disant, Thibault incline la tête pour coincer le portable entre l’oreille et l’épaule, ce qui fait ressortir encore davantage sa musculature du coté ou le cou est étiré… le beau mécano plonge sa main gauche dans la poche de son short et il en sort un petit calepin qu’il pose sur la table pour y noter ce qui ressemble à un numéro de téléphone…  

    Et là, surprise… je remarque un autre petit détail qui a pour moi une importance presque capitale… voilà… le beau Thibault est gaucher, un détail qui, pour une raison inexplicable, le rend encore plus sexy à mes yeux… un petit détail, qui revêt pour moi l’importance d’un trait essentiel qui compose l’univers inconnu de ce garçon… 

    La conversation au téléphone prend fin, et le beau mécano replonge son regard vert marron dans le mien. Je fonds.

    « Excuse-moi… » me chuchote-t-il en remettant ses mains autour des miennes. Il attend que j’aille au bout de ce que j’avais entrepris. Je décide d’y aller franco. Advienne ce qui peut.

    « Je suis fou de lui… ».

    Une simple question, une réponse simple. Et mon cœur se fend. C’est lâché. Je suis fou de lui. Je le suis toujours. Je passe aux aveux. Devant Thibault. Et devant moi avant tout. La tristesse m’envahit. Une partie de moi savait que c’était une bêtise d’aller à la rencontre de Thibault. Au fond je savais que cette conversation allait avoir lieu. Et je savais qu’elle allait me replonger dans le gouffre sans fond de cette relation malheureuse… je savais que la lancée et la détermination du dimanche après midi auraient étés éclipsés par la lumière aveuglante de mes sentiment pour le beau brun une fois que ces derniers auraient été déterrés par une question de ce genre… une simple question et tout remonte en moi… une simple réponse et je me sens replongé dans l’angoisse d’un amour impossible…

    Si dur, si frustrant, si humiliant d’admettre que malgré ma colère face à son comportement à la con de samedi dernier ; malgré ce dimanche après-midi où j’ai cru découvrir un nouveau moi, envisager un nouveau demain sans Jérém, découvrir une tendresse qui m’a fait tant de bien, des câlins qui m’ont comme fait renaître, des mots qui m’ont donné des ailes : oui, malgré tout ce qui s’est passé depuis une semaine, mes sentiments pour Jérém sont toujours là, aussi vifs et puissant que jamais… j’en suis secoué… j’ai envie de pleurer car je suis en train de tourner le dos à l’amour que Stéphane m’a offert. Je trahis tout le bonheur de dimanche dernier. Je trahis Stéphane. Je me trahis moi-même… cette fois-ci c’est définitif…

    Rien ne passe inaperçu au charmant Thibault. Ses mains se resserrent un peu plus autour des miennes, elles disparaissent carrément dans les siennes. La chaleur de ses paumes irradie sur ma peau et ça me donne du courage.

    « C’est ton premier ? » finit-t-il par me demander.

    « Oui, mon premier… » j’admets, touché et ému.

    « Tu es heureux, Nico ? » me demande-t-il, direct, adorable.

    « Je n’en sais rien… » je marque une pause pendant la quelle je parviens si bien que mal à retenir mes larmes et je continue « quand je suis avec lui, je suis bien, mais lui il veut juste coucher avec moi… ».

    « Et toi tu voudrais plus… » devine-t-il.

    « Pas me marier avec, mais un peu de… » je ne sais pas comment définir ce que j’attends de Jérém, surtout devant Thibault.

    « Un peu de tendresse ? » il me devance.

    « Oui… juste pas me faire foutre à la porte dès que c’est fini… quand je suis avec lui, je suis bien, mais quand je rentre chez moi, je me sens mal… tu comprends… »

    « Oui, très bien… » et il continue « … malgré tout, tu sais, Nico, je crois vraiment que Jérém t’aime… bien… à sa façon, certes, mais il t’aime bien… il ne me l’a jamais dit, mais je sais que tu comptes pour lui… je le connais un peu et certaines choses me sautent aux yeux… ».

    « Bah, il devrait le montrer un peu plus alors, car moi je ne vois qu’un mec qui a envie de tirer son coup et qui me jette juste après… »

    « Je comprends, ça ne doit pas être facile à vivre pour toi… »

    « Non, je te confirme… » je lâche ; un instant plus tard, je coupe court « de toute façon il va partir, alors c’est pas la peine de continuer à se faire du mal… ».

    « Putain… ça, oui… je te jure… » assène-t-il en prenant un ton soudainement emporté « … c’est vraiment trop con qu’il veuille partir… ».

    Ah, si c’est pas touchant ce beau Thibault qui me fait cette sortie inattendue venant tout droit du profond du cœur, un grand cœur que je découvre touché, blessé. Je suis surpris. Je croyais que dans sa tête c’était réglé. Mais je suis con, bien sur, ils sont potes depuis l’enfance, bien sur que leur amitié va lui manquer… comment j’ai pu ne pas penser à cela… l’amitié et l’amour, deux sentiments si proches… entre l'amour et l'amitié… il n'y a qu'un lit de différence…

    Il fallait entendre comment il a appuyé sur le mot « vraiment » avec un ton presque enfantin, comme un gosse qui s’exclamerait « c’est pas juste », un gosse confronté à une injustice qui le prend aux tripes et qu’il se sent cruellement impuissant à l’éviter, un gosse mis devant des événements qu’il est condamné à subir… si c’est pas mignon ce contraste entre son physique de beau mâle puissant et cette sensibilité à fleur de peau, cette angoisse de perdre le pote qui représente tellement à ses yeux, tellement que c’en est émouvant…

    Il marque une pause, le temps d’évacuer la colère sans cible véritable que j’ai sentie surgir de ses derniers mots ; et il continue, sur un ton un peu plus apaisé mais ému :

    « Putain… il va vraiment vraiment me manquer ce petit con, si tu savais… Jérém n’est pas qu’un pote pour moi…

    [Je sens soudainement la panique submerger mon esprit, l’alarme rouge d’alerte maximale retentit dans ma tête… tu veux dire quoi par là, Thibault ? Elodie a donc raison ? Toi aussi tu en pinces pour lui ? Vous n’avez quand même pas couché ensemble ? Calme toi, Nico, calme toi… laisse le parler… laisse lui le temps…].

    « … Jérém est comme un frère pour moi, un jeune frère, même si on a le même âge… [aaahhh, j’aime déjà mieux ça…]… on a tout vécu ensemble, depuis la toute première enfance jusqu’à aujourd’hui… on a connu de bons moments, mais aussi des moments difficiles… c’est vraiment mon meilleur pote et il compte énormément pour moi… et ça me fait chier, chier, chier… si tu savais, de penser que je ne vais plus le voir tous les jours, et qu’on va peut-être se perdre de vue… ».

    Il boit une gorgé de bière et il continue :

    « Je sais que Jérém est un homme désormais… un homme qui n’a besoin de personne pour vivre sa vie… mais moi je sais que ce petit bout d’homme a tendance à perdre pied lorsque ses démons refont surface… un verre de trop et tout peut partir en vrille… quand il sera loin, je ne pourrai plus l’empêcher de boire le verre de trop, l’empêcher de conduire quand il l’a quand même bu, ce verre … je ne pourrai plus l’empêcher de se bagarrer… car lorsqu’il est un peu rond, Jérém est le genre de mec qu’on a pas besoin de trop chercher pour le trouver… j’ai longtemps espéré qu’il trouve une fille assez forte pour le garder, une fille capable de le driver… mais Jérém n’est pas facile à vivre… et surtout ce n’est pas le genre de mec qui se fixe, surtout pas si jeune… ».

    Je lui souris timidement. Je suis vraiment touché par ses mots. Il marque une pause, il respire profondément et il finit par continuer :

    « Et puis, un jour t’es arrivé… et là j’ai vu Jérém retrouver petit à petit les commandes de sa vie… c’est pour ça que j’ai été content quand j’ai compris ce qui se passait entre vous… tu sais, jamais je ne l’ai vu… réviser… aussi longtemps avec la même personne… ».

    Aaaaahhhh, je sais… je me rappelle maintenant pourquoi je me suis dit que je devais aller voir Thibault, et j’ai eu raison ! Je suis touché… presque coulé… ses mots me font un bien fou…

    « Ce que tu me dis me fait chaud au cœur… » je lui réponds « mais ce mec est ingérable… je ne sais jamais s’il a envie de me voir, comment il va réagir… tiens, l’autre jour lorsque tu m’as appris qu’il bossait rue de Metz, j’ai de suite eu envie d’aller le voir… mais j’avais super peur qu’il m’envoie bouler en me voyant arriver… si tu ne m’avais pas gaulé à l’abribus, je me serais contenté de le regarder bosser… ».

    « T’es vraiment bien atteint… » il rigole avec un sourire à la fois lumineux et ému qui me donne des frissons.

    « Je te l’ai dit… je suis grave… » j’admets, toujours entre gêne et soulagement.

    « Tu sais… » enchaîne-t-il un peu plus sérieusement «  Jéjé peut se comporter comme un parfait petit con… je le sais… mais au fond c’est un bon gars… ».

    « Je le pense aussi… mais c’est dur, trop dur de l’aimer… »

    « Tu l’aimes vraiment, Nico ? »

    « Oui, je crois que je l’aime vraiment… mais je n’ai pas le droit de le lui monter… dès que je lui montre un peu d’affection, il me jette comme du poisson pourri… et ça me fait un mal de chien…».

    « Je te comprends, Nico… »

    « J’en peux plus, je suis à bout de forces… » je finis par balancer.

    « Je sais qu’il peut être très dur, même méchant, qu’il fait souvent n’importe quoi… je pense qu’il ne veut pas que tu t’attaches car il a surtout peur de s’attacher à son tour… d’abord… un mec comme lui, un mec qui a tombé plus de nanas qu’il peut en contenir son répertoire téléphonique, si seulement il prenait la peine de le faire… un mec dont la réputation n’est plus à faire, et qui se découvre un penchant pour un autre mec… ».

    « Je vois, oui… » j’admets.

    « Ensuite… » il continue « …je crois que je t’en ai déjà un peu parlé… Jérém a trop souffert du sentiment de l’abandon de sa mère, et aujourd’hui encore il ne sait pas s’attacher aux gens, il ne veut pas, au fond de lui il doit avoir peur de les perdre… ».

    Jérém en fait applique un précepte de Maître Yoda, lorsqu’il dit a Luke : "Apprends a renoncer a ce que tu as peur de perdre"…

    « Bien sur… » continue le beau mécano « tu es un mec, ce qui complique encore la tache, mais si ça peut te consoler, jamais je ne l’ai vu amoureux d’une nana… jamais… et jamais une de ses relations n’a duré autant que la votre, si houleuse soit-elle… je sais qu’il tient à toi, Nico, et je pense qu’il serait réellement malheureux s’il devait te perdre… ».

    Ça y est Thibault, c’est ce que tu voulais ? Voilà, t’as réussi à me faire chialer…

    J’ai la gorge nouée, je n’arrive plus à parler. Une de ses mains se décolle de l’étreinte autour des miennes, son pouce se pose tout doucement juste en dessous de mes paupières, l’une après l’autre, pour essuyer le flot de larmes qui glissent sur mes joues… ce petit contact est aussi doux que s’il m’avait serré dans ses bras… d’ailleurs, je suis à deux doigts de me lever et de me jeter vraiment dans ses bras… je ne sais pas ce qui me retient, à part peut-être le fait que nous ne sommes pas seuls en terrasse…

    Il me sourit, son regard est ému, ses lèvres ont l’air de trembler… ses yeux aussi… j’ai l’impression qu’il se retient de justesse… un instant plus tard il me chuchote :

    « Ne pleure pas, Nico, s’il te plait… ».

    Il reboit une gorgée de bière et il enchaîne :

    « Tu comptes beaucoup pour lui, beaucoup plus qu’il ne te le montre ou qu’il veuille l’admettre à lui-même… cette relation qui au départ, dans sa tête, je pense, ne devait être que… physique, a pris petit à petit des proportions inattendues… il est débordé par ce qui se révèle en lui… ».

    « De toute façon, il m’oubliera vite… je crois bien qu’il a déjà commencé à m’oublier… ».

    « J’en suis pas si sur… je pense que ça doit trotter dans sa tête aussi… ».

    « Quoi donc ? ».

    « Ton départ, son départ… ».

    Je frissonne. Je tremble comme si j’étais en t-shirt en Sibérie. Si seulement il pouvait dire vrai.

    « Jérém n’est pas un mec très expressif, tu sais… » il finit par enchaîner « et quand il a mal, au lieu d’en parler, il cogne d’abord… je veux dire, il devient mauvais… ça peut paraître con, mais c’est sa façon de se protéger… il est perdu en ce moment… il se cherche… mais il a vraiment besoin de toi… ».

    « C’est pour ça que samedi il m’a jeté et qu’il a préféré se faire ce plan avec… » je m’insurge.

    « Tu sais, Nico… » me coupe-t-il net avant que je termine ma phrase « … je crois vraiment que ce qui s’est passé montre à quel point il se cherche, à quel point il se voile la face… ».

    « Je l’ai vraiment dans la peau, mais il y a des fois où il me fait trop mal… »

    « Je te promet que ce gars en vaut la peine… ».

    « Je sais pas… » c’est tout ce que je trouve comme réponse.

    « Si tu l’aimes vraiment, tu ne dois pas baisser les bras… c’est vrai qu’il va peut-être partir à la rentré, et toi aussi, mais il vous reste deux mois pour vous faire du bien… ce serait dommage de gâcher ce temps… ».

    « Oui, je l’aime vraiment… » je finis par admettre.

    Voilà, j’ai répondu à sa question. A ses questions. Je ne voulais pas le dire, car dès que l’on énonce quelque chose, il devient plus vrai. Je me suis fait avoir. Bien joué Thibault, petit coquin… Mais comment me contenter de répondre à cette question sans avoir envie de poser la même question dans l’autre sens au cas où le beau mécano en saurait ou il en devinerait quelque chose des sentiments que Jérém pourrait avoir pour moi…

    Thibault a affirmé à plusieurs reprises que Jérém tient à moi, et qu’il n’est peut-être même pas conscient à quel point… que je pourrais lu manquer si nos vies se séparent… qu’il cogite sur notre éloignement à venir… tout cela me fait si chaud au cœur… et voilà que cette sensation de bien être, cet espoir, cette force que le beau mécano a su imprimer en moi, font que je n’ose plus poser LA question qui brûle mes lèvres… une question pour laquelle il n’aurait par ailleurs pas la réponse, étant donné que même le direct intéressé ne doit pas l’avoir non plus…

    Alors, voilà, mon petit Thibault, je ne te poserai pas la question qui me tourmente l’esprit par-dessus toutes, la question de savoir qu’est ce que Jérém ressens pour moi… et je ne te poserai pas non plus, pas aujourd’hui du moins, une autre question dont la réponse pourrait se révéler fâcheuse pour notre amitié naissante… à savoir… et toi, beau Thibault, tu ressens quoi au juste pour ton pote Jéjé ?

    « Tu es vraiment touchant, Nico, Jéjé a de la chance de t’avoir… » me rassure Thibault. Le contact de la paume de ses mains avec le dos des miennes, le contact avec cette chaleur d’homme a le même effet sur moi qu’un feu de cheminée… elle me chauffe le cœur, elle m’apaise…

    « Tu parles… » j’essaye de me défendre  « … je ne sais même pas comment un mec aussi beau peut s’intéresser à moi… » je lui confie.

    « Mais t’es beau garçon, Nico et t’es adorable… ».

    « Merci, toi aussi t’es beau garçon… et en plus tu es un mec bien… » je laisse échapper.

    Nos regards s’accrochent, s’aimantent l’espace d’un instant, un instant d’éternité… aaaahhh… qu’il est beau et sexy et sensuel et adorable ce garçon… il émane de lui une « virilité tranquille » dans laquelle on a envie de se perdre… 

    Et puis, à un instant, j’ai comme l’impression que son regard pénétrant arrive à lire au plus profond de moi, à percevoir l’attirance que je ressens pour lui… je suis sur le point de couper le contact, de décrocher mon regard du sien lorsque je crois voir dans le sien quelque chose de troublant… se yeux me fixent intensément, avec une douceur qui me fait fondre… et je ne sais plus comment me sortir de ce doux malaise… 

    « Je dois y aller… » finit par couper court le beau mécano, avec un sourire tout gentil et lumineux.

    « Moi aussi… » je réponds.

    Il relâche l’étreinte autour de mes mains, il finit la dernière gorgée de sa bière et il me lance :

    « Ça me fait plaisir que tu sois venu me parler… je te trouve sympa comme mec… j’aimerais bien qu’on devienne amis… »

    « Le plaisir est pour moi… moi aussi je te trouve sympa… on se reverra, t’inquiète… ».

    « Tu y seras demain soir, à la soirée du bac ? » me lance-t-il.

    Il sait tout. Les deux potes parlent entre eux.

    « Oui… » je lui confirme.

    « Je ne sais même pas si Jérém va y être, il ne bosse pas ? ».

    « Il va y être… cette semaine il a fait un tas d’extras pour avoir sa soirée… » me répond-il.

    Ah, il va être là… c’est officiel… je me sens piqué à vif… je sens mon inquiétude me rattraper, grandir, me déborder… ça doit se voir, je ne sais pas cacher mes ressentis… mais le beau mécano est là, avec le mot juste, comme d’hab…

    « Nico… ne te prends pas la tête… ne pense pas à comment ça va se passer, de toute façon ça ne se passera jamais comme tu l’as imaginé… détends toi, écoute ton coeur, sois toi-même… tu sauras comment tu dois faire quand le moment se présentera… ».

    Quand je dis que ce garçon est pétri d’une sagesse incroyable pour son jeune âge…

    « Tu as raison… » je finis par lâcher.

    « Je sais que tu sauras gérer… » et il enchaîne, un beau sourire, un de plus, en bonus « … je crois en toi, Nico… ».

    Je souris, touché.

    « On se verra à l’Esmé, alors… » m’informe-t-il. 

    C’est cool si Thibault va être de la partie… je sens que si Thibault est là, ça devrait mieux se passer… 

    « Ce serait cool… » je réponds. 

    Thibault est déjà debout. Je bois la dernière gorgée de ma bière et je me lève à mon tour. Il me serre la main. Et au même temps, voilà que son autre main se lève et me tape deux fois sur l’épaule, fermement, chaleureusement, amicalement… sensuellement. Son regard se pose dans le mien. Je me sens dériver. Je me noie dans ce regard vert marron, je me perds dans ces pupilles transparentes, je me mets à rêver devant ce regard derrière lequel se cache tout un monde merveilleux, les envies, les craintes, les désirs, les peurs, les espoirs, les joie et les tristesses, en un mot, tout ce que compose la vie toute entière, mystérieuse et inconnue, captivante d’un beau garçon.

    Et puis, surprise… tout se passe très vite, au point qu’il me faut un instant pour comprendre ce qui m’arrive… rien de très grave, mais assez fort pour provoquer en moi un frisson puissant… sa main se resserre autour de mon épaule, je vois son buste avancer, je sens un léger parfum de déo de mec mélangé à l’odeur d’un savon dégraissant envahir mes narines… Thibault se penche vers moi, son visage s’approche du mien, ses lèvres se posent sur ma joue, puis sur l’autre… une bise… la chaleur de son visage, combiné à la sensation très virile de sa barbe naissante me fait vibrer…

    « On est potes maintenant… » il me chuchote à l’oreille, comme pour me rassurer et pour me mettre à l’aise une fois de plus.

    Oui, on est potes, mais là tu prends un risque sérieux, mon Thibault, le risque que je te saute dessus sans autre forme de procès !!! Tu ne te rends même pas compte…

    Ahhhh, la bise, ce geste qui se veut si anodin, si virilement affectueux, entre potes… et qui l’est en effet, la plupart du temps… c’est un geste que j’ai vu s’échanger parfois entre beaux gosses, nonchalamment, le plus naturellement du monde, des beaux gosses bien dans leurs baskets et que personne ne songerait à traiter de « pd » pour cela ;  un geste d’amitié et de complicité virile entre garçons, un geste qui a cependant toujours été pour moi très évocateur, qui a souvent fait remonter en moi des fantasmes de promiscuité, d’ambiguïté entre bogosses me laissant imaginer toute une complicité sensuelle qui s’y cacherait derrière… oui, la bise, voilà un geste que jamais je n’aurais le cran de proposer à qui que ce soit de mon même sexe… de peur qu’on puisse justement me traiter de « pd »…

    C’est la première fois que je reçois la bise de la part d’un garçon. Et d’un beau garçon, qui plus est. Et ça me file des frissons… tout comme sa petite phrase « On est potes maintenant… » qui me va droit au cœur…

    « A samedi… » il me lance en me quittant avec un sourire à faire fondre la banquise.

    « A samedi… » je lui retourne, abasourdi.

    « Ne le lâche pas, Nico… » il me chuchote en partant.

    Je lui souris, sans trop savoir quoi lui répondre.

    Je le regarde s’éloigner en direction de la gare en repensant toujours et encore aux mots de ma cousine… je me dis que, comme toujours, elle a raison… avoir un pote comme Thibault, loyal, solide, gentil et attentionné, va me faire un bien fou…  

    Je rentre chez moi, je prends une douche, je dîne vite fait. J’écoute de la musique, je zappe un peu sur les 5 chaînes télé et je me laisse brancher par la finale de Loft Story… de niaiserie en niaiserie, de pub en pub, le temps de voir Loana et Christophe remporter cette première saison, la soirée m’est glissée entre les doigts. Je me mets au lit vers minuit.

    Les longues heures de course sur le Canal ont un effet bénéfique sur mon corps. Mes muscles sont épuisés, je sens une douce fatigue s’emparer de mes membres… ça commence dans mes jambes, ça remonte dans mon ventre, ça avance jusqu’à mes épaules, ça redescend au long de mes bras et ça finit par atteindre mon cerveau, mon esprit… mes yeux deviennent lourds, je sens que le marchand de sable arrive à grand pas, je pense que je vais m’endormir vite…

    La rencontre avec Thibault a, quant à elle, un effet bénéfique sur mon esprit… ses mots, ses regards et ses gestes ont provoqué en moi tout un ensemble d’émotions qui m’ont secoué en profondeur… je me sens serein, presque heureux… car je vais m’endormir en m’accrochant à la rassurante sensation d’avoir un pote maintenant… et pas n’importe quel pote… le meilleur ami du mec que j’aime et qui semble bien intentionné à me soutenir, à m’aider… à nous réunir… c’est bon de penser que je peux compter sur quelqu’un pour me guider dans le voyage, dans l’odyssée qui m’attend avant d’atteindre mon Ithaque à moi, ce lieu lointain et dont la route est semée d’embûches, qu’est le cœur du beau brun…

    Mon beau brun… la rencontre avec Thibault n’a fait que jeter de l’essence sur un feu qui ne s’est jamais éteint dans mon cœur… j’ai cru pendant un temps que je pourrai arriver à le contenir, à l’éteindre… mais mon amour pour Jérém est le genre de brasier si débordant que le seul moyen de l’éteindre, c’est de le laisser flamber et se consumer tout seul… à rien ne sert de tenter de l’étouffer, il ne s’arrêtera que le jour où il n’y aura plus rien à brûler… et pour l’instant, je sens que ça brûle toujours et encore et que ce n’est pas prêt de s’éteindre au fond de moi…

    Ou est donc passé le « feu sacré » de ce dimanche soir qui sur le moment a m’a semblé balayer tout sur son passage ? Ou sont donc partis mes propos de ne plus me laisser faire, de reprendre le contrôle de ma vie ?

    En commençant à me branler dans mon lit, je retrouve dans ma tête le tourbillon images qui m’a cueilli la veille à la gare lorsque je buvais mon café assis sur un banc dans le hall devant le tableau d’affichage des trains… Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane…

    Stéphane, l’adorable garçon qui m’a fait découvrir ce qu’est faire l’amour… Jérém qui m’a fait découvrir le plaisir de la baise avec un étalon dominant… Stéphane qui m’a montré que les câlins c’est trop bon… Jérém qui refuse toute tendresse… Stéphane le mec qui m’a appris que j’aime jouir comme un mec, Jérém le mec qui m’a appris à quel point c’est bon de me faire baiser… Stéphane que je trouve touchant, Jérém que j’ai dans la peau… Stéphane charmant et adorable, Jérém le petit con ultrasexy à gifler… Stéphane calme et posé, gentil, rassurant… Jérém impulsif et sanguin, imprévisible, parfois agressif… Stéphane attentionné, doux, Jérém dur, parfois brutal… Stéphane avec qui l’amour est partage, Jérém pour qui il n’y a que son plaisir qui compte… Stéphane sexy et adorable, fougueux et généreux, Jérém sexy et odieux, macho et égoïste… Stéphane avec qui tout parait possible, Jérém avec qui il n’y a que la baise de possible… Stéphane qui me respecte, Jérém qui fait de moi ce qu’il veut… le regard doux et bienveillant de Stéphane, le regard viril et fuyant de Jérém… Jérém la baise, Stéphane l’amour, Stéphane la balade au Jardin des plantes, Jérém la baise à la piscine… le risotto… la baise au terrain de rugby… le dvd d’Aladdin… la baise dans les chiottes du lycée… me sentir bien dans les bras chauds de Stéphane, me sentir bien défoncé par la queue bien chaude de Jérém… le t-shirt blanc de Jérém… la serviette verte de Stéphane… Jérémie qui provoque mes larmes, Stéphane qui tente de soigner mes larmesles images s’enchaînent et s’accélèrent dans ma tête, ça va si vite que j’ai du mal à gérer… je me perds, j’en ai la tête qui tourne… Stéphane (où est-t-elle passé la magie de dimanche dernier ?), Jérém (il y a quoi au juste entre Thibault et Jérém ? - cette fois-ci le disque de ma mémoire a sauté l’espace d’un instant sur une scène dans la section bonus, avant de revenir dans la lecture principale) Stéphane, Jérém… Jérém, Stéphane et…  

    Paf !

    Ça bogue méchamment… tout se bloque à nouveau dans ma tête, les images s’arrêtent, plus de signal, l’écran est noir, comme si le disque était endommagé et que la lecture plantait toujours au même point… c’est là que je retrouve la petite voix se fraye un chemin dans ma tête… elle chuchote quelque chose… c’est un tout petit message, mais il est si dur à admettre… je secoue la tête, je tente de la faire taire… je me lève, je marche, j’arrive à la distancer un peu, mais elle me suit de près… je fais semblant de ne pas l’entendre, mais elle ne me lâche pas… j’ai passé toute cette journée de vendredi à essayer de la fuir, mais le petite voix a pris du coffre et maintenant elle crie presque dans ma tête… et la rencontre avec Thibault a vraiment remis de l’essence sur les braises…

    Oui, ce qu’elle me dit, cette petite voix, c’est que tout ce qui s’est passé dimanche dernier, est si fort, si beau, que je n’ai vraiment pas envie de l’oublier… ça, je n’ai pas de mal à l’admettre…

    En revanche, là où j’ai plus de mal, c’est lorsque cette petite voix insiste à dire, redire et à répéter qu’au final, ce que j’ai vécu avec Stéphane, j'aurais tellement voulu le vivre tel quel avec Jérém… 

    Oui, c’est en jouissant qu’on voit enfin cette vérité qui nous fait peur, cette vérité en images que l’on s’entête naïvement à essayer de cacher à nous même mais qui nous lâche pas d’une semelle tant qu’on ne l’aura pas acceptée. 

     


    votre commentaire
  •  

     

     

    « Je ne te demande rien, tu sais… tu le sais que j'adore coucher avec toi... j’ai tout le temps envie de coucher avec toi… alors, quand l’envie te prend de me baiser, tu m’appelles… si je suis libre je viens… je vais te faire tout ce que tu veux, quand tu veux, ou tu veux, autant que tu veux… mais quand tu ne veux pas, surtout quand tu vas voir ailleurs et que tu le fais sous mes yeux... alors là, ne me demande surtout pas de t'attendre... 

    Je le vois s’énerver… touché une fois encore, j’ai l’impression que le navire a perdu le contrôle de sa trajectoire, qu’il dérive ; alors, comme un animal excité par le sang et par la peur de l’adversaire blessé je continue, impitoyablement, cherchant l’angle de tir parfait pour mener le coup de grâce…  

    Insatiable dans ma vengeance, limite cruel, profitant pour la première fois d’une position de force vis-à-vis de mon con de beau brun, je décide de tenter un piège, une feinte… de faire durer mon « plaisir »… je vais l’obliger à sortir à découvert pour mieux le frapper… mon but est de le terrasser comme lui il m’a terrassé tant de fois… 

    « De toute façon, à t’entendre, il n’y a aucun mec qui pourrait être bien pour moi… le mec de la piscine non plus ce n’était pas un mec pour moi… mais ce n’est pas comme si tu avais ton mot à dire, Jérém… » 

    « T'as baisé avec le pd de la piscine? ». 

    Le piège a marché. Les dernières défenses du cuirassé Jérém ont sauté, le navire est à découvert, et ma puissance de feu le tient dans le cœur de cible ; il n’y a qu’a tirer pour couler l’objectif... cible inratable… 

    Je n’en ai pas assez… je deviens cruel… j’ai vraiment envie de savourer ma vengeance… 

    « Le pd a un nom… il s'appelle Stéphane… » j’assène froidement.
    Ça le met encore plus en rogne. Je le vois et je m’en réjouis. Je sais qu’il attend ma réponse à sa question et je sais aussi que, quoi que je dise, soit il ne va pas me croire, soit il va me détester… alors j’hésite... mais pas quant à ma volonté d’asséner le coup de grâce, ça je n’y renoncerai pas…  

    Là où j’hésite, c’est surtout sur le type de munition à choisir… la plus douloureuse, celle qui consiste à lui dire que je n'ai pas baisé avec Stéphane, mais que j'ai fait l'amour avec lui, et ce pour la première fois de ma vie, lors d’un après midi de rêve... ou alors choisir un arme plus propre mais tout aussi efficace… juste admettre qu’il s’est passé un truc…
    J'ai envie de tout lui balancer a la figure dans les moindres détails, de lui jeter à a figure ma sexualité, mon plaisir sans lui, comme lui il l’a fait si souvent et sans aucun scrupule ni respect vis-à-vis de moi… j’ai envie de lui faire mal, pour une fois que j’en ai la possibilité… oui, j’ai envie de lui faire mal tellement il m’énerve, tellement il m’exaspère avec sa jalousie hypocrite et mal placée…
    Au final, dans un éclair de lucidité, je me dis que si une vengeance s'impose, un aveu partiel avec des circonstances atténuantes fera assez de dégâts dans sa fierté de mâle sans pour autant l’anéantir comme le ferait un aveu complet de toutes les sensations nouvelles que cette rencontre, que ce garçon ont su m’apporter… 

    « Oui... j’ai couché avec lui dimanche dernier… » je finis par admettre, calmement mais fermement ; j’ai sciemment utilisé le mot « couché », le plus neutre qui soit, pile au milieu de la gamme qui va de « faire l’amour » à « baiser » : je ne veux pas lui montrer que Stéphane m’a apporté quelque chose que lui n’a jamais su m’apporter, mais je ne veux pas non plus qu’il croit que ce garçon n’est qu’un simple coup de queue comme il semble l’affirmer à travers de son mépris… 

    Oui, je suis diplomate, mais avec modération, une modération qui semble par ailleurs soudainement s’absenter lorsque je crois bon ajouter, comme un pied de nez : 

    « … mais t’inquiète, j’ai mis une capote… ».

     

    Plus tôt dans la semaine…

     

    Le lendemain matin, jeudi, je me réveille aussi mal en point que je m’étais bien réveillé la veille… je sais que je n’oserai pas aller sonner à la porte de Stéphane, je ne connais même pas son emploi du temps, et je sais désormais que je n’arriverai plus à le revoir avant son départ…

    J’ai du mal à ressembler mes pensées, à me sortir du coltard d’une nuit difficile, et pour arranger le tout, le portable n’a cesse de couiner… les sms autour de la soirée pleuvent et je n’ai vraiment pas envie d’y répondre… je n’ai pas les yeux en face de trous, j’ai la tête dans le q… je persiste à faire le mort… vers dix heures le tel sonne… je ne réponds pas… il sonne une deuxième fois… je ne réponds pas et je le mets en vibreur… un instant plus tard il se met à vibrer… ça m’agaaaaaaaace !!! Pourtant…

    Pourtant c’est là que je commets la bêtise de répondre. C’est Laura, une camarade de classe. Elle veut me donner les détails pour la soirée. J’ai pas envie d’aller à cette soirée, rien que d’y penser est au dessus de mes forces, surtout dans l’état zombique qui me caractérise à ce moment là… je la laisse parler un long moment, incapable d’en placer une, car même parler au téléphone est au dessus de mes forces lorsque j’ai dormi moins de 4 heures et qu’un mal de crâne carabiné me fend la tête en deux…

    Ce qui m’énerve le plus dans l’histoire, c’est qu’elle parle comme si ma participation était acquise… elle n’y est pour rien, elle ne sait rien de ce qui se passe entre moi et un autre camarade de classe, mais ça m’agace… Bodega… Esmé… ces mots résonnent dans ma tête comme des déflagrations… rien que l’idée de retourner à l’Esmé après la fameuse soirée d’il y a quelques semaines, me parait définitivement hors de ma portée…  

    Elle me saoule, mais je n’ai pas la force de me battre, alors je finis par me laisser faire… je lui confirme ma présence, même si je vis cela comme du harcèlement… elle m’aura eu à l’usure… je n’ai pas envie de lutter, au pire je trouverai une excuse à la dernière minute ou je poserai un lapin, de toute façon personne ne va remarquer mon absence… 

    Je finis par me lever, mais je sais déjà, rien qu’en posant le pied sur le parquet, que ça va être une journée de merde… je suis contrarié par le rendez vous manqué de la veille, et encore plus contrarié d’avoir laissé Laura m’embarquer dans cette putain de soirée… mais par-dessus tout je suis agacé par le bordel qui remue sans cesse dans ma tête… je me traîne toute la matinée sans me décider à m’attaquer à quoi que ce soit, en attendant midi… et surtout l’heure de la sieste…

    Mais rien ne va ce jour là, je rate même le petit somme de l’après midi… je me lève, je reprends un café, me revoilà en mode zombie… errant de pièce en pièce, le mal au crâne qui persiste et qui me plombe l’esprit, qui me rend incapable de réfléchir, incapable de prendre une quelconque initiative pour éviter qu’une belle journée de soleil et de vacances se retrouve gaspillée dans une morosité inéluctable…

    Heureusement Internet est là… les vidéos, bien que pourries, d’une date du DW Tour passent sur l’écran de mon ordi me donnant un avant goût de ce à quoi je vais assister… « Ray of light » et « Music », ses deux derniers bébés électroniques résonnent dans ma chambre… oui, sa voix et elle seule, a le pouvoir magique de m’apaiser… 

    Je sens que je glisse sur une mauvaise pente… pas d’sms, son départ approche : Stéphane s’éloigne… samedi avance à grand pas, mon inquiétude avec : collision avec le beau brun inévitable… le coté obscur de la force me guette…

    Je n’ai pas envie d’aller à cette soirée, mais je sais au fond que je serai incapable d’y renoncer… alors la grande question se pose… comment le retrouver après tout ce qui s’est passé samedi dernier ? oui, comment le retrouver après ce que je lui ai chuchoté à l’oreille, après lui avoir avoué dans les moindres détails toute ma soumission à sa queue, après m’être rabaissé à assumer, à verbaliser avec des mots crus, mon rôle de salope à lui ? comment le retrouver après qu’il m’ait balancé à la figure d’aller me branler tout seul aux chiottes ? après son regard provocateur, insolent et blessant pendant qu’il embrassait sa pouff…  

    Et surtout, comment le retrouver après l’humiliation de le voir partir avec les deux nanas et son pote Thibault, après avoir remué, bouilli à l’intérieur en imaginant la nuit qu’ils allaient passer ? après avoir imaginé son plaisir sans moi ? après avoir ressenti l’extrême jalousie de penser à Thibault en train de le mater prendre son pied, tout aussi forte que celle de l’imaginer en train de mater Thibault prendre le sien… une jalousie, celle de savoir les deux garçons nus tous proches dans le même lit, qui aurait même tendance à la faire passer au deuxième rang celle de le savoir en train de baiser les deux pouffes… je crois que c’est bien cela qui m’a fait le plus mal… le fait d’imaginer les deux coéquipiers nus dans la même pièce, leurs corps en sueur, pris dans une excitation qui pourrait leur donner des idées pour la suite… les imaginer dans le même lit après que les deux nanas soient parties… pour peu qu’Elodie ait raison au sujet des sentiments que Thibault éprouverait pour Jérém… et pour peu que Jérém boive un verre de trop, queutard comme il l’est dans ces moments là… 

    Arrête donc Nico, tu te fais du mal… 

    Maintenant que je réalise que je vais le voir samedi, tout remonte en moi, et la colère avant tout, beaucoup, beaucoup de colère… alors, quelle attitude adopter ? L’ignorer, en me disant tout simplement que cette soirée n’est qu’un mauvais moment à passer, que de toute façon nos vies vont nous éloigner et qu’à l’avenir il n’y aura plus de raisons de nous croiser ? Oui, l’ignorer, sage stratégie, stratégie de défense… mais que faire en revanche, si je suis la cible d’une attaque délibérée… si je reçois un de ses regards charmeurs en pleine figure ? Et s’il vient me causer ?  

    J’appréhende vraiment la soirée de samedi… j’ai une boule au ventre et, bien que mort de fatigue, je décide d’aller marcher pour me détendre… je sors de chez moi et là surprise…

    Le vent d’autan s’est à nouveau levé… il souffle de façon insistante et il semble augmenter d’intensité de minute en minute… et ça, ce n’est pas fait pour me rassurer… je n’aime pas ça… je suis inquiet… quand le vent d’autan souffle aussi fort, j’ai toujours l’impression qu’il veut m’annoncer quelque chose, mais je n’arrive pas à savoir quoi évidemment… oui, quelque chose va se passer, mais quoi, ça je ne le saurai que plus tard, bien plus tard dans la semaine… 

    Je marche sans but, jonglant dans la foret épaisse de mes pensées, me laissant probablement entraîner par mon (in)conscient… je suis trop fatigué, je n’arrive plus à maîtriser mes émotions, encore moins que d’habitude, ce qui n’est pas peu dire… je remonte ma ville de rue en rue, je remonte ma vie, de souvenir en souvenir… sans trop savoir comment et pourquoi, je me retrouve dans le quartier de la Halle aux Grains… Stéphane me manque, et lorsque j’aperçois l’entrée de son immeuble, me voilà à nouveau à deux doigts d’aller sonner à sa porte… j’ai besoin de le voir… il n’y a que lui qui saurait m’offrir le câlin qu’il me faut à cet instant pour me remonter le moral, pour me retrouver… j’approche du seuil, je ralentis mon pas, je jette un œil rapide dans le hall inanimé et sombre… je m’arrête… j’hésite en regardant son nom sur l’une des sonnette… ce n’est que l’espace d’un instant, je repars, je n’ai pas le courage de le faire… je me dis que de toute façon à cette heure là il doit être au taf…

    Alors je trace… je parcours les petite rues, et je me retrouve à St Aubin… ça sent le danger, j’approche du feu… rue de la Colombette n’est qu’à quelques pas, l’entrée d’un autre immeuble bien connu est si proche… je suis tiraillé entre le désir de tourner au large et celui de m’engouffrer dans le Chemin de Traverse… c’est con, c’est irrationnel mais j’ai envie de passer devant cette porte que j’ai tant de fois franchie la respiration coupée, le cœur hors de la poitrine… le danger me guette… et si je le croise ?

    Le temps que je me pose toutes ces question auxquelles je ne sais pas répondre, mes jambes m’ont amené toutes seules devant sa tanière… je panique, je leur ordonne de m’amener vite loin de là, elles m’obéissent… hélas, ma tête n’en fait qu’à sa tête, mon cou se relève, mes yeux accrochent cette terrasse bien connue… le cœur bondit de ma poitrine… je crois déceler un mouvement là haut…

    J’ai l’impression d’avoir vu un bout de cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc disparaître à l’instant précis que mon regard s’y pose… on est en milieu d’après midi, peut être bien qu’il est en pause… en train de fumer une clope en terrasse… est-ce qu’il m’a vu avant que je n’ose lever la tête ? est-ce qu’il m’a vu et qu’il s’est retiré pour ne pas croiser mon regard ? est-ce qu’il a ressenti ma présence dans la rue comme un harcèlement ? ou alors, est-ce que j’ai rêvé tout simplement ?

    Instinctivement, pour en avoir le cœur net, je relève mon regard de façon bien imprudente… je prends un risque de plus de croiser son regard… hélas, je dois admettre avec soulagement plutôt contrarié que la terrasse est vide, tristement vide…

    Le cœur tapant de grands coups dans ma poitrine, je trace vite vers le Canal et je m’éloigne à grands pas du Chemin de Traverse… ce n’est qu’en arrivant à la Gare King’s Matabiau que j’arrive à me calmer un peu… je rentre dans le hall et je me perds dans la foule des voyageurs… envie de prendre un train et de partir loin, très loin de là… mais le Poudlard Express a du retard, alors je m’approche d’un comptoir et je prends un café… je me pose sur un banc et, assis face au grand tableau des Arrivées et des Départs, regardant les gens défiler devant moi et buvant mon café, j’essaie de ranger un peu le bazar qui encombre ma tête… Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane…

    Stéphane, Jérém… Stéphane, l’adorable garçon qui m’a fait découvrir ce qu’est faire l’amour… Jérém, le mâle serial insatiable qui m’a fait découvrir le plaisir de la baise avec un étalon dominant… Stéphane qui m’a montré que les câlins c’est trop bon, Jérém qui refuse toute tendresse… Stéphane qui m’a appris que j’aime jouir comme un mec… Jérém qui m’a appris à quel point c’est bon de faire jouir un mec… Stéphane que je trouve touchant, Jérém que j’ai dans la peau… Stéphane charmant et adorable, Jérém le petit con ultrasexy à gifler… Stéphane calme et posé, gentil, rassurant… Jérém impulsif et sanguin, imprévisible, parfois agressif… Stéphane attentionné, doux, Jérém dur, parfois brutal… Stéphane avec qui l’amour est partage… Jérém pour qui il n’y a que son plaisir qui compte… Stéphane sexy et adorable, fougueux et généreux… Jérém sexy et odieux, macho et égoïste… Stéphane avec qui tout parait possible, Jérém avec qui il n’y a que la baise de possible… Stéphane qui me respecte, Jérém qui fait de moi ce qu’il veut… Stéphane au regard doux et bienveillant, Jérém au regard viril et fuyant… quartier de la Halle, rue de la Colombette, Jérém la baise, Stéphane l’amour… la balade au Jardin des plantes… la baise à la piscine… le risotto… la baise au terrain de rugby… le dvd d’Aladdin… la baise dans les chiottes du lycée… me sentir bien dans des bras chauds, me sentir bien défoncé par sa queue bien chaude… la serviette verte de Stéphane… le t-shirt blanc de Jérém… les images s’enchaînent et s’accélèrent dans ma tête, ça va si vite que j’ai du mal à gérer… je me pers, j’en ai la tête qui tourne… Stéphane, Jérém, Jérém, Stéphane et…

    Paf !

    Ça bogue méchamment… tout se bloque dans ma tête, les images s’arrêtent, plus de signal, l’écran devient noir… ça dure un petit instant, le temps que je rouvre les yeux et que je termine mon café… je m’abandonne sur le dossier du banc, je respire profondément… et là, une petite voix se fraye un chemin dans ma tête… elle chuchote quelque chose… c’est un tout petit message, mais il est si dur à admettre… je secoue la tête, je tente de la faire taire… je me lève, je marche, j’arrive à la distancer un peu, mais elle me suit de près… je fais semblant de ne pas l’entendre, mais elle ne me lâche pas…

    J’ai la tête comme un tambour, je suis terrassé par la fatigue… je décide de rentrer en faisant un grand détour pour éviter toutes les tentations et les rencontres inopportunes… marcher me fait du bien, j’arrive à détourner l’attention de mon esprit, de ses troubles… mon odyssée vers la maison m’amènera à l’église de St Sernin, me fera transiter sur le pont St Pierre, mon préféré avec son élégante architecture métallique ; me fera continuer vers St Cyprien, avant de rejoindre enfin le Fer à Cheval et ma maison…

     

    Commencée avec deux branlettes au réveil, après une nuit guère meilleure que la précédente, la journée de vendredi promet d’être longue… je vis dans l’attente, je ne suis que dans l’attente… l’attente d’un sms de Stéphane qui ne vient pas, l’attente de la soirée du bac, de revoir Jérém, l’attente de savoir ce que je vais ressentir à ce moment là, l’attente de voir comment ce petit con va se comporter vis-à-vis de moi… oui, je suis dans l’attente que le temps s’écoule… 

    Mais l’attente la plus insoutenable, celle qui a le pouvoir d’éclipser et d’apaiser toutes les autres, est celle du concert de Madonna… oui, plus que quelques jours avant le Drowned World Tour… Drowned World, le monde englouti… quand je dis que Madonna est la bande son de ma vie… plus que quelques semaines et mon monde actuel sera englouti sous une vague de départs, de changements, de bouleversements tous azimuts… mon enfance est en train de partir loin, très loin, ma vie de jeune adulte se profile, approche à toute allure, c’est une page vide ou tout est à écrire, à remplir, avec d’autres temps, d’autres rythmes, d’autres gens, d’autres amours…  excitant et terrifiant à la fois… 

    Mais en attendant, encore je n’arrive par à croire que je vais la voir en chair et en os… l’attente est insoutenable… j’ai besoin d’écouter la voix de Madonna mais j’ai besoin aussi de sortir de ma chambre… il fait beau et j’ai envie, j’ai besoin de me dépenser pour vider ma tête et détourner mon attention de ma montre et laisser le temps passer… 

    C’est ce jour là que j’achète mon premier baladeur mp3… si c’est pas le bonheur ça… de la musique qu’on amène partout, en grande quantité, en bonne qualité audio, sans avoir à se trimballer ni cd ni cassettes, dans un boîtier tout petit à qui il ne faut pas changer les piles toutes les cinq minutes… non, le mp3 ce n’est pas le bonheur… c’est carrément le pied ! 

    Armé de mon baladeur soigneusement casé dans un brassard livré avec la bête, je vais courir le long du Canal du Midi en compagnie de Madonna… je confirme, sa voix a le pouvoir de m’apaiser, sa musique le pouvoir de me faire rêver… je cours et je marche de longues heures, je me dépense beaucoup et ça m’aide à m’aérer l’esprit… 

    L’exercice physique est propice à changer les idées… l’effort nous accapare, notre corps réagit en vidant notre cerveau de son énergie pour la réserver aux membres sollicités, jambes, cuisses, bras… lorsque l’on fait du sport, la tête se vide de tout ce qui l’accablait auparavant… c’est comme un redémarrage de Windows, une fois qu’on a éteint et fait repartir la machine, tout a l’air de tourner mieux pendant un moment… comme les logiciels, les idées qui étaient en conflit entre elles le sont toujours, mais puisqu’elles reviennent dans un ordre différent que celui qui les avait conduites à boguer précédemment, elles s’agencent autrement… c’est pour cela que après l’effort, on a l’impression de voir les choses autrement… 

    Au bout de deux heures de course et de marche je me pose sur un banc à l’ombre et j’essaie de ressembler mes idées… 

    Dans l’ordre… c’est vendredi après midi, et depuis mercredi soir, je n’ai eu de message de Stéphane que celui annonçant l’annulation de notre rendez vous… toujours pareil, je ne lui en veux pas, je comprends que c’est une période chargée pour lui… pourtant il me manque, et je sens que dans ce silence je dérive… par moments des images remontent à ma mémoire et j’ai l’impression de pouvoir rattraper mon état d’esprit de dimanche soir, je le sens tout proche, à ma portée…  

    J’essaie de retrouver sa tendresse, ses sourires, l’effet de ses caresses, mes émotions, la sensation d’avoir été plongé dans une autre vie, dans une autre dimension… un autre espace-temps dans lequel j’ai découvert que je peux être désiré, que l’on peut avoir envie de me faire plaisir, que l’on peut me trouver attirant et désirable… que mon besoin de tendresse et de câlins peut être partagé… j’essaie de retrouver le sentiment puissant, incroyablement puissant, bouleversant… le sentiment que l’on pourrait m’aimer pour ce que je suis… ses mots avant de nous quitter résonnent dans ma tête comme la plus belle des mélodies. 

    « …tu as le droit d’être heureux… tu as le droit d’aimer et tu as le droit de te sentir aimé… Nico, tu es un très beau cadeau... prends confiance en toi… tu vas y arriver, tu vas la trouver ta place… pour peu que tu croies en toi… il faut que tu croies que tu as le droit d'être heureux, avant que les autres puissent te reconnaître ce droit… sois toi même, ne laisse pas les autres choisir pour toi… tu es un bon gars, même trop bon, trop gentil, fais attention que cela ne te joue pas de tours… fais attention aux gens que tu vas rencontrer, surtout dans le milieu, car il n’y a pas que des gentils… la mauvaise herbe nique souvent ce qui est trop bien cultivé… 

    … fais gaffe à ne pas te perdre, même pas par amour… veille toujours à rester toi-même… à tout donner mais à ne pas tout accepter par amour… et si un jour tu as besoin de quelqu’un pour parler, je serais toujours là pour toi… toujours… ».

    C’est bien touchant, et ça fait vraiment chaud au cœur, ça donne carrément des ailes que d’entendre cela à ce moment de la vie… à 18 ans, cet age durant laquelle on se cherche et on cherche l’amour…  oui, ça fait un bien fou qu’un mec de 26 ans nous prenne par la main, nous guide, nous apprenne, nous rassure, nous dise de ne pas avoir peur, nous montre qu’on a droit au bonheur, le droit d’être soi même, qu’il nous tende une main en cas de besoin… c’est beau, plus que beau, comme une révélation…

    Pourtant, au fur et à mesure que le samedi approche, je repense de plus en plus souvent à Jérém… je sais qu’il ne faudrait pas, que je suis en train de trahir les belles promesses de dimanche soir, les promesses d’une nouvelle vie, la promesse de retrouver ma liberté et de reprendre ma vie en main, et par-dessous tout c’est moi-même que je suis en train de trahir…  

    J’ai beau me dire qu’il ne faudrait pas que je cède à mon envie de lui céder… qu’il faut que je garde en moi le feu sacré que j’ai ressenti quand j’étais dans les bras de Stéphane… qu’il ne faut pas que je laisse échapper trop loin de moi cet état de grâce, cette détermination à reprendre le contrôle de ma vie, de le reprendre des mains de… Jérém… pourtant je sens que ma volonté vacille… «  l’effet Stéphane » diminue d’intensité au même rythme que « l’effet Jérém » me rattrape… j’ai tellement besoin d’une piqûre de rappel, mais comme elle ne vient pas dans le délai, ma couverture vaccinale est insuffisante… ses effets vont s’éteindre… 

    Oui, par moments des images remontent à ma mémoire et j’ai l’impression de pouvoir rattraper mon état d’esprit de dimanche soir… j’essaie de m’en saisir, j’ai besoin de le garder avec moi, de l’enfermer dans mon cœur… mais à chaque fois il s’envole, disparaît, s’éloigne… 

    Soudainement un souvenir lointain se présente à moi venant de nulle part… c’est un jour de mon enfance, un jour d’été, je devais avoir pas plus de 6 ou 7 ans, j’étais à la campagne chez mes grands parents… il venait de faire de l’orage et voilà que, la pluie ayant cessé, un énorme, magnifique arc-en-ciel bien lumineux venait d’apparaître… ce jour là, j’étais bien décidé à pédaler sur mon vélo, autant qu’il le faudrait, pour atteindre l’un de ses pieds… oui, je voulais aller là ou l’arc-en-ciel se pose, prend naissance… je ne sais pas pourquoi je m’étais donné cet objectif, ce que je voulais y découvrir, mais trouver le pied de l’arc-en-ciel me semblait chose intéressante… je me souviens d’avoir pédalé longtemps, encore, encore et encore, jusqu’à l’épuisement, d’avoir avancé sur les sentiers en terre battue qui sillonnaient la campagne jusqu’à une heure où mes grands parents avaient commencé à s’inquiéter pour moi… j’avançais droit vers mon but, inlassablement, mais plus je pédalais, plus j’avais l’impression que ma cible s’éloignait… 

    C’est un peu le sentiment que j’ai vis-à-vis de mon état d’esprit de dimanche dernier… j’essaie d’aller à sa rencontre, mais plus je m’y efforce, plus j’ai l’impression que je serre ma main pour attraper un fantôme… 

    Si seulement Stéphane ne devait pas partir si tôt, si loin… si seulement Jérém devait partir, lui, à sa place, dans quelques jours, au lieu de rester dans mes pattes tout l’été… avec Stéphane à mon coté, je crois que mon bonheur serait vraiment à portée de main… mais Stéphane s’éloigne et Jérém est toujours là, si loin de mon cœur, mais si physiquement près…  

    Et force est de constater, de réaliser et d’admettre que, assis sur ce banc à l’ombre des platanes qui bordent le Canal, je me fais violence pour ne pas céder à l’envie de me rendre rue de Metz… c’est une envie qui me chatouille depuis le début de la semaine mais que j’avais réussi à anesthésier avec l’adrénaline qui alimentait mon état de grâce dans l’attente du rendez vous avec Stéphane ; une envie qui m’a cueilli de façon vive et brûlante après l’annulation de notre rendez vous ;  une envie qui a explosé en moi la veille, lorsque j’étais assis dans le Hall de la Gare Matabiau, après cette image furtive cheveux-bruns-peau-mate-t-shirt-blanc que j’ai cru capter rue de la Colombette… une envie qui, dès lors, est en train de me ronger de l’intérieur comme un vers de bois ; une envie qui m’a carrément harcelé depuis le réveil ce matin…  

    Une envie à laquelle je tente de résister du mieux que je peux… hélas, cette envie est en moi, et quoique je fasse, elle ne me quittera pas… de plus je suis fatigué, depuis le week-end dernier je ne fais que creuser mon déficit de sommeil, alors il m’est tout particulièrement difficile de m’opposer à mes démons intérieurs et aux tentations… surtout lorsque la tentation est si forte… et là, la tentation est forte, et plus que ça… il est si près de moi, je peux le rejoindre à pied en quelques minutes… alors, très difficile de résister, surtout lorsqu’on est si peu occupé que je le suis à cette période…  

    Je suis au bout de mes forces, mais j’emploie toute mon énergie pour soutenir ma volonté de ne pas y aller… en allant courir de longues heures durant sur le Canal, Madonna à fond dans mes oreilles, pour essayer de l’oublier… hélas, il y a bien un moment où mon énergie ne suffit plus, ma volonté ne suffit plus à faire taire mon désir de plus en plus débordant au fur et à mesure que je le malmène… non, ma volonté ne suffit plus quand, dans mon esprit, Jérém… redevient soudainement MON Jérém, mon (con) de beau brun… 

    Il faut que je voie mon beau brun… il me manque… putain… il me manque… oui, il faut que je le voie… cette idée s’affiche en moi comme une évidence… il faut que je le voie avant la soirée, il me faut savoir si je suis toujours assez fort et déterminé à me passer de lui… ok, je l’admets, je suis une boule de contradictions, cherchez l’erreur… 

    Il faut que je le voie… mais comment m’y prendre ? Y aller franco… m’installer tout seul en terrasse, lui commander une bière… même pas la peine d’y penser, je n’oserais jamais… y aller avec ma cousine, en admettant qu’elle veuille bien m’accompagner, ce qui est par ailleurs loin d’être gagné… ça non plus je n’oserais pas… juste passer dans la rue, l’air d’être là par hasard… j’aurais surtout l’air d’un con… je pense qu’à ce stade de notre «  relation », rien ne va plus, surtout en l’absence de ce charmant Thibault dont la simple proximité a le pouvoir de rassurer et d’apaiser le beau brun…  

    Pourtant j’ai très envie de le voir, même de loin… très très envie, même… ce dont je n’ai en revanche aucune envie, c’est de me taper un numéro de pauvre type qui piste le mec par qui il s’est fait jeter et dont il est toujours fou amoureux… 

    Comment faire alors ? Avec la ruse. En faisant appel à la Sainte protectrice des jeunes pd qui ont du mal à assumer leurs envies profondes, j’ai nommé la Sainte Semvat, la compagnie de bus toulousaine. Elle se présente à moi ce jour là, sous les traits du Magicobus, alias, le Bus 46. Pourquoi n’y ai-je pas pensé plus tôt ? J’ai vraiment un train de retard… ou plutôt un bus… 

    Le temps de rentrer chez moi et de prendre une douche, j’embarque à quelques arrêts de la rue de Metz aux alentours de quatre heures… l’adrénaline monte à l’approche du déjà célèbre abribus juste à coté de la brasserie… le temps d’arrêt est court, il n’y a pas grand monde qui descend et une seule personne qui monte… pas de Jérém en vue… j’avance de quelques arrêts, je descends et je reprends la même ligne en sens inverse… on approche à nouveau du fameux abribus…  

    Et cette fois ci, la chance semble plus favorable à mes projets… le voilà le beau brun, je le vois de dos et de loin, il est en train de rentrer avec un plateau, son torse est habillé d’un tissu blanc, je crois que c’est une chemise… miaaaam… je veux voir ça de plus près, de beaucoup plus près… j’ai même envie de le lui arracher… hélas, le bus est de l’autre coté de la chaussée, ainsi j’ai du mal à saisir les détails, et ma curiosité en est bien attisée… 

    Un autre aller en bus, et ce coup-ci c’est le bon… voilà qu’un ensemble d’éléments, un ralentissement dû à un feu rouge, combiné avec le fait que dans ce sens de la ligne le bus se trouve à nouveau du bon coté de la chaussée, me permet de détailler le beau serveur… oui, mon beau serveur, avec ses cheveux bruns sculptés dans un brushing de mec, avec cette chemise blanche, une chemise bien ajustée, les manches retroussées à hauteur des biceps, un bout du tatouage qui dépasse, le reste je le devine… deux boutons ouverts sur son cou à la peau mate et entouré par cette chaînette de mec si sexy qui se balade en dessous de sa pomme d’Adam… j’arrive même à distinguer son grain de beauté si mignon au creux de son cou… 

    Et je ne peux pas non plus me taire au sujet de son pantalon noir plutôt class et plutôt moulant son joli cul, et d’avoir enfin une mention spéciale pour ses baskets bleues… ça fait bizarre et ça fait mal de le voir si loin de moi, ce mec avec qui j’ai couché tant de fois et avec qui je ne coucherai plus, ce mec qui samedi dernier, au lieu de me dire adieu avec une dernière bonne baise, s’est payé un plan à quatre avec son meilleur pote… ça fait mal et ça me donne envie de hurler de voir deux filles assises à une table de la terrasse en train de le brancher… Jérém qui rigole avec elles, qui les allume par sa simple présence, les nanas qui minaudent… c’est révoltant… je t’en conjure… lâche l’affaire, Jérém, tu ne vois donc pas que ce ne sont que des pétasses ?!?!?! pardon les filles, je sais que je ne suis pas objectif… mais quand vous branchez mon Jérém, vous êtes toutes des pétasses !!! 

    Le bus repart, me laissant frustré et contrarié par cette image de Jérém en train de flirter avec deux pou… avec deux clientes, admettons… ce n’est pas raisonnable de reprendre le bus une fois de plus pour le mater encore… non, ce n’est pas raisonnable mais est-ce pour autant une bonne raison d’y renoncer ?… je ne crois pas… un quart d’heure plus tard me revoilà dans le Magicobus 46, après avoir fait un joli détour pour le prendre dans le sens qui me permet d’approcher le beau brun au plus près… 

    Et rebelote… même scénario que tout à l’heure… ralentissement de la circulation, le bus qui s’arrête pas loin de la terrasse… les secondes passent et le bus ne bouge pas… ça klaxonne dans la rue, mais rien n’avance… mon beau brun est toujours en terrasse avec sa chemise blanche aux manches retroussées qui lui va comme un gant et qui lui donne un coté « mec bosseur, fonceur » et « mec tout court »… il est juste à se damner… 

    Il est plus près de la chaussée que tout à l’heure, alors je peux capter encore plus de détails…  et cette chemise blanche, mon dieu cette chemise blanche… naaaan, mais ça c’est juste… pas possible… ça devrait être interdit d’être aussi sexy… cette nouvelle tenue me fait bouillir… mon regard plonge dans ce col outrageusement ouvert jusqu’à laisser non seulement deviner mais carrément montrer l’entrée de la douce vallée qui sépare ses pectoraux, cette vallée sur laquelle sa chaînette de mec se pose comme un chemin sinueux, un chemin du bonheur en quelque sorte…  

    Oui, il est là, en train de papoter, car à cette heure là il n’y a pas grand monde en terrasse… et cette fois ci ce sont deux mecs qui semblent le brancher… mon beau brun sourit, charmeur… mais foutez lui la paix, vous aussi, les deux pouffiaux !!! Vous n’êtes pas quand même en train de le brancher sur un plan à trois… ah, non, hein, non, pas ça, bas le pattes, bas les pattes !… là je ne bous plus… je suis proche de l’explosion… je sens monter en moi une envie irrépréhensible de descendre du bus et aller me manifester, pour crier « hein, je suis là, j’existe »… non, je ne me sens pas capable d’aller lui faire une scène, mais je me sens tout de même capable de m’installer à une table et de l’appeler pour ma commande pour casser ce petit jeu à trois…  

    Certes, je n’ai aucun droit de le faire, au fond je ne sais même pas s’ils sont vraiment en train de le draguer, et surtout qui suis-je pour lui pour lui faire une quelconque morale ? Mais l’envie est pourtant bel et bien là… l’abribus n’est pas loin… ça me démange vraiment de descendre et de me pointer à sa terrasse pour voir sa réaction… je suis en train de chercher l’appoint de courage qui me manque pour me lancer dans mon projet, lorsque les événements tranchent pour moi une fois encore, coupant court à mon hésitation… le bus avance… c’est parti… mais pas pour longtemps… il n’avance que de quelques mètres et il s’arrête pile à hauteur de la terrasse… je ne suis qu’à quelques mètres du beau brun et à un moment j’ai l’impression de le voir tourner légèrement la tête vers le bus… et le pire c’est que j’ai même l’impression que son regard accuse comme un soubresaut… je me demande s’il a pu me capter… non, pas ça, pitié… instinctivement, je recule mon torse et je me cale derrière le montant du bus… le cœur qui tape à mille à l’heure, ça va de soi… 

    Un instant plus tard le bus repart, avance de quelque mètres pour s’arrêter à l’abribus… et ce n’est que lorsqu’il repart, après un arrêt qui me parait interminable, que je me sens enfin soulagé… évidemment, le courage pour descendre à l’abribus et d’aller faire un esclandre silencieux en terrasse s’est évaporé au contact de la puissance à peine effleurée du regard et de la présence du beau brun… mon cœur fait des bonds tellement puissants dans ma poitrine que j’ai l’impression de le voir apparaître par intermittence et en relief, comme dans un dessin animé… 

    Le bus avance et mon cœur n’en finit plus de taper dans ma poitrine… je suis assis mais je sens que rien que le fait d’avoir eu si peur de me faire gauler, j’ai du mal à respirer, j’en ai les jambes en coton… ce sont des jambes en coton qui, je le sens, ne vont plus le quitter jusqu’au lendemain soir… ça y est, je viens tout juste de l’apercevoir, sans me retrouver en sa présence… je n’ai pas entendu sa voix, ni senti son parfum, ni vraiment croisé son regard ou son sourire… et je suis déjà dans cet état là…  

    J’appréhende la soirée du lendemain… mes derniers messages à Stéphane sont restés sans réponse… je me sens seul, abandonné à moi-même… j’ai besoin de lui, j’ai besoin « qu’on me tienne la main » pour ne pas faire de bêtises… plus le temps passe, plus la soirée du bac approche, et moins je me sens assuré sur mes jambes… où est-elle passée ma force, ma résolution, ma détermination, le vent de mutinerie, mon esprit « rebel heart » de dimanche soir ? Est-il tout simplement disparu pour laisser place à cette angoisse, à cette faiblesse retrouvée ? 

    De plus, voilà que, depuis la veille, le vent d’autan souffle sans discontinuer… et maintenant je sais que lorsqu’il se lève et qu’il souffle si puissant, c’est qu’il veut m’annoncer des choses… des choses puissantes, qu’elles soient bonnes ou mauvaises… 

    Et toujours les mêmes questions qui tournent en rond dans ma tête… ce sont pile les mêmes interrogations que celles du lundi lorsque j’avais imaginé le croiser à l’affichage des résultats du bac… oui, les mêmes questions, mais en plus puissantes… car lundi j’aurais pu l’ignorer, repartir juste après avoir vu mes résultats… mais là je suis censé passer une longue soirée au même endroit que lui… des endroits confinés, la Bodega d’abord, l’Esmé ensuite… Est-ce qu’il va être là, d’abord ? Quelle attitude va-t-il avoir vis-à-vis de moi ? Va-t-il venir me parler comme si tout était normal ? Il en est bien capable, ce n’est pas le culot qui l’étouffe… non, ce mec n’a pas froid aux yeux… son approche va-t-elle être une sorte de nouvelle humiliation pour mon amour propre, son attitude de samedi dernier va-t-elle rester une fois de plus impunie devant mon incapacité à faire entendre ma voix ? Vais-je ressentir une fois de plus la frustration de me laisser faire, de me sentir piétiné sans savoir réagir ? Est-ce qu’il va essayer de me rattraper pour que je lui vide les couilles une fois de plus ? Ou alors, tout simplement, va-t-il me monter rien d’autre que de l’indifférence ? 

    Oui, tout un tas de questions légitimes, des questions qui clignotent de plus en plus fort dans mon esprit monopolisant toute mon attention et tout mon être et se résumant à une seule et unique interrogation, celle de départ : comment retrouver Jérém après samedi dernier ?  

    Une idée lumineuse se manifeste soudainement à la surface de mon esprit pour tenter de répondre à cette épineuse question : peut-être en retrouvant Thibault d’abord… 

    Je repense aux mots d’Elodie… 

    « … si tu veux avoir une chance de garder un peu plus longtemps ton con de brun, t’as tout intérêt à saisir la main que Thibault est en train de te tendre… »… 

    J’ai un grief contre lui, mais je sais que ma cousine a raison. Certes, je lui en veux pour avoir pris part à ce putain de plan à quatre, mais au fond, elle a raison, ce n’est rien que la normalité pour des garçons de leur âge… des garçons qui ne font que profiter à juste titre de la vie, de leur jeunesse… certes, il a vu Jérém à poil en train de baiser, mais après tout,ce n’est pas comme s’il avait baisé avec lui… j’aurais tellement voulu pouvoir assister à cette scène… deux bogoss en train de jouir côte à côte…  

    Laisse tomber, Nico, tu te fais du mal… 

    Oui, je pense qu’il serait bon de rencontrer Thibault avant de revoir Jérém… peut-être qu’en discutant avec lui, ça m’apaiserait… peut être qu’il saurait trouver les bons mots pour soulager l’angoisse qui me secoue de fond en comble…  

    Je descends du bus à l’arrêt du Pont Neuf et je me mets à marcher en direction de la gare Matabiau… je réalise que j’ai la moitié de la ville à traverser, et que je pourrais prendre un autre bus… mais je préfère marcher… il est encore tôt, je vais arriver juste à temps pour le croiser à la sortie de son taf… j’ai besoin d’un peu d’activité physique pour trouver le courage d’approcher le beau mécano… non pas que j’appréhende particulièrement de provoquer une rencontre avec Thibault, même si c’est en forçant un peu le destin… le mec est mille fois plus accessible que Jérém, et je sais que je n’ai pas à craindre de lui de réactions hostiles, je sais qu’il va bien m’accueillir et que je vais avoir droit à un beau sourire… ce que je me demande en revanche, c’est s’il ne va pas éprouver un certain malaise vis-à-vis de moi après ce qui s’est passé le week-end dernier… surtout si, comme le dit Elodie et comme je le conçois aussi, il a deviné pour moi et Jérém, et qu’il s’imagine mes sentiments pour lui… et ma jalousie qui va avec… 

    Mais par-dessus tout  je me demande aussi si je vais pouvoir tenir bon, ne pas me montrer blessé… lui c’est pareil… comment vais-je le retrouver après ce qui s’est passé samedi dernier ? Vais-je avoir la force de faire comme si de rien n’était, comme si le fait qu’il se soit envoyé en l’air avec son pote et deux nanas ne me dérange pas alors que ça me met hors de moi ? Vais-je lui en parler pour avoir des explications ? D’ailleurs, de quel droit lui demanderais-je des explications, encore moins à lui qu’à Jérém, alors que cette partie de jambes en l’air n’à, à bien y réfléchir, rien de reprochable? Vais-je lui parler ouvertement de ce que je ressens pour Jérém… comme le suggère Elodie ? Vais-je trouver en lui un allié dans ma quête du « Graal », le cœur de Jérém ? Vais-je au contraire me faire rire au nez ? Vais-je trouve un allié ou un adversaire, au cas où il aurait lui aussi des vues sur le beau brun, ce que ma cousine semble suggérer, ce qui parait somme toute assez réaliste, car je sais par expérience que dans ce genre d’intuition, elle se trompe très rarement…

    Le Pont Neuf, le lycée que je ne fréquenterai plus, les Jacobins, la Place du Capitole, la rue du Taur que j’adore pour son allure d’endroit plongé dans un autre temps ; j’arrive à St Sernin, mon église toulousaine préférée avec St Etienne. Je traverse le boulevard de Strasbourg, la place Jeanne d’Arc et je file droit dans la rue pour m’approcher du garage où bosse Thibault… 

    Je connais à peu près ses horaires depuis que je l’ai croisé une semaine et demi plus tôt rue d’Alsace-Lorraine à la fin de la journée boutiques avec Elodie… pourvu qu’il ne termine pas plus tôt le vendredi… c’est 17 heures et pour me donner le plus de chances de ne pas le rater, je rode dans les rues adjacentes…

    Il y aurait plein de façons de le rencontrer plutôt que de le pister, genre passer un coup de fil, envoyer un sms… oui, j’ai son 06… mais je ne veux pas donner l’impression de provoquer cette rencontre, dans ma tête j’ai envie à que ça ressemble plutôt à un coup du hasard, même si à un hasard un peu forcé, car ma présence à cette heure là dans ce quartier là, ressemble quand même à une intention de le croiser… mais qu’importe, le coup de fil ou le sms ne figurent pas dans la liste des options possibles… car il faut bien l’admette, quelque part mon amour propre s’oppose à mon projet d’aller à son encontre, mon amour propre demeure blessé…

    J’avance dans la rue sur le trottoir opposé jusqu’à que la devanture du garage ne me soit à portée de vue… je suis encore à plusieurs centaines de mètres et je vois que les portes sont toujours ouvertes, que ça bouge à l’intérieur… je ne veux pas stationner dans la rue, genre « mec qui attend », alors je fais des petites incursions dans les rues voisines… les minutes passent et toujours pas de Thibault à l’horizon… 17h30… toujours pas de Thibault… mais il bosse jusqu’à quelle heure un vendredi soir ? Là je commence à ne plus avoir d’idée pour m’occuper… je dois avoir l’air d’un rôdeur… les gens vont commencer à me remarquer et à me trouver chélou…

    17h47… voilà… c’est à cette heure précise que le beau mécano déboule dans la rue en saluant quelqu’un à l’intérieur avec un geste du bras et laissant traîner un beau sourire sur son visage… si c’est pas beau d’essayer d’imaginer la vie et les petits bonheurs quotidiens d’un beau garçon… la petite blague ou la situation, le mot, la complicité qui ont provoqué ce beau sourire…

    Le jeune mécano avance sur le trottoir d’en face… je suis assez loin, genre une petite cinquantaine de mètres, loin mais assez près pour remarquer qu’avec un simple marcel gris sur un short noir, Thibault est tout simplement sexy…

    J’avance, il avance, je le regarde, il regarde droit devant lui ; j’avance encore, lui aussi, pas après pas on approche l’un de l’autre, je le regarde, je ne peux détourner le regard de cette putain de silhouette de bogoss qui avance vers moi d’un pas décidé, cette silhouette pas très grande, mais carrée, le torse bien droit, le regard portant loin… au fur et à mesure qu’il approche, je me rends compte que son marcel gris n’est plus tout jeune, que son short noir est plutôt quelconque, que ses baskets sont des vieilles godasses… pourtant… malgré tout, il faut admettre le mec est incroyablement sexy… plus que ça… avec son vieux marcel et sa démarche de mec droit autant dans le physique que dans l’esprit, il est… bah, oui, même avec un vieux marcel… il est classe…

    C’est vraiment le pouvoir de ce genre de mecs : ils sont classes et ils sont sexy quoiqu’ils portent, et il le sont, je dirais, presque d’autant plus lorsqu’ils portent des fringues « de base » ou même des fringues « nases, ayant vécu », ce qui fait comme ressortir leur cote sexy inné, inconscient, un coté « mec nature » qui trace droit sur son chemin, droit dans ses baskets et qui ne se la raconte pas… 

    Et puis, il faut bien l’admettre, il est bien plus agréable de voir un beau mec dans un marcel quelconque qu’un mec quelconque dans un très beau marcel… 

    Il avance toujours, direction l’apart des Minimes… je le regarde toujours et lui il regarde droit devant lui… on dirait un petit militaire, la démarche assurée… je commence à me dire qu’il regarde tellement droit devant lui qu’il ne va pas me repérer… et puis, à force de le regarder, je finis par rentrer en collision avec une dame que je n’ai pas vue arriver sur mon trottoir mais en sens inverse… je faillis la faire tomber, je la rattrape, je m’excuse, la dame s’excuse à son tour, elle repart, pressée…

    Ce petit accident sans conséquences a pour résultat de générer un peu de mouvement de mon coté, ce qui est suffisant pour que le beau mécano tourne la tête et qu’il me capte… et là, lorsqu’il me voit, il s’arrête net, il me lance son beau sourire, un sourire tellement gentil et charmant que je faillis tomber, sans que personne ne me bouscule… oui, tomber dans les pommes…

    On n’est plus qu’à une dizaine de mètres l’un de l’autre… et lorsque le bogoss entame la manœuvre de traverser la rue pour venir me rejoindre, je m’efforce de lui sourire à mon tour… je le regarde avancer droit vers moi et je suis saisi par cette beauté profondément masculine qui dégage de sa personne…  

    et mon dieu que ses épaules dénudées sont un appel sensuel incroyable… sa chute d’épaule est magnifique… son cou puissant est d’un beauté spectaculaire, puissant et harmonieux à la fois… et que dire de ce putain de torse en V que je devine et dont d’autres t-shirts dans d’autres occasions, des t-shirts autrement ajustés, m’ont déjà dit tellement mais tellement mais tellement de bien… 

    Oui, dans ses fringues que j’imagine passées vite fait le matin après la douche, il est classe et… vraiment, vraiment beau mec… un petit mec de 19 ans, mais tellement mec… un mec qui respire la droiture et la gentillesse… et c’est bien ça à mes yeux, ce qu’on est en droit d’appeler… la « classe »… 

    « Salut toi… » me lance-t-il sur un ton presque enjoué, lorsqu’il met le pied sur le trottoir.

    « Salut » je lui réponds pendant qu’il me serre la main avec sa prise puissante de mec… et lorsqu’il balance un nouveau sourire qui donne tout leur éclat à ses yeux vert marron magnifiques, je suis conquis et je sais déjà que j’ai perdu tous mes moyens… je sais que je ne saurais plus lui reprocher quoi que ce soit… je suis vraiment trop sensible au charme masculin… et en l’occurrence, c’est bien ainsi, car je n’ai pas à lui reprocher quoi que ce soit… j’ai surtout besoin de l’apprivoiser et d’en faire un pote, et un allié… 

     

    C’est la puissance de son corps en contact avec le mien. Ses abdos et ses pecs contre mon dos. Ses jambes contre les miennes. Son bassin contre mon séant. C’est la chaleur de sa peau contre mes reins, mes épaules. C’est la prise ferme de ses mains sur mes fesses. Sa façon de les écarter pour offrir à sa queue l’accès à mon intimité, à ce petit abricot qui lui fait tant envie. J’adore savoir qu’il a envie de s’amuser avec mon corps. De s’amuser en moi. Savoir que dans sa tête il n’y a que son plaisir qui compte. Et que mon cul est le bon endroit pour jouir. 

    C’est la raideur de sa queue qui s’enfonce en moi, ferme, lente, précise, déterminée. Un mouvement assuré. Sans appel. Une évidence. Ce sont ses couilles qui effleurent ma raie. Les parois de mon ti trou écartées par l’assaut inattendu de ce manche délicieux qui glisse dans un passage encore lubrifié par une jouissance précédente. 

    Sa queue s’enfonce en moi. Et j’émerge rapidement du sommeil. Après un instant de surprise, je réalise ce qui est en train de se passer… et la surprise laisse rapidement place à l’excitation… je vais me faire prendre, encore… je vais me faire sauter une fois de plus par ce beau mâle qui a pourtant déjà joui un bon nombre de fois cette nuit, et qui a pourtant encore de la ressource dans ses bijoux de mec… sacré mec, réaffirmant par sa puissance sexuelle sa position de mâle dominant après qu’elle ait été ouvertement défiée… 

    C’est en dégustant cette palette, ce feu d’artifice de sensations érotiques que je suis arraché de mon sommeil pour être propulsé dans une nouvelle dimension de sensualité. 

    Quelques bruits remontent de la rue, un début de lumière filtre du store baissé, mais la chambre demeure dans la pénombre… je suis sur le ventre … position propice… et tentante apparemment… il est allongé sur mon dos… 

    Je dormais, il s’est réveillé, il a eu envie de baiser… il a vu mes dunes, ignoré mes infortunes… il ne s’est pas posé de questions… le mâle me pénètre suivant le seul chemin de son envie… il avait envie et il s’est enfoncé en moi, son trou à bite… moi, docile, à sa complète disposition, réveillé par le poids de son corps, par le passage de sa queue… je suis sa chose… son vide couilles…  

    M’en plaindre ? Non, je ne m’en plaindrai pas, je ne m’en plaindrai plus… j’adore baiser avec lui… vraiment j’adore… plus que tout au monde… être sa chose, satisfaire ses envies de mâle… pourvu qu’il ait longtemps envie de me faire ce cadeau… jouir en moi, sur moi, devant moi… me laisser goûter à son jus brûlant, à cette liqueur d’homme qui m’offre la plus étourdissante des ivresses… me laisser le voir nu… me laisser toucher à sa queue, à sa peau, à son corps musclé… me laisser le sentir sur moi, écrasé par son poids et par sa puissance virile… me faire cette faveur ultime, me laisser le faire jouir… me laisser le voir jouir… 

    J’ai décidé que je prendrai du bon temps avec lui tant que je pourrai… que je ne lui demanderai rien de plus, que je le laisserai me baiser autant qu’il voudra… de toute façon il n’y a que cela qui nous lie… la baise… alors je n’ai que cette solution pour le côtoyer, de tenter de l’apprivoiser… accepter de n’être que son jouet sexuel… lui rendre mon cul et ma bouche indispensables… lui offrir des orgasmes de dingue, des orgasmes qu’il ne trouvera nulle part ailleurs… 

    En attendant… en attendant qu’il se rende compte un jour que je suis autre chose qu’une somme de trous… en attendant qu’il soit touché par mes sentiments et non pas agacé… je ne sais pas si cela arrivera… tout ce que je sais c’est que je ne veux pas renoncer à une seule baise avec lui, à une seule goutte de son sperme, tant qu’il voudra de moi… 

    Sa queue calée en moi, immobile, envahissante, débordante, écartant les parois de mon intimité. 

    Et là, dans cette pénétration perpétrée dans mon sommeil, le mâle franchit une nouvelle étape dans son emprise sur moi… c’est comme s’il considérait qu’il a tout droit sur moi, qu’il peut me prendre, m’utiliser pour son plaisir, quand il le veut, comme il le veut… et c’est le cas, ça l’a toujours été, et ça le sera toujours, inutile de résister… non, je ne me sens pas humilié par son attitude… j’adore me sentir soumis à lui, j’adore voir, sentir la vibration de son attitude de mâle dominant… 

    Je jouis de me sentir pris dans le noir, en silence, pendant la nuit… je jouis de l’idée de m’être réveillé en le sentant sur moi, en moi, au fond de moi…  

    Ses coups de reins commencent, sa queue glisse en moi… il va me baiser… je sais qu'il est épuisé et qu’il va lui falloir du temps, beaucoup de temps, des coups de reins bien puissants pour jouir une nouvelle fois… je sais que je vais prendre cher, que mon ti trou va sentir passer sa fougue masculine… mais je jouis déjà de cette longue domination qui s’annonce… je jouis du souvenir que cette dernière sauterie va laisser entre mes fesses… je sais que lorsque j’abuse du passage de sa queue dans mon fondement, je vais m’en souvenir pour des jours entiers, des jours où j’aurais souvent l’impression qu’il soit encore en moi… alors je veux abuser… je veux sentir sa domination et son plaisir de mec m’accompagner le plus longtemps possible… j’ai envie de me faire défoncer… 

    Je ne vais pas pouvoir le regarder pendant qu’il prend son pied, alors je vais en profiter pour me concentrer sur sa queue qui coulisse en moi, sur sa respiration, sur son attitude de mâle dans la recherche de son plaisir exclusif… je vais me concentrer sur les parfums, les odeurs qui dégagent de sa peau… je vais me focaliser sur le glissement de son manche en moi, sur la prise puissante de ses mains sur mes épaules donnant plus d’entrain à ses coups de reins… 

    Je vais me concentrer sur les petites variations dans le rythme de sa saillie, je vais savourer et jouir de sa domination… je vais jouir de sa queue qui me martèle en profondeur, de ses couilles qui, tour à tour, percutent et caressent mes fesses… je vais jouir de sentir son plaisir monter, d’attendre sa jouissance… je vais guetter le changement de souffle et de cadence de ses va et viens qui annoncent son orgasme… je vais guetter son râle qui marque la délivrance de cette puissance sexuelle, de cette énergie fécondante qui va sortir de ses couilles et remplir mon ti cul…  

    Je jouis sous ses coups de bassin de plus en plus amples, rapides, je jouis de cette rage masculine d’atteindre l’orgasme, de se répandre en moi… pendant qu’il me défonce, ma queue frotte sur sa couette… j’en jouis tellement que je finis par lâcher mon jus sur ses draps sans que ni lui ni moi nous ne fassions quoi que ce soit pour… 

    Je jouis un instant avant d’entendre les petits grognements, et le changement d’allure de ses coups de bassin qui annoncent l’explosion de son plaisir… 

    J’ai joui, mais je n’ai pas fini de jouir… je jouis  encore de le sentir s’extirper de moi dès son plaisir accompli, mon trou béant, humide, brûlant, déjà en manque de cette puissance masculine à l’instant même où elle se retire… j’ai envie de toi, mec, j’ai toujours et encore envie de toi… 

    Une queue capable de faire jouir deux mecs à la fois… si ce n’est pas un sacré mâle, ça… 

     

    Joyeuse année 2016 à vous tous. 


    votre commentaire
  • Dimanche matin, 8 juillet 2001, 2h39.

     

    Un beau mec n'ayant jamais connu auparavant le plaisir de la sodomie. Un beau brun découvrant qu'il aime ce plaisir inconnu et toujours écarté, refoulé auparavant… voilà que je trouve cela outrageusement excitant…
    Non, jamais je n'aurais cru voir le beau brun prendre son pied de cette façon, en se faisant mettre bien profondément, tout en gémissant, en suppliant, en quémandant ce nouveau plaisir qui secoue chacune de ses fibres… en réclamant avec insistance, presque en criant, qu’on le défonce plus fort, encore plus fort, sans retenue… le voir gémir sous les coups de reins d’un mec qui est à ce instant précis… plus « mec » que lui… le voir complètement soumis au plaisir, à la puissance de la queue qui le fait jouir du cul…  

    Oui, je trouve cela extrêmement excitant de voir le beau brun renoncer à son statut de mâle, jouir de voir sa virilité écrasée de cette façon absolue, céder avec bonheur à l’assaut d’une virilité plus puissante que la sienne…

    Ce qui ne m’empêche pas de me demander comment le beau brun va assumer cela après coup, lorsque l’excitation sera retombée, lorsque son « maître » d’un soir se sera vidé les couilles et lorsqu’il verra dans son regard le triomphe de sa virilité sur la sienne…

    J’ai mal dans ma chair de voir une fierté masculine si impitoyablement malmenée… et de deviner les dégâts que cela va engendrer après coup… hélas, comme il est suggéré dans une fable célèbre, « Le beau brun et le brun beau », il n'est point de loi que celle du plus viril... car la raison du plus couillu est toujours la meilleure…
    En attendant, je regarde le beau brun en train de prendre son pied sans ménagement… pendant que son « maître » d’un soir se défoule entre ses cuisses, sans ménagement… ce dernier est en nage, il va bientôt jouir…

    « Vas y, comme ça, vas-y, défonce-moi, vas-y, mec… » j’entends le beau brun crier, fou de plaisir « … putain que c’est bon… jamais on m’a fait un truc pareil, jamais ! ». 

    Ce qui finit par motiver son « maître » à se lancer dans une série de coups de reins bien puissants et profonds, avec pour conséquence de l’amener à jouir rapidement et très fort, le visage déformé par la puissante secousse de l’orgasme, exprimant son plaisir dans un râle profond… tout en cherchant mon regard pour s’y abandonner l’espace d’un instant de jouissance… 

    Lorsque son excitation retombe, son regard retombe aussi… c’est là que je capte les yeux du beau brun, des yeux dans lesquels je lis la vibration toujours puissante d’une excitation extrême… j’ai carrément l’impression que son physique de petit coq sexy tremble encore, secoué par le plaisir de fou qui l’a carrément retourné…

    Précédemment dans 50 nuances de ces inqualifiables goujats de Jérém et de Thibault : après le bac, après Gruissan, après les interludes fort distrayants de la Piscine Nakache et du vestiaire du terrain de rugby, le mois de juin 2001 touchait à sa fin ; une journée shopping avec ma cousine rue d’Alsace-Lorraine s’était terminé avec la rencontre du charmant Thibault m’annonçant de façon désinvolte que son pote bossait désormais dans une brasserie rue de Metz ; un peu plus tard ce jour là, à une terrasse bondé de monde, j’avais retrouvé un beau mécano ainsi qu’un beau brun en mode serveur, le torse moulé dans un t-shirt noir à me donner le vertige… un Jérém souriant, l’air d’apprécier ma présence sur les lieux… Thibault m’avait parlé d’une soirée au KL…

    Le samedi suivant, Elodie et moi on avait eu rendez vous avec Amélie… Amélie Poulain… un peu plus tard dans la soirée, au KL, la meute avait débarqué avec charmes et fracas… j’avais d’abord retrouvé Thibault m’annonçant un nouvel emploi pour Jérém à la rentrée, un emploi qui pourrait l’amener très loin de moi, et de lui… ma tristesse trop évidente s’était mélangée avec la sienne, plus discrète mais pas pour autant moins forte, mon chagrin avait été pansé par la tendresse touchante et émue du beau mécano…

    Encore plus tard dans la soirée, le nouveau parfum de Jérém, combiné en mélange explosif avec son regard pénétrant et avec mon envie excessive de lui, m’avaient poussé à chuchoter au creux de son oreille des cochonneries dont j’aurais honte à posteriori… croyant lui faire plaisir, et lui donner envie de terminer la soirée avec moi, je n’avais eu pour résultat que celui de me faire jeter comme une merde…

    Et, cerise sur le gâteau, j’avais assisté à une scène complètement surréaliste, avec un Jérém en mode chasseur qui lève deux nanas d’un claquement de doigts pour un plan à quatre avec… Thibault…

    Colère, jalousie, trahison voilà la palette complète des sensations que j’avais ressenti à ce moment là…

    Quelques minutes plus tard, un magnifique reubeu avait suscité en moi un désir urgent et inéluctable… j’avais eu envie de lui comme une évidence… j’étais assommé tellement ce mec me faisait de l’effet, tellement sa simple présence était un appel au sexe… hélas, son regard dur, dans lequel je n’avais su lire que de l’hostilité, ainsi qu’un geste ambigu de la main m’avaient sacrement foutu les pétoches… j’étais alors parti en courant, laissant définitivement planer le doute sur ses intentions…

    Le retour précipité avec ma cousine s’était terminé avec une conversation instructive et apaisante…

    « Mon cousin, t’aurais pas par hasard un 06 en attente de rendez-vous ? Je sais pas… genre un mec à qui t’as posé un lapin en début de semaine et avec qui tu aurais envie de passer un bon moment pour te consoler ? ». 

    Dans l’après midi de ce dimanche commencé de façon si décevante, une belle rencontre dans le quartier de la Halle aux Grains avait mis ma vie sur de nouveaux rails. Oui, dans un apart très accueillant j’avais trouvé plaisir, tendresse et réconfort auprès d’un charmant Stéphane…

     

    Le lundi matin au lendemain de ce dimanche après midi magique chez Gabin et son maître, je me réveille comme je me suis endormi, c'est-à-dire… sur un petit nuage… j’émerge petit à petit, comme d’un rêve, et les souvenirs viennent à moi en douceur, comme des caresses légères… oui, c’est ainsi, comme des caresses inattendues mais oh combien plaisantes, que je vois faire surface, en vrac et en nombre, des images et des sensations de la veille… 

    … le câlin sur le canapé en arrivant chez lui en début d’après-midi, un câlin doux et inattendu qui m’a touché jusqu’aux larmes… son adorable délicatesse dans le fait de me réconforter en me serrant à lui sans demander d’explications… la balade avec Gabin au Jardin des Plantes, la plaisante sensation de marcher ensemble, côte à côte, tout naturellement, sans se soucier d’être pris pour des pd… découvrir que l’on peut partager autre chose avec un garçon que son lit et sa queue… comme une balade, une simple, banalissime balade du dimanche après midi, une balade pourtant si spéciale, si chargée de symboles et de significations pour moi, un moment si extraordinairement normal…  

    … le retour à l’apart… le sourire de Stéphane, les baisers… défaire les boutons de sa chemisette… sa bouche sur la mienne, sur mon torse, sur mon sexe… ma première fellation reçue, la découverte de ce plaisir nouveau, la sensation magique de comprendre ce plaisir que je n’ai jusqu’à là réservé qu’à Celui-dont-on-ne-doit-plus… l’excitante sensation de comprendre, de vivre son propre plaisir… 

    … le beau Stéphane, le doux Stéphane, ses caresses, son sourire, sa tendresse, les câlins… la première fois que je suis venu dans la bouche d’un garçon… mon enchantement face à toutes ces découvertes de jouissance masculine que ce charmant garçon a su m’amener avec une douceur incroyable…

    … son DIM orange et blanc… les câlins, ses caresses, son sourire, sa tendresse… la douce impatience de découvrir sa queue… le désir d’y aller par petites touches… sa queue dans ma bouche… sa tendresse, son sourire, les câlins, ses caresses… ce truc de dingue avec sa main autour de ma queue et le bout humide de son pouce dans le creux de mon gland… son envie de moi exprimée par des mots simples, gentiment, me laissant le choix d’accepter ou de refuser… Stéphane qui enfile sa capote, mon aide maladroite… Stéphane en moi… ses caresses, les câlins, son sourire, sa tendresse… 

    … Stéphane qui prend son pied en moi, avec moi… les câlins, sa tendresse, son sourire, ses caresses… Stéphane qui jouit… Stéphane allongé sur moi secoué par le hoquet et qui en rigole… Stéphane qui me fait jouir encore avec sa main… les câlins, ses caresses, son sourire, sa tendresse… la douche, son corps contre le mien sous l’eau, encore des câlins, sa main qui serre nos queues, le plaisir de jouir ensemble sous l’eau et de s’abandonner dans les bras l’un de l’autre juste après… abandonner mon visage dans le creux de son épaule, l’eau qui emporte mes larmes, le sentiment d’être compris, accepté, aimé pour ce que je suis… la douceur de la serviette verte, les peaux qui se frôlent, l’odeur du gel douche, de nos peaux humides… le goût de ses lèvres, la douceur de sa peau, la douceur de son regard… la chaleur de son étreinte… sa collec’ de dvd Disney, Aladdin, le risotto… le jambon porté disparu… la douceur du regard de Gabin… Drucker, le 20 heures, le film du dimanche soir qui défile sans importance… le moment de se quitter, ses mots adorables… et…  

    … Paf ! 

    Oui, paf… c’est un tourbillon d’images qui me donne le tournis… à un moment j’ai vraiment la tête qui tourne… j’en ai des frissons… je déconnecte, j’ouvre les yeux et je me concentre sur ma respiration… j’ai l’impression qu’un rouleau compresseur est passé sur moi… un bon rouleau, certes, mais qui me laisse tout mâché, tout étourdi… ça fait tellement de choses en une seule fois… j’ai carrément l’impression d’avoir été plongé dans une autre vie, dans une autre dimension…  

    Je referme les yeux, je respire profondément… je retrouve mes esprits ou du moins je les cherche… ce que j’ai vécu la veille est à un point beau et fort que je n’arrive toujours pas à croire que ça m’est réellement arrivé… oui, j’ai toujours du mal à croire qu’un mec aussi charmant que Stéphane puisse s’intéresser à un couillon comme moi… d’autant plus que je ne le mérite pas… quoi qu’il en dise, quoi qu’il en pense, non, je ne le mérite pas… je lui ai menti sur pas mal de choses, notamment sur les raisons de l’annulation de notre premier rendez vous…  

    Non, je n’ai pas été réglo avec lui, ce mec ne sait rien de moi… il ne sait pas comment, avant de le rencontrer, et même après, et même juste après avoir annulé notre rendez vous, je me suis mis à genoux, au sens propre comme au sens figuré, devant un mec pour qui je ne suis qu’un trou à bite… non, Stéphane ne sait pas comment je me suis rabaissé sexuellement vis-à-vis de ce Celui-dont-on-ne-doit-plus… à quel point je l’ai eu trop profondément dans la peau, comment j’ai tout accepté de lui, l’humiliation, la dégradation, comment j’ai cédé à ses envies de mec, à toutes ses envies de mâle dominant, et que j’ai sacrement aimé ça, que je m’en suis contenté et que j’ai même joui de cela dans le feu de l’action… non, Stéphane ne sait pas que j’ai accepté d’être la parfaite salope d’un bel apollon sauf me plaindre juste après du fait que cet apollon ne veuille rien de plus de moi que de se vider les burnes… 

    Je me dis qu’un mec qui ment, qui se laisse rabaisser à ce point, ne mérite pas le bonheur de se retrouver dans les bras d’un garçon aussi adorable que Stéphane… je ne me sens pas digne de son attention, je sais qu’il se trompe sur moi, qu’il me surestime… non, je ne suis pas le type bien qu’il semble voir en moi… il a eu beau me dire et me répéter que j’ai le droit d’être heureux et de recevoir de l’amour, ce n’est pas pour autant que la leçon est rentrée…  

    Je sais que s’il me connaissait vraiment, s’il savait ce que je suis, ce qu’est ma nature profonde, son regard sur moi changerait du tout au tout… j’ai l’impression que notre rapport est basé sur un mensonge et que si jamais le destin nous offrait la possibilité de nous côtoyer un peu plus, il comprendrait qui je suis vraiment, et il me laisserait tomber… je perdrais son estime, son affection, pour lui laisser, en tant qu’unique souvenir de moi, le goût amer de la déception… 

    J’ai l’impression d’être « creux », que je n’ai rien à offrir à un mec à part mes talents au lit… non, je n’ai rien à proposer à un mec, surtout pas à un mec comme lui, un mec aussi gentil… je cherche beaucoup de choses chez un mec, mais je ne connais rien à rien, alors que j’ai même du mal à trouver des sujets de conversation ? Alors, c’est dur de l’admettre mais il faut être lucide, quelque part c’est un bien que le destin nous sépare, qu’on se quitte sur une bonne impression, bien qu’elle soit fausse en ce qui le concerne… 

    Voilà la grande question qui sera longtemps sous-jacente aux malheurs de ma vie… comment se faire accepter, alors que l’on ne s’accepte pas soi même ? 

    Et encore : comment se faire aimer alors qu’on ne s’aime pas soi même ? 

    Et surtout : comment aimer vraiment alors qu’on ne s’aime pas soi-même ? 

    J’ai envie de pleurer tellement je me sens nul à ce moment là… je n’ai pas envie de me lever… je n’ai pas envie d’aller voir les résultats du bac, je n’ai surtout pas envie de croiser  Celui-dont-on-ne-doit-plus… je me sens plonger dans la tristesse et je ne sais vraiment pas ce qui pourrait me remonter le moral… je ne vais pas tarder à le savoir.  

    Ce ne sera pas toujours le cas par la suite, mais ce jour là je me dis que le mec qui a inventé les sms est un bienfaiteur de l’humanité… 

    Mon portable vient de couiner. Un sms vient d’arriver. 

    « J’ai vraiment aimé… tout… » 

    Oooohhh il est adorable ce Stéphane… voilà un petit message qui a le pouvoir de me secouer illico de ma torpeur et de repousser mes idées noires comme un coup de vent frais fait disparaître les nuages à l’horizon. 

    Car à travers ce tout petit message je sens toute son affection sur moi… c’est comme une caresse, une caresse électronique, certes, mais une caresse quand même… dans ce petit message je ressens toute sa bienveillance, sa douceur… et je me dis qu’au fond c’est peut-être moi qui me trompe sur moi-même… le fait qu’un mec si bien et si avisé s’intéresse à moi me laisse alors espérer qu’il pourrait avoir vu en moi quelque chose que je ne sais pas déceler… 

    Le fait est que lorsque je suis avec Stéphane, quand je sens la douceur de son regard sur moi, même à travers ce petit message, je me sens quelqu’un de meilleur… oui, j’ai l’impression que Stéphane arrive à sortir le meilleur de moi… alors que Celui-dont-on-ne-doit-plus… arrive à sortir le pire, les instincts les plus bas… 

    Peut-être que simplement que ma vie sentimentale et sexuelle n’a pas commencé avec la bonne personne… peut-être que si d’entrée j’avais rencontré Stéphane, mes envies et mes désirs seraient autres aujourd’hui… à partir du moment où Celui-dont-on-ne-doit-plus… s’est enfoncé en moi, je me suis à mon tour enfoncé dans une sexualité débridée… à partir du jour où j’ai compris que je n’aurais pas autre chose que son corps et sa queue, ce qui n’est déjà pas peu de choses lorsqu’on y pense… lorsque j’ai réalisé que je ne serai pas autre chose que son vide couilles, j’ai essayé de me contenter de ce rôle et d’aller de plus en plus loin dans le plaisir que j’étais capable de lui donner… 

    Certes, il n’en demeure pas moins que les fantasmes que j’ai vécus avec lui, ne sont pas sortis de nulle part, ils sont bien là, tapis au fond de moi… des fantasmes que son indicible sexytude et son attitude dominatrice n’ont fait que faire ressortir… oui, ces fantasmes sont bien là, dans mon esprit de jeune gay de 18 ans… et si bien, est ce que cela fait pour autant de moi quelqu’un de mauvais, de pervers ? 

    Le plaisir, encore plus de plaisir, toujours plus de plaisir… oui, à bien regarder, le plaisir est bien la seule façon que j’ai trouvée pour communiquer avec lui, la seule brèche pour atteindre le plus profond de son être, la seule manière de le marquer, pour qu’il se souvienne de moi…  

    Me faire sauter à la demande, lui rendre ma bouche et mon cul indispensables, le faire jouir encore encore et encore est la seule façon de partager quelque chose avec lui… la seule façon de le retenir… 

    Si j’étais tombé sur « un » Stéphane dès le départ, peut-être que l’amour et la tendresse auraient organisé autrement ma vie toute entière, et celle sexuelle par conséquent… oui, peut-être qu’avec un garçon avec qui on peut partager autre chose que du sexe, eh bien ce dernier prend une importance moins capitale… 

    Je ressens à nouveau un sentiment d’impuissance et de profonde injustice face à l’inéluctabilité de son départ… j’en suis sur, s’il restait, je pourrais vraiment tourner La Page… s’il restait, je pourrais en écrire une autre, très belle, avec lui… c’est un terrible gâchis… comment la vie est mal foutue…

    Je veux le revoir coûte que coûte avant son départ… j’ai envie de lui, de son corps, de sa bouche, de son torse, de ses bras, de son sexe… j’ai envie de le câliner, j’ai envie de me faire câliner, j’ai envie de faire l’amour avec lui 

    Je finis par me branler en pensant à l’amour avec Stéphane… je jouis dans mes draps avec bonheur, et je retombe dans les bras de Morphée, une petite mort si apaisante… un instant de répit supplémentaire, de bien être, de douceur avant de replonger dans le réel… pouvoir immense de la branlette que celui de nous faire voir la vie en rose juste après… 

    Lorsque j’émerge à nouveau, je relis le sms de Stéphane et je retrouve dans ce petit texte toute la complicité de la veille, l’impression d’être plus fort grâce à l'amour et à la tendresse que ce garçon m’a données, grâce au fait d'être enfin en accord avec moi-même… je retrouve en moi cette puissante certitude que, quoi qu’il arrive à l’avenir, je me sens déterminé à ne plus tout accepter par amour, fort de pouvoir désormais penser qu’il peut y avoir sur terre (et sur Toulouse) d'autres mecs que Celui-dont-on-ne-doit-plus… qui sauraient m’aimer d'une façon qui me correspond vraiment… je me sens encore et toujours très déterminé…

    Seul petit bémol… qu’en sera-t-il de cette détermination lorsque Stéphane sera parti à mille bornes de Toulouse ? Ou, beaucoup plus près, qu’en sera-t-il de ma résolution lorsque je reverrai Celui-dont-on-ne-doit-plus… peut être tout à l’heure devant les grilles du lycée ? 

    Je regarde le radio-réveil… 10 heures… je réalise que dans tout juste une heure les résultats du bac vont être affichés au lycée… vais-je le revoir ? vais-je le revoir ? vais-je le revoir ? vais-je le revoir ?... cette question clignote dans mon esprit de façon obsessionnelle…  

    Mais de toute façon il faut y aller… je balance les couvertures, je me lève presque d’un bond, je passe à la douche, je m’habille, je descends pour le petit déjeuner. 

    Maman : « Il va bien Dimitri ? » 

    Moi, à dix mille bornes de là, carrément dans une autre dimension spatio-temporelle « Qui donc ? ». 

    Maman : « Dimitri… ». 

    « Ah oui, Dimitri… » je réalise à la fin. 

    Oui, Dimitri… il va bien, oui… enfin, je n’en sais rien… je l’ai croisé l’autre soir, mais j’étais tellement occupé à mater ce petit con de Celui-dont-on-ne-doit-plus… en train de draguer des nanas que je n’ai écouté un traître mot de ce qu’il racontait. Au fait, ça fait des années que je n’ai pas eu de ses nouvelles… Maman. Il faut que je te dise un truc. Tu sais… tu te souviens la fois que j’ai découché il y a quelques semaines ? Oui, la fois que je t’ai envoyé un sms au petit matin en te disant que je restais dormir cher Dimitri…  

    Non, maman, je n’étais pas chez lui… j’étais chez un autre gars que tu ne connais pas, un camarade de classe… oui, j’ai passé la nuit chez lui, mais je n’ai pas fait que dormir… non, car Celui-dont-on-ne-doit-plus… est un mec qui me rend dingue… son corps, son attitude de mec, son parfum, son tatouage, son grain de beauté dans le cou, ses oreilles, son torse en V, sa chaînette de mec, ses t-shirts moulants, le mystère de sa personne, son regard ténébreux et excessivement brun… et bien d’autres choses dont je ne te parlerai pas… tout me rend dingue chez lui… ce soir là j’ai couché avec ce mec, et ce n’était pas la première fois, ni d’ailleurs la dernière… ça fait des mois que je couche avec lui… oui, maman, tu as bien compris, j’aime les garçons… les filles me laissent de marbre mais alors, les garçons… ce sont eux qui me font vibrer au plus profond, ce sont eux qui me font tourner la tête dans la rue, tant au sens propre comme au sens figuré… pour moi les garçons c’est une évidence, depuis toujours… et surtout CE garçon là…  

    Oui, j’aime les mecs… je ne l’ai pas choisi, mais c’est venu à moi comme mon goût pour les pâtes au pesto, la glace fraise/chocolat, le jus d’orange… alors que pour moi les filles.. c’est plutôt les choux de Bruxelles… tu te souviens quand, lorsque j’étais petit, tu n’a jamais réussi à me les faire avaler ? 

    je n’y suis pour rien, tu n’y es pour rien… tout m’attire vers les beaux garçons, c’est une force à laquelle je ne peux pas m’opposer, c’est comme l’attirance d’un aimant… c’est une force qui me fait tourner la tête et remuer partout à l’intérieur, qui fait un feu d’artifice dans ma tête lorsque je croise un gars qui me plait… avant d’être ma maman tu es une femme et si tu le voyais, ce beau Celui-dont-on-ne-doit-plus…, tu comprendrais, j’en suis sur… il est beau et sexy au delà de ce que les mots peuvent exprimer…  

    Oui, je suis sur que tu comprendrais pourquoi je l’ai à ce point dans la peau … et depuis que je suis à lui, je lui ai laissé faire de moi tout ce qu’il voulait… il lui suffisait de claquer des doigts pour me faire rappliquer illico… d’ailleurs, il n’avait même pas besoin de claquer des doigts, c’est moi qui lui tournoyait autour comme une abeille autour de la plus belle fleur du pré… je ne sais pas si un jour dans ta vie t’as ressenti ça pour un gars, maman, cette envie déchirante de voir un garçon, d’être avec lui, de le toucher, de… tu comprends ce que je veux dire…  

    Moi, si, maman, j’ai ressenti tout cela… j’avais envie de tout avec ce mec… mais pas que de son corps… hélas c’est tout ce qu’il était disposé à me donner…  

    Hélas, même les plus belles choses ont leur revers de la médaille… je suis un jeune garçon qui ne connaît rien à la vie, mais s’il y a une chose que j’ai cru comprendre c’est qu’il ne suffit pas d’être beau pour rendre heureux quelqu’un, il faut aussi être un bon gars… et celui là il ne l’est pas, du moins il ne l’est pas avec moi, il ne l’est pas pour moi… il parait qu’il a eu une enfance difficile, il parait que dans sa vie tout n’est pas si charmant comme on pourrait s’imaginer lorsqu’on voit ce genre d’apollon à qui tout semble réussir, mais peu importe… ce gars ne sait pas m’aimer et il ne le saura jamais… j’ai envie de câlins, de beaucoup de câlins, toujours des câlins… oui, maman, des câlins… sans vouloir te vexer, je pense que tu as arrêté trop tôt de m’en faire…  

    Oui, je cherche des câlins… car le fait d’être homo ça ne se résume pas à rechercher du sexe à tout va… il y a ça aussi, bien sur, et c’est super important… mais pas que… je cherche un gars avec qui partager plus qu’un lit, un gars avec qui parler, avec qui faire un petit bout de chemin ensemble…  

    Heureusement, le destin a parfois des ressources bien supérieures aux nôtres… un jour je me suis endormi sur une pelouse et je me suis fait réveiller par un labranoir… le labranoir était accompagné par un Stéphagnon… un mec mignon prénommé Stéphane… il m’a proposé une bière chez lui, il m’a offert les câlins que je cherchais et que je commençais à désespérer de pouvoir trouver un jour… à force de me voir refuser la tendresse qui me manquait tant, j’avais même commencé à penser que je n’étais pas normal, que j’avais un grain… mais non, avec Stéphane j’ai découvert qu’on peut être bien dans les bras d’un gars… 

    Mais ça n’a pas suffi pour me faire oublier le premier gars… alors samedi soir j’ai été à sa rencontre et je lui ai dit à quel point j’avais envie de lui… il a écouté ce que j’avais à lui dire, il s’est foutu de moi et il m’a jeté comme une merde… c’est là que j’ai croisé Dimitri pour de vrai… mais c’était comme s’il était transparent, tellement mon attention était accaparée par Celui-dont-on-ne-doit-plus… en train de me faire du mal…  

    Ca a été une soirée très dure pour moi, car en l’espace d’une heure à peine, le mec que j’aime par-dessus tout m’a mis plus bas que terre, un ami m’a trahi, et j’ai eu peur de me faire cogner à cause de ce que je suis… autant te dire que cette nuit en rentrant, j’était mal, très mal, j’étais déçu comme jamais de ma vie… heureusement, Elodie était avec moi… 

    Et hier matin, après ma nuit agité, j’ai repensé à ce gars rencontré sur la pelouse à St Etienne qui m’avait laissé entrevoir tout un univers de tendresse et de bonheur lors de notre première rencontre… ou plutôt c’est lui qui a repensé à moi… j’ai été chez lui, hier après midi… 

    Et si je t’ai dit que j’allais chez Dimitri, c’est pour ne pas que tu saches que je suis pd, c’est pour ne pas te faire de la peine… tu sais, maman, ce gars m’a fait des câlins si doux que j’en ai même pleuré… est ce que un gars t’a fait cet effet un jour ? Ensuite on s’est baladés au Jardin des Fleurs avec son labranoir… lorsqu’on est rentré à l’apart de la Halle aux Grains, j’ai connu l’amour, la tendresse, je me suis senti bien dans les bras d’un mec… non, maman, hier je n’ai pas été chez Dimitri, mais chez Stéphane… et je crois que c’est la meilleure chose que j’ai faite, la meilleure chose qui me soit arrivée depuis très longtemps… 

    Le seul problème c’est qu’il va partir loin, que je ne sais pas si je vais le revoir avant son départ et que je vais être malheureux comme les pierres lorsqu’il ne sera plus là…  

    Voilà ce que j’avais envie de te dire, maman… 

    Mais ce n’est pas aujourd’hui que je vais le faire, car le temps presse et le courage manque… alors, je me contenterai de résumer l’essentiel des événements qui résument ma vie à ce moment, en omettant tout juste quelques détails insignifiants… 

    Moi : « Ah oui… il va bien… il est impatient de savoir pour son bac… ». 

    Maman : « Il ne doit pas être trop inquiet… si ? ». 

    « Nooooon… tout roule pour lui… » je m’avance « faut que j’y aille, maintenant… » je dévie. 

    « Tu rentres manger ? » 

    « Oui, maman… ». 

    Je suis dans la rue dans ce magnifique matin de début juillet, il fait beau, il ne fait pas encore chaud et je ressens en moi cette douce sensation d’être en vacances… le bac est fini, l’été est là… et qu’est ce que c’est beau Toulouse lorsque le soleil est là, lorsque les grandes vacances approchent… ses façades en briques, ses rues, ses espaces verts, tout est accueillant, agréable à vivre, les gens semblent de bonne humeur, on entend rigoler dans la rue… c’est une ambiance qui met de bonne humeur… qui donne le sourire et qui fait qu’on finit par se dire que, oui, finalement, la vie est belle…  

    Oui, quand on a 18 ans et que l’on a deux mois de vacances devant soi, le sourire est forcement là… deux mois avant la rentrée, deux mois sans réveil ou presque… deux mois… à moi !  

    Déjà, les « tic tac » du compte à rebours pour le concert de Madonna à Londres sont de plus en plus bruyants dans ma tête… j’ai vraiment hâte d’y être…  

    Ensuite, dès la mi juillet je vais intégrer un stage de formation accélérée pour le permis sur 15 jours… je veux l’avoir du premier coup, car il me faut un moyen de locomotion pour profiter ce cet été… une fois le permis en poche, j’irai choisir une petite voiture qui rentre dans un budget compatible avec la petite cagnotte que j’ai mis de coté en bossant les deux étés précédents… il faut juste que je pense à en garder un peu pour équiper ma chambre à Bordeaux…  

    Début août, Elodie va être à nouveau en vacances pendant deux semaines et on a déjà parlé de partir quelques jours, on ne sait pas encore ou, Gruissan ou ailleurs…  

    Deuxième quinzaine d’août il faudra préparer la rentrée, m’occuper du logement à Bordeaux, emménager… 

    Voilà le programme agréablement chargé de l’été de mes 18 ans… 

    Je mesure la chance d’avoir des parents qui me paient non seulement des études, mais également le permis et qui me permettent de vivre pleinement l’été plein de mes 18 ans… merci papa, merci maman… c’est très important pour moi… je ne vous décevrai pas à la fac, vous pouvez y compter… je vous décevrai peut-être un jour, mais ce ne sera pas à cause de mes études… 

    Oui, l’été est devant moi et c’est un été plein de promesses qui se profile… j’ai envie de profiter de la vie… oublier d’abord Celui-dont-on-ne-doit-plus-jamais-jamais-jamais-prononcer-le-nom… arrêter de me faire du mal… j’aimerais tellement revoir Stéphane, mais je sais que ça va être un casse-tête…  

    Alors, c’est décidé, cet été sera sensuel… merde à la fin… c’est l’été de mes 18 ans, je suis majeur et il faut que je m’éclate maintenant… la chaleur montante du soleil, la brise qui caresse ma peau éveillent mes sens… et puis… les garçons, tous ces garçons que je vois passer à coté de moi, ceux que je croise dans la rue, un regard, un brushing de mec, un biceps qui dépasse d’une manchette de t-shirt, une traînée de deo, une barbe de trois jours, une attitude virile, un démarche assurée, tous ces mecs dont la beauté et la sensualité happent mon regard, toutes ces vies de mâles que je voudrais connaître et qui me seront à jamais inconnues… voilà de quoi éveiller mes sens, plus qu’il n’en faudrait… 

    Tous ces mecs que je croise dans la rue et qui disparaissent aussitôt marquant mon esprit d’un petit sentiment, passager mais intense, de frustration, me font penser à une chanson de Brassens, dont mon esprit aurait (in)consciemment adapté certains mots… 

    Je veux dédier ce texte/A tous les hommes qu'on aime/Pendant quelques instants secrets/A ceux qu'on connaît à peine/Qu'un destin différent entraîne/Et qu'on ne retrouve jamais 
    A celui qu'on voit apparaître/Une seconde à sa fenêtre/Et qui, preste, disparaît /Mais dont la svelte silhouette/Est si gracieuse et belle/Qu'on en demeure épanoui 

    Chères images aperçues/Espérances d'un jour déçues/Vous serez dans l'oubli demain 

    Pour peu que le bonheur survienne/Il est rare qu'on se souvienne/Des épisodes du chemin 
    C’est beau de croiser des beaux passants dans la rue… et certains de ces passants, j’ai une sacrée envie de les retenir… certes, je ne sais pas comment faire… je suis trop timide et j’ai la trouille de me faire démonter la tronche… mais ça me démange sacrement de voir un beau mec à poil, de le faire jouir… j’ai envie de jouir et de faire jouir… j’ai envie de tout… le fait est que j’ai 18 ans, les hormones à fleur de peau, et faute d’avoir un véritable histoire stable avec un garçon, j’ai envie de sexe, terriblement envie de sexe…  

    De toute façon je vais partir de Toulouse, et je me dis que pendant le temps qu’il me reste à passer dans ma vie natale, je ne vais pas chercher à rencontrer LE mec…  

    Et maintenant que je sais que je peux jouir comme un mec… je ne veux plus souffrir, être la pute d’un mec comme Celui-dont-on-ne-doit-plus… j’ai envie aussi que l’on s’occupe de moi… c’est l’été… on drague… je vais me faire sucer et je vais jouir dans la bouche d’un autre mec… j’ai trop aimé ça, j’ai trop envie de recommencer… 

    C’est effarant le pouvoir de la beauté masculine de me faire oublier tous mes soucis… depuis que je marche dans la rue, c’est leur présence, un ensemble de regards croisés l’espace d’un instant, de corps et de visages dont la sublime beauté m’a pris aux tripes pendant une fraction de secondes avant de disparaître à tout jamais, voilà qui tient mon esprit comme en suspension au dessus de la réalité… au point que je ne me suis même pas aperçu que je suis arrivé devant le lycée…  

    Bah, tiens, le voilà le lycée… et voilà le troupeau impatient des bacheliers s’agglutinant autour des tableaux d’affichage qui viennent d’être garnis…  

    Ah, qu’est-ce que c’est beau l’été… c’est la réflexion que je me fais en matant tout ces jeunes mecs que mon regard sélectif détache très rapidement de la masse informe, ces jeunes mecs en t-shirt, des blancs, des gris, de toutes les couleurs, des bras, parfois même des épaules dénudées, des jambes musclées et légèrement poilues sortant des shorts, des corps bien chauds et pleins de testostérone, des corps que le soleil et la brise et l’air des vacances doivent faire frémir autant que le mien… des jeunes mecs avec plein d’envies à satisfaire, des mecs qui ont autant envie de jouir que moi…  

    Des jeunes gens avec toute leur vie devant eux, avec tout à découvrir, tout à expérimenter, pleins d’espoirs infinis car la vie ne leur a montré jusqu’à là que le meilleur, des jeunes gens qu’en l’espace de quelques mois vont avoir leur bac, le permis, la voiture, l’amour, le sexe, quitter le toit familial, partir faire des études, trouver un travail, passer de l’enfance à l’âge adulte… c’est une période où tout change autour de nous, ou tout est possible, où il y a tellement de choix à faire, des choix qui en partie vont conditionner toute notre vie… c’est la plus belle période de la vie mais c’est aussi peut-être la plus difficile… 

    Oui, qu’est-ce que c’est beau l’été… et par-dessus tout, qu’est que c’est beau que la jeunesse masculine, beau et éphémère, beau car éphémère, c’est une émotion intense capable de me pousser jusqu’aux larmes… 

    Mon regard sélectif est passé en mode scanner Nico-gay haute définition… je googolise l’espace avec le moteur de recherche de mes yeux pour retrouver SA silhouette… mais j’ai beau balayer de droite à gauche et de droite à gauche, l’image de Celui-dont-on-ne-doit-plus… ne se numérise pas sur ma rétine… zut, alors… il n’est pas là… déception aigue et soulagement immédiat… car au fond de moi je crève d’envie de le revoir ce petit con, mais le fait qu’il ne soit pas là me permet d’avancer le cœur léger vers le tableau d’affichage…  

    J’avance, je regarde mieux… une plastique magnifique se détache de la foule… merde, il est là… il est de dos… t-shirt gris magnifiquement ajusté, short bleu… baskets blanches… casquette noire portée à l’envers… chaînette de mec qui dépasse… une fois de plus, record battu dans la discipline « plus petit con tu meurs »… aaaaaahhhhhh, je commence à transpirer à grandes gouttes… le cœur bondit dans ma poitrine tellement il tape fort… je vais faire quoi ? faire semblant de ne pas l’avoir vu ? l’ignorer ?  

    J’avance encore, il tourne un peu le visage, je le regarde et… putain… mais non, ce n’est pas lui… c’est un autre mec, un autre beau brun, il était dans une autre classe et il m’avait tapé dans l’œil au même temps que Celui-dont-on-ne-doit-plus…, mais pas autant que Celui-dont-on-ne-doit-plus…  

    Nouvelle déception aigue et nouvel soulagement immédiat… j’approche désormais sereinement des tableaux d’affichage… je n’ai pas trop de doutes quant à mon bac, à vrai dire c’est plutôt le sien qui m’inquiète… à vrai dire, je ne sais pas bien pourquoi je m’en inquiète… s’il ne l’a pas c’est sa merde,  il ne peut s’en prendre qu’à lui-même, il n’a pas voulu bosser de l’année, ni même lors de nos révisions, toujours préférant écarter des cuisses plutôt que les pages des bouquins… alors c’est son problème… pas le mien… et puis on n’est rien l’un pour l’autre, je ne suis rien pour lui, il n’est rien pour moi… alors quel sens ça a de m’inquiéter pour lui ? Pourtant…

    Pourtant je ne peux m’empêcher de me demander ce que je vais ressentir si jamais il ne l’a pas… et de chercher d’abord son nom que le mien dans le tableau d’affichage… T…. T… T, voilà… Jérémie T…. oh que sa sonne bien ce prénom avec son nom de famille… celui qui est désormais pour moi Celui-dont-on-ne-doit-plus… « Admis ». Voilà le mot magique. « Admis ». Ouf, je suis soulagé. Tout va vien.

    Nicolas S. « Admis ». Je parcours tout le tableau de notre classe. C’est une unanimité d’«Admis ».

    Heureux et soulagé que tout se soit bien passé malgré la « légèreté » de nos révisions, soulagé et heureux de ne pas l’avoir croisé devant les grilles du lycée, je suis calme, je suis bien. Quand je ne le vois pas, je suis calme, je suis bien, je pense que je pourrais même l’oublier…

    Je discute un peu avec les camarades, c’est l’euphorie générale, il n’y personne de laissé pour compte, alors le mot « soirée pour fêter ça » commence à circuler de lèvres en lèvres. Les mots « Bodega » et « Esmé » commencent à résonner en écho autour de moi… ouais… c’est une bonne idée… ouais… ouais… c’est peut être la seule et unique fois ou l’on sera tous réunis… ouais… ouais… ouais…

    Ouais, mais… non… pas pour moi en tout cas… franchement je n’ai pas envie d’une nouvelle soirée bac… et surtout je n’ai pas envie de revoir Celui-dont-on-ne-doit-plus… si je veux l’oublier, j’ai besoin de ne plus le voir… dès que je croise son regard, son pouvoir sur moi est total… alors cette soirée, à vrai dire je m’en passerais bien…

    Je repars du lycée en espérant qu’ils vont m’oublier… en marchant vers la maison, j’envoie un sms à Elodie pour lui donner la bonne nouvelle.

    Maman est ravie, elle me félicite, je ne l’ai pas déçue cette fois-ci, pas encore… attends maman, ça va arriver…

    Je ressors me balader en ville, je me demande comment je vais passer ma semaine, mon week-end suivant, et les quelques jours qui me séparent de Londres… je n’ai pas fait cent mètres en direction du pont que le portable beepe… un sms vient d’arriver.

    Lui : « Alors le bac ? ». C’est Stéphane. Il est trop mignon.  

    Moi : « Tout s’est bien passé » 

    Lui : « Trop cool, félicitations mon grand… » 

    Moi, direct : « J’ai envie de te revoir… » 

    Lui : « Moi aussi, mais compliqué, ma mère est là… » 

    Moi : « Même un verre pas possible ? » 

    Lui : « Mon loulou… si je pouvais… » 

    Moi : « T’es pas marrant… lol » 

    Lui : « Lol » 

    Je décide de lâcher l’affaire pour ne pas paraître rélou. Pourtant j’ai excessivement envie de le voir. Il me manque. Je sens que j’ai besoin de sentir encore son amour pour que ma mutation intérieure prenne de l’assurance et soit durable… il m’a montré un chemin, il m’a montré que je peux le parcourir… mais j’ai besoin d’être accompagné par la main encore un peu… j’ai envie de faire l’amour avec lui, j’ai envie d’être dans ses bras… il est encore si près et pourtant déjà si loin, si inaccessible… c’est injuste… 

    Par dépit, je décide de faire ce qu’un fait d’habitude lorsqu’on ne sait pas quoi faire… aller faire un tour à la Fnac Wilson… je fais la visite détaillée de tous les niveaux et je trouve enfin le dvd que je cherchais, « Un couple presque parfait ». Un sublime navet, mais sublimé par la présence de sa majesté. Il n’y a que sa présence et les chansons American Pie et Time stood still qui sont à sauver de la cata… comme l’a dit ma cousine il y a un an, lorsqu’on a été voir le film en salle « on voit trop qu’elle joue mal »… eh, oui, ce n’est pas au cinéma que Madonna s’illustre le mieux… exception  faite pour ce petit chef d’œuvre qu’est Evita…

    Je rentre chez moi, je passe le dvd. J’adore la voir à l’écran, même si elle joue mal. Sa présence, son être tout entier… et sa voix avant tout, qui n’est pas la voix de la Callas, certes, possède pourtant le pouvoir immense de m’apaiser et de m’apporter du bonheur. C’est pour cela que, après la fin du navet, je ressens le besoin de passer Evita… et là c’est l’extase…

    Madonna est ma meilleure copine virtuelle. Chaque fois que quelque chose de marquant se produit dans ma vie, on dirait qu’elle s’arrange pour le marquer avec un  nouveau titre, un nouveau clip, un concert, un film… on l’a souvent dite « finie » et elle est toujours revenue… elle ne m’a jamais laissé tomber…

    Evita se termine et je commence à me dire que je ne sais pas ce que je vais faire de ma soirée. Franchement, je n’ai pas envie de passer la soirée du jour où j’ai eu mon bac collé devant la télé… mais quoi faire ? Stéphane, pas de nouvelles…. Elodie m’a félicité pour ma réussite, mais à ma proposition de sortir ce soir, elle m’a répondu de façon laconique « Désolé, cousine HS ». Pas de nouvelles non plus de Celui-dont-on-ne-doit-plus…, j’en ai pas cherché non plus…

    Oui, la soirée est calme et agréable, rien ne semble pouvoir la gâcher, à part un léger ennui… et c’est là que je commets l’irréparable. J’envoie un sms à Celui-dont-on-ne-doit-plus… « Félicitations pour ton bac ». Oui, l’ennui est un danger pernicieux. Lorsqu’on s’ennuie on finit par faire n’importe quoi. Et lorsqu’on fait n’importe quoi, souvent c’est anti-productif. C’est pour cela qu’il est important de s’occuper et de ne pas flirter avec cette mauvaise bête… comment trouver une quelconque cohérence entre l’envoi de cet sms avec le propos bien clair dans ma tête ce matin « j’ai envie de profiter de la vie… oublier d’abord Celui-dont-on-ne-doit-plus-jamais-jamais-jamais-prononcer-le-nom… arrêter de me faire du mal… », si ce n’est tenter de mettre cela sur le dos de l’ennui ?

    A l’instant ou je confirme l’envoi, je regrette de l’avoir fait… je tente de le bloquer, mais c’est trop tard… c’est parti… c’est con… avant je redoutais son silence, maintenant je redoute sa réponse… je redoute le fait qu’il me réponde froidement, je redoute encore plus le fait qu’il cherche à m’attirer chez lui pour se vider les couilles une fois de plus, mais je redoute par-dessus tout son silence… et c’est évidemment ce tarif là qu’il me faudra payer ce soir là… non, finalement, les sms ce n’est pas une invention si géniale que ça…

    Un peu plus tard dans la soirée, les sms commencent à pleuvoir pour organiser la fameuse soirée du bac… Bodega… Esmé… ils me saoulent… on en a déjà faite une avant, il n’y a pas besoin d’en refaire une autre… ils ont qu’à se l’organiser cette putain de soirée, ma décision est prise, je ne vais pas y aller. Je trouverai une excuse…

    Une nouvelle dose de Madonna à pleine puissance dans mon casque m’aidera à faire passer cette soirée, une bonne branlette m’aidera à trouver le sommeil et à le garder pour rattraper le retard de la veille.

     

    Le mardi matin je me lève en pleine forme et je me rends à l’auto-école pour prendre rendez-vous pour les cours de conduite… ça a été une bonne idée de passer le code pendant les vacances de février… je ne me vois pas réviser le code dans cette chaleur et dans cette ambiance de vacances qui plane sur la vielle… 

    Je suis reçu par une nana qui m’explique en détail comment tout cela va se passer.  

    « Votre moniteur pour les cours de conduite… ce sera… ce sera… ah oui… ce sera Martin… ». 

    « D’accord » je commente. 

    « Martin ! Martin ! » j’entends la nana appeler en tournant le visage ver la porte de la salle à côté. 

    Et là, un instant plus tard, un mec apparaît dans l’embrasure de la porte… 

    Aaaahhh… c’est lui mon moniteur… dès l’instant où je vois Martin, je sais déjà que réussir mon examen pratique ne sera pas une mince affaire… comment réussir un stage intensif, faute de pouvoir me concentrer ? Car Martin est le genre de garçon qui attire le regard, comme un rideau blanc la lumière du soleil… 

    « Bonjour ! » il me lance en me serrant la main.  

    « Bonjour… » j’arrive tout juste à lui répondre. 

    Martin est un mec genre la trentaine, très class. Un beau jean, une ceinture noire épaisse, une chemise blanche toute simple mais très bien coupée… une belle montre bien lourde de mec… de beaux cheveux châtains en bataille… les yeux marron foncés, le regard très intense, charmeur… un beau spécimen… sa poignée de main est ferme mais à la fois douce, comme une caresse… son parfum est captieux, captivant… 

    C’est qui ce bogoss ? Ça va être une torture de le côtoyer… de me retrouver seul dans la voiture de conduite avec lui… il a quel âge au juste ? il habite où ? est-ce qu’il a une copine ? est-ce qu’il la baise tous les soirs ? se branle-t-il ? le matin ? le soir ? dans les chiottes de l’auto-école ? a-t-il déjà couché avec des élèves ? je parie que oui, c’est sûr, il est charmant à un point que les nénettes doivent toutes être folles de lui… est-ce qu’il fait du sport ? combien de temps reste-t-il sous la douche ?  

    Ok, bon, admettons, le gars a légèrement attiré mon attention… mais enfin, c’est pas comme si je me posais mille et une questions sur sa vie… c’est pas comme si je fantasmais sur sa vie… mais à quel age a-t-il couché pour la première fois ? est-ce qu’il a déjà couché avec un garçon ? en aurait-t-il envie ? dans quel « rôle » ? qu’est-ce qu’il aimerait ? 

    Oui, Martin m’a carrément laissé de marbre… il faut dire que quand je repense à ce mec aujourd’hui, c’est la silhouette classe, virile et élégante d’un Jamie Dornan qui me vient à l’esprit… exactement le genre de mec qui me laisse… avec les jambes en coton… 

    Je sors des locaux de l’auto-école tout guilleret… c’est l’effet « bogoss inconnu » sur mon esprit… à chaque fois que je croise un bogoss, j’ai l’impression que mes poumons s’ouvrent et qu’un air nouveau s’y insuffle… j’ai l’impression d’être ivre de la beauté et du charme de ce bogoss, une drogue puissante pour mon esprit, une drogue qui me fait planer, flotteur sur un bonheur éphémère mais intense… 

    Je glandouille le reste de la journée, je me sens apaisé, fringuant… ce Martin m’a mis de bonne humeur, et l’idée de le retrouver me chatouille bien l’esprit… je sais qu’il ne se passera rien avec lui, que je vais passer deux semaines à baver dans mon coin en matant ce bogoss hétéro… mais je ne peux m’empêcher de ressentir une petite impatience à l’idée de le retrouver…  

    Oui, la journée a bien commencé, et elle continue sur la même lancée… depuis dix heures, j’ai reçu plusieurs messages de Stéphane me racontant comment ses journées sont chargées entre le travail, les cartons, sa mère dans les pattes… à travers ces quelques échanges, je sens sa présence bienveillante, ses mots comme des caresses, et je me sens fort et déterminé à avancer… il est trop bien ce Stéphane…
    Un de ses messages en particulier me rendra vraiment heureux : 

    « Marre du taf… envie de tout lâcher et venir te voir ». 

    Moi : « Lâche alors… » 

    Lui : « Peux pas L » 

    Moi : «  LLLLLLLLLLLL » 

    Il ne lâchera pas. Je commence à me dire qu’on ne va pas y arriver. Que je vais passer toute la semaine seul à glandouiller… Elodie a repris le travail et sans elle je n’ai pas le courage de bouger… si elle avait été disponible, on serait retourné passer quelque jours à Gruissan, mais même si elle m’a dit qu’il n’y aurait aucun problème pour me filer les clefs, je n’ai pas le cœur à y aller sans elle… prendre le train, me retrouver seul dans l’apart, aller seul à la plage… remarque, ce serait une occasion en or pour commencer à vivre mon été « sensuel »… mais je n’ose pas, je sais que sans Elodie pour me faire rire, je vais redevenir le garçon très timide que je suis et les occasions que j’ai quand je suis avec elle, ne vont pas se présenter à moi tout seul… tiens… et si je demandais à Martin de m’accompagner ? On peut toujours rêver… 

    Blagues à part, il y a aussi une autre raison qui me pousse à rester sur Toulouse… c’est l’espoir de revoir Stéphane avant son départ… je sais que les chances sont très faibles, presque inexistantes, mais si jamais l’occasion devait se présenter à l’improviste, je m’en voudrais vraiment de la rater… 

    Alors, en attendant, j’essaie de tuer le temps, en attendant de partir pour Londres… je me balade, je retourne au Jardin des Plantes. Je marche sur le Canal. Je me dis que j’ai envie de reprendre la course à pied. J’ai tellement de temps à moi que je trouve même le temps de ranger ma chambre (ça c’est un exploit), de ranger mes cours, mes bouquins qui ne serviront plus.  

    Je me sens calme. Un jour de plus sans croiser Celui-dont-on-ne-doit-plus… je n’ai même pas trop pensé à lui de la journée, presque pas…  

     

    Mercredi arrive, je fais la grasse mat. Un sms de Stéphane me souhaitant « Bonjour petit mec » me fait bien commencer la journée. L’après-midi je vais courir sur le canal.  

    Marcher assez loin, côtoyer les péniches stationnées sur les bords ; quitter peu à peu la ville est ses immeubles, aller vers un paysage de moins en moins urbain, sentir l’appel de la campagne. 

    D’autres sms de Stéphane me donnent la banane. Je croise un mec avec un labranoir. Le labra est mignon tout plein, le mec n’est pas mal non plus. Mais le labra n’est pas Gabin et le mec n’est pas Stéphane. Dommage. J’ai vraiment super envie de le voir. Hier soir encore je me suis caressé et j’ai joui en pensant à nos gros câlins du dimanche… hier soir encore je me suis endormi en m’enroulant tout serré dans ma couette en imaginant l’éteinte de se ses bras… et hier soir encore je me suis repassé le dvd d’Aladdin tout seul dans ma chambre… 

    Je crois que je suis en train de tomber amoureux de ce gars… je l’ai tout le temps dans la tête, des images ce dimanche après-midi font sans cesse surface dans mon esprit comme des feux d’artifice… et à chaque fois que je reçois un sms venant de lui, drôle, gentil et toujours affectueux, ça me met de bonne humeur, ça me fait sentir bien, mes poumons ont envie de respirer profondément, je sens une énergie nouvelle parcourir mon corps, j’ai l’impression de renaître… et c’est si agréable… 

    Mais ce qui est agréable par-dessus tout en cette fin d’après-midi, c’est de recevoir un sms de la part de Stéphane me proposant d’aller prendre un verre ensemble le soir même… c’est adorable comme proposition, mais au même temps c’est nul… on ne pourra même pas se câliner… je sais que l’on a pas le choix, chez lui on ne peut pas, chez moi encore moins… je suis à deux doigts de lui proposer un plan hôtel mais ça me parait trop glauque… je me dis que s’il en avait envie, il me le proposerait lui-même… 

    Il faudra se contenter d’un verre ensemble… hélas, même ce verre ne sera pas… un empêchement de dernière minute le retiendra tard au bureau et un sms annulera ce rendez-vous… je sais qu’il a envie de me voir mais que ce sont les événements qui le retiennent, j’imagine bien que la veille d’un déménagement, surtout en travaillant jusqu’à presque le dernier jour, ça ne doit pas être une période de tout repos…

    Je ne lui en veux pas, mais je ne peux pas m’empêcher d’être déçu, très déçu… d’avoir du mal à trouver le sommeil, d’essayer de m’étourdir avec des branlettes qui n’arrivent même pas à me détendre… je suis déçu de ne pas pouvoir le retrouver, ne serait-ce que pour un petit moment, devant un verre… juste le voir aurait suffi… le voir, échanger quelques mots, quelques regards, une accolade, un petit bisou discret dans un coin de rue, vraiment ça m’aurait fait du bien… comme une piqûre de rappel de ce dimanche magique… et ça m’aurait peut être aidé à… tenir bon… car… je le sais, je le sens sur ma peau, dans mon ventre, au plus profond de moi… poussé par le vent je brûle et je m'enrhume (…) je je, suis si fragile, qu'on me tienne la main…

    Oui, je suis déçu de ne pas le voir ce soir-là, mais je suis surtout déçu et triste car je comprends rapidement que les jours passent, que je n’arriverai pas à le retrouver avant son départ… oui, je suis déçu, mais je suis surtout déçu de moi-même… de ma faiblesse que je sens venir de loin, lentement mais assurément, une faiblesse qui va me rattraper quoique je fasse et qui va faire le jeu de Celui-dont-on-ne-doit-plus… ma faiblesse est son pouvoir… mon amour, sa baguette de sureau… j’avais cru, avec le sort de Protego jeté sur moi par le sorcier Stéphane dimanche dernier, de m’être définitivement soustrait au pouvoir de Celui-dont-on-ne-doit-plus… mais qu’est donc un charmant sort de Protego, face à celui de l’Imperium, ce sort que Celui-dont-on-ne-doit-plus… m’a jeté depuis de longs mois… ce sort qui est cousin très proche d’un autre, bien connu, le Doloris…

    Je suis déçu et triste car je sens que dans mon cœur tout commence à remuer… la pureté, la puissance des sentiments, les promesses de dimanche soir, ma détermination à tourner la page, mon sentiment d’être comble par l’amour de Stéphane, sont en train de se dissiper petit à petit dans mon cœur à l’approche de la soirée « bac »… Stéphane me manque toujours, mais ce qui me fait le plus mal c’est que je me sens dériver loin de lui sans avoir le pouvoir de l’empêcher…

    J’essaie de me battre, de retrouver le sentiment de dimanche soir, mon assurance, ma sérénité… mais j’ai beau me battre et me débattre, je ne peux rien y faire… les heures passent inexorablement et inexorablement mes sentiments pour Celui-dont-on-ne-doit-plus… refont surface…

    Et cette petite contrariété, ce rendez-vous annulé, joue dans mon cœur le rôle de déclencheur, d’étincelle qui va mettre le feu aux poudres… c’est con, mais cette petite contrariété suffira pour que mes démons trouvent la force de refaire violemment surface dans mon esprit… et une fois qu’ils ont refait surface, je n’ai pas le pouvoir de les repousser…

    Oui, je recommence à repenser à Celui-dont-on-ne-doit-plus… en réalité, je n’ai jamais cessé d’y penser… mais pendant quelques jours, il me semblait loin, et en train de s’éloigner progressivement, de s’effacer de mon esprit… les échanges de sms avec Stéphane me gardaient à l’abri comme dans une bulle, et si cette relation avait continué assez longtemps, peut être que j’aurais été guéri… je suis comme un malade à qui on aurait commencé à donner un traitement efficace pour sa pathologie mais à qui on l’aurait arrêté beaucoup trop tôt… la maladie reprend le dessus, et il n’y a plus rien à faire…

    Quand on a quelqu’un dans la peau comme moi j’ai Celui-dont-on-ne-doit-plus…, on n’en guérit pas d’un claquement de doigts… il faut un long suivi, une longue convalescence, une rééducation émotionnelle et sentimentale… je suis privé de cela par le départ de mon beau docteur Stéphane… je suis donc à ce point malade ???

    Dans un dernier sursaut de survie, je me dis que j’ai absolument besoin de le revoir, car le revoir c’est retrouver la belle énergie, l’élan de dimanche soir… j’ai envie d’aller sonner à sa porte le lendemain, lui faire la surprise… même s’il y a sa mère, je peux bien passer pour un pote qui s’arrête dire bonjour… j’ai besoin de renouveler le sortilège de Protego, alors qu’au fond de moi je sais déjà que même un Protego Horribilis ne suffirait pas… car je sens se produire en moi quelque chose d’inattendu, inattendu mais pas trop quand même… un inéluctable sortilège de métamorphose est en train de s’opérer… je suis au bout de mes forces, mais j’emploie toute mon énergie pour m’y opposer… hélas, il y a bien un moment où mon énergie ne suffit plus, où ma volonté désarmé s’incline devant un mouvement qui me dépasse, devant une force qui me déborde… lorsque dans mon esprit, Celui-dont-on-ne-doit-plus… redevient soudainement Jérém… 

     

    Plus tard dans la semaine…

     

    « C’était qui ce mec de tout à l’heure? » me balance-t-il de but en blanc.

    « Je sais pas… je ne le connais pas, c’est la première fois que je le vois… ».

    « Il te voulait quoi? ». 

    Ses questions m’agacent, franchement. Il faut avouer que j’ai un peu bu et que de ce fait mon agacement est exacerbé. Il me saoule à un point que j’ai envie de le frapper. C’est viscéral. Quand je pense à samedi dernier, à son départ avec les deux pouffes et avec Thibault… alors que là il est en train de me faire la morale… là, franchement, je perds les pédales… je ne vais pas le frapper physiquement, mais me servir des mots… ça sort tout seul, comme une petite bombe… 

    « Coucher avec moi, je pense… en plus il était à mon goût… il a fallu que tu viennes t’en mêler…». 

    Un coup de bluff, certes, car il faut bien l’admettre, ça m’a fait drôlement plaisir voir débarquer Jérém en mode macho jouer de ses gros bras pour me casser un plan auquel je ne tenais que très moyennement. Un premier coup bien visé, qui atteint sa cible en plein cœur. Sa main frémit… un léger mouvement de son regard et une inspiration par le nez, profonde et nerveuse, me font comprendre que le beau brun accuse le coup… 

    « Tu vas pas baiser avec un bouffon pareil… » me lance-t-il avec mépris… voilà sa riposte : le mépris…

    « Pourquoi? Il n'était pas mal… même pas mal du tout… » je repars à l’attaque, culotté. 

    « C’est pas un mec pour toi… » gronde-t-il… du mépris à la colère, sa contre-attaque monte en puissance… 

    « Ah bon… » fais-je sur un ton ouvertement provocateur face à son culot « et maintenant tu sais quels mecs sont bons pour moi ou ceux qui ne le sont pas… le mec de la dernière fois à l’Esmé ce n’était pas un mec pour moi… celui de ce soir non plus… et… » 

    « T'as pas a faire ta chaudasse avec tous les mecs… » il m’engueule violemment en levant le ton et en m’empêchant provisoirement de lui balancer une dernière cartouche qui, une peu plus tard dans la conversation, l’atteindra bien comme il faut. 

    « Bah tiens, tu peux bien parler... » je me moque, mauvais. 

    « Quoi donc... » il s’énerve…

    « Ça te va bien de me faire la morale... toi qui baise tout ce qui bouge… ». Je n’arrive pas à croire que c’est moi qui balance ces mots, que je lui fais ce rentre dedans, que je le provoque sciemment. Est-ce bien l’alcool qui fait renaître mon amour propre et qui fait tomber mes inhibitions… ou bien, mes mots sortent-ils sous l’effet d’une quelque expérience récente ayant entraîné certaines prises de conscience vis-à-vis de moi-même ? 

    « Si t’as un truc à dire, vas-y… je t'écoute… » me lance-t-il, menaçant, en montant sur ses grands chevaux… 

    « C'est bien toi » je continue sans me démonter « qui n'a pas voulu baiser avec moi samedi dernier pour se faire un plan à quatre avec son meilleur pote et deux pétasses de la pire espèce... ». 

    De lieux en mieux, ma désinvolture frôle l’outrage… décidemment je n’arrive pas à croire que j’ai le cran de lui balancer ça comme ça, sur ce ton mutin et presque méprisant. Non, définitivement ce n’est pas que l’alcool seul qui parle… mais bien un début d’amour propre… une renaissance dont j’entrevois clairement les causes… une tête le labranoir s’affiche dans ma tête… 

    « C'est pas pareil... » me balance-t-il sèchement, sur un ton agressif, presque en gueulant. 

    Il est en train de monter en pression, mais il ne me fait plus peur. Deux mots s’affichent en grand dans ma tête. Merci Stéphane… ce dimanche n’a pas été vain… je ne suis plus le Nico d’avant… désormais… Jérém… ne pourra plus se foutre de ma gueule. J’ai enfin la force de lui tenir tête. Oui, Stéphane, ta force est avec moi 

    Jérém accuse un nouveau coup. Touché une fois de plus, mais pas coulé. Le navire est bien gardé, ses défenses solides… je le vois pourtant vaciller… j’ai l’impression que la colère monte en lui et qu’il est prêt à exploser. 

     « Qu'est ce qui n'est pas pareil? » je demande… non, je ne lâche rien ; et j’enchaîne, m’engouffrant dans la brèche creusée par son silence et par son évidente absence d’arguments « je croyais que nous deux on baisait quand on avait envie et qu’après on baisait avec qui on voulait.... ». 

    Touché une nouvelle fois… le cuirassé Jérém tangue, chancelle sérieusement. De la fumée sort du pont… il y a le feu à bord… le bâtiment de guerre est mis à mal… 

    Le système de communication doit être touché, aucun signal radio ne vient… je sens que je suis en position de force, alors j’en profite pour mener à bien mon assaut… j’ai envie de frapper, j’ai envie de lui faire mal, je veux voir sa réaction, je veux le mettre devant lui-même, devant ses contradictions… le repousser dans ses derniers retranchements, le voir exploser… je me surprends à admettre à moi-même que, au fond, je cherche le clash… ou peut-être j’espère que Jérém, dans une sorte de rage désespérée va me balancer qu’il tient à moi… mais bon, ça, évidemment ça n’arrivera pas… 

    « De toute façon tu baises avec moi quand tu en as envie et quand ça te chante tu baises ailleurs… par conséquent, moi je baise avec toi que quand toi t’en as envie… et mes envies à moi, t’en fais quoi de mes envies à moi ? tu te fous de ce dont j’ai envie… comme samedi dernier, quand tu m’as jeté comme une merde… alors, pourquoi je ne baiserais pas moi aussi ailleurs comme ça me chante et surtout quand tu me lâches ? pourquoi je t’attendrais sagement quand tu préfères passer ta nuit avec quelqu’un d’autre ? ». 

    « Fiches moi la paix… putain… t'es rélou... ».  

    L’artillerie lourde est touchée aussi. La puissance de frappe est compromise. Le navire est désormais sur la défensive. Je ne peux plus m’arrêter. J’avance tout droit vers ma cible. 

    « Je ne te demande rien, tu sais… tu le sais que j'adore coucher avec toi... j’ai tout le temps envie de coucher avec toi… alors, quand l’envie te prend de me baiser, tu m’appelles… si je suis libre je viens… je vais te faire tout ce que tu veux, quand tu veux, ou tu veux, autant que tu veux… mais quand tu ne veux pas, surtout quand tu vas voir ailleurs et que tu le fais sous mes yeux... alors là, ne me demande surtout pas de t'attendre... 

    Je le vois s’énerver… touché une fois encore, j’ai l’impression que le navire a perdu le contrôle de sa trajectoire, qu’il dérive ; alors, comme un animal excité par le sang et par la peur de l’adversaire blessé, je continue, impitoyablement, cherchant l’angle de tir parfait pour mener le coup de grâce…  

    Insatiable dans ma vengeance, limite cruel, profitant pour la première fois d’une position de force vis-à-vis de mon con de beau brun, je décide de tenter un piège, une feinte… je veux faire durer mon « plaisir »… je vais l’obliger à sortir à découvert pour mieux le frapper… mon but est de le terrasser comme lui il m’a terrassé tant de fois… 

    « De toute façon, à t’entendre, il n’y a aucun mec qui pourrait être bien pour moi… le mec de la piscine non plus ce n’était pas un mec pour moi… mais ce n’est pas comme si tu avais ton mot à dire, Jérém… » 


    1 commentaire
  •  

     

     

    A un moment je le vois balancer la tête vers l’arrière, laissant échapper un « putain… » venant du plus profond du cœur, je parle de celui qui est au bout de sa queue et dont je suis en train de m’occuper…

    Je regarde son gland et je me fais une curieuse réflexion… en fait… un gland bien gonflé… ressemblerait presque… à un cœur renversé…

    C’est ce soir là que je réalise que le « cœur » de mon Jérém est au bout de sa queue… et que pour le faire palpiter, il suffit de le prendre entre mes lèvres… et là, autant dire que je ne vais pas m’en priver…

    Le t-shirt blanc coincé derrière son cou, avec une attitude « plus petit con tu meurs » ; le torse, pecs, abdos, complètement dénudes et offerts à ma seule vue, la chaînette qui pendouille entre ses deux tétons… il faut qu’on me dise… devant tant de beauté masculine, de jeunesse, de sexytude exacerbée,  quoi faire d’autre à part céder à la tentation, capituler sans conditions ? Comment ne pas avoir envie de le sucer, comment ne pas avoir envie de sucer un mec aussi beau et aussi bien monté… mes lèvres glissent lentement sur sa bite, ma bouche enfourne sa queue… avec application j’entreprends de le sucer, lentement, doucement… ma langue joue une partition de mille et une nuances tactiles sur son gland, mes lèvres s’activent sur son manche, ma bouche rend hommage à ce sexe tendu et lui montre à quel point ça lui a manqué… sa queue semble elle aussi vibrer de désir… j’ai l’impression que ma langue est un archet jouant sur une corde de violon, vibrante de désir…

    Et puis je me lâche… à l’instar de certaines chansons qui commencent tout en douceur et qui se déchaînent au bout de quelque mesure, à un moment je m’emballe… je veux le faire jouir, je veux goûter à son jus… je veux le surprendre, précipiter son orgasme…

    La brusque variation de tempo semble ravir mon beau couillu, son corps semble me remercier avec des frissonnements plus marqués… je l’entends haleter très fort… tout en continuant à le sucer comme si ma vie en dépendait, je relève les yeux, juste à temps pour le voir rabattre la tête arrière, le regard vers le ciel comme cherchant là haut une explication de comment c'est possible de prendre autant son pied dans la bouche d'un garçon… j’adore quand il a ce geste… j’adore le voir prendre son pied…

    J’ai l’impression qu’il approche à grands pas de l’orgasme… et là, paradoxalement, alors que j’ai tout fait pour le précipiter, j’ai soudainement envie de retarder un peu ce moment, cet instant délicieux ou le bogoss se déchargera dans ma bouche, le moment ou tout sera fini, où il retirera sa queue de ma bouche et je me retrouverai seul dans cet espace étriqué qui, après son départ, n’aura plus rien d’un Paradis mais ressemblera à nouveau à des chiottes puantes…

    Alors je change de rythme une fois de plus, je ralentis tout cela… je l’entends respirer fort, souffler presque agacé… de suite je le sens frustré… j’adore le faire languir… provoquer une réaction de sa part… son bassin commence à onduler vigoureusement, ma main se pose à nouveau sur ses abdos, le plaquage est de retour… je crains un peu sa réaction, mais j’y vais franco et je suis heureux de voir qu’il se laisse faire… je crois qu’il a compris que quand je lui demande d’attendre, c’est qu’il va y trouver son compte…

    Ma bouche quitte sa queue, j’ai envie de lécher ses boules… alors j’y vais, tout en entreprenant de branler sa queue avec le même geste ample que je lui ai vu accomplir quelques minutes plus tôt lorsqu’il s’impatientait en attendant que je me mette à genoux… mes lèvres, ma langue, mon nez, mon visage tout entier perdus dans cet univers de douceur, de chaleur, de petites odeurs magiques de garçon… je passerais des heures à humer ses couilles, à y frotter mon visage, à jouir du contact de ses bourses bien rebondies, protégeant ses précieux bijoux de mec, bien pleines de ce jus de beau brun que je désire plus que tout au monde…

    Oui, je pourrais passer ma vie le nez entre ses couilles… hélas, voilà un luxe que je ne peux m’octroyer qu’avec parcimonie… je sais que le beau brun aime ça, mais je sais que sa queue réclamera vite le contact de mes lèvres, la chaleur humide de ma bouche… il faut que je pense à me réincarner en slip ou en boxer lors d’une prochaine vie… mais à condition évidemment de pouvoir choisir mon propriétaire…

    En attendant, me voilà contraint malgré moi de quitter ce lieu magique, le cœur même de sa virilité, et ma langue remonte lentement mais de façon très appuyée le long de sa queue… il frissonne… j’adore… car je sais pourquoi… j’arrive au terminus, à la Gare du Frein…

    Et là, l’arrêt sera long… le Frein... le turbo de la fellation... l’arme secrète pour propulser un mec en orbite... pour lui faire entrevoir les étoiles... il faut vraiment être un garçon et l'avoir vécu sur sa propre anatomie pour savoir à quel point cela peut faire plaisir à un autre garçon… pour comprendre comment pratiquer une fellation dans les règles de l’art, comment apprivoiser la sexualité d’un beau mâle… pour savoir à quel point la couronne du gland est sensible aux câlins légers d’une langue avisée, alors que la tige semble apprécier des caresses plus vigoureuses...

    Un mélange de douceur et de puissance, voilà ce que c’est une bonne fellation… 

    Tout mon art s’exprime, tout mon savoir faire y passe… définitivement je me déchaîne… gorge profonde, gobage des boules, titillement du bout du gland, succion appuyée, léchage rapide et insistante de la queue sur toute sa longueur… bref, tout ce qu'un garçon fait mieux qu'une meuf…

    Je l'entends respirer bruyamment sous l'effet de mes sollicitations… et là, c’est la réaction en chaîne… le cercle vertueux… plus je l’entends prendre son pied, plus j’ai envie de lui faire plaisir, de l’avoir le plus profondément en moi… je gobe sa queue à fond, je me laisse aller à des gorges de plus en plus profondes, je vais tellement loin que mon front arrive par moments à effleurer la peau de ses abdos… j’en sens la chaleur, la douceur… et pendant que mon menton frôle ses couilles, mon nez approche de très près les poils au dessus de sa queue et se charge des petites odeurs magiques de mec qui se dégagent de cette région…

    Quand j’y pense, tout cela est de la folie… oui, c’est une pure folie que de le sucer dans les chiottes pendant que toute la classe fait la fête à quelque mètres de là à peine, avec le risque de croiser quelqu’un en sortant à la fin de nos ébats… oui, de la pure folie… mais, comme je le saurai plus tard, les folies ce sont les seules choses qu’on ne regrette jamais…

    J’y vais comme un fou, il se laisse faire… c’est juste délirant… le cœur entièrement à l’ouvrage, je continue de faire coulisser mes lèvres sur son magnifique pieu de chair… insatiable, impatient, ce petit con balance par moments de bons coups de reins qui amplifient mon entrain de façon inattendue et imprévisible… son gland tape alors violemment au fond de ma gorge, arrive à effleurer l’entrée de ma gorge… aussi, une fois ou deux j’ai un peu mal… j’ai l’impression de me faire empaler par le haut… et quand il s’arrête, c’est moi qui y va de plus en plus fort…

    Rien ne semble pouvoir m’arrêter dans la course sur cette dernière, magnifique, délirante ligne droite vers sa jouissance de mec… rien à part… un bruit dans l’espace des toilettes…

    Soudainement le silence de la pièce est rompu par la vibration de deux voix masculines que je reconnais de suite… Thierry et de Bruno… ah, la bière… action au comptoir… réaction aux urinoirs… soudainement, Jérém me repousse fermement… sa queue quitte ma bouche et je suis instantanément en manque… il me plaque sa main sur la bouche… la queue en feu, prête à jouir, je vois ses abdos onduler sous l’effet d’une respiration accélérée et profonde…

    Mon beau Jérém… quel dommage… si près de lâcher ta semence… ta queue vibre d’impatience, je le vois si bien, tout ton corps est tendu, frustré, je te regarde et je te vois relever lentement la tête jusqu’à l’appuyer à la cloison, je te vois fermer lourdement les paupières, déglutir bruyamment, tenter de maîtriser ta respiration, ta frustration…ton gland est tellement gonflé que j’ai cru pendant un instant que tu allais me cracher à la figure… ta queue sursaute, animée par des mouvements musculaires incontrôlés liés à l’excitation extrême… je regarde ton beau torse découvert, tes pecs… ta peau moite… putain qu’est ce que j’ai envie de te faire jouir… et qu’est que tu es sexy avec ce t-shirt coincé derrière le cou… vraiment, définitivement, plus petit con tu meurs…

    Et les deux autres pignoufs prennent leur temps pour vider leur vessie… ils tapent la discute, pendant que Jérém et moi on crève d’envie de conclure notre affaire… leur étape pipi ne doit durer que quelques secondes à peine, mais cela me parait prendre une éternité… et cela doit paraître encore plus long pour mon beau couillu…

    On entend les jets tomber drus dans les urinoirs… on entend leur conversation… ils parlent du billard… de la partie qu’ils ont prévu de faire dès que Jérém sera là… j’entends Bruno demander où est passé Jérém et Thierry répondre qu’il faut aller voir à l’étage, « le coin des nanas »… oui, Thierry, c’est ça, va donc chercher Jérém du coté des nanas…

    Le bruit d’une première chasse, suivi de près d’un deuxième ; le bruit de l’eau qui tombe dans l’évier,  et un dernier bruit du séchoir à mains, on entend petit à petit leurs mots s’éloigner, jusqu’à disparaître… et là, d’un seul coup, voilà que le beau poupon Jérém, jusqu’à la inanimé, redémarre au quart de tour… sa main se pose sur ma nuque, m’obligeant à reprendre dare-dare mon ouvrage inachevé, ma fellation de dingue… il aime ça le mec… mon beau couillu… c’est le bonheur… 

    L’invitation lancée, il faut y aller Nico, le mec n’en peut plus… il a envie de jouir… il a besoin de jouir… il est tellement excité qu’il n’y tient plus… alors je me laisse aller.. je ferme les yeux, je me concentre sur la délirante sensation d'avoir la bouche envahie par son pieu chaud, remplie de son excitation, je me focalise sur les odeurs de mec et sur la chaleur de son corps… 

    J’y vais franco et lorsque le beau brun ne juge plus nécessaire la présence de sa main sur ma nuque pour lui garantir son plaisir, je sens ses deux mains se poser sur mes épaules pour prendre appui et balancer à nouveau de bons coups de reins… 

    Le contact de ses mains sur mes épaules, ses pouces effleurant mon cou... la mélodie de son plaisir... je ne suis plus dans ces chiottes mais dans un monde merveilleux où mon beau brun est en train de prendre son pied comme un dingue et où ma bouche va très bientôt être remplie de son jus…
    Une partie de la masse musclée de son corps prenant appui sur mes épaules, je me sens déséquilibré… d’une main je me tiens à sa jambe tandis que l'autre cherche le délicieux contact de ses abdos... une fois de plus, je me dis que son t-shirt rabattu derrière le cou est juste du pur délire… j’accélère encore mon tempo, car j’ai trop envie de goûter au délicieux nectar de ses couilles…
    Et là je vois du coin de l’œil son buste se plier, sa bouche approche de mon oreille pour me chuchoter quelque chose…

    « Tu l'aimes ma bite... c’est ça, tu l’aimes… elle t'a manqué… c'est ça… elle t'a manqué... t’as besoin de ma queue pour prendre ton pied… elle te plait.. je le sais… tu en es dingue… ».

    Et toi, petit con sexy... dis-moi donc… tu prends bien ton pied là... et alors… ma bouche… elle ne t'as pas manqué ma bouche?
    J’ai envie de le gifler. Mais il a raison. Elle m’a maNqué. Car depuis le premier jour elle m’a maRqué. Oui, j’ai envie de le gifler. Mais surtout de le sucer. Alors je le suce, avec de plus en plus d’entrain… je le pompe à fond, j'ai envie de son jus…
     « Vas y, suce bien… salope… » surenchérit-il.

    Petit con, va…
    Me voilà à nouveau à genoux, au sens propre comme au sens figuré, devant sa virilité… m’y voilà sans conditions... complètement a nouveau soumis… j'ai tout oublié de l’état d’esprit de ce fameux dimanche avec Stéphane… tout ou presque… au fait… peut-être pas tout… c’est la première fois que je m’impose autant face à mon beau brun… la première fois que je dirige le jeu… un jeu auquel bien sur je ne peux pas me soustraire… je n’y peux rien… Jérém est là, il a envie que je le suce, et je vais le sucer… je le suce en matant sans répit ce t-shirt blanc coincé derrière son cou et son torse dénudé… et je suis dingue…

    « T'es trop sexy Jérém... » je ne peux m’empêcher de me laisser m’échapper tout en continuant à le branler avec ma main ; et d’insister « … et qu’est ce que t’es sexy avec ce t-shirt… ».

    Sa réaction sera lapidaire. Du pur Jérém, du Jérém en rut. En attendant de lâcher son jus un peu plus tard, il ne lâche rien par ailleurs :

    « Je sais… tais toi… suce moi... fais moi jouir, vite! ».

    Devant tant d’arrogance, je suis fou d’excitation… c’est beau, c’est sexe, c’est « à le cogner », on dirait un poème…

    Je sais,

    Tais toi,

    Suce moi....

    Fais moi jouir,

    Vite!

    Je sais que ça lui fait plaisir que je lui dise qu’il est sexy… il ne l’admettra jamais, mais je sais qu’il aime ça, ce petit con…

    Unissant le geste à la parole, il avance son bassin, il pose son gland sur mes lèvres qui s’ouvrent, accueillantes… et je reprends à le sucer de plus belle… et il se remet à frissonner de plus belle… et il se remet à me baiser la bouche en me tenant fermement la tête de ses deux mains, de plus belle…

    Une fois de plus je repousse son bassin… je veux le faire jouir… j’ai envie d’être l’auteur de sa jouissance et non pas un simple instrument… au moment de sa jouissance, je ne veux pas que ce soit lui qui baise ma bouche mais moi qui baise sa queue… subtile nuance, qui a pour moi une immense valeur… la signification du fait que Nico est en train de s’affirmer et qui signale enfin sa présence, ses envies, ses besoins… un Nico qui ne subit plus… 

    Je me remets à le sucer de plus en plus vite, l’approchant à grand pas du moment où il lâchera sa semence… et puis, à un moment, surprise, c’est lui qui semble vouloir ralentir mon entrain, comme s’il voulait retarder sa jouissance… il pose ses mains sur mes épaules, puis carrément sur mon front, m’obligeant à calmer mes ardeurs… et pendant que je m’adapte à son envie, pendant que des tours de langue bien calculés et des mouvements de lèvres savamment appuyés autour de son gland procurent au beau brun un plaisir à la fois intense et mesuré, un plaisir qui le maintient comme en suspension sur la corde raide qui sépare l’explosion de son plaisir et l’attente de celui-ci…

    C’est à ce moment là que je sens son regard excité sur moi… la tête penchée en avant, bien attentif à la progression de mon ouvrage… Jérém me regardant en train de le sucer, c’est juste pas possible… il me regarde lui donner du plaisir, me plier à ses envies de mec, il regarde, apprécie, jouit de ma soumission, ça doit donner des beaux frissons à sa fierté masculine, ça doit l’exciter au plus haut point…  

    Ses paupières lourdes, sa bouche entrouverte, ses halètements profonds donnent la mesure de son excitation extrême, de cet état de plénitude sensuelle à l’approche de l’orgasme dans lequel les actions de ma bouche sur le bout de sa queue l’entretiennent… lui aussi n’est plus qu’envie, envie de jouir, envie de faire durer à la fois… au fait, j’ai bien l’impression que mon beau brun est déjà en train de jouir… à ce moment là, il pue carrément de sexe… 

    Comment ne pas succomber à cette image de beauté sensuelle, à la vision de ce magnifique corps masculin animé par le seul instinct du plaisir et sur lequel la raison a perdu provisoirement tout droit… 

    C’est à ce moment là que tous mes principes cèdent sous le poids de l’évidence… j’ai trop envie de ce mec pour lui résister, quelles que soient les conditions et les contraintes pour avoir accès à son corps, à son intimité, à sa sexualité… c’est à cet instant que je me dis que je peux mettre mes sentiments entre parenthèse et prendre ce qu’il veut bien me donner, à savoir, sa queue et puis basta…

    Mon cœur s’emballe, ma respiration s’accélère…

    Il m’a manqué, putain qu’il m’a manqué… et je me rends compte seulement à ce moment là à quel point… c’est bon de le retrouver… son visage, sa chute d’épaules, son torse, son cou, son corps… je suis saisi d’une émotion qui me déborde, qui me dépasse… il est là, je le retrouve et j’ai presque envie de pleurer tellement c’est beau… plus jamais ça… plus jamais dix jours sans le voir nu, sans le sucer…

    Un instant plus tard, me laissant guider par les mouvements de ses mains, je me retrouve la tête coincée contre le carrelage du mur du fond en train de me faire baiser la bouche plutôt violemment… sa queue coulisse entre mes lèvres, son gland tape bien au fond e mon palais, ses couilles frappent lourdement mon menton… 

    Je sais que c’est le bouquet final… qu’il ne va pas tarder à venir et qu’il a envie de venir ainsi, à sa manière, en me baisant la bouche, ma tête coincée contre le mur… bah, tant pis, je me suis assez imposé, là je lâche la bride… j’ai trop envie… vas-y Jérém, fais toi plaisir, jouis, lâche toi, remplis moi la bouche, je vais tout avaler… maintenant que je sais ce que ça fait dans le corps et l'esprit d’un garçon, j’ai dix fois plus envie qu’avant d'avaler ton jus…

    Mon beau brun va jouir, et ça va être le tsunami dans sa tête… soudainement il arrête ses coups de reins, sa queue se cale au fond de ma gorge… grâce à ma langue bien appuyée sur le revers de sa queue, je sens le flux de sperme passer sur toute la longueur, je sens sa bite se contacter pour expulser très fort son jus... j’adore ce moment, sentir cette contraction musculaire, ce point de non retour juste avant que les jets de sperme inondent ma bouche...

    « Je viens », il me balance, la voix étouffée par l’orgasme.

    Et il jouit… 

    Une décharge électrique parcourt mon corps… son bassin contre mon visage, ses couilles sur mes lèvres, il jouit sans bouger, le gland coincé à l’entrée de ma gorge… il jouit en silence, le corps secoué par des spasmes puissants… il jouit dans ma bouche pendant que dans les urinoirs à coté, deux autres mecs échangent des grossièretés tout en se vidant la vessie… il jouit et il me fait cadeau de plusieurs jets bien lourds, chauds, denses, puissants, répandant dans ma bouche ce goût de mec qui me fait délirer…

    C’est furieusement excitant de faire ça dans ces conditions, dans ce lieu, dans ces circonstances, avec à tout instant le risque de se faire surprendre…

    Il en finit plus de jouir et j'en finis plus d'avaler… des râles étouffés, des râles qu'il a du mal à contenir dans ses poumons marquent l'explosion de ses jets, la cadence régulière de chaque notes de son plaisir de mec… un râle, un jet, voilà le tarif…

    J’ai l’impression qu’au travers de ce jet puissant qui se délibère, c’est toute la virilité, la puissance de Jérém qui se déverse en moi, comme un barrage qui vient de céder… comme la lave bouillante d’un volcan…

    Son sperme coule en moi en glissant tout doucement vers ma gorge ravie… qu’est ce que j’aime son jus… meilleur que tout ce qu’on peut servir dans cette boite… délicieuse liqueur d'homme, nectar de mec, le jus épais et fort de mon beau Jérémie…
    Lorsque Jérém jouit dans ma bouche, lorsqu’il se vide de cette énergie liquide, chaude, épaisse, savoureuse, lorsqu’il m’offre le goût de sa puissance sexuelle, c'est comme s'il éjaculait dans mon cerveau… c'est une forme de prise de possession très étrange, une absolue domination… une onde géante de plaisir nous relie… je ressens son énergie… cette énergie virile véhiculée par son sperme qui rentre en moi, circule en moi, résonne en moi… c’est un peu de lui qui vient en moi, c'est son plaisir qui déborde en moi… quelque chose d’éphémère mais sur le moment extrêmement puissant, l’un connecté à l'autre dans une jouissance parfaite… 

    Il a joui dans ma bouche et lorsque les jets s’arrêtent, je levé les yeux, ses abdos dénudés ondulant au rythme de son diaphragme animé par une respiration rapide et profonde, une respiration d'après l’effort…

    Moi aussi je suis essoufflé... je n’ai pas joui mais il faut bien admettre que le sexe, lorsqu’il est si intense, demande une bonne dose d'énergie d'une part et d'autre

    Jérém a fini son affaire et je ne peux pas m’empêcher de recommencer à le sucer tellement j'ai aimé, tellement je suis fou de cette queue capable de me faire vibrer au plus profond... je mouille dans mon boxer et je bande tellement que j'en ai mal…

    Je le trouve encore dix fois plus beau lorsqu'il a joui, lorsque sa fierté de jeune male s’évapore provisoirement laissant entrevoir un côté fragile, perdu

    Le t-shirt blanc CK toujours coincé derrière le cou, je vais mourir… je suce fébrilement, j’en veux encore, ma main est ivre, elle s’envole pour aller caresser ses abdos, pour se pousser jusqu’à ses pecs, à ses tétons, dans l’espoir fou de lui donner envie de jouir encore…
    Non, je ne peux pas arrêter de le sucer… mais le mec a joui, et très fort, et il ne va pas tolérer cela très longtemps… au bout d’un instant, ses deux mains se posent sur mes épaules dans le but de me repousser plutôt fermement…

    Frustré, je me décide à me lever… excité à l’extrême, je ne peux m’empêcher de me branler, la main dans mon boxer… j’ai envie de jouir moi aussi… tremblant d’excitation, ivre de lui et du goût fort de son jus qui agit sur mon cerveau comme une drogue dure, je porte ma bouche à proximité de son oreille et je lui chuchote : 

    « C’était trop trop bon… ça m'a trop manqué… »

    Je suis fou, et dans la foulée je lui fais des bisous… je ne peux pas arrêter de lui faire des bisous et de me branler, ma queue et ma main toujours enfermées dans mon boxer… le front, le nez, les lèvres, enfuis dans le creux de son cou, je mordille sa peau mate… d’une main je caresse ses cheveux… et je frotte ma braguette ouverte contre sa cuisse…

    Et je descends, j’embrasse son petit grain de beauté, je mordille sa chaînette de mec… un instant plus tard je lèche ses pecs, je m’attarde sur ses tétons chauds…

    Je m’attends à ce qu’il me repousse incessamment sous peu… et là, nouvelle surprise… non seulement il ne me repousse pas, mais à un moment il porte ses doigts à mon téton, il pince délicatement du bout de ses doigts… et là je me sens perdre pied… je suis à un rien de jouir dans mon boxer…

    Poussé par une excitation qui me dépasse, je frotte ma queue, toujours cachée dans mon boxer, de plus en plus vigoureusement contre sa cuisse… mes coups de reins sont tellement puissants que le beau brun en est presque déséquilibré… il se retient de justesse en appuyant son bras à la cloison…

    C’est là que ce que je craignais se produit… soudainement, mon attitude doit faire trop pd à ses yeux… alors, sans prendre en compte le fait que je suis à un rien de jouir, Jérém me repousse une fois de plus par les épaules… hors de moi, j’y reviens illico… il me repousse à nouveau, plus fermement, presque violemment, je manque de me vautrer sur les chiottes…

    Je suis tellement excité que je ne peux pas imaginer de renoncer à jouir… je sais que je ne peux pas compter sur Jérémie, car Jérémie n'est pas Stéphane… il n’y a que son propre plaisir qui compte… j’ai été trop naïf de croire qu’il me laisserait jouir contre lui, alors tant pis… alors, habité par l’urgence de ma jouissance, je descends un peu plus mon jeans et mon boxer, et je commence à me branler très vigoureusement
    J’ai envie de jouir très vite, avant qu’il parte… je le vois amorcer le mouvement pour remballer son service trois pièces… d’un geste rapide, je le vois attraper Calvin et Diesel dans la même main… vas-y, Jérém, je t’en prie, je t’ai fait jouir comme jamais tu aurais cru possible de jouir, mais le renvoi de l’ascenseur n’est vraiment pas ton truc… vas-y petit con, barre-toi…
    Je m'attend a qu'il se tire et qu’il me laisse planté là en train me branler comme un con, mais non… son mouvement pour remonter son calebut se fige… je réalise que sa queue n’a pas débandé… je me branle avec vigueur et je remarque que Jérém me mate, l'air intrigué…
    Et là ça va très vite… je le vois avancer vers moi, il porte les mains sur mes épaules, il me retourne face à la cloison, il descend un peu plus mon froc et mon Athéna… je ne le vois plus, mais je l’entends cracher dans sa main et sur sa queue… j’ai tout juste le temps de me rendre compte ce qui est en train de se passer que je sens son gland se faufiler dans ma raie, viser au bon endroit… un instant plus tard il m’embroche, sa queue s’enfonce en moi…

    Ses abdos bien plaqués contre mes reins, ses pecs appuyés sur mes omoplates, sa queue bien calée au plus profond de moi, je sens ses lèvres effleurer mon oreille pour y glisser quelque chose du style :

    « Alors… elle te semble comment, ma gaule ? ».

    Echec et mat. Il faut se rendre à l’évidence… le mec il en a entre les jambes…

    « T’es vraiment un sacré étalon… » je lui balance, la voix coupée par une excitation qui me tend comme une corde de violon.

    A ce moment précis je me dis que si c’est par la queue que l’on commande un mâle… c’est par le cul qu’on commande une salope…

    J'arrête de me branler en attendant la confirmation du coup de folie dont je le sais parfaitement capable… celui de me baiser deux fois coup sur coup… mais non, Jérém reste immobile au fond de moi, les couilles fermement appuyées contre mes fesses… et là, comble des combles, je l’entends me balancer un truc du genre :

    « Allez… dépêche… finis en… ».

    Je suis surpris. Abasourdi. Incrédule. Il veut que je me branle et que je jouisse pendant qu’il est en moi… j’ai du mal à réaliser ce qui est en train de se passer, tout ce que je sais c’est que je n’ai pas le choix, qu’il ne me reste qu’à m’exécuter… je recommence à me branler… et là je sens son regard sur moi, je sens ses deux mains s’agripper à mes épaules, je sens le contact de son menton dans le creux de mon épaule, sa tête penchée pour me regarder faire…

    La queue calée en moi jusqu’à la garde, il ne bouge pas d’un poil… tout ce qui l’intéresse semble n’être que de me mater pendant que je me branle… alors, le fait d’être venu en moi ce n’est ni pour me baiser, ni même pour me faire la démonstration de cette gaule que j’ai osé mettre en doute… il a juste envie de me voir prendre mon pied, il a même envie de m’aider à prendre mon pied… il me l’a même dit, à sa façon, certes, mais c’est quand même assez clair…
    Et comme si tout cela n’était pas suffisant, voilà que je l’entends encore me chauffer :

    « Allez, vas-y, crache ton jus… ».

    Je n’arrive pas à croire ce qui est en train de se passer… le beau brun impatient de me voir jouir… mais le meilleur est à venir… unissant le geste à la parole je sens sa main se faufiler dans l’ouverture en haut de ma chemisette… elle se balade entre mes pecs, ses doigts s’empressent d’agacer furtivement mes tétons…

    Putain qu’est ce que c’est bon… Jérém en moi… sa main sous ma chemisette… son goût fort de mec dans ma bouche, son torse enveloppant le mien, son souffle sur mon cou, je décolle, je m’évapore… et je jouis vite des grands jets copieux et violents sur la cloison… je jouis et le fait d’avoir sa queue en moi modifie mes sensations, je sens mon anus se contracter autour de son manche, et c’est sacrement bon…
    C’est là que Jérém se retire de moi… d’abord sa main, puis sa queue… il remonte son boxer, son froc, il reboucle sa belle ceinture, glin glin… je t’ai baisé le mec… glin glin… t’as aimé ça… glin glin… et putain, qu’est ce que j’ai aimé ça… il repasse le t-shirt en position normale et il le laisse retomber sur son torse, couvrant ainsi ses pecs et ses abdos… il l’ajuste, ainsi que les quelques plis apparus dans le tissu lors de son utilisation non conventionnelle et qui disparaissent à vue d’œil (ce t-shirt est la perfection même)…

    Dans la foulée, il colle l’oreille à la cloison pour déceler d’autres éventuels utilisateurs des pissotieres… je tends l’oreille au même temps, il n’y a pas un bruit… il déverrouille la porte, et d’un geste plus rapide que l’éclair, il l’ouvre et il s’y faufile en bondissant comme un chat, disparaissant de ma vue, la porte claquant sur son passage… pendant que je la verrouille à nouveau, j’entends le bruit de la porte battante qui donne sur la salle principale… Jérém est parti… tout va bien…

    Je remonte mon froc à mon tour, je reboucle ma ceinture, j’essaie de me ressaisir, pas facile après ce petit moment de distraction… je regarde ma montre, ça n’a duré que quelques minutes, mais j’ai l’impression que ça fait très longtemps que j’ai quitté le « coté scène »… je suis complètement dépaysé, je ne sais plus où j’habite… c’est limite si je me rends compte où je suis… sacré mec…

    Pendant que je sors à mon tour de la cabine et que je me dirige vers un lavabo pour me laver les mains encore moites de nos jus, je me fais la réflexion que, franchement, ça ne me dit plus rien de retrouver les anciens camarades… tout dont j’ai envie c’est de partir de là et de jouer un deuxième round rue de la Colombette…

    Mais une longue soirée est prévue, et il faudra encore passer par la case Esmé avant d’espérer en découdre à nouveau avec le beau brun… la soirée s’annonce longue… et ce que je ne sais pas encore c’est que l’Esmé ne sera pas vraiment la dernière étape de ce samedi soir de dingue…

    Je ferme l’eau et je commence à me sécher les mains, le bruit assourdissant de l’air chaud propulsé à grande vitesse m’empêche d’entendre le bruit de la porte battante.

    Il m’a capté avant que je le capte. Je suis surpris de le voir juste à coté de moi. Lui, en revanche, il n’a pas du tout l’air pas surpris de me trouver là…

    Je tente de lui sourire. Il me sourit à son tour. C’est un beau sourire, dans lequel j’ai pourtant l’impression de déceler comme un pincement, un petit malaise…

    Thibault est là…

    Et je crois qu’il a tout pigé. Comme d’hab. Et je crois qu’au fond de lui quelque chose le dérange… je crois qu’il est un peu jaloux… je crois qu’il a mal… un peu… beaucoup… je me sens soudainement très mal à l’aise… je l’aime beaucoup et je ne veux pas le blesser… je veux être son ami, je ne veux pas le fâcher… mais comment être potes s’il en pince pour le gars que j’aime ?

    Mais qu’est ce qu’il est beau, lui aussi, et touchant avec cette note de tristesse dans son regard… et qu’est-ce qu’il a l’air dépité lorsqu’il me lance, le regard fuyant :

    « Ah, t’es là… toi aussi… ».

    Sacré Thibault…

    « J’y retourne, à de suite… » sera ma seule réponse, avant de quitter les toilettes et de revenir dans la salle principale. Je ne peux pas soutenir son regard, le malaise entre nous est trop grand, il me faut prendre l’air…

    Soudainement, j’ai envie de retrouver les camarades, j’ai besoin de cette diversion pour ne pas devoir affronter Thibault ou Jérém tout de suite… ainsi, je me mélange à un groupe qui est en train de discuter à une table. Dès que je pose mon fessier sur la chaise, quelqu’un me demande :

    « Tu bois quelque chose ? ».

    La réponse s’affiche clairement dans ma tête… « Non, merci, de viens de boire, et je veux garder cet arrière goût délicieux le plus longtemps possible dans ma bouche… ».

    Mais dans les faits je me limiterai à hocher ma tête tout en souriant en lâchant un « Non, merci… », tout en suivant leur conversation d’une oreille distraite…

    Car, en réalité, toute mon attention est accaparée ailleurs… accoudé au comptoir, les jambes légèrement écartées, le bassin vers l’avant, la bosse bien en vue, Jérém a toute l’attitude d’un mec qui voudrait se faire sucer encore… enfin… presque… car, à bien regarder, on dirait plutôt qu’il apprécie cet appui pour récupérer de l’effort récent… oui, Jérém est comme ailleurs, il a l’air bousculé comme s’il venait de se faire secouer par une décharge électrique…

    Entouré de Bruno et de Thierry, chacun une bière à la main, Jérém est en train fumer une cigarette… ses deux acolytes déconnent entre eux et Jérém les regarde faire… si seulement ils savaient ce qu’il vient de vivre leur pote, leur coéquipier de rugby… rien de moins que ce que j’aime imaginer comme la pipe de sa vie… sacré contraste, n’est pas mon beau Jérém, que de se retrouver là parmi eux, comme si de rien n’était… comme moi, parmi mes anciens camarades… comme si de rien n’était… si seulement ils savaient le bonheur que je viens de vivre… ce bonheur que, si je m’écoutais, je crève d’envie de crier à tout rompre… pourtant je suis condamné à garder ça pour moi… c’est notre petit secret… et il faut admettre que ça a un coté extrêmement excitant…

    Je regarde Jérém et voilà que le fait de le savoir certainement encore en train de penser à l’orgasme que je lui ai décroché, ça me fait penser a tous ces « mystères » qui nous entourent et qui font partie de la vie des petits cons qu’on peut croiser dans la rue, le bus, les bars… à l’instant où on les croise, que viennent-ils de faire, 5 minutes avant, 1heure avant, la veille, la nuit d’avant ? Peut-être viennent-ils de baiser, de se branler ?

    C’est grisant de savoir que pour une fois j’ai la réponse, car en l’occurrence je suis une partie de la réponse…

    Sa bière posée sur le comptoir juste à coté de lui, sa main libre se faufile à nouveau sous le t-shirt, en contact avec ses abdos… est-ce qu’il ressent dans son bas ventre la même douce chaleur que je ressens dans le mien et qui me donnerait envie de passer la main de la même façon, si seulement j’osais le faire ?

    Oui, il a l’air ailleurs, il respire profondément… est-ce qu’il ressent la même douce fatigue que je ressens en moi et qui rend désirable plus que tout autre chose, l’appui rassurant de son matelas plutôt que de rester planté là en attendant que la nuit s’écoule ?

    Jérém tire sur sa clope, longuement, lentement… ce geste est chargé d’une volupté saillante… petit bonheur qui semble prolonger et faire écho à celui, bien plus grand, que je viens de lui offrir… petit bonheur qui semble nécessaire pour « calmer » le petit cafard qu’attend un garçon juste après l’orgasme… il ôte la cigarette de ses lèvres, il garde la fumée, il lève le visage vers le plafond, un peu comme je l’ai vu faire par moment pendant que je m’occupais de sa queue… c’est vers le haut qu’il expire lentement la fumée qui vient de chauffer ses poumons et qui petit à petit calme son rut…

    A quoi pense-t-il le beau brun à ce moment là ? Au plaisir de dingue qu’il vient de prendre dans ma bouche ? A ma mutinerie, à ma façon de prolonger l’attente d’une pipe, malgré ses injonctions d’y aller tout de suite ? A ma façon de le sucer, à son jus qui glisse en moi, à mon regard chargé, débordant d'envie ? A mon cul, dosé par sa queue enfoncée jusqu’aux couilles pendant qu’il me laissait me branler, la revanche au défi que j’ai osé lancer a sa virilité ?

    Sa cigarette prend fin, le mégot écrasé dans le cendrier, il reprend sa bière sans retirer sa main de dessous son t-shirt… il boit une bonne gorgée de bière en inclinant la tête vers l’arrière, je vois le liquide pétillant glisser dans sa gorge, tout comme j’ai senti le flux de son jus glisser dans la mienne quelques minutes plus tôt…

    Je suis le moindre mouvement de sa pomme d’Adam et de son petit grain de beauté… et lorsque la bière a fini de couler dans sa gorge, une fois sa soif étanchée, je le vois respirer profondément, secouer sa tête comme pour se ressaisir…

    Et lorsque ce mouvement s’arrête, voilà… à ce moment là mon Jérém a cet air… cet air que je lui connais très bien et qui me rend dingue de lui et au même temps tout particulièrement fier de moi… oui, Jérém porte sur lui cet air de mâle comblé, de mâle repu qui lui va si bien…

    Vraiment il n’y a pas à dire… il n’y a pas de secret… un homme bien sucé, est un homme heureux.

     


    votre commentaire