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    Pendant la balade à cheval, en milieu d’après-midi, il fait très chaud. Et nous n’avons plus d’eau, ni Jérém, ni moi. Ni même Charlène.
    « Et il nous reste au moins deux heures avant d’arriver chez moi » fait cette dernière.
    « On aurait dû prendre davantage d’eau » regrette Jérém.
    « C’était pas prévu qu’il fasse si chaud » fait Charlène, avant d’enchaîner « et en plus j’ai l’impression qu’Unico boîte ».
    « C’est pas qu’une impression. Ça fait un petit moment que je le sens sensible des pieds ».
    Et, ce disant, mon bobrun descend illico de son étalon, il lui attrape le pied et regarde à l’intérieur du sabot.
    « Y a un clou du ferrage qui est en train de se barrer. Il faudrait le déferrer ».
    « Tiens, j’ai une idée. On arrive à la ferme de Florian. On va se faire payer un coup à boire et se faire prêter des outils pour le déferrer… ».
    « Florian, l’ex de Loïc ? » je demande.
    « C’est ça. C’était un cavalier lui aussi, avant la rupture avec Loïc, il y a un an… non, deux ans déjà, le temps file si vite. En plus, ça me fera plaisir de lui faire un petit coucou, ça fait un moment que je ne l’ai pas vu. ».
    Dans mon for intérieur, je suis curieux de rencontrer ce Florian. Dès que j’en ai entendu parler par Charlène et Martine, j’ai eu de l’empathie pour ce gars qui a vécu une séparation difficile. Je ne le connais pas, et pourtant j’ai envie de voir comment un homo s’assume à l’âge adulte, j’ai envie de voir comment on se reconstruit après une rupture. J’ai aussi envie de savoir à quoi il ressemble. Et quel genre de mec il peut bien être.
    Sur notre droite, un grand pré en pente clôturé enferme un troupeau de brebis à la laine bien blanche. Le petits herbivores sont en train de pacager paisiblement en plein soleil.
    Et alors que nous approchons de la maison aux volets bleus, deux labradors, l’un sable, l’autre noir, déboulent à notre rencontre. Le noir aboie de façon insistante, son jappement est sonore et retentissant.
    « On va se faire bouffer » je commente.
    « Mais non, ils sont sages comme des images » fait Charlène « Gaston, Illan, c’est moi… ».
    Pour toute réponse, le labrador noir aboie un peu plus fort encore, le corps massif tout tendu, le poil brillant hérissé autour de l’encolure, comme s’il se préparait à attaquer.
    « Et pourtant, il y eut une période où l’on se voyait très souvent » elle continue, sur un ton empreint d’une sorte de nostalgie « ce qui est chiant, quand un couple d’amis se sépare, c’est de devoir en quelque sorte choisir lequel on va continuer à fréquenter. Allez, les toutous, du calme ! ».
    Les mots de notre « guide » semblent apaiser les deux labradors. En effet, après quelques derniers aboiements insistants, les deux gros toutous se contentent de nous escorter jusque dans la cour de la ferme.
    Un mec d’une trentaine d’années vient de se pointer sur le seuil de la maison, alors qu’une musique vive s’échappe de la porte ouverte. Le type nous regarde, en utilisant sa main comme d’un parasol pour se protéger du soleil. Le mec est grand, un peu enrobé, châtain, les cheveux frisés. Il est habillé d’un vieux t-shirt rouge délavé et d’un short coupé dans un jeans qui a fait son temps.
    « Charlène ! » je l’entends s’exclamer, la voix joyeuse, et avec un grand sourire lorsqu’il réalise qu’il s’agît de son ancienne copine « du cheval ».
    Cette dernière descend de sa monture, passe les rênes à Jérém, et s’empresse d’aller lui claquer la bise.
    Jérém et moi regagnons le sol à notre tour et Charlène fait les présentations.
    « Florian, voici Jérémie et Nicolas… ».
    « Mais on s’est déjà vu, non, Jérémie ? » fait Florian.
    « Oui, je crois ».
    « Jérémie n’est pas venu souvent nous voir ces dernières années, mais c’est un cavalier, et un bon cavalier. Nicolas, c’est un ami à lui, qui est venu s’essayer à l’équitation ».
    « Je me disais bien que ta tête ne m’était pas inconnue » fait Florian « j’ai du mal à me souvenir des nanas, mais je n’oublie jamais un beau mec ».
    Jérém sourit, il a l’air flatté. Qu’est-ce qu’il aime quand on lui dit qu’il est beau !
    Et quand je pense qu’en plus de plaire aux gays, Jérém est également du genre charmeur, qui aime être admiré, désiré tous azimuts : je me dis que j’ai vraiment vraiment vraiment du souci à me faire pour Paris. Et à plus forte raison maintenant qu’il commence à assumer son attirance pour les mecs, maintenant qu’il a découvert et bien apprécié le plaisir entre mecs.
     « Et de moi, tu te souviens, espèce de goujat ? » fait Charlène.
    « T’es qui, toi ? » se marre Florian.
    « Celle qui va te mettre une bonne fessée ! ».
    « Ça me fait plaisir de te voir ».
    « Moi aussi. Tu nous manques à l’asso de cavaliers ».
    « Vous aussi vous me manquez… enfin, certains plus que d’autres ! ».
    Charlène éclate dans un rire sonore.
    « Je veux bien te croire ».
    « Je vois que t’as toujours la pêche, et que tu montes toujours, ça me fait plaisir ».
    « Je monterai jusqu’à que je tiendrai debout. Toi, en revanche, t’as arrêté le cheval ».
    « Oui ! Et je ne m’en porte pas plus mal ! ».
    « Ce n’était pas vraiment ton truc ».
    « Non, j’ai toujours eu peur à cheval. Je crois que pour ne pas avoir peur, il faut commencer quand on est très jeunes et inconscients. Moi j’ai commencé à monter à trente ans. Et dès la première fois, je n’ai jamais cessé de me demander quand je tomberais. Et je suis tombé plus que mon dû ».
    « Si ce n’est pas une passion, il vaut mieux ne pas se forcer ».
    « Je montais surtout pour lui faire plaisir, pour partager quelque chose à deux. Mais ça n’a pas suffi ».
    « Tu as fait tellement d’efforts pour sauver ton couple. Hélas, parfois les choses nous échappent des mains et il n’y a rien à faire ».
    « C’est ça, merde au passé ! Alors quel bon vent t’amène ? ».
    « On a fait la grande boucle dans la forêt et on est à court d’eau. En plus, le cheval de Jérémie est en train de déferrer. Alors on se demandait si tu pouvais nous donner de l’eau et nous filer une pince pour sortir les clous qui restent et enlever le fer ».
    « Mais avec plaisir. Viens voir à l’atelier, si tu trouves ton bonheur » fait Florian à l’intention de mon bobrun.
    Jérém le suit à l’atelier. Les deux gars se postent devant un panneau mural garni d’ustensiles de toute sorte, clefs, pinces, marteaux. Mon bobrun de dos, sa plastique moulée dans le coton gris marqué par une trace de transpiration le long de la colonne vertébrale, il est juste sexy à se damner.
    « Prends ce que t’as besoin » fait ce dernier, tout en lorgnant du côté de mon Jérém en train de choisir et de décrocher les outils.
    « Je crois que j’ai tout ce qu’il me faut, merci ».
    Jérém revient vers son cheval, il reprend le pied d’Unico et tente d’extraire les clous, non sans effort. Après une première réticence, Unico se laisse faire bravement.
    « Tu as besoin d’un coup de main ? » je lui demande.
    « Non, ça va aller. Mais ça va prendre un certain temps ».
    « T’es sur que t’as besoin de rien ? » insiste Charlène.
    « Merci, c’est une affaire entre lui et moi » il plaisante.
    « On te laisse faire, alors. Nous on va boire un coup » fait Florian.
    « Oui, merci ».
    « Venez donc à l’intérieur, j’ai même de la pastèque au frais ».
    « Ce n’est vraiment pas de refus ».
    Au fur et à mesure que nous approchons de la maison, la musique m’enveloppe un peu plus à chaque pas, les décibels me happent, me font vibrer. Et lorsque nous passons la porte d’entrée, je suis instantanément plongé dans un univers sonore saisissant.
    Dans un angle du séjour trône une grande chaîne hi-fi, surmontée d’une platine vinyle massive. Un disque 33 tours tourne d’une allure paisible et régulière, alors que deux grandes enceintes à chaque coin de la pièce envoient « du pâté », délivrant le son qui arrive à mes oreilles, dans ma chair, dans mes tripes.
    Florian s’empresse de baisser le volume sans pour autant arrêter le disque.
    « Ici je n’ai pas de voisins » il nous explique « alors, depuis que je suis seul, je ne me gêne pas pour mettre la musique à fond ».
    « C’est ça qui est bon quand on est seuls, c’est qu’on fait ce qu’on veut » commente Charlène.
    Je suis aimanté par le mouvement hypnotique de la galette sur la platine, si loin de la frénésie de rotation d’un cd, je suis happé par cette pointe qui parcourt patiemment son sillon pour en extraire le son. Regarder un disque tourner c’est apaisant, c’est presque comme regarder une clepsydre, on a l’impression de regarder le temps en train d’avancer.
    A cet instant précis, je découvre le disque. Enfin, je le redécouvre. Maman avait un tourne disque, mais il était loin d’avoir la gueule et le son de l’équipement de Florian. Quant à moi, depuis que j’écoute de la musique, je n’ai jamais acheté de disque. J’ai commencé avec des cassettes. Et je suis rapidement passé au cd. Avant de me laisser conquérir, quelques années plus tard, par le mp3.
    En approchant un disque « en action », après des années où je n’ai pas vu tourner un seul disque, je me rends compte d’à quel point cette galette en vinyle est un bel objet. Sa robe noir brillant capte la lumière et en met plein la vue. Le son qu’il envoie est chaud et vibrant. Et le crépitement de ses sillons rappelle d’une certaine façon le crépitement du feu dans une cheminée. C’est à la fois charmant, rassurant, reposant, chaleureux et doux.
    A côté de la chaîne hi-fi est installé un meuble rempli de disques, exposés sur la tranche. Et devant ces importantes archives musicales, une pochette est debout, appuyée contre l’alignement de ses consœurs, exposée à la vue. C’est certainement la pochette du disque qui est en train de jouer.
    L’image, assez sombre, représente un beau garçon en demi-buste, de profil, la barbe d’une semaine, une grande boucle en forme de croix à l’aplomb de son oreille. Le gars est habillé d’un blouson en cuir qu’il soulève avec ses mains et dans lequel il semble vouloir cacher son visage. Entre les deux pans, on devine une portion de torse velu. Pas de titre d’album, ni de nom du chanteur bogoss.
    « Dis-donc, t’as une sacrée collection de disques » lance Charlène à Florian, alors que la chanson se termine et un petit crépitement de fond fait la liaison avec le titre suivant.
    « Et encore ils ne sont pas tous là. La musique c’est mon plaisir. Je crois que je pourrais vivre sans sexe, mais jamais sans musique ».
    « A ce point… ».
    A nouveau je me laisse happer par le disque et sa rotation perpétuelle. Et soudain le titre suivant démarre.
    Des notes de piano, un air doux et un peu mélancolique. Une ambiance jazzy. Puis vient la voix. C’est une voix feutrée et pourtant bien virile, une voix de jeune mâle, comme une caresse à la fois très douce et terriblement sensuelle, une vibration qui touche des cordes sensibles, qui me touche au cœur. Et en quelques secondes à peine, elle m’émeut jusqu’aux larmes.

    Vinyle vidéo :
    https://www.youtube.com/watch?v=mwFVCLoeVDo&list=WL

    Cette voix, cette vibration masculine fait dresser mes poils, jusqu’au cuir chevelu, elle me file une boule au ventre, et l’envie de pleurer. Je crois que je n’ai jamais entendu quelque chose de si beau.
    Car il y a dans cette musique et dans cette voix une sensualité qui donne envie de faire des câlins, de faire l’amour avec l’homme qu’on aime.
    Comme promis, Florian nous offre des boissons et de la pastèque. Mais moi j’ai complètement oublié ma soif et ma fatigue, tout ce dont j’ai besoin à cet instant c’est de silence autour de moi pour être seul avec cette voix qui me fait vibrer et avec mon Jérém avec qui j’ai envie de faire l’amour.
    La porte d’entrée est restée ouverte. Les deux labradors nous ont suivis à l’intérieur et se sont installés d’un côté et de l’autre de la chaise occupée par Florian. Ils se sont postés en position assise, la truffe à l’affut du moindre petit geste de leur maître en train de découper la pastèque.
    Une tranche atterrit dans les mains de Charlène, une autre dans les miennes. Florian découpe la sienne en petit morceaux et il en balance un à chaque labrador, à tour de rôle. Ces derniers gobent voracement l’aubaine sans même lui laisser toucher le sol.
    « Ils sont doués, dis-donc » fait Charlène.
    « On s’entraîne tous les jours ».
    Je regarde le labranoir et sa truffe de gros toutou adorable et soudain je repense à Gabin. A Stéphane. Ça fait un moment que je n’ai pas de leurs nouvelles. Qu’est-ce qu’ils deviennent ? Est-ce que tout se passe bien pour eux ? Est-ce que Stéphane a trouvé un mec à Bâle ? Quelle belle rencontre, celle avec le garçon au labrador.
    Pendant que Charlène et Loïc discutent tout en mangeant leurs tranches de pastèque, je me laisse amener de plus en plus loin par cette voix et par les couplets qu’elle me chuchote à l’oreille.
    La chanson parle d’un amour unique et irremplaçable. Au détour d’un sillon, la beauté mélancolique des couplets est soulignée par l’envolée de la musique, par la montée en puissance de la voix :

    But remember this/Mais souviens-toi de ceci
    Every other kiss/Chaque autre baiser
    That you ever give/Qu’il t’arrivera de donner
    Long as we both live/Tant que nous vivrons tous les deux
    When you need the hand of another man/Lorsque tu auras besoin de la main d'un autre homme
    One you really can surrender with/Un homme auquel tu puisses véritablement t'abandonner
    I will wait for you/Je t'attendrai
    Like I always do/Comme je le fais toujours
    There's something there/Il y a quelque chose là-dedans
    That can't compare with any other/Que je ne peux comparer à rien d'autre

    Puis, la chanson s’installe à nouveau dans la douceur, dans un duo piano-voix qui me donne des frissons.

    You are far/Tu es loin
    When I could have been your star/Alors que j'aurais pu être ton étoile
    You listened to people/Tu écoutais des gens
    Who scared you to death, and from my heart/Qui te glaçaient le sang, et du fond de mon cœur

    Strange that I was wrong enough/Il est étrange que je me suis trompé à ce point
    To think you'd love me too/Pour croire que tu m'aimais aussi
    I guess you were kissing a fool/J’imagine que tu as embrassé un idiot
    You must have been kissing a fool/Tu devais embrasser un idiot

    Des crépitements plus marqués d’échappent des enceintes, puis le silence se fait, un silence par-dessus lequel se fait entendre un léger bruit de mécanique bien réglée, le mouvement du bras du tourne disque qui se lève et se remet seul sur son support, alors que la galette cesse de tourner.
    La chanson vient tout juste de se terminer et elle résonne toujours en moi. J’ai vraiment l’impression que je n’ai rien entendu de si beau auparavant. Je crois que même sans comprendre les mots, la douceur et la mélancolie de cette voix savent parler directement au cœur et transmettre une émotion incroyable.
    J’en ai le souffle coupé. J’ai des frissons, un nœud au fond de la gorge, j’ai la chair de poule, les poils dressés sur les bras. Je ressens une sensation d’électricité qui part d’entre mes reins, remonte le long de ma colonne vertébrale, fait vibrer mes omoplates, crispe mon cou et se perd dans le bas de ma nuque. Je suis retourné comme une chaussette, comme si j’avais pris une claque en pleine figure. Je sens les larmes mouiller mes yeux.
    Un disque a un début, un développement, et une fin. Suivis par le silence. Un silence aussi long que la flemme de celui qui écoute de se lever et aller remettre la galette à tourner, la faire démarrer depuis le début, ou choisir un morceau précis, ou pour la retourner. J’ai très envie d’écouter à nouveau ce petit chef d’œuvre que je viens de découvrir. Et pourtant, je savoure le silence qui suit le chef d’œuvre et qui le fait apprécier par le manque. Ne dit-on pas que le silence après du Mozart, c’est toujours du Mozart ?
    « Ça va Nico ? » me demande Charlène.
    « Oui, ça va » je lui réponds, en essayant sans succès de cacher l’émotion qui s’invite dans ma voix.
    « T’as l’air tout ému ».
    « C’était très très beau ».
    « Elle se nomme Kissing a fool » fait Florian « et c’est vrai qu’elle est magnifique. Je crois que la première fois que j’ai entendu cette chanson, j’ai été aussi touché que toi. C’était il y a environ quinze ans. Ça fait plaisir de voir que la magie opère toujours, même aujourd’hui, et même sur les nouvelles générations ».
    « J’avoue que c’est une très belle chanson » confirme Charlène « au fait, c’est qui le chanteur ? ».
    « C’est George Michael » fait Florian, en se levant et en approchant du tourne disque.
    Ah, oui, George Michael. Je me disais bien que cette voix ne m’était pas inconnue. Je ne connaissais pas cette chanson, en revanche.
    Un instant plus tard, j’entends le bruit de diamant qui ripe bruyamment sur le vinyle, suivi par quelques crépitements, avant qu’à nouveau des notes de piano empreintes de tristesse et de beauté, les mêmes que quelques minutes plus tôt, viennent me faire vibrer d’émotion.
    Florian a remis le même titre.
    « Merci » j’ai envie de lui lancer.

    Clip officiel :
    https://www.youtube.com/watch?v=omsBhh8vA7c

    Et la voix revient, apportant avec elle le même frisson que la première fois.
    Le son d'un vinyle sur une bonne chaîne hi-fi, on n’a encore jamais rien fait de mieux en termes d'expérience d'écoute musicale. Même le cd n’arrive pas à rivaliser avec la richesse et l’authenticité du son d’un bon vieux vinyle. Et certainement pas avec son charme daté mais jamais démodé. Porté par la puissance et la fidélité des grandes enceintes, à nouveau cette voix, cette caresse me prend aux tripes, elle m’enveloppe d’une sorte de douceur virile qui m’émeut.
    « Ah, George Michael, je me disais bien que je connaissais cette voix » se souvient Charlène « ma fille en était folle quand elle était ado, elle écoutait ses cassettes en boucle ».
    « On était nombreux à en être fou à cette époque, il était juste canonissime, il était sexy à mourir, en plus d’être un musicien génial et un très bon interprète. Ferme les yeux et écoutes. Tu te laisses transporter, et t’as l’impression que c’est à toi et à toi seul qu’il chuchote à l’oreille ».
    Je fais l’expérience suggérée par Florian, je ferme les yeux et je me concentre sur la voix. Et j’ai effectivement l'impression que le beau George est penché sur mon oreille et qu'il me prend dans ses bras chauds et rassurants. Comme Jérém après la pause déjeuner tout à l’heure.
    J’ai tellement envie d’être dans les bras de mon mec. J’ai envie de l’embrasser, de danser avec lui sur cette musique, sur cette voix, danser serrés l’un contre l’autre, et ne plus jamais se quitter. Cette musique, cette voix donnent envie de dire des mots doux à la personne qu’on aime.
    « Cette voix me fait un effet de fou » lâche Florian.
    « Moi aussi » j’ajoute à mon tour.
    « Quand on pense qu’il n’avait que vingt ans quand il a chanté ça » il explique.
    Vingt ans. Que vingt ans ! Un petit mec de vingt ans capable de graver une telle émotion dans le sillon, ça a tout mon respect.
    « C’est pas lui qui a fait une chanson qui s’appelle Faith ? » se souvient Charlène.
    « Oui, oui, c’est bien lui. A l’époque, le clip passait en boucle sur MTV, lui et son jeans mettant en valeur son beau cul, lui et son blouson en cuir sur débardeur blanc, lui et ses chaussures pointues, ses grandes lunettes de soleil, sa grande boucle d’oreille en forme de croix, sa guitare, ses déhanchements sexy. Lui, beau comme un Dieu !
    Et il a fait un autre clip très sexy, I want your sex. A un moment, on le voyait torse nu au lit avec une nana. Il était sexy à un point inconcevable. Je pense qu’avec ces deux clips, il a inspiré un nombre difficilement quantifiable de plaisirs solitaires autour de la planète ».
    « Ooooohhhh !!!! » feint de s’offusquer Charlène.
    « Pendant l’été ’87 » continue Florian « j’avais 17 ans et j’étais en vacances à Port Leucate avec ma cousine. Nous étions en train de refaire le monde et de mater les beaux mecs sur la plage, tranquillement allongés sur nos serviettes. Un gars s’était pointé et avait allongé sa serviette pas très loin de nous. Le mec était seul et il était beau comme un dieu. Il devait avoir quelques années de plus que moi, peut-être 20-22 ans, et je me souviens que sa démarche et son attitude dégageaient une assurance qui m’impressionnait. Il était brun, il avait une belle gueule, la peau mate. Il avait un short rouge et des grandes lunettes de soleil. Et il était torse poil ».
    « Dis donc, tu as de la mémoire » s’étonne Charlène.
    « Une mémoire très sélective pour les bogoss. Et lui, il était vraiment bogoss. Il était bien gaulé, il avait un torse en V, des pecs saillants et des beaux abdos. Et sur toute la hauteur de ces abdos, il y avait une inscription, sur deux lignes, tracée en lettres capitales bien épaisses. Ce n’était pas un tatouage, ça avait l’air d’avoir été dessiné, au Stabilo noir ou au stylo. Cette inscription disait :

    I  WANT
    YOUR SEX

    « La dégaine de ce gars, beau et sexy comme pas possible, portant sans pudeur cette inscription évoquant sa sexualité, l’air fier de son corps et de sa virilité, était pour moi, ado, comme un appel sauvage au sexe. Je crois que j’ai bandé sur le champ, que j’ai eu envie de lui comme d’aucun gars auparavant. C’était vraiment violent. Tout en lui semblait évoquer une sexualité bouillonnante, c’était comme un truc invisible qui se dégageait de sa simple présence et qui m’étouffait.
    Evidemment, il ne m’a pas décroché un seul regard.
    Je me suis demandé qui avait pu faire cette inscription sur ses abdos. Car elle avait dû certainement prendre pas mal de temps, et elle était trop nette, il n’avait pas pu se la faire tout seul. Est-ce que c’était l’œuvre d’une nana particulièrement enthousiaste de ses prestations sexuelles ? Et si c’était le cas, quel bonheur sensuel et sexuel avait bien pu pousser cette nana à écrire cela après l'amour, à vouloir à ce point flatter l’ego du beau mec ? Quelles caresses, quels plaisirs avait connu ce gars autour de cette inscription ?
    Je crois que c’est la première fois où j’ai violemment fantasmé sur la sexualité d’un mec, un mec complètement inaccessible et dont la simple vision me vrillait les tripes.
    Bref, c’était la première fois que la sexualité et le plaisir d’un beau gars m’était envoyée à la figure d’une façon si directe, presque violente, et par conséquent la première fois où je me suis posé les questions que depuis me hantent à chaque fois que je croise un beau mec.
    Avant ce jour j’étais un gars très timide, introverti, un gars qui se cherchait, qui ne voulait pas voir l’évidence, mon attirance pour les gars. Je crois que cet épisode a marqué mon éveil à la beauté masculine et à la sensualité. Ce que j’ai ressenti ce jour-là était trop violent pour que je puisse l’ignorer. La sensualité de ce gars m’a mis face à moi-même. Alors, d’une certaine façon, c’est un peu grâce à George Michael que j’ai commencé à accepter mon orientation sexuelle ».
    « Ça doit être violent, en étant adolescent, de réaliser qu’on n’est pas comme la plupart des copains, qu’on est attiré par des gars qui souvent ne sont attirés que par les nanas » considère Charlène.
    « Je ne te le fais pas dire » fait Florian, songeur.
    « Je ne te le fais pas dire » je lâche, comme un cri du cœur.
    Nos voix se superposent, ce qui provoque l’hilarité de Charlène.
    Définitivement, j’aime bien ce Florian. Je me reconnais en lui, dans ses ressentis, dans ses fantasmes, ses désirs, ses peurs, dans sa façon de découvrir ses penchants, ses attirances, dans ses frissons face aux bombasses mâles. Et aussi dans cet épisode de l’éblouissement face à la bogossitude extrême, comme ça a été le cas le premier jour du lycée en voyant Jérém, qui a été comme une révélation, et qui a provoqué le déclic, le début de prise de conscience de l’irrépressibilité de cette attirance et de sa légitimité. Lui aussi, comme moi, a dû se dire : « si regarder un gars me donne autant de frissons, ça ne peut pas être une mauvaise chose. En tout cas, ça ne l’est pas pour moi. Pourquoi j’essaierais de m’opposer à cette attirance ? Je n’ai pas à le faire, je ne veux pas le faire. Car elle me fait être en phase avec moi-même, car elle me rend heureux ».
    Je me reconnais également en Florian dans le fait d’avoir une cousine qui a certainement dû être sa confidente comme Elodie l’est pour moi, d’avoir été à la plage avec elle, à quelques dizaines de bornes à peine de notre plage à nous, celle de Gruissan.
    « Kissing a fool » se termine pour la deuxième fois et j’en redemande. Pendant quelques secondes, le crépitement du vinyle se charge de combler le vide laissé par la musique, avant que le bras du tourne disque ne revienne en position de repos.
    Florian me jette un regard, me sourit. Et sans attendre, il se lève, et remet la même chanson pour la troisième fois.

    https://www.youtube.com/watch?v=mwFVCLoeVDo&list=WL

    « Comment tu vas, sinon ? » lui demande Charlène lorsqu’il revient s’asseoir près de nous.
    « Pas trop mal ».
    « Tu y penses toujours ? ».
    « Comment ça pourrait en être autrement, après douze ans de vie ensemble ? ».
    « Tu ne lui parles toujours pas ? ».
    Florian marque une pause. Il me jette un regard, et il semble réaliser qu’il n’est pas seul à seul avec Charlène, qui à l’évidence doit être sa confidente. Mais un instant plus tard, après avoir pris une bonne inspiration, ses réticences semblent s’évaporer. Comme s’il me faisait confiance, comme si le fait que « qu’on se ressemble » le mettait à l’aise.
    « Non, je ne lui parle pas ».
    « Tu lui en veux toujours ? ».
    « Je lui en ai voulu de m’avoir quitté, mais je crois que ce n’est même plus le cas. Aujourd’hui, j’ai juste envie de garder de la distance. Et, surtout, pas envie d’entendre parler de sa super nouvelle vie avec l’autre machin ».
    « Tu sais, c’est pas non plus la joie tous les jours… ».
    « Ah bah, j’espère bien ! Ils ont voulu se « marier », alors, bon divorce ! ».
    « T’es mauvais ! ».
    « Je pense que je lui reparlerai quand il se sera fait larguer par son pouffiau ».
    « Son quoi ? ».
    « Pouffiasse, nom féminin, pouffiau, déclinaison au masculin ».
    « J’ai pigé ! » elle se marre.
    « En vrai, ce qui me guérirait, ce serait qu’il assume sa part de responsabilité dans la fin de notre histoire, alors qu’il a toujours soutenu dur comme fer que tout était de ma faute ».
    « Tu sais, quand l’amour n’est plus là, tout est prétexte et mauvaise foi » fait Charlène.
    « Mais tout ça, ça n’a plus grande importance. Tout ce que je veux, c’est ne rien savoir. Je voudrais même oublier qu’ils existent, ces deux-là. Celui qui quitte devrait avoir la décence de partir loin et de ne plus donner des nouvelles jusqu’à ce qu’on lui en redemande, éventuellement, un jour ».
    « T’exagères ».
    « Je n’y peux rien, leur bonheur me hérisse le poil ».
    « Tu ne devrais pas garder cette rancœur en toi ».
    « Notre séparation a duré trop longtemps, ça m’a usé ».
    « Je te l’avais dit qu’il fallait lâcher prise plus tôt ».
    « Je sais, mais je n’étais pas prêt ».
    Pendant ce temps, le disque continue de tourner et d’envoyer les couplets de cette magnifique chanson.

    People/Les gens
    You can never change the way they feel/Tu ne peux jamais changer leurs sentiments
    Better let them do just what they will/Il vaut mieux de les laisser faire ce qu'ils veulent
    For they will/Parce qu'ils le feront,
    If you let them/Si tu les laisses
    Steal your heart from you/Te voler ton cœur

    « Tu sais, tu n’es pas le seul à avoir connu une séparation difficile » continue Charlène « regarde à l’ABCR, depuis 10 ans, les trois quarts des couples ont explosé. Nadine, Martine, Satine, Emelyne. Quand l’amour finit, il n’y a pas de fautif. C’est comme ça, c’est la vie ».
    « Parfois, j’ai l’impression que cette séparation a brisé quelque chose en moi. Ma capacité à faire confiance, à tomber amoureux à nouveau. Et j’ai l’impression que ce « quelque chose » personne ne me la rendra, jamais ».

    You are far/Tu es loin
    I'm never gonna be your star/Je ne serai jamais ton étoile
    I'll pick up the pieces/Je ramasserai les morceaux
    And mend my heart/Et réparerai mon cœur
    Maybe I'll be strong enough/Peut-être serai-je assez fort
    I don't know where to start/Je ne sais pas par où commencer

    « Je ne crois pas que notre capacité à être amoureux s'émousse avec le temps ou les déceptions » considère Charlène « je pense juste que les premières fois on se laisse transporter par ce sentiment qui est nouveau pour nous et qu'on ne cherche pas à maîtriser, car c’est tellement agréable.
    Après une rupture, on est plus prudents, on réfléchit deux fois avant de se donner tête et corps perdus dans une relation. On se protège. Parfois trop.
    Je sais que c’est difficile, parce que ce n'est pas toi qui as fait ce choix de rupture, mais tu dois arriver à tourner la page ».
    « Accepter de tourner la page, c’est accepter le fait que toute l’énergie que j’ai mis dans mon couple dès le départ, jusqu’aux efforts déraisonnables pour le sauver quand il était déjà foutu, ça n’a servi à rien. A part à me faire quitter pour quelqu’un d’autre ».
    « Après une rupture, on peut avoir le cœur comme « asséché », mais pas de façon irréversible » continue Charlène « le tout est de savoir réapprendre à recevoir de l’autre et à faire confiance pour le réhydrater. Et puis l'amour ne nous arrive pas toujours tout ficelé, il est parfois en kit et demande de la patience, ne serait-ce que pour décrypter la notice de montage ».
    « Cette maison, cette ferme pleines de souvenirs ne m’aident pas à aller de l’avant ».
    « Ça je le comprends ».
    « Et à chaque fois que je passe devant la boutique de chaussures de machin à Bagnères, j’ai envie de balancer un pavé dans la vitrine et un autre dans sa tronche ».
    « C’est pas à lui qu’il faut en vouloir, c’est Loïc qui l’a laissé rentrer dans sa vie ».
    « Je sais, je sais. Au fond, je crois que je ne veux pas de mal à Sylvain ni même à Loïc ».
    « Je crois qu’il aimerait retrouver une relation apaisée avec toi ».
    « Une relation apaisée ? J’y arriverai peut-être un jour, mais pour l’instant, je ne peux pas. Je ne supporte pas de sentir son regard « amical » à la place du regard amoureux que je lui ai connu pendant douze ans. Je ne peux pas supporter ses derniers messages, finissant par « Bises » alors qu’il y avait eu tant de « Bisous » enflammés par le passé.
    Après avoir vu de l’amour et de l’admiration dans son regard, c’est très dur de ne retrouver que de la distance. C’est horrible de réaliser un jour que celui à qui on manquait « avant » se sent désormais en cage lorsqu’il est à côté de soi, car c’est désormais quelqu’un d’autre qui lui manque et qui fait battre son cœur amoureux ».
    « Je comprends parfaitement. Mais tu sais, je crois que malgré tout, tu as toujours une place spéciale dans son cœur, et que tu l’auras à tout jamais ».

    But remember this/Mais souviens-toi de ceci
    Every other kiss/Chaque autre baiser
    That you ever give/Que tu pourras donner
    Long as we both live/Tant que nous vivrons tous les deux
    When you need the hand of another man/Lorsque tu auras besoin de la main d'un autre homme
    One you really can surrender with/Un homme auquel tu puisses véritablement t'abandonner
    I will wait for you/Je t'attendrai
    Like I always do/Comme je le fais toujours
    There's something there/Il y a quelque chose là-dedans
    That can't compare with any other/Que je ne peux comparer à rien d'autre

    « Moi aussi je pense souvent à lui. J’espère qu’il va bien, même loin de moi. Je me demande comment il va, quels sont aujourd’hui ses rêves, ses bonheurs, ses peurs, ses angoisses. Je me demande si ça lui arrive de penser à moi, de se demander comment je vais. Je me demande s’il se souvient de nos moments heureux, s’il a de la nostalgie. Je me demande si ça lui arrive de se dire que les choses auraient pu se passer autrement, que tous les deux on aurait pu faire en sorte qu’elles se passent autrement ».
    « Quand je t’écoute, j’ai l’impression qu’une partie de toi s’échine à vouloir prouver que ce qui a échoué aurait dû réussir ».
    « C’est peut-être de la fierté mal placée ».
    « On peut appeler ça comme ça, mais moi je dirais que c’est surtout un besoin de déculpabilisation. Je conçois que la fin de cette histoire soit encore pour toi un dossier obsédant. Parce qu'il y a des choses que tu n'as pas acceptées, car elles t'apparaissaient trop injustes.
    Mais il faut à un moment savoir lâcher prise, renoncer à tout comprendre, à tout analyser, sans quoi on continue son chemin comme quelqu'un qui conduirait un véhicule sans en desserrer le frein à main.
    On ne peut pas effacer le passé, et heureusement, car on doit apprendre de tout, y compris de ses propres échecs et de ce qui nous a fait souffrir. Mais il ne faut jamais lui laisser te voler ton avenir.
    Il ne faut pas laisser la peur et la rancœur nous empêcher de saisir le bonheur quand il vient sonner à notre porte. Car il ne passe pas tous les jours ».

    Strange that I was wrong enough/Il est étrange que je me sois trompé à ce point
    To think you'd love me too/Pour croire que tu m'aimais aussi
    I guess you were kissing a fool/J’imagine que tu as embrassé un idiot
    You must have been kissing a fool/Tu devais embrasser un idiot

    Le disque tourne une nouvelle fois dans le vide. Florian se lève à nouveau et s’approche de la platine. Pendant un instant, je me demande s’il va remettre une nouvelle fois cette chanson, la dernière du disque. Mais il semble avoir d’autres intentions. Il saisit la galette avec soin, et il la glisse dans sa sous pochette en papier, puis dans la pochette cartonnée. Il glisse le tout à un endroit choisi dans l’alignement de vinyles.
    Et le disque que Florian choisit en suivant, je ne le connais que très bien. Ce disque est un monument de la pop des années ’80. Lorsque je vois la couverture, je me sens chez moi.
    Regard captivant, maquillage relevé, robe de poupée, suggestive, ceinture avec mention « Boy Toy ». Définitivement, Florian et moi nous nous ressemblons à plus d’un titre.
    Le disque est sur la platine, il commence à tourner, le diamant se pose dans un sillon dans un bruit de craie qui ripe sur une ardoise, avant de capter le crépitement entre deux chansons.

    https://www.youtube.com/watch?v=G4iFot0ZMb0

    Un instant plus tard, l’intro reconnaissable entre mille parvient à mes oreilles avec la qualité inégalée du son venant d’un disque joué par un bon équipement hi-fi.
    Et sa voix arrive enfin. Une voix fragile et puissante à la fois.

    You abandoned me/Tu m'as abandonné
    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici
    Just a vacancy/Juste un vide
    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici

    J’ai de plus en plus d’estime pour ce Florian. Car un gars qui écoute du Madonna ne peut être qu’un bon gars.

    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici
    Just emptiness and memories/Juste le vide et les souvenirs
    Of what we had before/De ce que nous avions avant
    You went away/Tu es parti
    Found another place to stay, another home/Trouver un autre endroit où rester, une autre maison

    « Moi aussi j’adore Madonna » je ne peux m’empêcher de lâcher.
    « Elle est pour moi cette voix qui, même dans les jours les plus sombres, sait allumer une lueur d’espoir ».
    « C’est très juste » je commente.
    « Sa voix me fait du bien ».
    « C’est exactement ça ».
    « Je l’ai découverte avec Holiday et je ne l’ai jamais lâchée. Et elle n’a jamais lâché. Elle a toujours été là, quand j’ai été heureux, quand j’ai été triste ».
    « Moi je l’ai découverte à l’époque de « Secret »… ».
    « Tu es un petit jeune… » il se moque gentiment.
    « Mais elle m’a bien accompagné aussi ».
    « Même dans 20 ans, même si elle se mettait à chanter l’annuaire téléphonique en chinois, en roumain ou en portugais, je l’écouterai toujours »
    « Je suis allé la voir cet été à Londres ».
    « À Londres ? Chanceux, va ! ».
    « Allez, je vais vous laisser faire l’apologie de Madonna, moi je vais voir où il en est avec cette ferrure » fait Charlène.
    Elle vient tout juste de franchir le seuil de la maison, lorsque Florian change brusquement de sujet et me lance :
    « Veinard, va ! ».
    « De quoi ? » je tombe des nues, pris au dépourvu.
    « Comment ça, de quoi ? Vous êtes beaux tous les deux ».
    « Ah… » je réalise enfin.
    « Tu l’aimes, hein ? ».
    « Je suis fou de lui ».
    « C’est beau ! ».
    « Mais si je peux te donner un conseil… » il continue « n’oublie jamais que l’amour de l’autre n’est jamais acquis et que pour que la flamme dure, il faut l’alimenter un peu chaque jour.
    Ne cesse jamais de lui montrer que tu l’aimes, mais n’accepte pas tout par amour.
    Et si un jour vous emménagez ensemble, rappelle-toi qu’une vie de couple est faite de bonheurs, mais aussi de concessions, parfois de déceptions, et d’une bonne dose d’indulgence.
    Même si tu es fou de lui et que tu as envie de tout partager avec lui, garde toujours un petit coin rien que pour toi, un petit jardin secret. Garde des amis, garde tes passions, car si un jour l’amour devient souffrance, tu auras toujours quelque chose auquel t’accrocher pour ne pas sombrer, en attendant de retrouver la force de rebondir et aller de l’avant ».

    You abandoned me/Tu m'as abandonné
    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici
    Just a vacancy/Juste un vide
    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici

    Le titre se termine, le bras du tourne disque se lève et se remet une nouvelle fois à sa place, avec ce bruit caractéristique si apaisant.
    Les mots de Florian me touchent beaucoup. J’ai envie de passer des heures à discuter avec lui, ça fait du bien de croiser une sensibilité aussi proche de la mienne.
    Mais déjà Charlène revient. Et elle est accompagnée de mon bobrun, en nage. Florian lui propose une bière et Jérém la boit directement à la canette. Le t-shirt gris trempé de transpi, la pomme d’Adam s’agitant nerveusement au gré de la déglutition sous sa peau mate, moite, portant une barbe de plusieurs jours : on dirait une pub pour une célèbre marque de soda. Je ne peux décrocher les yeux de lui, et Florian non plus.
    « Alors, cet étalon ? » finit par demander ce dernier.
    « Le clou l’a blessé, il va avoir besoin de repos et de soins ».
    « Je vais m’en occuper » assure Charlène.
    « En attendant, je vais terminer la balade à pied » fait Jérém.
    « On va y aller alors ».
    « Merci » fait mon bobrun à l’intention de Florian.
    « De rien, de rien » fait ce dernier, en mettant une petite tape amicale sur l’épaule de mon bobrun.
    « Oui, merci » lance Charlène à son tour « ça m’a fait plaisir de te revoir ».
    « A moi aussi. Je suis désolé de ne pas avoir donné de nouvelles pendant tout ce temps, mais j’avais besoin de prendre du recul. J’avais besoin d’éviter tout ce qui me renvoyait à ma vie passée ».
    « J’ai bien compris, et tous les autre cavaliers l’ont compris aussi. Il y avait des jours où j’avais envie de prendre de tes nouvelles, mais je me suis forcée à respecter ton besoin de prendre de la distance. Il faudra qu’on se fasse une bouffe l’un de ces quatre, je t’inviterai avec JP, Carine, Ginette, Martine… ».
    « Avec plaisir » fait Florian, visiblement touché « j’ai hâte de les revoir. Je sais que nous sommes le genre d’amis qui se retrouvent un jour comme s’ils s’étaient quittés la veille, même s’ils se sont quittés des années plus tôt ».
    « C’est bien vrai, ça. En tout cas, je te trouve bien mieux qu’il y a deux ans. Et ça me fait plaisir de voir que tu vas mieux ».
    « J’y travaille ».
    « Le temps sera ton allié, crois-moi ».

    Charlène et moi remontons à cheval, tandis que Jérém prend le sien en longe. Et pendant que nous nous éloignons de la maison aux volets bleus, et alors que Gaston et Illan nous escortent le long des clôtures, une musique et une voix familières nous rattrapent :

    You abandoned me/Tu m'as abandonné
    Love don't live here anymore/L'amour ne vit plus ici

    A cet instant précis, je me fais la réflexion que l’amour a beau être parti, tant de choses lui survivent, et parfois longtemps : la colère, l’amertume, le sentiment d’injustice, d’humiliation, les regrets, les remords, la nostalgie, la mélancolie.
    En m’éloignant de la ferme, je n’arrive pas à cesser de penser au récit ce Florian, à son parcours. La petite complicité qui s’est créé entre nous deux alors que Charlène était sortie voir mon bobrun me fait chaud au cœur. Oui, tous les deux on se ressemble. Pourvu que nos destins sentimentaux ne se ressemblent pas trop.
    « Alors, comment avez-vous trouvé Florian ? ».
    « Je l’ai trouvé très gentil ».
    « Il a été sympa » fait Jérém.
    « J’espère qu’il va retrouver un gars qui saura le rendre heureux » fait Charlène, avant de continuer « et vous deux, faites attention l’un à l’autre, ne vous perdez pas, ne gâchez pas cette chance inouïe que vous avec eu de vous rencontrer ».
    Ni Jérém ni moi ne trouvons les mots pour lui répondre. Mais nos regards se croisent pendant un instant fugace, et notre entente est merveilleuse.
    Nous marchons en silence pendant un long moment. Au bout d’une heure, Charlène propose à Jérém de le remplacer à terre pour accompagner Unico.
    « Mais ça va pas, avec ton genou en vrac ? ».
    Je lui propose à mon tour, mais le bobrun décline également ma proposition.
    Je le regarde, les cheveux bruns en bataille, la barbe de plusieurs jours, le pull à capuche et le pantalon d’équitation marqués par des traces de boue, de végétation, d’animal. Et je me dis que, loin du Jérém petit con soigné de la ville, le Jérém nature à la campagne me fait, si possible, encore plus d’effet.
    Une autre bonne heure plus tard, alors que nous approchons du centre équestre, Charlène me lance :
    « Moi je dis que t’as bien tenu le coup, Nico. La balade était longue, et avec quelques difficultés. Vraiment, je te félicite ».
    Les mots de cette pro du cheval me font chaud au cœur. Mais ils sont loin de me toucher autant que ceux que mon bobrun va m’envoyer dans la foulée.
    « Pour un gars qui n’a jamais monté, tu as une très bonne position à cheval, tu te tiens bien droit, un peu en arrière, tu as les talons vers le bas et les rênes assez souples. Je prends du plaisir à monter avec toi ».
    « C’est pas ce que tu disais hier » je le cherche.
    « J’ai changé d’avis… car tu progresses à vue d’œil ».
    « Moi aussi j’adore faire du cheval avec toi ».
    « J’aime bien parce que tu en veux, et tu ne te laisses jamais décourager ».
    Une nouvelle fois je me sens bien dans son regard, je me sens apprécié. Je commence à m’habituer à ce regard bienveillant, et je me dis qu’il va terriblement me manquer quand nous serons loin l’un de l’autre.
    Aussi, j’ai l’impression que ses mots recèlent un petit sous-entendu très agréable à mes oreilles. J’ai l’impression que dans ses intentions, ce n’est pas que du cheval dont « j’en veux », mais aussi de notre relation, malgré toutes les difficultés passées, et celles à venir.
    « Et moi je n’existe pas » se moque Charlène.
    « Si, on t’adore » lâche Jérém.
    « Tu m’as donné de bons conseils ce matin » je lui lance.
    « Vous êtes si mignons tous les deux ».
    En arrivant au centre équestre, nous trouvons un petit comité d’accueil inattendu. JP et Carine, ainsi que Ginette, accompagnée par un petit bonhomme qui doit être son mari, sont en train de desseller leurs montures.
    « Vous êtes parti en balade, vous aussi ? » fait Charlène.
    « Tu n’étais pas là, alors on s’est fait un petit tour, seuls comme des grands » fait Ginette.
    « Vous avec largement atteint l’âge pour vous dispenser de permission de sortie ».
    « Dit la pucelle » fait JP.
    « Nous on a fait la grande boucle par la forêt » fait Charlène après une bonne tranche de rigolade.
    « T’as fait toute la boucle ? » s’étonne Carine à mon intention.
    « Oui… ».
    « C’est qu’il prend goût au cheval, le Nico ! » fait JP.
    « Il se débrouille comme un chef » lâche Jérém.
    Entouré par la bienveillance de ces gens que je considère désormais comme des véritables amis, touché par l’attitude adorable de mon bobrun, mon bonheur est total.
    « Eh, les amis » fait JP « et si on se faisait une bonne bouffe ce soir, tous ensemble ? ».
    « Mais quelle riche idée » fait Charlène « restez manger à la maison ».
    « Comme ça on peut profiter un peu plus du champion avant qu’il se casse à Paris » assure JP « et de Nico, avant qu’il se casse à Bordeaux ».
    « Et si on invitait Florian aussi ? » propose Charlène.
    « Ca c’est une très bonne idée » délibère le sage JP.


    Prochain épisode vers le 15 octobre.

     

    0216 L’amour ne vit plus ici.



    Pour ceux qui voudraient acheter le livre Jérém&Nico ou contribuer au financement de l’écriture de cette histoire sans avoir à rentrer ses propres données sur tipeee, il est désormais possible d’envoyer des contributions via PAYPAL, directement à l’adresse mail : fabien75fabien@yahoo.fr.
    L’envoi est sécurisé et SANS frais. Merci d’envoyer un petit mail à la même adresse pour m’indiquer vos coordonnées pour l’envoi du livre papier ou du livre epub. Et pour que je puisse vous dire merci.

    0216 L’amour ne vit plus ici.



    Livre papier : 25 euros via PAYPAL au lieu de 30 euros jusqu’au 5 octobre 2019.
    Livre format epub : 10 euros via PAYPAL au lieu de 15 euros jusqu’au 5 octobre 2019.
    Contributions à partir de 1 euro via PAYPAL.

    Merci d’avance !
     

    Fabien


    BONUS


    Bonus 1 : George Michael.


    Faith


    https://www.youtube.com/watch?v=6Cs3Pvmmv0E


    I want your sex


    https://www.youtube.com/watch?v=r3AP26ywQsQ


    Praying for time


    https://www.youtube.com/watch?v=12mZ6qVmlBI


    Jesus to a child

    (Chanson écrite en mémoire d’Anselmo, celui qui a été l’amour de sa vie, décédé du SIDA).


    https://www.youtube.com/watch?v=zNBj4EV_hAo


    Bonus 2 : le disque.


    Le disque est un objet fascinant. Il est élégant, distingué, sa robe noire n’est jamais démodée. Ses sillons brillants captent la lumière et la visualisent sous la forme d’un faisceau de lumière radiale frémissant au gré de sa rotation.
    Un disque a un poids, une envergure, une présence, une fragilité. Un disque, ça a de la gueule. Un disque impose le respect.
    Autour du disque, il y a une poésie, le récit d’une époque, une façon d’être. Le disque raconte une histoire, celle du temps qui passe. Le disque commence, avance et a une fin, comme toutes les bonnes choses, comme la vie elle-même.
    Le disque a un son qui lui est propre, chaud, rassurant.
    C’est peut-être grâce à son charme particulier que malgré les évolutions techniques, et même à l’époque du tout numérique, le disque n’a jamais été complètement abandonné et qu’il compte toujours des aficionados.
    Le numérique, notamment par le biais du streaming, a amené l’abondance, la diffusion la plus large et la plus accessible qui soit. Il a amené la démocratisation des contenus, il a porté la facilité d’écoute à son paroxysme. Mais il a ôté une partie de la magie de l’écoute de la musique.
    Quand celle-ci était plus rare, plus difficile à obtenir, car liée à un objet physique, elle était davantage respectée. L’abondance et la facilité d’accès amènent à une sorte de dévalorisation. Tout ce qui est facile à obtenir a moins de valeur que ce qui doit être gagné.
    L’« effort » de se déplacer pour aller acheter le disque dans un magasin, n’était que le début d’un rituel qu’il fallait à chaque fois accomplir avant d’écouter une chanson qu’on aimait au point de nous pousser à dépenser de l’argent et du temps pour pouvoir l’avoir chez nous.
    A l’époque du disque, la musique était plus rare, moins disponible, elle s’écoutait dans la séquence prévue par l’auteur. Pour faire une playlist, on devait s’improviser DJ. Et, d’une certaine manière, elle avait davantage de valeur.
    Depuis l’évènement du tout numérique, la musique n’a plus de support, et elle ne demande plus aucun effort pour venir à nos oreilles. Quelques clics suffisent pour avoir cinquante millions de titres dans ses oreilles, n’importe où, n’importe quand.
    Le manque de support et d’effort nécessaire pour écouter de la musique à l’ère du numérique rend l’écoute éphémère.
    Le disque, c’est autre chose. Un disque existe, il a une taille, une envergure qui nous rappelle sa présence. On ne range pas un disque n’importe où, mais souvent dans un séjour ou dans une chambre, sur une étagère, sous notre regard. Sa présence nous invite à l’écouter. Alors qu’un fichier caché dans un serveur lointain se fait oublier beaucoup plus facilement.
    Un disque pouvait être un cadeau rappelant notre amitié ou notre amour pendant de longues années. Parfois il survivait à l’une et à l’autre. Va donc offrir un fichier en streaming pour rappeler l’amour et l’amitié…
    Un disque c’est grand, il faut le manipuler. Et on s’imprègne de sa présence. Avec le disque, on « touche » la musique, car elle a un support qui la transforme en objet, qui la rend plus réelle, plus précieuse.
    Lorsqu’on touche un disque après des années, on peut se souvenir du jour où il est rentré en notre possession, par l’achat, ou en tant que cadeau. On peut se souvenir de qui on était au moment où il est rentré dans notre vie, un disque peut nous ramener des années et des années en arrière.
    Un disque est un vrai support pour le souvenir, un objet de collection qui nous replonge dans l’instant où il est arrivé dans notre vie.
    Un vinyle qui tourne, ça a quelque chose de chaleureux, d’apaisant, de solennel, de précieux. Un charme qui est aussi dans ses imperfections, dans sa fragilité.
    Car un disque peut s’abimer. Il craint la poussière, l’humidité, les rayures. Un disque demande à être extrait de sa pochette avec soin, et à nouveau rangé après l’écoute avec le même soin, si on veut le préserver.
    Un disque peut carrément casser lors d’une mauvaise chute. Au fil du temps, ses crépitements peuvent se faire sentir de plus en plus marqués sur la musique. Un disque peut sauter un sillon, se mettre en boucle. Et parfois il peut se ressaisir tout seul et se remettre à avancer. Et se remettre une nouvelle fois en boucle, sans fin. Autant de petits défauts amenés par le temps, comme autant de cicatrices, comme des rides, les signes de l’âge. Un disque c’est « vivant ». Un vinyle, ça possède un « âme ».
    Aussi, le disque avait une pochette, une grande pochette avec de belles photos, une pochette qu’on pouvait toucher, dont on pouvait sentir l’odeur, sur laquelle on pouvait écrire, un prénom, une date, un mot d’amitié ou d’amour, un souvenir.
    Une pochette qu’il fallait manipuler avec prudence, dont il fallait prendre soin pour ne pas l’abîmer, envers laquelle il y avait de l’affectif, un sorte d’attachement. Malgré les efforts, la pochette de disque finissait par se tacher, elle s’abîmait à force de frotter contre d’autres pochettes. Au fil des années, le papier prenait l’odeur du temps. La pochette vieillissait aussi, car elle était « vivante » aussi.
    A l’époque du numérique quel support physique pour le souvenir ?
    Le streaming est éphémère, le disque est matière.
    Mais à quoi bon toute cette matière ?
    J’ai tant de disques, de cd, de cassettes et de livres chez moi : qu’en sera-t-il de toute cette collection qui compte tant pour moi, le jour où je ne serai plus ?


    8 commentaires
  • Le songe (étrange) d’une nuit d’été


    Jérémie a 18 ans. Brun, de beaux cheveux épais très courts autour de la tête et pas mal plus longs au-dessus… un torse en V magnifique, un cou puissant, des épaules carrées sculptées par le rugby. Vraiment un physique de dingue pour son jeune âge.
    En ce début du mois d’août, Jérémie vient d’avoir son permis. Et sa voiture. Une vieille 205 rouge de quatrième main… mais qu’importe… c’est sa toute première voiture, celle pour laquelle il a bossé depuis un an, pendant toutes ses vacances…
    Le permis, la voiture, l’été… il faut fêter tout ça avec les potes du rugby… alors, c’est décidé… partir une semaine au bord de la mer… avec son meilleur pote, Thibault… et deux autres coéquipiers, Julien et Thierry…
    Pourtant, l’idée du bobrun ne fait pas que des heureux… Julie, sa copine, n’est pas du tout enchantée d’apprendre la nouvelle…
    C’est bien la première fois que Jérémie a « une copine »… car jusque-là, le bogoss a toujours été plutôt du genre à avoir « des copines »… d’un soir, pas plus… une par soir, deux s’il le faut…
    Beau comme il est, le capitaine de l’équipe de rugby est très sollicité…
    Puis, un soir, au KL, Julie l’a approché… elle a accroché son regard… et elle a décroché une nuit de feu dans l’appart rue de la Colombette…
    Mais, à la différence de tant de filles qui n’ont fait que défiler dans les draps du bogoss, Julie lui a carrément mis le grapin dessus… et sans que Jérémie y trouve d’inconvénients…
    Comment elle a réussi cet exploit ?
    Il faut dire que Julie a pour elle des arguments imparables… sa plastique élancée, ses jambes interminables… sa poitrine « ni trop, ni pas assez »… sa féminité mise en valeur avec classe… son minois pétillant, son naturel souriant…
    Pourtant, lorsque le bogoss lui a annoncé son intention de partir en vacances avec ses potes, elle n’a pas du tout eu envie de rigoler… dans sa tête, une équation simple : (un canon comme Jérémie) + (vacances au bord de la mer avec ses potes) = trop de tentations…
    Julie a beau se montrer contrariée… rien au monde ne ferait changer les plans du bobrun…
    Il est deux heures de l’après-midi lorsque les quatre potes arrivent au camping de Gruissan… le soleil cogne fort… le temps de planter les tentes, d’avaler un sandwich, de passer un short de bain… la joyeuse bande quitte le camping direction la plage pendant que les enceintes de la réception diffusent le tube viral de l’été…

    « Moi je m'appelle Lolita/Lo ou bien Lola/Du pareil au même/Moi je m'appelle Lolita… ».

    C’est beau cette meute de jeunes mâles marchant dans la rue l’un à côté de l’autre… comme une vague, une déferlante de bogossitude, ils avancent en rigolant, en parlant fort, en dégageant cette sensualité des corps, cette insouciance des esprits, cette présence qui laisse de si belles couleurs sur son passage…
    Bonheur ultime lorsque les pieds touchent enfin le sable chaud et qu’une impression de bien-être se propage dans tout le corps… en ce premier instant où tout en soi semble crier : liberté, bonheur…
    La plage, le sable, la mer, le soleil, les serviettes, les parasols, l’odeur de la crème solaire, le parfum des vacances…
    Très vite, les corps musclés plongent lourdement dans l’eau, éclaboussent, font des vagues à tout va…
    Quelques instants plus tard, les torses nus dépassent de l’eau, la peau ruisselante, les brushings défaits… et sur les visages, des sourires de gosses…
    On pourrait passer des heures à les regarder faire les cons entre eux, touchés et émus par ces corps débordants d’énergie, par leur côté « jeunes chiens fous fous »…
    On ressent comme une gifle puissante en les voyant si jeunes, si sexy, si désirables, et si hors de portée… pourtant, il y a quelque chose de nécessaire dans le bonheur profond d’être spectateur de ces instants d’éternité…
    Il y a dans cela quelque chose proche de la contemplation de l’œuvre d’art… et le désir sensuel finirait presque par passer en deuxième plan, derrière l'émotion profonde que ces garçons savent inspirer tout en étant simplement... eux-mêmes...
    Oui, les regarder est à la fois une épreuve, quelque chose de presque insoutenable… mais, au-delà de la brûlure intérieure ce spectacle peut occasionner, il y a comme une sorte d’apaisement à assister au triomphe de cette jeunesse, comme si on pouvait s’y perdre, s’y noyer dedans, et s’y trouver divinement bien…
    Le lendemain soir, la petite bande est de sortie… et les t-shirts moulants aussi…
    Jérémie rentre en boîte avec son sourire ravageur aux lèvres, fer de lance d’un regard conquérant qui semble annoncer « personne ne peut me résister »… il avance, plutôt fier de ce tatouage sur le biceps gauche qu’il vient de se faire faire l’après-midi même… c’est un brassard aux motifs tribaux, et il tombe juste en dessous de la manchette de son t-shirt blanc, à la lisière de ce coton bien enserré autour de son biceps et de son torse de fou…
    Les filles le dévorent du regard… comme si elles voulaient le bouffer tout cru…
    Il y a celles qui attaquent frontalement, qui viennent se mélanger à la meute, qui viennent lui parler….
    Et puis il y a des regards plus subtils, qui jouent un match de séduction tout en finesse…
    Il y en a un en particulier, un regard qu’il trouve particulièrement culotté… d’autant plus que ce regard vient d’une nana qui n’est pas à priori son style de nana…
    Non, les filles pas très grandes, qui s’habillent et se maquillent avec des couleurs trop sombres, ce n’est pas du tout le genre de Jérémie…
    Pourtant, Mélanie sait bien mener son jeu… elle fait du charme au bobrun tout au long de la soirée, par petites touches… tour à tour en cherchant son regard, en l’ignorant… en se montrant intéressée, puis distante…
    Un jeu de séduction qui se solde par une bonne galipette dans l’un des fameux chalets de Gruissan…
    Au petit matin, Jérémie marche sur la plage en fumant cette cigarette si nécessaire, après…
    La brise marine ramène le son étouffé d’une radio…

    « Ces soirées-là hum hum/On drague, on branche toi-même tu sais/Pourquoi ouais/Pour qu'on finisse ensemble toi et/Moi c'est pour ça… ».

    Si elle savait, Julie…
    En rentrant au camping juste avant le lever du jour, le bobrun est surpris par un autre regard… il y a pas mal de filles au camping qui s’intéressent à lui… mais ce regard-là, il ne le lâche pas d’une semelle… tout aussi culotté que celui de Mélanie… et à cet instant précis, ce regard s’accompagne d’un :
    « Bonjour ! » agrémenté par un beau et large sourire.
    « Bonjour… » répond mécaniquement le bobrun, tout en continuant son chemin vers la tente où son pote Thibault est rentré dormir seul.
    « Ça va ? » lui demande ce dernier, pendant que le bobrun se glisse dans son sac de couchage.
    « Ouais… ça va… » répond Jérémie, avant de donner des consignes « ne m’attendez pas pour la plage… je vous retrouve là-bas, ok ? ».
    « Ok Jéjé… bonne n… ».
    « Thib… ».
    « Quoi ? ».
    « Ce qui se passe à Gruissan, reste à Gruissan, ok ? » balance alors Jérémie sur un ton monocorde.
    « Entendu, mec… » fait Thibault sur ce ton rassurant qui est sa marque de fabrique.
    En glissant vers le sommeil, Jérémie repense à ce regard, à ce sourire qu’il vient de croiser en arrivant au camping… pourtant, ce n’est pas du tout le genre de regard auquel il est sensible… encore moins que celui de Mélanie…
    Il est deux heures de l’après-midi lorsque le bobrun émerge de son sommeil décalé… et lorsqu’il sort de la tente, torse nu, la serviette sur l’épaule, direction les douches, il sent à nouveau ce même regard se poser sur lui…
    « Bien dormi ? ».
    « Ouais… » ce sera la seule réponde d’un bobrun en mode « il ne faut pas m’emmerder dès l’aube de 14 heures »…
    Le soleil, la mer, les vacances, les potes … quatre mecs avec un ballon sur la plage, ça finit par attirer d’autres mecs… le volley, le foot, le rugby… chaque jour, il y a davantage de monde que la veille…
    Tout ce raffut de bogosses sportifs sur la plage finit par attirer des nanas… dès lors, la petite bande de rugbymen toulousains n’aura pas de mal à conclure… même Thibault, le plus pudique et réservé des quatre, finira par craquer un soir sur une petite jolie brune…
    Jérémie, quant à lui, après un premier but marqué au chalet de Mélanie, il avait transformé des essais à chaque soir…
    Si elle savait, Julie…
    Les jours filent et le dernier soir arrive. Jérémie s’est éclipsé avec Stéphanie, cette jolie rousse avec un petit tatouage entre les omoplates...
    Thibault a désormais l’habitude de s’endormir seul dans la tente… pourtant, ce soir il n’arrive pas à dormir… il est deux heures passées lorsqu’il décide d’aller faire un tour…
    Il marche déjà depuis quelques minutes lorsque, au détour d’une haie abritant un mobil-home, il reconnaît un peu plus loin, dans la pénombre, la silhouette familière de son pote, torse nu, le débardeur à la main, la cigarette entre les lèvres, s’apprêtant à quitter les lieux, tout en fouillant fébrilement dans les poches de son short, certainement à la recherche de son briquet…
    Thibault se dit que son pote est vraiment incroyable… une fille chaque soir, et le dernier soir, cette jolie rousse qui fait de l’effet à tout le monde…
    Il attend patiemment que Jérémie s’éloigne de quelques pas pour aller le rejoindre et se moquer gentiment de ses exploits…
    Mais une deuxième silhouette apparaît aussitôt sur le seuil du mobil-home, dans le noir.
    « Pssssssst ! ».
    Jérémie s’arrête net, se retourne… le bobrun se trouve désormais dans une zone un peu plus éclairée… la deuxième silhouette avance jusqu’à le rejoindre…
    Et là, Thibault a du mal à réaliser ce qui se présente à ses yeux… car ce dos, ce tatouage… il ne les reconnaît pas, pas du tout…
    Enfin… si…
    Il regarde Jérémie récupérer son briquet de la main qui lui tend, allume sa cigarette, trace sur sa route…
    Thibault a besoin de marcher un peu… il a besoin de prendre l’air… il a besoin de remettre de l’ordre dans sa tête…
    Lorsqu’il rentre enfin à la tente, Jérémie est déjà dans son sac de couchage.
    Mais il ne dort pas pour autant.
    « Tu étais où ? ».
    « J’ai fait un tour à la plage… » fait Thibault « c’était bien ta soirée ? ».
    « Pas mal… il faut dormir maintenant… ».
    Si elle savait, Julie…

    En ce soir du 21 août, la 205 rouge roule à vive allure sur l’autoroute des Deux Mers… au bout d’une longue montée, la citadelle de Carcassonne apparaît sur la droite, majestueuse…
    Tout en conduisant, Jérémie porte une cigarette entre les lèvres, l’allume…
    Le regard de Thibault se fixe sur ce briquet qu’il lui a offert pour ses 18 ans, ce briquet que son pote a failli oublier dans ce mobil-home…
    « Tu regardes quoi ? » fait Jérémie, surpris par le regard figé de son pote.
    « Rien… » lui sourit Thibault, tout en posant la main sur son épaule « rien du tout… ».
    Thibault repense à la phrase que son pote lui a lancé de retour de sa première coucherie… « Ce qui se passe à Gruissan… »…
    Mais Thibault sait désormais que ce ne sera pas le cas… car ce qu’il a vu la nuit d’avant est bien en train de remonter à Toulouse, gravé dans sa tête…
    Lorsque la deuxième silhouette était sortie du mobil-home, alors qu’il s’attendait à voir une petite rose posée entre deux épaules finement dessinées d’une jolie rousse, c’était plutôt un ange avec de grandes ailes qui s’était présenté à ses yeux…
    Thibault s’était souvent demandé si son pote Jérémie faisait cas de ce regard vif, insolent, charmant, qui ne l’avait pas quitté tout au long du séjour… au camping, sur la plage, pendant les matchs… désormais, il a sa réponse…
    La 205 rouge roule à vive allure sur l’autoroute à hauteur du parc d’éoliennes de Villefranche de Lauragais… une toute nouvelle chanson vient de résonner sur les ondes radio…

    Hey Mister D.J/Put a record on/Mets un disque
    I wanna dance with my baby/Je veux danser avec mon bébé

    Jérémie allume une nouvelle cigarette… il repense à cette bêtise dans le mobil-home… à cette escapade qu’il regrette déjà… qu’il a regrettée dès l’orgasme venu…
     « Je vais te faire jouir comme personne ne t’a jamais fait jouir… »… voilà les mots par lesquelles il s’était laissé tenter…
    Certes, il faut admettre que ce n’étaient pas des mots en l’air… dans ce mobil-home, il avait pris son pied comme rarement dans sa vie… mais il n’aurait pas dû pour autant marcher dans ce jeu…
    Pourtant, en arrivant au péage de Toulouse, Jérémie n’arrive toujours pas à effacer de sa mémoire l’image de ce petit gabarit très bien proportionné, de ce grand tatouage en forme d’ange dessiné à cheval d’une épaule musclée, couvrant une large portion d’un solide dos en V…
    Il a beau se dire que tout cela est sans importance, que ce n’est qu’une connerie de vacances… il ne peut pour autant oublier le fait que ces regards, ces sourires qui ne l’ont pas lâché d’une semelle pendant toute la semaine, lui ont procuré une excitation si puissante, si inattendue… et que ce corps lui a procuré un plaisir explosif…
    Non le p’tit footeux n’avait pas menti... jamais il n’avait autant pris son pied que dans ce mobil-home… mais quand-même…
    Si elle savait, Julie…
    Jérémie a beau se dire que cela restera une expérience sans suite, une erreur à oublier…
    Ses fantômes le rattraperont quelques mois plus tard… le jour où, sur un coup de tête, il donnera l’occasion à Nico, ce camarade qui n’arrête pas de le mater depuis le premier jour du lycée, de rentrer dans sa vie et de la bouleverser de fond en comble.

    And when the music starts/Et lorsque la musique commencera
    I never wanna stop/Je ne voudrais plus jamais m'arrêter
    It's gonna drive me crazy/Cela va me rendre fou

    Music… makes the people come together/La musique… rapproche les gens…


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  • 51.6 Le garçon qui ne dort pas


    Je commence à m’assoupir… c’est là que Thibault revient… je ne l’entends pas rentrer dans le petit séjour mais je sens son corps musclé et chaud se glisser derrière moi...
    Cool… il reste finalement…
    Encore plus cool… son torse se colle à mon dos… ses bras m’enlacent, me serrent contre lui…
    A cet instant, Jérém vient à son tour se serrer contre moi… son bras enlace mon épaule…
    Thibault me fait un bisou dans le cou et il s’endort…
    Je suis bien au chaud entre les deux potes… je m’endors à mon tour entre les deux mâles qui m’ont tant fait jouir… je m’endors enserré dans cette débauche de muscles de rugbyman… je m’endors bercé par de bonnes petites odeurs de transpiration, de testostérone, de sexe, de plaisir de bogoss, et de bogoss apaisés…

    Pourtant, mon sommeil sera de courte durée… je me réveille à nouveau, pas longtemps après… quelque chose a changé autour de moi… mon torse est toujours bien au chaud… alors que mon dos est parcouru par la brise fraîche de la nuit silencieuse…
    Très vite, je me rends compte que Thibault n’est à nouveau plus là… je ne l’ai pas entendu se lever… mais sa présence me manque… c’est ce manque qui m’a réveillé… ça fait bizarre, je me sens comme nu…
    Mince alors… il est parti finalement ?
    Je lève la tête de l’oreiller, je pivote frénétiquement le cou en balayant l’espace du petit séjour… je le cherche, et je finis par le retrouver… une fois de plus, le bomécano est parti sur la terrasse… j’entrevois sa plastique dans la pénombre, je reconnais l’odeur du tarpé qu’il s’est rallumé…
    Mais qu’est-ce qui se passe ? Est-ce qu’il a du mal à trouver le sommeil ? Qu’est-ce qui le tracasse, pour avoir besoin d’une nouvelle fumette ?
    Je me demande ce qu’il ressent dans sa tête à propos de tout ce qui vient de se passer… comment il est en train de ruminer tout ça, comment il va le vivre demain…
    Je pense que cette nuit doit représenter quelque chose à ses yeux… une nuit qui risque de marquer durablement le bomécano…
    Comment va être ma relation avec lui ? Quand et comment on va se retrouver ? Quel regard on va porter l’un sur l’autre ?
    E aussi… comment va être sa relation avec Jérém ? Comment ils vont se retrouver, se regarder ?
    Comment ils vont vivre le fait d’avoir partagé le même mec ? Comment ils vont vivre le fait d’avoir partagé des moments d’intense sensualité entre eux ?
    Est-ce que à cet instant précis, en fumant son pétard, le bomécano se pose ces mêmes questions ? C’est ça qui l’empêche de trouver et de garder son sommeil ?
    Tant de questions commencent à fuser dans ma tête… heureusement, la fatigue l’emporte et je finis par m’assoupir…
    Je viens tout juste de pioncer que je suis à nouveau réveillé par la présence du beau Thibault… une fois de plus, je ne l’ai pas senti arriver… je le sens s’allonger sur le lit et se caler à nouveau contre moi… son bras fait le tour de mon épaule, son torse velu me chauffe et me caresse le dos…
    Me voilà à nouveau plongé dans cet univers, dans son univers de bonheur sensuel… je ne suis ni endormi ni vraiment alerte… je suis comme dans un rêve éveillé, je suis à moitié étourdi, je n’ai même pas la force de rouvrir les yeux… je sens sa présence olfactive, sa chaleur m’envelopper, m’envahir… c’est peut-être ainsi que doit se sentir un bébé bien au chaud dans son berceau douillet…
    « Ça va ? » je ressens le besoin de lui glisser tout bas.
    « Très bien… et toi ? » je l’entends me répondre, un chuchotement doux et caressant.
    « Ça va, moi aussi… » je relance, tout en attrapant sa main et en la posant à hauteur de mon sternum… c’est bon le contact avec ses grosses paluches…
    Le bomécano se serre un peu plus contre moi… son visage dans mon cou, ses pecs, ses abdos contre mon dos…
    Le matin approche, un oiseau solitaire chante quelque part au loin, probablement posé sur les frondaisons autour de St Aubin, il dit au revoir à la nuit qui s’achève et il semble appeler le nouveau jour qui va se lever… une légère brise entre dans la chambre et caresse ma peau, m’arrachant peu à peu de ma torpeur et mettant mes sens en éveil…
    J’ouvre les yeux… la chambre est plongée dans une sorte de pénombre faiblement éclaircie par la réverbération de l’illumination publique qui monte de la rue à travers de la porte fenêtre toujours ouverte…
    Je sens son souffle dans le cou… je sens le bomécano prendre sa respiration à plusieurs reprises, s’arrêter net, comme s’il voulait parler… j’ai l’impression qu’il voudrait dire quelque chose mais qu’il se retient à chaque fois…
    J’ai envie de le mettre à l’aise, de lui dire qu’il peut parler librement… mais je ne sais pas comment m’y prendre… j’ai envie de me retourner, pour le câliner, pour le mettre à l’aise, pour lui donner l’occasion de me parler plus facilement… mais mes mouvements sont entravés… Jérém est toujours calé contre mon torse et il dort comme un bébé… si je me retourne, je risque de le réveiller…
    Je me surprends à avoir envie de le laisser dormir et de profiter en tête à tête de ce moment de tendresse avec cet adorable Thibault…
    Puis, à un moment, poussé par je ne sais quelle motivation inconsciente, le bobrun se retourne de l’autre côté… il me tourne le dos, mais il cale son corps musclé contre mon torse… ce qui fait que je suis toujours aussi imbriqué en lui… toujours impossible de me retourner vers le petit Thibault…
    Heureusement, le bomécano sait s’exprimer même lorsque les mots sont entravés… son regard vaut dix-mille mots… et même lorsque le contact avec son regard est impossible, comme en ce moment, dans cette position, le mec sait parler avec ses mains, ses bras, sa bouche, sa présence…
    De toute façon, il n’y a guère besoin de mots pour exprimer certaines choses… comme les envies d’un garçon dont l’érection se manifeste de façon aussi claire que la sienne…
    Oui, sa queue à nouveau raide vient de se caler entre mes fesses…
    Putain de mec… voilà un autre petit taureau bien endurant… oui, fascinant et foisonnant la sexualité d’un garçon de 19 ans…
    Voilà donc ce qu’il essayait d’exprimer sans y arriver… il a encore envie mais qu'il n'ose pas... il n’ose pas me demander et peut être il n’ose pas par rapport à son pote endormi juste à côté…
    Aussitôt, le sexy pompier a un petit mouvement brusque… je sens son bassin s’éloigner du mien… sa main vient se glisser entre mes fesses et sa queue… je perds le contact avec son manche chaud…
    Ah, non… il ne peut pas me faire ça… pas maintenant… pas dans l’état dans lequel il m’a mis…
    Je tente de protester en remuant mon bassin, je m’insurge en pressant mes fesses contre le revers de sa main… et pour que le message soit encore plus clair, j’attrape son poignet et je l’attire loin… après une petite résistance, sa main finit par céder, par se laisser faire…
    Sa queue ainsi libérée, revient instantanément se caler dans ma raie... je la sens frémir entre mes fesses… elle remue tout doucement, sous l’effet de contractions musculaires involontaires, signe d’excitation… les abdos du bomécano calés contre mes fesses semblent parcourus eux aussi par des frémissements électriques… je sens son souffle de plus en plus excité… je l’entends frissonner de plaisir… le contact avec sa peau m’amène les battements de son cœur…
    Je suis dans un étant second… je n’en peux plus… je bande comme un âne… ce mec va me rendre dingue… j’ai très envie de lui… encore…
    Est-ce dangereux ce qu’on est en train de faire ? Sont-elles dangereuses ces pentes convergentes que l’on est en train d’emprunter… cette tendresse, cette sensualité que nous sommes en train de se laisser s’installer entre nous au fil du plaisir… cette faiblesse qui nous conduit à nous laisser guider par nos sens, nos pulsions, nos envies ? Que se passe-t-il dans la tête du bomécano vis-à-vis de moi ? Que se passe-t-il dans ma tête vis-à-vis du bomécano ? Ce bonheur qui nous rapproche cette nuit, ne va pas nous éloigner demain ? Ce que je vis cette nuit avec ce mec est juste magique… je ressens avec lui des trucs que je n’ai jamais ressentis avant… même pas avec mon bobrun… tout simplement parce qu’il ne n’en a jamais laissé l’occasion… mais demain… que sera-t-il de nous, demain ?
    Quelque chose me dit que, en laissant aller les choses si loin avec Thibault, je suis en train de jouer avec le feu… pourtant, cette nuit, j’ai furieusement envie de lui, de sa douceur, furieusement besoin…
    Le bomécano aussi est peut-être en train de jouer avec le feu… certes, il n’a pas arrêté de fumer des joints… pourtant, même s’il a l’air un peu « fait », son attitude semble exprimer des envies, des besoins, des manques authentiques, profonds, bien réels… je n’ai pas l’impression que pour lui cette nuit ce ne soit qu’une expérience menée par les effets des joints qu’il a enchaînés… ça en est une, certes… mais j’ai l’impression qu’il y a trop d’implication émotive de sa part, trop de désir, trop de sensibilité pour que ce ne soit que ça…
    Que recherche-t-il vraiment le bomécano ? Quels sentiments profonds recèlent ses câlins ? Ceux qu’il n’a cessé de m’apporter… ceux qu’il a réservé à son Jéjé… peut-être que lui aussi a besoin de ça cette nuit… il a besoin de câlins…
    Puis, le bomécano fait un truc dément… ses bisous remontent tout doucement le long de mon cou… un frisson géant se propage sur ma peau, explose dans mon cerveau…
    Et j’en oublie demain, une fois de plus… il n’y a plus que le présent, et le bonheur sensuel avec ce garçon… cette nuit est une erreur, certes, une erreur qui ne se reproduira pas… alors, autant en profiter un max…
    Il faut à tout prix que j’arrive à me retourner vers lui…
    Je recule un peu plus mon bassin, le bomécano recule avec moi… profitant de cette petite marge de manœuvre retrouvée, je me contorsionne jusqu’à pouvoir me retourner lentement vers lui…
    Nos deux visages se font face… nos torses se frôlent… et là, je retrouve le comité d’accueil silencieux et touchant de ses bras musclés prêts à m’accueillir… heureux de me retrouver…
    Je ne peux m’empêcher de l’embrasser dans la pénombre… il m’embrasse à son tour… oui, ça va peut-être trop loin entre nous deux… mais il serait inhumain de ne pas succomber au bonheur de retrouver l’étreinte de ses bras, le contact avec ses lèvres, avec sa barbe douce…
    Il glisse la main dans mon entrejambe et il me branle… je glisse ma main dans son entrejambe et je le branle… nos mains se frôlent au fil des va-et-vient réciproques… c’est beau cette communication entre garçons, cette correspondance par le désir, par le plaisir…
    Sensualité et tendresse, virilité et douceur… bonne queue et bons câlins… voilà le mix explosif à la Thibault…
    Puis, quelque chose se produit… un petit accident vient interrompre ce moment de bonheur…
    Le lit n’est pas très large… Jérém prend de la place… Jérém fait comme… chez lui… et le pauvre Thibault doit être vraiment sur le bord du matelas… ce qui explique pourquoi, à un moment, son corps musclé, qui devait être jusque-là en équilibre précaire au-dessus du vide, finit par glisser sur le matelas écrasé… le bord du lit se dérobe sous le poids de son corps, et le bomécano se dérobe à mes caresses… il glisse lentement et il atterrit sur le carrelage… il atterrit sur ses pattes, avec grâce, sans un bruit, avec la souplesse d’un beau félin…
    Je lève la tête et je capte son regard… il me sourit… c’est un petit sourire à la fois amusé et parcouru par une étincelle coquine chargée de promesses…
    Le bogoss se rattrape de façon élégante, sa musculature tendue donnerait des envies à un chêne séculaire… et moi, j’ai envie de le bouffer tout cru…
    Un instant plus tard, il est debout… si c’est pas beau ce corps de bomécano nu, la queue tendue, me dominant de toute sa taille… j’ai envie de l’avoir en moi… je ne vais jamais oser le lui dire avec des mots… je vais essayer de lui dire avec mon corps…
    Alors avant qu’il puisse mettre un genou sur le matelas, je me décale un peu vers le bord du lit et je le prends en bouche… je le pompe, je caresse ses couilles, je lui fais plaisir, je me fais plaisir… je sens son excitation monter, je sens sa respiration témoigner de son plaisir…
    Je le suce pendant un bon petit moment… je commence à trouver l’idée de pouvoir gouter à nouveau à son petit jus de mec tout aussi séduisante, si ce n’est plus, que celle de l’avoir en moi… lorsque le bomécano s’accroupit sur le carrelage, contre le lit… sa mains chaude se pose à plat dans le creux de mes reins… elle remonte lentement le long de mon dos, elle caresse, câline, rassure, excite… et lorsqu’elle arrive à mon cou et qu’elle insiste sur la région à la base de ma nuque… je sens tout mon corps parcouru par une décharge de bonheur sensuel indescriptible… c’est vraiment comme une décharge électrique qui irradie depuis ce point de contact  et qui se propage dans ma tête, dans mes tétons, dans ma queue… entre mes fesses…
    Excité, apprivoisé, conquis par ses caresses, j’ai envie de tout lui donner, plus que jamais envie de lui faire plaisir…
    Ma main s’anime, elle se pose sur ses pecs saillants… elle caresse fébrilement… elle descend vers ses abdos, elle les dépasse, elle rencontre son manche raide… elle le saisit, le branle… ses lèvres se posent sur mon biceps, ses bisous sont chauds et sensuels…
    Nous restons ainsi, à nous faire du bien réciproquement, pendant un petit moment…
    Puis, sa main se porte sur ma queue… commence à me branler… très vite, j’ai l’impression que son regard est happé par mon entrejambe… ses va-et-vient ralentissent peu à peu, comme si son esprit était ailleurs… son buste semble approcher du bord du lit… son visage semble approcher de mon bassin… son nez est désormais si proche de sa main que je sens son souffle chaud caresser mes couilles…
    Je l’entends inspirer très profondément… j’ai l’impression de reconnaître ce genre de respiration… je l’ai parfois entendue chez mon bobrun… c’est le genre de respiration qui parle d’une envie déchirante, d’une pulsion entravée par une barrière mentale insurmontable…
    Je ne sais pas ce qui est en train de se produire, ce qui va se produire, ce qui pourrait se produire… tout ce que je sais c’est que j’en ai à la fois très envie et très peur…
    Envie, certes… car, même si je ne connais pas de plaisir plus exquis que celui d’offrir du plaisir à un bomec, il est vrai aussi que, lorsque ma queue est ainsi stimulée, je retrouve quand même des envies typiques de garçon…
    Alors, à cet instant précis, ma queue tendue et surexcitée frémit en espérant recevoir un bonheur inattendu…
    Oui, j’ai parfois envie de me faire sucer… pourtant, est est-ce que j’ai envie de recevoir ça de lui ? Le Thib de mon Jérém ? Puis, dans ma tête, le bonheur de coucher avec un hétéro… c’est le fait qu’il reste hétéro dans ses envies sexuelles…
    Pourtant, si vraiment il a envie de goûter à cela, est-ce que j’ai le droit, l’en priver ? Mais est-ce que cela ne risquerait pas de casser dans ma tête cette image d’hétéro très viril que je me fais de lui ? Et de faire surgir par la même occasion tout un tas d’autres inquiétudes…
    Alors, je me surprends à être très inquiet de voir une nouvelle facette de la sexualité du bomécano se profiler… je suis très troublé de faire le constat que cette nuit, la boîte recelant les envies jusque-là refoulées du charmant Thibault a été ouverte… et que, apparemment, tout son contenu ne s’est pas encore dévoilé… et que probablement il ne le sera pas cette nuit… quand le sera-t-il ? Avec qui ?
    Et là, mon imagination se met à galoper… j’entends le bruit de la respiration de mon bobrun dans le dos… je repense à la montre de Thibault sur la table de chevet juste à côté… je cours vite en besogne, certes… mais je me dis que, s’il le faut… c’est déjà fait…
    La main du bomécano s’est arrêtée… ses doigts relâchent peu à peu la prise sur ma queue… je sens sa déglutition bruyante, indice là aussi d’un trouble, d’une excitation, d’une envie retenue…
    Est-ce que le beau Thibault aurait envie de ça ? Est-ce qu’il a vraiment envie de m’offrir ce plaisir si intime ?
    Je ne saurais jamais ce qui se serait passé à cet instant précis si je n’avais pas choisi de prendre les devants… je ne sais pas si je suis en train de faire le bon choix… c’est stupide, mais je panique… ma main quitte brusquement sa queue pour aller saisir fermement son biceps rebondi… ce simple contact avec cette partie de son anatomie me rend toujours aussi dingue…
    « Viens… » je lui lance, tout en amorçant un mouvement avec le bras pour l’inviter à se relever… le bomécano me regarde… il semble hésiter… je le vois, je l’entends déglutir sa salive… même dans la pénombre, j’ai l’impression de lire sur son visage cette envie de mec qu’il n’ose pas exprimer…
    « Viens… » j’insiste, tout en me mettant à plat ventre.
    Et là, le bogoss suit le mouvement, il retrouve sa position debout… mon regard s’arrête à hauteur de ses cuisses musclées et de sa queue… pourtant, je sens son regard insistant sur moi, je sens que son hésitation se transforme en une sorte de frustration contenue, mais perceptible…
    Je suis désolé, mon gentil Thibault… je ne sais pas pourquoi, mais je ne suis pas prêt à vivre ça avec toi…
    Les secondes s’égrènent, le bomécano n’a toujours pas bougé… je commence à regretter mon choix dicté par la panique… je commence à craindre de l’avoir vraiment déçu… je redoute qu’il parte sur le champ…

    La suite de cet épisode ? Pour l'instant, uniquement en version audio, sur chuchote-moi.fr. Bonne écoute !

    Puis, le bogoss fait le tour du lit… je sens le matelas se dérober sous mes mollets… se genoux frôlent mes jambes… son corps s’allonge sur le mien… ses cuisses épousent les miennes… le bomécano grimpe sur moi tout en douceur… son torse glisse sur mon dos comme une caresse géante…
    Son visage vient se plonger dans le creux de mon cou... sa bouche recommence à semer de petits bisous sur ma peau… ses bras puissants glissent sous mes aisselles, m’enserrent, me collent contre son corps chaud…
    Cool… je retrouve le doux Thibault… je suis soulagé de voir qu’il n’y a pas de malaise…
    Un instant après, son gland parcourt ma raie à la recherche de mon ti trou…
    Lorsqu’il trouve la cible, sa queue glisse en moi toute seule, s’enfonce dans ce passage bien ouvert par les assauts répétés de deux jeunes mâles…
    Le bogoss recommence à me pilonner… la lenteur de ses va-et-vient me tient en suspension entre plaisir et désir… je brule d’envie de lui crier de me défoncer… alors que je prends un plaisir géant à me faire limer ainsi, tout en douceur… il y a du plaisir à retirer dans les deux façons de faire…
    Son souffle dans mon cou est chaud, haletant… il semble exprimer l’ardeur de ses envies de mec… puis, sa bouche s’aventure jusqu’à mon oreille… ses lèvres embrassent… sa langue se lâche, elle découvre, léchouille… mon bonheur monte encore d’un cran lorsqu’il se lance à mordiller mon oreille…
    Oui, ce mec a décidé de me rendre dingue… et j’en ai la certitude quelques instant plus tard, lorsque ses mains se portent à l’intérieur de mes cuisses, frôlant mes bourses au passage… leur prise m’attire à lui de façon ferme, puissante, virile, comme si je lui appartenais… il y a quelque chose de Jérém dans ce geste… c’est une attitude de mec qui est en train de prendre son pied et qui, d’instinct, a envie de montrer qu’il est le mâle… c’est un bonheur intense de le voir, lui si mal à l’aise deux heures plus tôt, montrer cette nouvelle facette, cet instinct très « mec »…
    Et cette attitude, juxtaposée au côté doux et prévenant de Thibault, me donne le tournis…
    C’est que le bogoss a pris de l’assurance... et un mec qui prend de l’assurance, est un mec qui dévoile ce qu’il aime au pieu… qui se lâche… et ça, ça n’a pas de prix…
    Puis, à un moment, je sens son torse se relever… son bassin recule, notre connexion senxuelle cesse… ses grosses paluches me saisissent avec fermeté et douceur… je me laisse faire, je seconde ses mouvements, trop impatient de savoir ce dont il a envie… ce qu’il kiffe…
    Très vite, ses mains attrapent mes chevilles m’invitent à me retourner… je me laisse faire, je seconde le mouvement et, un instant plus tard, je me retrouve allongé sur le dos… son torse musclé se glisse à nouveau sur le mien…
    J’adore sa fougue, son enthousiasme, ce plaisir qui l’anime, ce bonheur des sens si expressif, si communicatif… j’adore ses baisers de plus en plus fébriles, ses mains de plus en plus déchaînées, qui caressent, touchent, saisissent, excitent, qui osent, encore et encore… qu'est-ce qu'il est tactile ce garçon…
    Le bomécano recule le bassin… il lève le buste, il se met debout sur ses genoux… il attrape mes jambes, les soulève, m’attire à lui, mon bassin avec… une fois de plus, il me manipule avec une facilité déconcertante… quelle puissance dans ces mains, dans ces biceps, dans ce torse, dans ces cuisses…
    Mes chevilles se retrouvent à hauteur de ses épaules… ses mains maintiennent mes mollets en apesanteur… mes fesses se soulèvent par la même occasion…
    Dans l’effort, ses biceps se gonflent, ses pecs poilus se bombent, toute sa musculature semble en tension… son torse s’éclate, il montre toute son envergure… et il en est tout simplement impressionnant… magnifique plastique sculpturale, image insoutenable de jeune mâle en passe de prendre son pied…
    Son bassin avance et sa queue trouve très facilement le chemin de son bonheur… de mon bonheur… ses va-et-vient reprennent, doux et puissants… incroyablement plaisants…
    Sous l’effort, son torse dégage une impression de chaude moiteur… c’est une odeur très « mec » qui se dégage de sa peau, une odeur de transpiration, de sexe, d’orgasme consommé et d’orgasme à venir… je ne sais pas comment définir ça… mais autour de lui, ça sent le mâle en amour tout simplement…
    Tous mes sens sont comblés… je suis très réceptif à tout ce que ce mec dégage… à sa puissance masculine, à sa puissance sexuelle… mes mains s’enhardissent… elles cherchent une fois de plus le contact avec son torse velu… elles se posent sur ses pecs, épousent ce relief chaud et doux… mes doigts agacent ses beaux tétons saillants…
    Le bomécano semble bien apprécier ce contact… il prend son pied, mais il a envie de tenter autre chose, d’aller encore plus loin dans cette découverte sensuelle…
    Un instant plus tard, ses bras se déplient, mon bassin amorce une lente descente… atterrissage tout en douceur, mouvement qui amène mes fesses à se poser sur ses cuisses musclées… sans quitter notre parfaite connexion de plaisir, le jeune pompier a également reculé son bassin, se retrouvant désormais dans une position assise sur ses mollets et sur ses chevilles… l’angle de pénétration change, l’allure de ses coups de reins aussi… c’est un nouveau délice sensuel qu’il m’apporte…
    Ses mains attrapent mes cuisses, puis se déplacent sur mes hanches… le bomécano se livre à une séquence de coup de reins plus rapide, plus intense, plus puissante… et je jouis carrément dans mon entrejambe…
    Et lorsque ce petit coup de folie prend fin, je sens ses doigts se resserrer autour de ma queue et commencer à la branler vigoureusement…
    Qu’est-ce que c’est bon de me faire branler pendant qu’il me pilonne… j’adore le sentir prendre son plaisir en moi sentir sa main sur mon sexe, sentir qu’il semble même prendre du plaisir à me branler…
    C’est si bon de découvrir tant des sensations nouvelles… mon cœur tape à mille…
    Je prends tellement mon pied que je perds pied… je pose mes mains sur ses biceps, je les caresse fébrilement, je serre, je tâte, je les enserre très fort… ils sont épais, rebondis, ils remplissent ma main… je ne me lasse pas de ce contact avec cette partie de sa musculature, symbole à mes yeux de toute la puissance masculine d’un garçon…
    Mes mains sont avides, ivres, insatiables… elles expriment tout le désir que ce garçon m’inspire…
    J’ai envie de le sentir contre moi… j’attrape ses biceps et j’amorce un mouvement d’approche… le bomécano se penche un peu vers moi… pas assez à mon goût… il prend appui sur ses mains, d’une part et d’autre de mes bras… il penche sa tête pour me faire des bisous, tout en continuant à me pilonner…
    Je profite de cette nouvelle proximité pour envoyer mes mains se faire plaisir sur cet autre magnifique expression de sa puissance masculine, cette partie de son corps que mes mains ont eu envie de caresser depuis toujours… j’ai parlé de cet ensemble délicieusement harmonieux composé par son cou puissant et sa chute d’épaules…
    Bonheur pour la vue, délice pour le tact… c’est une texture ferme, un contact chaud, moite de transpiration… là encore mes mains tâtent fébrilement, insatiables de ce contact exquis…
    Je brûle d’envie de sentir le contact de son torse sur le mien… alors, je porte mes mains autour de son dos musclé et je l’attire carrément contre moi…
    Le bomécano se laisse faire, son torse velu revient se poser sur mon torse presque imberbe… sa peau se colle à la mienne… et tant pis si, au passage, sa main quitte ma queue… mon plaisir est total…
    La sensation de son poids sur moi est délicieuse… je me sens à la fois si fragile et si bien protégé sous cette imposante masse de muscles…
    Son visage s’enfonce dans le creux de mon cou, ses lèvres se laissent aller à de longs chapelets de bisous légers…
    Mes mains impatientes, excitées, comme délirantes, parcourent son corps en long, en large et en travers… elles caressent, palpent, massent… dos, épaules, cou, nuque, tête… tout y passe et y repasse…
    Le bogoss semble vraiment bien apprécier mes caresses… mais il en est certaines auxquelles il semble particulièrement sensible… ainsi, lorsque mes doigts s’enfoncent dans ses cheveux à la base de sa nuque, le bogoss arrête carrément ses va-et-vient… la queue calée bien au fond de moi, il pose sa joue à plat à hauteur de mon sternum… il respire très fort, il frissonne… son abandon est total…
    Bomécano… touché, coulé… j’ai trouvé le talon d’Achille de ce bel Apollon… le même que le mien… et que celui de son pote…
    Et ce n’est pas qu’une impression…
    « Qu’est-ce que s’est bon ça… » je l’entends chuchoter dans mon oreille, la voix cassée par une respiration profonde, haletante, traduisant son bonheur parfait.
    « A qui le dis-tu… c’est trop bon… » je ressens le besoin de lui répondre, ivre de lui.
    Juste à côté de nous, Jérém dort toujours à poings fermés, sur ses deux oreilles… enfin… surtout sur une… c’est bizarre les expressions…
    Bref, la présence du bel endormi au lit dormant rend ce moment d’autant plus excitant… les relents du gel douche de Thibault se mélangent a la fraîcheur de la peau de Jérém douchée depuis pas longtemps… la respiration haletante de l’un se combine avec la respiration apaisée de l’autre… c’est dingue comme situation… j’aime mon Jérém plus que tout au monde, mais je couche avec son meilleur pote parce que… Jérém lui-même l’a voulu… parce que ce pote sait m’offrir une tendresse qui me fait sentir bien pendant et après nos galipettes…
    La peur qu’il se réveille, la peur de sa réaction vis-à-vis de ce qui est en train de se passer… elle se mélange à l’envie qu’il se réveille, à l’envie qu’il voit à quel point je voudrais que lui, mon Jérém, me fasse l’amour de cette façon…
    Le bomécano vient de reprendre à coulisser en moi… ses mains prennent appui sur le matelas, son torse se relève légèrement, son cou avec, mais il arrête très vite son mouvement… son souffle caresse mon visage… sa barbe effleure mon menton… ses lèvres se posent sur ma joue… mais elles trouvent très vite le chemin de ma bouche… oui, bonheur parfait de ce mélange explosif entre son attitude extrêmement virile mais rassurante, et ce un côté nounours adorable qui ferait craquer une montagne de granit…
    Entre deux sessions de bisous, je croise son regard… et là, j’ai vraiment l’impression que tous les sens bomécano sont aux aguets… au fil des va-et-vient de son bassin, il guette mes réactions, mes halètements de plaisir, mes frissonnements, mes sensibilités… et au fur et à mesure qu’il découvre mon corps, il oriente la cadence, l’intensité, l’ampleur de ses coups de reins… le bomécano s’intéresse vraiment à mon plaisir… et il s’emploie à le faire durer, à le renouveler sans cesse…
    A chacun de ses va-et-vient, chaque fibre de mon corps vibre d’un plaisir de plus en plus insoutenable… ce mec est un véritable magicien… un magicien qui va bientôt faire des étincelles avec sa baguette magique… très vite, je sens que s’il continue comme ça, il va me faire jouir rien qu’en me limant…
    Doucement, Thibault… je ne veux pas jouir avant… je veux te voir jouir d’abord…
    Dans le timing aussi, le bomécano est au point… le jeune pompier sent l’orgasme venir, et il a besoin d’air pour prendre son pied à fond… son torse se relève, moite de transpiration… ses épaules s’ouvrent, ses pecs se bombent, ses abdos et ses pecs paraissent ainsi encore plus saillants… ses mains attrapent à nouveau mes mollets, ses avant-bras et ses biceps les tiennent en suspension pendant que les coups de reins s’accélèrent…
    Ses va-et-vient se rapprochent encore, pendant que son regard se perd dans le vide… le mec rentre dans cette courte mais intense phase de la jouissance masculine pendant laquelle rien ni personne n’existe plus autour de lui… le mec est juste ailleurs, seul avec son plaisir…
    « Putain que c’est bon… » je l’entends chuchoter tout bas à un moment, la voix étranglée par un plaisir débordant…
    « Oh, oui… » je lui réponds, cherchant fébrilement son regard « c’est trop bon, mec ! ».
    « Ah, putain… Nico… » il laisse échapper, le regard fou de plaisir.
    Le bogoss jouit…
    J’entends un râle de plaisir exploser dans le silence, une déflagration de jouissance que le bomécano s’efforce de contenir dans sa gorge… j’ai l’impression de sentir trembler sa cage thoracique sous l’effet de la profonde vibration qui la secoue…
    Thibault se retient… par discrétion vis-à-vis du voisinage, en particulier à cette heure trop tardive et/ou trop matinale… et vis-à-vis de son pote qui dort juste à côté…
    Je donnerais cher pour être à un endroit tranquille et avoir l’occasion d’entendre son plaisir s’exprimer librement… je sens que son râle de plaisir, sans brides, serait puissant et extrêmement viril…
    Et pendant que le plaisir secoue chaque fibre de son corps, pendant qu’une décharge électrique circule dans chaque muscle de sa plastique de fou, j’ai l’impression qu’une émotion débordante monte à ses yeux… l’impression que tant de plaisir a fini par le déboussoler… oui, j’ai l’impression que le bomécano essaie de maitriser son émoi…
    C’est une sensation très marquante et insaisissable à la fois… à l’image de son râle de plaisir dont la puissance contenue laisse imaginer une jouissance débordante… c’est comme si une barrière avait cédé en lui avec grand fracas, laissant éclater une émotion tout aussi difficile à contenir…
    Oui, le bomécano jouit, très fort… ses râles étouffés s’enchaînant sur la partition vierge du silence nocturne… j’ai envie de le prendre dans mes bras, de lui faire mille câlins, tellement je le trouve touchant et adorable… je fais glisser mes mains sur se ses épaules… je le caresse ainsi, comme je peux, pour lui faire sentir me présence… j’ai envie de lui offrir plein de tendresse…
    Lorsque son plaisir s’éteint, ses avant-bras se déplient, ses mains accompagnent mes chevilles jusqu’à les poser doucement sur le lit…
    Très vite, son buste se plie… le bomécano s'étale sur moi de tout son poids… mes mains en profitent pour parcourir son anatomie, encore et encore… mes caresses sont lentes, légères, elles sont juste l’expression de l’infinie tendresse que ce mec m’inspire…
    Thibault se blottit un peu plus fort contre moi, il m’enveloppe de son torse musclé et chaud… je suis profondément ému par ce garçon…
    Pourtant, l’émotion ne suffit pas à apaiser mon excitation… mon corps est tellement chauffé par le plaisir qu’il vient de recevoir, que je bande comme un âne…
    J’ai envie de jouir… juste me branler, tant qu’il est encore en moi… je sens qu’il n’en faudrait pas beaucoup pour que je me lâche… le corps du bomécano abandonné sur le mien rend tout autant impossible la branlette que ce qu’il entretient mon excitation…
    Après avoir repris un peu ses esprit, Thibault relève le torse… pendant une fraction de seconde je me dis que je pourrais profiter cette occasion pour me soulager…
    Je n’en aurai pas l’occasion… le bomécano saisit promptement ma queue et entreprend de la branler, tout en reprenant à envoyer des petits coups de reins dans mon entrecuisse…
    Très vite, je sens l’orgasme monter dans mon bas ventre, je sens ma jouissance se presser à la base de ma queue…
    La paume chaude de sa grosse paluche se pose à plat sur ma peau, transversalement à mes pecs… son pouce et son index arrivent chacun de son coté à caresser mes deux tétons…
    Et là, je ne peux plus me retenir… plusieurs jets de bonne puissance s’échappent de moi et atterrissent sur mon torse…
    C’est une jouissance intense… pourtant, ce n’est qu’une jouissance accessoire… ma véritable jouissance je l’ai eue tout au long des assauts et des caresses de ce beau mâle…
    Thibault se dégage de moi doucement… il recule sur le matelas, il descend du lit… au passage, il caresse furtivement mes mollets, petite complicité qui me fait chaud au cœur…
    Le bomécano revient s’allonger à côté de moi… je me tourne vers lui, sur le flanc, pour lui laisser un peu de place… il se cale contre moi, la respiration toujours haletante…
    Son front est en nage, son souffle brûlant… son visage, son regard affichent cette ivresse des sens, l’expression typique d’un garçon qui vient de jouir… le portrait d’un garçon épuisé mais repu… un garçon qui s’est bien donné mais qui a encore de la ressource pour faire des câlins et pour afficher un regard serein et apaisant … des petits gestes qui me chauffent le cœur, des gestes qui me laissent comprendre que non seulement il a vraiment aimé… mais qu’il assume le plaisir qu’il vient de prendre…
    Ses bras m’enlacent très fort… son front trempé de sueur se pose entre mes omoplates et la base de mon cou…
    Je réalise que moi aussi je suis en nage… mon corps retentit encore des multiples jouissances qui viennent de le secouer… je suis heureux, mais épuisé… j’ai envie de me perdre dans l’étreinte de ses bras… j’ai besoin de dormir…
    Je commence à glisser vers le sommeil…
    Mais je suis rapidement rappelé à la veille… très vite, sa main se pose sur mon épaule, me fait basculer sur le ventre…
    Jérém vient de se réveiller…


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  • 0215 Balade avec Charlène et mon mec.

     

    L’épisode « 0214 Nuit torride et douce à la fois » a été mis en ligne le même jour que plusieurs dizaines d’autres épisodes de la saison 1 qui ne figuraient pas jusqu’à là sur jerem-nico.com.

    En effet, la section « Les épisodes » vient de connaître une importante mise à jour. Elle affiche désormais tous les épisodes de Jérém&Nico depuis 2014, avec une nouvelle organisation plus claire et lisible (trois parties pour la saison 1, la saison 2 en suivant).

    Il est possible que la notification de l’épisode 0214 ait été noyée parmi celles des autres épisodes mis en ligne le même jour et que, de ce fait, certains abonnés à la newsletter n’aient pas vu que le nouvel épisode était sorti.

    Pour ceux qui ne l’auraient pas lu, l’épisode 0214 est disponible en cliquant sur le lien suivant :

     

    Jérém&Nico S02E14 Nuit torride et douce à la fois.

     

    Merci de votre compréhension et bonne lecture.

    Fabien

     

    0215 Balade avec Charlène et mon mec.

     

    Ce récit et ses dialogues sont de la pure fiction. Toute ressemblance avec des personnes existantes ou ayant existé ou avec des faits réels, est à considérer comme purement fortuite.

     

    Après la bonne pipe du matin, mon Jérém bondit du lit, l’air gai comme un pinson. On dirait que l’idée de la balade avec Charlène lui fait très plaisir. J’aime penser que le fait qu’elle ait compris et accepté ce qu’il y a entre nous deux le fasse se sentir bien.

    Le bogoss disparaît dans la petite salle de bain, sans vraiment fermer la porte derrière lui. Je l’entends siffloter, alors que son jet dru du matin tombe lourdement dans les wc, suivi du bruit de la chasse d’eau.

    « T’as l’air tout guilleret toi » je lui lance, alors que je l’entends tirer le rideau et ouvrir l’eau de la douche.

    Et là, je le vois revenir d’un pas rapide, et s’approcher du lit. Le bogoss se glisse sur moi, m’embrasse et me chuchote :

    « J’aime bien me réveiller à coté de toi… ourson ».

    « Ourson ? ».

    « Ca ne te plaît pas ? ».

    « Si, si… mais tu ne m’as jamais appelé de cette façon ».

    « Ca m’est venu comme ça ».

    « Pourquoi ourson ? Je ne suis pas poilu ».

    « Mais tu es tout doux, tout mignon, comme un ourson, et moi j’ai envie de te prendre dans mes bras » il me répond, tout en me serrant très fort entre ses biceps puissants et en me faisant des bisous.

    « Je suis un ourson alors » j’accepte volontiers ce petit surnom.

    « Un ourson tantôt tendre, tantôt chaud comme la braise » il me lance, en quittant le lit, avec un sourire doux et adorable.

    « Moi aussi j’aime me réveiller à coté de toi » je finis par me rappeler de lui répondre, alors qu’il est à nouveau debout.

    « Et j’ai aussi aimé cette pipe… » il me balance, en se dirigeant une nouvelle fois vers la salle de bain.

    « Coquin ! » je lui lance assez fort pour qu’il l’entende par-dessus le bruit de l’eau de la douche.

    « C’est qui qui a commencé ? » il me relance, en apparaissant juste à moitié, le visage et les pecs, sur le côté de la porte, l’air canaille à tomber « moi je n’étais même pas réveillé… ».

    Il n’a pas tort, et je me contente de lui sourire. Quant à Jérém, il pousse sa canaillerie jusqu’à me balancer un sourire incendiaire et un clin d’œil explosif, avant de disparaître sous la douche.

    Je suis très touché par ses mots : « j’aime me réveiller à coté de toi », c’est mignon et adorable. Mais il y a autre chose qui me touche encore davantage, qui me fait vibrer, qui me fait rêver. Un simple mot, inattendu et pourtant tellement chargé de significations.

    « Ourson ».

    Ourson. Je trouve ça adorable. Ourson. C’est mignon comme tout. Je suis son ourson. Ça me plaît. Mon Jérém ne cessera jamais de me surprendre et de me faire kiffer. Et de me rendre heureux. Au-delà de mes espoirs les plus fous.

    Jérém vient de passer sous la douche et le bruit de l’eau change illico de tonalité. Avant de retomber dans le bac, elle atterrit désormais sur ses cheveux bruns, sur ses épaules, elle ruisselle sur sa peau, sur ses muscles, elle glisse sur sa queue. J’hésite à aller le rejoindre, mais en même temps je suis tiraillé par une autre envie, celle de voir débouler sa bogossitude « après douche », de le voir sortir de la salle de bain tout beau, tout propre, les cheveux encore humides, la peau fraîche, le déo entêtant, le t-shirt moulant, le boxer bien rempli.

    Aussi, je trouve très excitant d’imaginer mon bobrun sous la douche, juste en écoutant les bruits, les sons, comme une symphonie de la bogossitude, capables de m’apporter des images très évocatrices. Ça commence par le petit claquement du bouchon du flacon du gel douche qui s’ouvre, ça continue avec le sifflement du liquide dense qui gicle du petit orifice sous l’effet d’une pression plutôt virile, ça s’envole au rythme des frottements de ses doigts qui savonnent ses beaux cheveux bruns, des claquements de ses paumes qui astiquent sa peau mate, ses pecs, ses abdos, ses aisselles, sa queue.

    Autant de bruits, associés aux sensations olfactives, comme le parfum du gel douche qui se répand dans toute la maison à la vitesse de la lumière et qui vient violemment titiller mes narines, que mon cerveau traduit en images, des images très excitantes.

    Tellement excitantes que je ne peux m’empêcher de commencer à me caresser moi aussi. D’autant plus que cette petite pipe m’a bien mis la trique et que je n’ai toujours pas joui. Ma queue ne se fait pas prier pour afficher le garde à vous. Je me branle en écoutant mon Jérém se doucher et en repensant au gabarit de sa queue qui remplit ma bouche, à ses giclées puissantes, à son goût de mec qui persiste sur ma langue. Mon excitation monte rapidement. Et lorsque je repense à la délirante sensation de mon gland collé à sa rondelle, sur le point de glisser dedans, l’orgasme me prend par surprise. Des bonnes giclées bien lourdes aspergent mon torse, jusqu’à mon cou.

    C’était terriblement bon. L’orgasme passé, je me sens envahi par une profonde sensation de bien-être, comme si chaque cellule de mon corps et chaque neurone de mon cerveau étaient heureux. J’ai l’impression de planer. Je me sens presque stone. Je prends une profonde inspiration et je m’empresse de m’essuyer. Je dois lutter contre l’envie de me glisser sous les draps et me rendormir une nouvelle fois.

    Je regarde par la fenêtre, il fait beau. Ça s’annonce bien pour la balade. Je me demande comment vont se passer ces « retrouvailles » avec Charlène, après cette soirée géniale, après cette mise au point avec Jérém, tout aussi géniale. Je me demande si le sujet de la relation entre Jérém et moi va revenir sur le tapis. J’imagine que si ça doit venir, ça ne pourra venir que de la part de Charlène. Je vois mal Jérém en parler de son propre chef, et je ne vois pas comment je pourrai parler de ça sans prendre le risque de gêner mon bobrun.

    J’espère vraiment que Charlène va vouloir en savoir un peu plus sur notre relation. J’ai hâte de voir comment Jérém va réagir, et ce qu’il sera en mesure d’assumer. J’espère vraiment qu’il va accepter la complicité et la main tendue de Charlène, et que cela va l’aider à avancer durablement.

    Le bruit de l’eau de la douche vient de s’arrêter. J’entends le rideau de douche s’ouvrir. J’entends le beau mâle ruisselant d’eau faire un pas en dehors du bac, saisir la serviette. J’entends la serviette frotter ses cheveux, sa peau mate. J’entends le sifflement prolongé de son déo parfumant généreusement ses pecs, ses abdos, ses aisselles. Une seconde plus tard, le parfum du déo envahit à son tour mes narines, assomme ma raison. J’entends des glissements légers de coton sur la peau, le bogoss est en train de s’habiller. J’entends le chuintement du gel pour cheveux sortant de son flacon, le bobrun soigne son brushing. Rien que des bruits, et l’odeur de son déo, et j’ai envie de lui. Je bande à nouveau. Instinctivement, j’attrape un bout de drap pour dissimuler ma trique.

    Quelques instants plus tard, mon bobrun déboule dans le séjour, les cheveux humides d’eau et de gel plaqués en arrière, un t-shirt gris épousant de façon vertigineuse ses pecs et ses biceps, un boxer rouge du meilleur effet, dont la poche est bien remplie, bien suggestive.

    Le bogoss avance avec sa démarche de jeune mâle satisfait de son corps, baladant à la fois nonchalamment et avec panache sa jeune virilité. Sacré mec, mon Jérém.

    En le regardant, je me surprends à repenser à ce qui s’est passé, à ce qui a failli se passer, cette nuit. Je me demande si je ne l’ai pas tout simplement rêvé. J’ai du mal à imaginer qu’un mâle comme Jérém, un mec aussi viril, puisse avoir envie de ça. J’ai toujours imaginé mon bobrun comme étant actif, et uniquement actif.

    Certes, depuis que je suis venu le rejoindre, il m’a sucé à de nombreuses reprises. C’est bon, terriblement bon. Et il a l’air d’y prendre goût. Mais la sodomie, je ne sais pas. Mon bomâle qui a envie de se faire prendre ? Lui, si macho encore il n’y a pas si longtemps, assumant le rôle de passif ? J’ai du mal à le croire. Et pourtant, ça avait l’air si réel. Une partie de moi a envie d’en avoir le cœur net. Mais pour cela, il faudrait en parler avec le direct intéressé. Conversation potentiellement dangereuse.

    En tout cas, moi j’ai vraiment kiffé. C’est fou comme, même en étant passif, j’arrive à ressentir des envies d’actif quand le mec en face de moi sait toucher les cordes sensibles pour réveiller mon côté « petit mec ». Après m’avoir fait sentir longtemps à lui, après m’avoir rendu passif et soumis à sa virilité, Jérém sait aussi me donner envie de jouir comme un mec actif.

    J’avais ressenti cette envie avec Stéphane, qui m’avait fait ma première pipe, et dans une moindre mesure avec Martin. Mais avec Jérém, c’est tellement plus puissant. Ce mec me fait vibrer comme personne d’autre. Lorsqu’il me suce, il sait réveiller en moi des envies de mec actif et même « dominant ». Non pas dans le sens de jouer au petit macho, de vouloir soumettre l’autre. C’est plutôt dans le sens d’avoir envie d’exprimer mon côté masculin, et de sentir que cela peut faire de l’effet. Je sais qu’en tant que passif je peux donner du plaisir. J’ai envie de sentir que je peux en donner aussi en tant qu’actif. Et cet aperçu de sodomie active, m’a donné envie de découvrir comment c’est « de faire le mec ». J’ai envie de goûter à ça. Est-ce qu’il sera prêt un jour à assumer cette envie ?

    Oui, une partie de moi a envie d’en parler, de savoir ce qu’il a ressenti, s’il a eu mal, s’il a envie de recommencer. Mais une autre partie me dit que ce n’est pas une bonne idée, qu’il est des choses sur lesquelles il vaut mieux ne pas mettre des mots. Au fond de moi, je sais ce qui s’est passé. Et lui aussi sait ce qui s’est passé. Si l’envie est là, elle se manifestera à nouveau. Il suffit d’attendre. Je décide d’écouter sagement cette dernière partie de moi.

    Le bogoss en t-shirt et boxer vient de s’arrêter au pied du lit et il me regarde fixement.

    « Qu’est-ce qu’il y a ? ».

    « Toi t’es un vrai coquin » il me balance, en hochant instamment la tête, un petit sourire plein de malice au coins des lèvres.

    « Pourquoi tu dis ça ? ».

    Jérém monte sur le lit, s’approche de moi, il lève le drap et découvre ma queue raide.

    « Moi je pense que tu t’es branlé pendant que j’étais sous la douche ».

    « Non… » je lui mens, juste pour le plaisir de me faire prendre en flagrant délit de coquinerie.

    « Si… ».

    « Comment tu sais ? ».

    « Tes joues sont toujours bien rouges après que t’as joui ».

    « T’as remarqué ça, toi… ».

    Son regard bien lubrique semble vouloir transpercer le mien et pénétrer mon esprit.

    « Et aussi, t’as oublié d’essuyer ça » il ajoute, tout en se penchant sur moi et en passant sa langue dans le creux de mon cou, pour essuyer ce qui devait être une dernière trace brillante de ma jouissance. Décidemment, mon bobrun a bien changé. Ou bien, tout simplement, il ne fait qu’écouter ses envies.

    En attendant, le corps puissant et fraîchement douché et au déo captivant de mon bobrun contre le mien me donne de sacrées envies. Je regrette déjà de m’être branlé. Si ma libido n’était pas au plus bas, en phase de réamorçage, je lui sauterais bien dessus.

    Le bogoss m’embrasse et sur ses lèvres et sur sa langue je retrouve un goût qui n’est pas le sien, mais le mien.

    « Allez à la douche ! » il me lance. Je le regarde quitter le lit et se balader dans la maison, promenant sa bogossitude avec une nonchalance, avec un naturel déconcertants, très mec, très viril, dégageant une sensualité torride, comme une aura, un fluide qui ensorcèle. 

    Le bogoss ajoute du bois dans la cheminée et s’attelle à la préparation de la cafetière. Je ne peux détacher les yeux de lui, tout en me disant à quel point ce petit con est sexy avec son beau t-shirt gris et son boxer rouge, lorsque mon téléphone émet le couinement caractéristique de l’arrivée d’un message. 

    « T’as du réseau, toi ? » me demande Jérém.

    « A peine » je lui réponds, en découvrant une misérable barre de réseau sur mon écran. J’ouvre les messages et j’y trouve un sms de mon pote Julien :

    « Alors, tu t’es marié ? Enceinte ? ».

    C’est bien une réflexion d’hétéro, ça ! Croyant comme beaucoup d’hétéros que les gays aiment parler d’eux au féminin, et pensant que c’est drôle. J’imagine sa façon de le dire, avec coquinerie et bienveillance à la fois. Et en fait, ça me fait sourire.

    « Alors, c’est qui ? ».

    « Juste un pote qui me demande des nouvelles ».

    « Le mec avec qui tu étais le soir… ».

    « Non, son collègue, le mec qui m’a fait les cours de conduite ».

    « Le blond… ».

    « Tu te souviens de lui… » je m’étonne.

    « Vite fait ».

    Soudain, je me rappelle d’un cours de conduite avec Julien cours pendant lequel on était passé devant la brasserie où Jérém travaillait à l’époque. Je me souviens qu’on s’était arrêté au feu rouge pas loin de la terrasse, et je me souviens du regard noir que mon bobrun m’avait lancé en me voyant en voiture avec le beau moniteur. Un regard tellement noir qu’il avait attiré l’attention de ce dernier, qui avait bien saisi sa jalousie.

    « Il est pd lui aussi ? ».

    « Non, il est très hétéro ».

    « Comment tu sais ? ».

    « On a discuté un peu, et on est devenus potes ».

    « Il t’a dragué ? ».

    « Non, mais il a compris pour moi… ».

    « Tu l’as maté ? ».

    « On ne peut pas ne pas mater un mec comme lui ».

    « Ah bon… ».

    « Il est presque aussi canon que toi. Je dis bien… presque… ».

    « Tu le kiffes ? ».

    « Il est beau et il est sexy, je ne vais pas te mentir. Mais t’as pas à t’inquiéter. Déjà, il n’aime que les nanas. Et puis, surtout, je suis trop bien avec toi, je n’ai vraiment pas envie d’aller voir ailleurs ».

    « Tu dis ça maintenant… ».

    « Ca sera la même chose quand tu seras à Paris ».

    Ça me fait bizarre de me retrouver à rassurer Jérém sur mes éventuelles tentations lorsqu’il sera loin de moi, alors que je n’arrête pas de m’inquiéter au sujet des tentations certaines auxquelles il sera exposé dans le milieu dans lequel il va évoluer, lorsqu’il sera un sportif connu, en plus qu’être un bogoss sexy en diable.

    Quand il aura goûté à ce monde-là, est-ce qu’il se souviendra longtemps de moi, de ce week-end à la montagne ? Pendant un temps, la magie pourra peut-être perdurer, mais jusqu’à quand ?

    J’imagine qu’il aura toujours besoin de briller, de vouloir être au centre des attentions comme il l’a toujours été. Et sans doute encore plus qu’avant, car il va désormais devoir se faire à nouveau une place, dans un monde inconnu, et plus difficile à conquérir.

    J’ai peur qu’il cède bien trop rapidement aux pièges auxquels faisait allusion Daniel, qu’il ne se contente pas de vouloir montrer qu’il est le meilleur sur le terrain de rugby, mais qu’il veuille aussi montrer qu’il est le meilleur au lit avec les nanas, ne serait-ce que pour dissimuler ses véritables penchants. J’ai peur que, malgré ses sentiments sincères aujourd’hui, Jérém ne cessera pas d’avoir envie de plaire, de séduire, d’affirmer sa virilité conquérante, y compris face à d’autres mecs qu’il ne manquera pas de rencontrer sur son chemin, des mecs comme le Romain du On Off par exemple.

    Soudain, je repense une nouvelle fois à ce qui a failli se passer cette nuit. Est-ce que Jérém a vraiment envie de ça ? Quand sera-t-il à mesure de l’assumer ? Quand aura-t-il envie de ressayer ? Un peu plus tôt dans la journée je me suis dit que si l’envie est là, elle se manifesterait à nouveau et qu’il suffirait d’attendre. Le fait est que je n’ai pas ce temps d’attendre. Nous ne sommes pas vraiment un couple, nous ne vivons pas ensemble. Dans quelques jours, Jérém sera à Paris, et moi à Bordeaux. Nous nous verrons au mieux une fois par semaine, le week-end, certainement moins. A Paris, il pourra avoir autant de mecs qu’il voudra, des mecs autrement plus expérimentés que moi, et qui sauront s’y prendre pour satisfaire cette envie, cette curiosité. Est-ce qu’il saura m’attendre, ou est-ce que sa curiosité et son impatience vont le pousser à aller chercher ailleurs ce que je n’ai pas su lui apporter ?

    Jérém est-il vraiment « impatient » d'essayer ça ? Bien sûr, j’ai du mal à l’imaginer céder plus ou moins facilement son statut de mâle actif à un autre mec inconnu. Car ce serait, de son point de vue, je pense, une façon de « se rabaisser », et je ne sais pas si ça c’est quelque chose qu’il pourrait accepter. Mais si je ne lui donne pas ça, si je m’y prends mal, est-ce qu’il aura envie de ressayer avec moi, d’autant plus que es occasions vont se faire rares ? Est-ce qu’il aura envie d’attendre ? Tôt ou tard, le désir est toujours plus fort du plus fort des tabous. Il suffit pour cela de le laisser inassouvi assez longtemps. Est que les tentations parisiennes n’auront pas un jour raison de ses tabous ?

    Et j’ai bien peur que, face à ces tentations, ses promesses de ne plus me faire souffrir seront bien fragiles. D’ailleurs, il a bien dit « Je ne sais pas comment je vais gérer quand je serai à Paris… ».

    Oui, quand je pense à sa future vie parisienne, je suis mort d’angoisse. Mais en attendant, la jalousie et l’inquiétude que je décèle dans ses questionnements à peine voilés vis-à-vis de l’avenir de notre relation, me touchent profondément. J’ai envie de le rassurer. Je me lève, je m’approche de lui et je le serre dans mes bras.

    « Tu seras toujours mon Jérém à moi, personne ne pourra prendre cette place, personne ».

    Je lui fais des bisous dans le cou, sur la joue. Le bogoss se laisse faire. Je sens qu’il en a envie, qu’il en a besoin. Il tourne la tête, ses lèvres cherchent les miennes. C’est tellement bon ça, ces moments de complicité, cette envie de câlins, être l’un contre l’autre, les corps et les esprits si proches.

    Je pars enfin à la douche. Je ne traîne pas dans la salle de bain, je reviens le plus vite possible auprès de mon bobrun. Je sais que le temps m’est compté, alors j’ai envie de profiter de chaque instant que nous pouvons passer ensemble. D’autant plus que, dès que le contact visuel est coupé, mon Jérém me manque. Je deviens accroc à sa présence.

    Lorsque je reviens de la douche, le café vient tout juste de couler, son arôme sature l’air du petit séjour. Jérém nous en sert deux grandes tasses. J’adore ces petits déjeuners avec mon Jérém. Car ces petits déjeuners marquent à chaque fois le début d’une nouvelle journée de bonheur ensemble. Une nouvelle journée arrachée au temps.

    « Allez, on est partis ! » fait le bogoss après avoir avalé sa tasse d’une seule traite, se levant de la chaise presque d’un bond.

    Décidemment, Jérém a l’air bien en forme. Je le regarde passer son pantalon d’équitation, le pull à capuche gris, le même qu’il portait lorsqu’il était venu m’attendre à la halle. Je le regarde chausser ses boots, glisser son paquet de cigarettes dans la petite poche du pantalon. En une minute chrono, mon bobrun est prêt à partir. Décidemment, dans sa tenue de cavalier, il est terriblement sexy. Et pour rajouter un côté insoutenable à sa sexytude incandescente, voilà qu’à la faveur d’un étirement matinal, le bas de son t-shirt gris se lève un peu, une fine ligne rouge de l’élastique de son boxer apparaît au-dessus du bord du pantalon, ainsi que quelques poils en dessous de son nombril. C’est craquant.

    « Alors, tu t’habilles pas ? » il me lance.

    « Si… si… » je lui réponds, en m’activant enfin.

    « Je t’attends dehors » fait le bogoss en sortant dans le jardin pour se griller une clope.

    Je finis de m’habiller en vitesse. Je rejoins mon bobrun et je lui propose de prendre ma voiture, ce qu’il accepte de bon gré. Ça me fait plaisir qu’il monte dans ma voiture. J’ai envie que le siège, les tissus, les plastiques s’imprègnent de son déo et de sa présence.

    Avant d’aller chez Charlène, nous faisons un petit détour par la superette de Martine pour acheter notre casse-croûte de midi.

    « Alors, les garçons, ça va bien depuis hier soir ? ».

    « Ça va, ça va » fait Jérém.

    « Oui, très bien » je lui réponds « la fondue était très bonne, je crois que je n’en ai jamais mangé d’aussi bonne »

    « Merci, c’est gentil, mais je suis savoyarde, la fondue c’est dans mes gènes… et dans mes hanches » elle rigole.

    « Allez, on est attendus, on va prendre deux bricoles et on y va » fait Jérém en baillant.

    « Mais vous avez de petits yeux, les garçons, la nuit a été courte on dirait… ».

    Son regard est perçant, plein de malice. Quelque chose dans ce regard me fait dire qu’elle aussi a compris pour Jérém et moi. de plus, sa façon de nous appeler « les garçons » sonne étrangement allusive à mes oreilles.

    « Non, ça va » fait Jérém en partant dans les petits rayons.

    Je le rejoins et j’en profite pour prendre un appareil photo jetable. J’ai envie de faire des photos, d’immortaliser ce moment, ces montagnes, ce bonheur. Et par-dessus tout, j’ai envie d’avoir quelques photos de mon Jérém. Je n’en ai toujours pas, à part les trois que m’a données Thibault. Je sens que j’en aurai besoin quand il sera à Paris. En parlant de Thibault, il faut absolument que j’aille le voir dès que je serai de retour sur Toulouse.

     « Vous faites quoi aujourd’hui ? » nous questionne Martine pendant qu’elle fait l’addition de nos courses.

    « On repart en balade » fait Jérém.

    « Alors, bonne balade ! ».

    « D’abord on va aider Charlène à soigner les chevaux, après on prend le petit déjeuner et on part avec elle ».

    « Ah, c’est pas une balade en amoureux du coup ».

    « Mais ta gueule ».

    « Il est ronchon, ton pote, ce matin, non ? » elle fait, en s’adressant à moi « il s’entraîne pour quand il sera à Paris… ».

    Sa réflexion me fait rire. Mais pas Jérém.

    « Tenez, je vais vous donner quelques chouquettes pour le petit déj. Vous m’en direz des nouvelles ».

     

    « Elle est marrante cette Martine. Et très gentille » je lance dès que nous sommes en voiture.

    « Elle est chiante, surtout ».

    « Pourquoi tu dis ça ? ».

    « Elle est toujours en train de fouiner… ».

    Je tends une chouquette à mon bobrun qui la dévore d’une seule bouchée, l’air contrarié. J’en goûte une à mon tour. C’est vraiment super bon ça.

    « Tu crois qu’elle a compris pour nous ? ».

    « Je n’en sais rien, mais je la connais, si elle a un doute, elle va faire des pieds et des mains pour savoir… et elle va cuisiner Charlène jusqu’à ce qu’elle parle… ».

    « Je pense que Martine est une nana aussi cool que Charlène ».

    « Peut-être, mais je ne tiens pas que tout le monde soit au courant. Ce qui se passe entre nous ne les regarde pas ».

    « Mais regarde comment ils ont accepté Loïc et Sylvain ».

    « Je m’en fous, je ne suis pas comme eux ».

    « C’est à dire ? ».

    « C'est-à-dire qu’eux ils aiment s’afficher, pas moi ».

    Ce que Jérém vient de dire, je le partage dans un certain sens : c’est vrai, au fond, ce qu’il y a entre nous ne regarde personne à part nous. Je ne suis pas forcément prêt à m’afficher non plus devant tout le monde. Mais d’un autre côté, ça me fait chier de devoir me cacher des personnes qui, j’en suis certain, pourraient comprendre et nous soutenir.

    « Passe une autre chouquette » fait mon bobrun en mode gourmand.

     

    « Coucou les bogoss » nous accueille Charlène, l’air de fort bonne humeur.

    Après les bises, nous l’aidons comme prévu à soigner les chevaux au pré et dans les box. Très vite, Jérém a chaud, et il se débarrasse de son pull à capuche. Je le regarde en train de bosser, de prendre de grandes fourchées de foin, de paille ou de fumier. Je l’observe sous l’effort, les pecs enveloppés dans ce t-shirt gris bien ajusté, les biceps en action, à un rien de craquer les manchettes. J’assiste à la formation d’une double trace de transpiration entre les pecs et entre les omoplates. Et c’est beau à en donner le tournis.

    « Ah, putain, j’avais oublié à quel point c’est bon d’avoir un mec à la maison » commente Charlène en contemplant le travail accompli « avec un mec, ça va trois fois plus vite. En plus, ce matin je suis gâtée, j’en ai deux pour le prix d’un ».

    « N’y prends pas trop goût » fait mon bobrun.

    « Ca m’est de plus en plus pénible de m’occuper des chevaux, avec mon genou en vrac ».

    « Tu devrais embaucher quelqu’un ».

    « J’attends patiemment ma retraite dans deux ans… ».

    « Et tu comptes faire quoi, après, du centre ? ».

    « Si ma fille veut le reprendre, je l’aiderai à s’installer. Mais je doute qu’elle en ait envie. Sinon, je vais essayer de le donner en gérance. Et si je ne trouve personne, je vais tout arrêter… ».

    « Et moi je vais faire quoi de mes canassons ? » fait Jérém, l’air inquiet.

    « T’inquiète, il y aura toujours un pré pour tes chevaux ».

    « Merci… ».

    Cette réponse aurait dû rassurer mon bobrun. Et pourtant, il semble toujours soucieux.

    « Allez, on va prendre le petit déj, vous l’avez bien mérité ».

    Pendant que Jérém s’allume une clope et se fait réprimander une nouvelle fois par Charlène, je vais chercher les chouquettes dans la voiture. En revenant, j’ai du mal à lui arracher un bisou, car il semble avant tout se soucier de ne pas être vu par Charlène. Le fond de l’air est frais, je rentre en premier, sans attendre qu’il termine sa clope.

    « Ah, Nico, vas-y, assieds-toi » m’accueille Charlène.

    Dans la grande cuisine, deux chiens sont en train de dévorer chacun leur gamelle de croquettes. Sur une vieille gazinière à bois qui a l’air de ne pas avoir servi depuis des lustres, un chat isabelle et obèse mange calmement son repas du matin.

    Sur une moitié de la grande table, les tas de papiers et de toute sorte d’objets semblent avoir encore avoir doublé de volume par rapport à la dernière fois. Aux fenêtres, les toiles d’araignées semblent en passe de se transformer en rideaux. Le sol est toujours autant couvert de poils de chien et de poussière.

    Et pourtant, cette cuisine a quelque chose de profondément accueillant. L’odeur du café et du pain grillé sature l’air de la pièce. Un petit insert dégage une chaleur douce. Sur la deuxième moitié de la table, trois bols, trois couverts et trois verres nous attendent. Il y a du jus de fruit dans une carafe, de la confiture maison dans un pot, du beurre sur une petite assiette, du pain grillé dans une corbeille. Elle ne s’est pas foutue de nous, pour nous remercier de notre aide, Charlène nous a préparé un vrai bon petit déj. Qui donne envie. D’autant plus qu’il commence à faire faim. L’exercice matinal ouvre l’appétit. La présence bienveillante de la maîtresse de maison réchauffe le cœur.

    « Ça va, Nico ? ».

    « Oui, très bien, j’ai faim… ».

    « Vas-y, prends ce qui te fait envie ».

    « Merci… ».

    « Alors, ça a été après la soirée, il s’est calmé ? » fait elle en s’installant à table à son tour et en commençant à beurrer une tranche de pain.

    Je suis surpris mais enchanté de cette question ouvrant une complicité inattendue.

    « Oui, après que tu lui as parlé, tout s’est arrangé ».

    « Vous en avez reparlé ? ».

    « Oui… ».

    « Et alors ? ».

    « Je crois qu’il est content que tu sois au coura… ».

    « Chut, il arrive » me coupe Charlène.

    Ce n’est pas de la cachotterie. Mais il ne faut surtout ne pas donner l’impression à Jérém de parler dans son dos, ça le braquerait à coup sûr.

    « Il fait quand même frais dehors » fait Jérém.

    « Aaahhh, tu pues la clope » fait Charlène.

    « Je pue le fumier aussi ».

    « Mais l’odeur de la clope c’est pire. Vraiment, tu devrais arrêter de fumer ».

    « Et toi tu devrais arrêter le beurre » répond le petit con du tac au tac, alors que Charlène s’apprête à avaler une pauvre tranche de pain chargée d’une couche de beurre proche du centimètre.

    « C’est pas faux » fait-elle en éclatant dans ce rire sonore qui est un peu sa « marque de fabrique ».

    « Bien sûr que c’est vrai ! Je pense à ton cheval, c’est lui qui va porter sur le dos toutes ces plaquettes de beurre. Surtout, tu ne montes jamais mes chevaux ».

    « Mais t’es vraiment qu’un petit con ! ».

    « Vielle peau ».

    « Moi aussi je t’aime ».

    « C’est ça… ».

    « Toi aussi tu m’aimes… ».

    « Je vais y réfléchir… ».

    « Je t’en foutrais ! ».

    « Il est aussi insolent avec toi ? » elle me demande sans transition. Nouvelle petite forme de complicité qui m’enchante.

    « Il est pire… ».

    « T’as du mérite, alors… » fait-elle en nous servant du café.

    Jérém et Charlène n’arrêtent pas de se taquiner, et le petit déj se passe dans une bonne humeur géniale. Nous déjeunons longuement, en prenant notre temps. C’est une merveilleuse façon de bien commencer la journée. Si on n’avait pas une balade à faire, je voudrais que ce moment se prolonge à l’infini.

    « Quelqu’un en veut ? » demande Charlène en saisissant une grande théière en fonte posée au coin de la table.

    « Garde ta bouillasse » fait Jérém.

    « Petit merdeux ! ».

    « Moi je veux bien goûter ».

    « C’est du thé que j’ai ramené cet été de Mongolie ».

    Elle me tend une tasse et la remplit de la boisson dorée. J’allonge la main pour prendre un sucre.

    « Malheur ! On ne sucre pas un thé pareil ! C’est pas du Lipton ! Tu vas couvrir tous les arômes ! ».

    « Ah… ».

    « Goûte d’abord, après tu aviseras ».

    Je porte la tasse à mes lèvres, je goûte. Elle a raison, ce thé a un caractère, un vrai, il a un arôme, et même plusieurs arômes, ils pétillent sur la langue, dans le palais, remontent dans les narines et provoquent un feu d’artifice sensoriel dans la tête. C’est une expérience gustative qui n’a rien à voir avec celle des sachets.

    « Alors, comment tu trouves ? »

    « C’est vraiment super bon ».

    A mi-tasse, je reprends une chouquette. Les deux saveurs s’épousent à merveille.

    « Tu as été en vacances en Mongolie ? » je lui demande.

    « J’y ai passé un mois, en balade, à cheval. C’est la troisième fois que j’y vais. J’y retourne tous les 2-3 ans. J’adore cette région ».

    « Mais tu pars comment, toute seule, à l’aventure ? ».

    Charlène nous raconte sa dernière randonnée en Mongolie, avec trois de ses clients, épaulée par une famille nomade. Elle nous parle des petits chevaux de là-bas, « pas plus grands que des pottocks du Pays Basque ». Elle nous parle du mode de vie des tribus nomades, dont la seule richesse est le bétail, vaches, chèvres, chameaux, moutons, chevaux, yacks, un bétail autour duquel toute la vie de la famille est organisée. Elle nous parle de ces mecs qui s’occupent de l’alimentation du bétail (la recherche de fourrages dicte la dynamique du nomadisme) et de sa surveillance (notamment contre le loup). Elle nous parle de ces femmes qui s’occupent de tout le reste, des gosses, de la bouffe, de la traite, de travailler le lait.

    Elle nous parle de ces hommes et de ces femmes qui avec peu d’outils savent tout faire, car ils ont gardé un bon sens paysan qui leur permet de vivre, certes durement, mais en harmonie avec la nature et avec les ressources qu’elle peut offrir, sans la violenter.

    Elle nous parle d’un village perdu dans la montagne, auquel on ne peut accéder que par des sentiers non carrossables. Elle nous parle d’une minuscule superette dans laquelle elle a trouvé l’« essentiel », à savoir du Coca et du Nutella. Elle nous parle d’un soir où elle a voulu faire pipi derrière un buisson et où elle s’est trouvée presque nez-à-nez avec un loup.

    Elle nous parle des immenses plaines et de la solitude, des petites yourtes et de leur promiscuité, du mode de vie nomade qui ramène à l’essentiel et ignore tout ce qui est superflu.

    Elle nous parle de gens simples, souriants, heureux. Elle nous parle de leur gentillesse, de leur hospitalité, de leur profond respect des traditions. Elle nous parle de gens ancrés à leurs racines qui poussent pourtant les enfants à faire des études à la ville « pour ne pas trimer comme leurs ainés ». Elle nous parle d’un mode de vie, d’un monde en cours de disparition.

    « Leur simplicité, leur authenticité, leur force et leur vulnérabilité me touchent et me fascinent. Voilà pourquoi j’aime retourner dans ce pays, dans ces plaines, auprès de ces gens ».

    Je suis enchanté par son récit, et j’ai envie de lui poser plein de questions. Mon bobrun semble lui aussi ravi d’entendre parler d’un mode de vie si différent de celui de nos pays, de nos villes.

    Hélas, le temps nous presse, et c’est Charlène même qui nous le rappelle :

    « Allez, il faut quand même y aller, j’ai prévu une boucle pas trop dure mais assez longue… ».

    Nous terminons nos boissons chaudes et nous allons chercher les chevaux. Unico et Téquila sont alignés devant l’entrée du paddock. Ils trépignent, comme s’ils savaient qu’ils vont partir en balade.

    Jérém rentre en premier, passe le licol à Unico. En cinq secondes net, le cheval est en longe. De mon côté, c’est un brin plus laborieux. Ce matin, Tequila semble d’humeur taquin, elle n’arrête pas de mouliner avec sa tête. Lorsque j’arrive enfin à passer le licol, je l’attache de travers. J’essaie de le défaire, mais elle n’arrête de bouger, je n’arrive à rien. Heureusement, Jérém vient à mon secours. Il tire un bon coup sur le licol, la jument affiche un air surpris, et elle arrête net son cirque. Le bobrun n’a plus qu’à reprendre les lanières, boucler au bon endroit, et me tendre le licol. Dans la vie, on est pro ou on ne l’est pas. Je le regarde, il me regarde. Mon regard est plein d’admiration, le sien plein de douceur et d’indulgence. Je lui dis « Merci », il me fait un bisou. Et il part devant, avec son Unico en longe, un beau sourire au fond de son regard.

    Au centre équestre, je brosse ma jument jusqu’à la faire briller de mille feux. Je mets le tapis pile au garrot, j’installe la selle, je sangle. Enfin, j’essaie, car le bidon de Tequila est énorme ce matin. Je suis obligé de forcer comme un âne pour arriver à avoir le premier trou. La selle c’est bon. Pour le mors et les rênes, là ça se complique sérieusement. Je ne sais jamais par quel bout attraper ce machin !

    Une fois de plus, l’aide de Jérém est providentielle.

    « Au fait, les garçons, je ne vais pas pouvoir partir tout de suite » fait Charlène en nous rejoignant.

    « Comment ça ? ».

    « J’avais complètement zappé qu’il y a un jeune qui doit passer ce matin pour voir Unico… ».

    « C’est qui ce type ? ».

    « C’est le fils d’une amie à moi qui se propose de monter ton entier cette année. Comme toi tu ne vas pas trop avoir le temps de le monter, j’imagine, ce serait dommage qu’il reste au pré sans rien faire ».

    « C’est sûr ».

    Les mots de Charlène me rappellent instantanément l’imminence du départ de mon bobrun pour Paris. Et la tristesse qui va avec.

    « Il doit passer quand ? ».

    « Il m’a dit 9h30. Il est 9h45, je pense qu’il ne va pas tarder. Tant pis, je vais l’attendre. Jérémie, t’as qu’à monter Little Black, et vous n’avez qu’à y aller, je vous rejoindrai en chemin avec Unico ».

    « Je préfère l’attendre, moi. Je veux être là pour voir s’il peut faire l’affaire. Apparemment celui qui le montait cette année était nul… ».

    « Ça c’est clair ».

    « Allez, filez, je m’occupe du casting pour mon cheval ».

    « T’es sûr ? ».

    « Certain ! ».

    « Ça te dit, Nico, si on part tous les deux ? » me demande Charlène.

    « Oui oui… ».

    « Allez, en selle, alors ! ».

    Je ressangle ma jument. Maintenant qu’elle s’est détendue, j’arrive à gagner deux trous de sangle. J’attrape les rênes et le pommeau de selle, je mets le pied à l’étrier. Je sais que mon Jérém me regarde faire, je sens ses yeux bruns sur moi. Je ne veux pas le décevoir. J’ai envie qu’il soit fier de moi. Je suis les consignes à la lettre, je m’élance avec puissance et j’atterris sur la selle comme une plume. Tequila ne bouge pas une oreille, et surtout pas un sabot, ce qui m’aide bien.

    « Joli » fait Charlène à mon intention.

    Je capte le regard de mon bobrun. Le bogoss me sourit, il hoche la tête en signe d’approbation et de fierté. Je me sens tellement bien dans son regard. Je suis heureux.

    « Il a vraiment une bonne posture » elle insiste.

    « Je lui ai tout appris… » fait Jérém en souriant, le ton taquin et le regard bienveillant.

    « Tu me fais confiance ? » me demande cette dernière.

    « J’ai pas le choix… » je la cherche.

    « Petit con toi aussi ! ».

    « Tu le corriges s’il monte mal ma jument » fait Jérém.

    « Tu lui as peut-être tout appris, mais moi je vais le prendre en main et le faire progresser encore ».

    « Vous faites attention, surtout… ».

    « Oui, t’inquiète, je vais prendre grand soin de ton chéri ! » ose Charlène.

    Jérém réagit en pouffant comme si cette dernière avait dit une énormité. Mais il n’a pas l’air vexé. C’est déjà ça.

     

    Après avoir longé les clôtures du centre équestre, nous empruntons un sentier qui grimpe, grimpe, grimpe. Chaque foulée faite nous emplit les yeux d’un paysage de plus en plus majestueux. Chaque mètre parcouru nous apporte des odeurs de terre, de végétation, d’animal, nous emplit les oreilles des bruits du cuir de nos harnachements, de la respiration de nos montures, de leurs sabots ferrés qui foulent le sol, qui résonnent contre les pierres. Le vent s’infiltre dans les frondes des arbres, souffle dans nos oreilles. La balade commence, le temps s’étire, nous changeons de dimension spatio-temporelle.

    L’émotion que tout cela me procure est tellement intense que plus rien ne me semble exister au-delà du sublime paysage qui se déroule sous mes yeux.

    Là, au milieu de nulle part, les soucis et les peurs s’évaporent comme le brouillard du matin sous un soleil bien chaud. Tant de beauté donne l’impression que le bonheur est à portée de main et que les obstacles qui s’interposent sont sans importance. A cet instant précis, même le départ de Jérém à Paris ne me fait plus peur. Je suis dans un état d’enchantement total.

    Nous marchons toujours au pas et à un moment je me sens assez en confiance sur Tequila pour penser à sortir mon appareil photo et essayer de capturer ce beau paysage.

    « Tu vas faire des photos à oreilles ? » me lance Charlène.

    « Des quoi ? ».

    « Quand on prend des photos à cheval, on obtient souvent des clichés avec les oreilles de sa monture en bas de l’image. C’est presque une signature. Du cavalier et de son cheval. Et on appelle ça des « photos à oreilles »… ».

    Je trouve ça marrant, des « photos à oreilles ». Je vise, j’appuie sur le déclencheur. Clic, clic, clic. Une fois, deux fois, trois fois. Il faut que j’y aille mollo, je dois garder quelques poses pour prendre en photo mon Jérém. 24 négatifs, ça va vite. C’était avant le numérique, c’était une autre époque. Et pourtant, cette quantité limitée de photos, l’impossibilité de voir le résultat sur l’instant et d’effacer les ratés, ce petit rouleau qu’on devait amener à développer dans un magasin, l’attente avant d’aller chercher les photos papier, la joie de découvrir celles qu’on avait réussies, la déception de découvrir celles qu’on avait ratées, tout cela avait son charme.

    Nous reprenons notre chemin. Charlène n’a pas menti, elle semble bien intentionnée à me faire progresser. D’abord, elle veut à tout prix que je trouve mon équilibre sur la selle sans me tenir au pommeau, pommeau qui est pourtant mon grand allié ainsi qu'un grand ami, car il m’inspire confiance et il est toujours là quand j’en ai besoin. « Tu t’appuies trop dessus, ça te fait prendre de mauvais reflexes ». Ensuite, elle me propose des séances de trot enlevé, séances au cours desquelles elle m'invite à relâcher les rênes pour « laisser respirer Tequila « au moins une fois chaque quart d'heure » (là encore, ce sont ses mots).

    J’ai toujours pensé que dans l'équitation c'est l’animal qui se tape tout le taf. Depuis que je monte à cheval, je constate que ce n’est pas du tout le cas. Putain, qu’est-ce que c'est physique ce trot enlevé !

    Entre deux exercices, nous marchons au pas. Charlène en profite pour me donner plein de conseils sur ma position en selle et sur l’écoute de l’animal. Elle a une grande connaissance et une immense expérience des équidés. En plus elle est très bonne pédagogue. C’est une passionnée, et par conséquent, sa pédagogie est passionnante.

    Puis, à un moment, alors que nous marchons au pas sur un sentir relativement plat, elle lance le sujet que je rêve d’aborder depuis que le hasard a décidé que nous allions nous balader seul à seul pendant un petit moment.

    « Alors, raconte, ça fait depuis combien de temps que vous êtes ensemble ? ».

    « On n’est pas vraiment ensemble. En tout cas, on ne l’était pas avant ce week-end ».

    « Ah bon ? Comment ça ? ».

    « C'est-à-dire qu’on… couchait ensemble mais que Jérém ne voulait surtout pas que ça se sache… ».

    « Ah, oui, ça j’ai bien vu ! Et alors, ça marchait comment votre relation ? »

    « Il couchait avec moi mais il couchait aussi avec des nanas… ».

    « Et tu supportais ça ? ».

    « Je n’avais pas le choix, c’était ça ou rien ».

    « C’est parce qu’il n’assumait pas, parce qu’il se cherchait… ».

    « C’est ça, jusqu’au jour où j’en ai eu assez ».

    « Je te comprends. Et qu’est-ce qui s’est passé ? ».

    « Un jour on s’est disputés, c’était peu de temps avant cet accident… ».

    « Je pense que cet accident ça lui a remis les idées en place et ça lui a fait ouvrir les yeux sur ce qui était vraiment important pour lui ».

    « J’aurais quand même préféré qu’il n’y ait pas besoin de cet accident pour que les choses évoluent entre nous ».

    « Certes. Mais parfois il faut un électrochoc pour faire avancer les choses ».

    « Tu as peut-être raison… ».

    « Au fait, comment vous avez su l’un pour l’autre ? » elle enchaîne « je veux dire, je me suis toujours demandé comment vous, les homos, vous arriviez à vous reconnaître ».

    « Lui il savait que je le kiffais… ».

    « Et comment ? ».

    « Parce que je n’arrêtais pas de le regarder, depuis le premier jour du lycée. Mais moi je ne savais pas si je lui plaisais… ».

    « Et alors ? ».

    « Un jour on a révisé ensemble et il a voulu que ça aille plus loin ».

    « C’est lui qui a voulu ? ».

    « Je le voulais aussi, mais je n’aurais jamais osé ».

    « Tu l’aimes ? ».

    « Comme un fou… ».

    « Et lui ? ».

    « Ça a été difficile jusqu’à il y a pas longtemps, mais là, je crois que oui. Même s’il ne me l’a jamais dit, je crois que oui. Depuis que je suis ici, je me sens vraiment heureux avec lui ».

    « Tu sais, Jérémie c’est un peu comme un enfant pour moi. Je l’ai vu grandir, je le connais un peu. J’arrive à lire derrière les apparences. Jérémie ne sait pas mentir, et surtout il ne sait pas me mentir. Il a beau faire l’indifférent, comme tout à l’heure quand je t’ai appelé son « chéri », moi je suis persuadée qu’il t’aime vraiment ».

    « Je pense, enfin, j’espère… ».

    « Nan, mais t’as vu ce regard qu’il avait quand tu es monté à cheval ? C’était un regard plein d’admiration et de tendresse. Tu sais, je paierais cher pour qu’un mec me regarde de cette façon. Hélas, à mon âge c’est foutu ! ».

    Je souris. Elle enchaîne :

    « Quand il m’a parlé de toi pour la première fois, comme d’un « pote qui allait venir quelques jours » j’ai senti qu’il avait vraiment envie de te voir. Il était fébrile à l’idée de te voir. Je crois que c’est à ce moment-là que j’ai senti que tu étais plus qu’un pote. Tu sais, il n’a jamais amené personne ici, aucune copine. Juste deux ou trois fois son pote Thibault. Et, maintenant, toi… ».

    « Je voudrais que ce week-end ne se termine jamais ».

    « C’est Paris qui t’inquiète ? ».

    « Oui, la distance, et tout ce qu’il va trouver là-bas… ».

    « Tu verras, vous allez y arriver, j’en suis persuadée. Il faudra juste être patient. Et persévérant. La persévérance, c’est ce qui rend l’impossible possible, le possible probable et le probable réalisé ».

    « Laisse-lui le temps de s’accepter. Donne-lui autant d’amour que tu peux. Fais-le se sentir bien. Je pense qu’il est très difficile d’assumer sa sexualité quand on l’associe à la peur du regard des autres et à la honte. En dehors du plaisir sexuel immédiat, elle ne procure aucun bonheur. Mais dès qu’on associe sa sexualité à la joie et à l’amour, c’est facile d’accepter qui l’on est. C’est une chance qu’il soit tombé sur un gars comme toi. Tu l’aimes, et il le sait, et il t’aime lui aussi. Je crois que je ne l’ai jamais vu aussi heureux depuis le divorce de ses parents. Il t’aime parce qu’il est heureux avec toi. Et c’est ça qui va faire bouger les lignes dans sa tête ».

    « J’espère juste que le jour où il s’acceptera, il aura toujours envie d’être avec moi, qu’il n’aura pas trouvé un autre gars qui lui plaît davantage et qui sera plus près que moi… ».

    « Tu es quelqu’un de spécial pour lui… ».

    « J’espère que tu dis vrai… ».

    « Parce que c'est Nico, parce que c'est Jérémie… ».

    « De quoi ? ».

    « Tu ne connais pas cette citation de Montaigne ? On ne vous apprend donc rien au lycée ? ».

    « Non, je ne connais pas, désolé… ».

    « Dans ses Essais, Montaigne a écrit un long chapitre sur l’amitié, à l’intention de La Boétie, son ami disparu prématurément, et qui était probablement plus qu’un ami. Une phrase de ce chapitre est restée célèbre, car elle résume en quelques mots simples la particularité, l’intensité de cette amitié qui le liait à la Boétie : « Si on me presse de dire pourquoi je l’aimais, je sens que cela ne se peut exprimer qu’en répondant : Parce que c’était lui, parce que c’était moi ». Ça veut dire qu’il y a des amitiés, des relations, des coups de foudre, qui sont comme autant d’évidences, qui sont si fortes que rien ni personne ne peut les empêcher. Elles doivent arriver et elles arrivent ».

    Les mots de Charlène me font chaud au cœur.

    « Qu’est-ce que c’est beau de tomber amoureux à votre âge ! » elle me lance, sur un ton enjoué « accroche-toi, Nico, car on ne tombe vraiment amoureux qu’une seule fois dans la vie… ».

    Charlène a tout juste le temps de terminer sa phrase, lorsque nous entendons au loin le claquement des sabots d’un cheval approchant au grand galop. Je ne le vois pas encore, mais je suis sûr qu’il s’agit de mon beau Jérém. Je me retourne, impatient de le voir apparaître. Le bruit de tonnerre des sabots augmente d’intensité seconde après seconde. C’est une cadence très rapide, c’est un bruit très sonore, presque une musique, un « allegro con moto » dans lequel j’ai envie de lire son impatience de me retrouver.

    Un instant plus tard, le bobrun apparaît sur son étalon, au grand galop. Qu’est-ce qu’il est beau mon Jérém sur son Unico ! Dès qu’il nous voit, il ralentit et il approche au pas.

    « Eh, ben, on dirait que tu étais impatient de nous rejoindre » fait Charlène.

    « Ça a été vite plié avec Gildas ».

    « Alors, comment tu l’as trouvé ? ».

    « Je lui ai mis les points sur les « I »… ».

    « Tu lui as pas fait peur ? ».

    « Non, je blague, il a l’air bien ce gars. Je lui ai fait faire un tour sur Unico dans la carrière. Ça va le faire ».

    « Allez, trêve de bêtises, on continue, la boucle est encore longue » fait Charlène.

    Nous marchons au pas avec pour décor un paysage magnifique. Et pourtant, il est un détail dans le paysage qui capte toute mon attention. Jérém marche désormais vingt mètres devant nous, et je ne peux détacher mes yeux de ce petit t-shirt gris qui moule ses épaules, ses biceps et souligne avec une précision redoutable le V de son torse.

    « Mais regarde un peu ce dos massif ! Quand je pense qu’il était tout fin quand il était plus jeune ».

    « Il est vraiment bien foutu » je confirme.

    « J’adore le dos des mecs, je trouve qu’il exprime toute la puissance d’un… ».

    « Mâle… » je complète sans réfléchir.

    « C’est exactement ça… ».

    « Moi aussi j’adore son dos ».

    Oui, j’adore son dos. Et j’adore également sa position sur le cheval que je trouve très suggestive, notamment au pas. Le buste bien droit, maintenu un peu vers l’arrière, les épaules ouvertes, tous pecs dehors, le bassin qui oscille avec nonchalance au gré des pas de l’animal, mouvement qui n’est pas sans me rappeler ses coups de reins pendant la recherche du plaisir masculin. D’une certaine façon, sa position et son attitude à cheval me rappellent ses positions et ses attitudes pendant l'amour. Dans les deux cas, il s’agit d’une forme de domination virile. Dans les deux cas, il s’agit d’une forme de sensualité. Une sensualité, celle dégagée par mon Jérém en selle sur son étalon, au parfum de terre, de nature, de transpiration, qui a quelque chose de profondément sauvage, d’authentique et d’indompté.

    « On va arriver dans une descente plutôt raide » m’annonce Jérém « et Tequila n'aime pas ça ».

    « Ah… » je stresse.

    « Tu te penches en arrière le plus possible et tu lui mets des petits coups de talon pour qu’elle avance. Il ne faut pas la laisser s’arrêter. Car si elle se plante, tu vas te faire chier pour la faire repartir ».

    Je ne savais pas que mon adorable Tequila pouvait être caractérielle. On ne finit jamais d’en apprendre à cheval et au sujet de son cheval.

    En effet, la descente est assez couillue, et elle m’occasionne un certain nombre de frissons. Je suis les consignes de mon bobrun à la lettre, je suis pratiquement couché sur ma jument, et je mets de petits coups de talon sur son ventre pour la faire avancer. Tout semble bien se passer lorsqu’elle s’arrête net au beau milieu de la pente, alors que Jérém et Charlène sont pratiquement arrivés en bas. Je me relève, je tape plus fort avec les talons. Rien ne se passe. Et là, je vois le bogoss descendre de son Unico, confier les rênes à Charlène, et remonter lentement la pente sous le soleil battant, jusqu’à moi.

    « Je suis désolé ».

    « C’est pas ta faute, elle est chiante. Passe-moi les rênes ».

    « Je descends ? ».

    « Tu peux rester en selle, tu risques rien ».

    J’ai déjà entendu cette phrase, et je me souviens qu’elle s’est révélée pas complément fondée. Pourtant, je décide de lui faire confiance. J’adore me sentir pris en main par mon Jérém.

    « Ca va ourson ? » il me demande.

    Ourson. Ça me plaît de plus en plus. Ça me donne des frissons. Je me sens tellement bien dans ce simple mot qui me rappelle à chaque fois toute la douceur et l’affection qu’il me porte.

    Le bobrun fait avancer Tequila en serpentant dans la pente jusqu’à rejoindre Charlène qui nous accueille avec un sourire plein de tendresse.

    Vers midi, nous nous arrêtons à l’ombre pour la pause déjeuner, déjeuner tiré de nos sacoches (j'adore toujours autant cette expression). A notre grande surprise, Charlène fait apparaître des magrets de son paquetage magique.

    Jérém se dépêche de faire un feu de camp. Nous nous installons autour et nous les faisons griller directement au-dessus du feu, perchés sur des petites branches.

    Pendant que les magrets cuisent, nous mangeons des entrées froides, nous racontons des bêtises, nous rigolons beaucoup. Je prends Jérém et Charlène en photo. Je prends Jérém en photo.

    Quelques minutes plus tard, nous retirons les magrets du feu. Mon bobrun se charge de les couper sur une pierre lisse. Il en fait des lanières, il en tend à Charlène, il m’en offre à moi.

    J’ai très faim, et la première bouchée est toujours la meilleure. Verdict : je crois que je n’ai jamais mangé un magret aussi bon de ma vie ! Ce goût de grillé, de fumé, cette texture légèrement croustillante en dehors, tendre dedans, c’est divin. Charlène a eu une bien bonne idée. Nous nous régalons.

    « C’est bon, ourson ? » me demande Jérém.

    « C’est très bon ».

    « Comment tu l’as appelé ? » ne manque pas de relever Charlène.

    « Nico ».

    « Non… ».

    « Si… ».

    « T’as dit ourson ».

    « T’as mal compris » fait Jérém en rigolant.

    « Ourson, c’est troooop mignon ! ».

    Après le repas, Charlène nous annonce son intention de faire une petite sieste.

    Elle s’éloigne un peu et s’allonge à l’abri du vent. Jérém fume sa cigarette le dos appuyé à un arbre. Ce t-shirt gris enveloppant son torse est sexy à mourir. Autour de nous, les chevaux évoluent en totale liberté. C’est apaisant de les regarder en train de brouter.

    « Alors, Charlène a essayé de te cuisiner ? ».

    « Elle m’a posé quelques questions… ».

    « Comme quoi ? ».

    « Comme depuis combien de temps on était ensemble, comment ça avait commencé… ».

    « Et tu lui as dit quoi ? ».

    « Je suis resté vague ».

    « Elle ne peut pas s’en empêcher ! ».

    « Elle t’aime beaucoup, c’est normal qu’elle veuille savoir ».

    « Viens voir » fait le bobrun, en m’attrapant par le bras.

    « Quoi ? » je feins d’opposer une improbable résistance.

    « Viens voir… » fait-il en m’attirant fermement contre son torse et en m’embrassant.

    Une seconde plus tard, je me retrouve dans ses bras, mon bassin entre ses cuisses, le dos enveloppé par son torse et ses bras. Jérém me fait des bisous dans le cou, s’attarde dans cette région hypersensible à la lisière des cheveux et de la nuque. Je vibre. Sa langue léchouille mon oreille, elle me procure des frissons inouïs. Sa barbe m’excite à fond. Je me retourne, nos lèvres se rencontrent, nous nous embrassons longuement.

    Je bande, j’ai envie de lui. Tellement envie que, pendant un instant, je suis traversé par l’idée de lui proposer de chercher un coin tranquille pour pouvoir lui faire une gâterie dans la nature. Mais je me ravise très vite. Car ce moment est purement magique, et rien ne pourrait me rendre plus heureux. Moi dans les bras du mec que j’aime, devant ce paysage magnifique. C’est le bonheur absolu, c’est un rêve qui devient réalité.

    « On est bien, là » je lâche.

    « C’est clair ».

    « Je n’aurais jamais imaginé que cette première révision chez toi nous conduirait ici, aujourd’hui, dans les bras l’un de l’autre » je considère.

    « Moi non plus… ».

    « Je n’aurais jamais imaginé que je serais aussi heureux un jour ».

    « Moi aussi je suis très heureux ».

    Nous restons ainsi, dans les bras l’un de l’autre, pendant un petit moment. Et nous finissons par nous assoupir.

     

    « On se fait des papouilles ? » fait Charlène en revenant de sa sieste et nous arrachant de la nôtre.

    Derrière moi, je sens Jérém remuer, je sens qu’il veut se dégager de cette position au plus vite. Mais Charlène lui pose une main sur épaule pour lui en empêcher.

    « Vous êtes vraiment mignons tous les deux ».

    Nous finissons quand même par nous relever. Je regarde Jérém, il me regarde lui aussi. Il me sourit.

    « Allez, le bisou, le bisou, le bisou ! » fait Charlène.

    « Mais ça va pas ? » fait Jérém.

    « Le bisouuuuuuuuuuu ! ».

    « Non ! ».

    « Je parie que vous n’avez jamais fait ça en public ».

    « Non, et c’est pas au programme non plus ».

    « Allez, je suis certaine que Nico en a envie… hein, t’en as envie, Nico ? ».

    Dans mon for intérieur, j’en ai envie, mais je ne veux pas mettre mon Jérém mal à l’aise. D’autant plus que moi aussi je suis un peu mal à l’aise avec le fait de l’embrasser devant quelqu’un, même si c’est Charlène, car je n’ai jamais fait ça auparavant.

    « Oui, mais je ne veux pas forcer Jérém… s’il n’a pas envie, il n’a pas envie ».

    Jérém a l’air surpris et touché par ma réponse. Et là, je le vois approcher de ma joue et claquer un bisou.

    « Et c’est tout ? ».

    « Il est timide » je m’enhardis.

    « Il est gêné » rigole Charlène

    « Putain ! » j’entends mon bobrun pester.

    Et là, je le vois approcher mon visage du mien, je sens ses lèvres se coller sur les miennes et poser un bisou, certes rapide, mais bien appuyé.

    Une décharge électrique secoue mon ventre et se propage dans tout mon corps. La gêne se dissipe, volatilisée par le bonheur.

    « C’est bon ? » fait le bogoss sur un ton sarcastique.

    « Et voilà, ça c’est un bisou ! Il ne faut pas avoir peur d’aimer ».

    « Tu m’emmerdes ».

    « Je sais, mais maintenant que tu l’as fait une fois, tu auras moins peur de le refaire… ».

    « C’est ça ».

    « Il faut assumer qui l’on est… ».

    « Elle me les brise menu ».

    « Je sais que tu es un mec, un vrai, alors j’attends de toi que tu assumes qui tu es, surtout devant moi, qui ne te veux que du bien. Tôt ou tard, vous serez confrontés à d'autres personnes qui comprendront qui vous êtes l’un pour l’autre. Et quand ça arrivera, tu vas faire quoi ? Tu vas nier, mentir, te cacher, tu vas avoir peur à chaque fois ? ».

    « T’inquiète, je me débrouillerai ».

    « T’es têtu comme un âne ».

    Nous ressellons nos chevaux et avant de remonter sur ma jument je prends mon bobrun en photo sur son étalon.

    « T’as pas fini avec tes photos ? ».

    « Il t’aime, il ne peut pas s’en empêcher » fait Charlène « d’ailleurs, donne ton appareil, je vais vous prendre tous les deux. Allez, Nico, en selle ».

    Soudain, j’ai envie de l’embrasser. Je n’avais même pas osé imaginer avoir une photo avec mon Jérém. Et Charlène a l’idée de le faire. Je l’adore.

    « Jérémie ! » elle l’appelle.

    « Quoi ? ».

    « Viens là, je vais vous prendre en photo, toi et ton ourson ».

    « J’aime pas les photos ».

    « Dépêche-toi ! ».

    « T’es vraiment chiante ! » grogne mon bobrun, tout en approchant Unico de Téquila.

    Lorsqu’il arrive à côté de moi, il me passe un bras autour du cou. Et Charlène appuie sur le bouton.

    « C’est dans la boîte ».

    « Merci encore ».

    « Je pense que tu en avais envie ».

    « Ah oui ! Merci beaucoup ».

    Je suis heureux. Je reprends l’appareil des mains de Charlène avec un soin tout particulier, car il recèle désormais un trésor inestimable, une photo de mon bobrun et moi.

     

    Vers le milieu de l’après-midi Tequila semble pressé. Elle fait des pieds et des mains pour prendre la tête du cortège. Le pas, elle le veut rapide. Le trot, elle le veut sans cesse. Le galop, elle se l'octroie sans rien demander. Tequila est un « véhicule » à boîte automatique, elle passe la troisième vitesse sans se soucier un seul instant de mon avis. Je suis surpris (c'est un euphémisme). J’ai une réaction épidermique, je tire un grand coup sur les rênes. Et là, elle réagit au quart de tour. On dirait un dessin animé : elle stoppe net, c’est presque un arrêt sur image. Les quatre fers en l’air, elle lévite un instant avant de retomber sur le sol.

    Sur un chemin à flanc de montagne, je me fais une frayeur lorsqu’elle semble trop approcher le bord. Je me vois déjà dans le vide ! J’ai une exclamation de panique qui fait beaucoup rire Jérém et Charlène.

    En milieu d’après-midi, il fait très chaud. Et nous n’avons plus d’eau.

    « Et il nous reste au moins deux heures avant d’arriver chez moi » fait Charlène.

    « On aurait dû prendre davantage d’eau » lâche Jérém « mais on n’avait pas prévu qu’il fasse si chaud ».

    « J’ai l’impression qu’Unico boîte » enchaîne Charlène.

    « Merde, c’est pas une impression » fait mon bobrun.

    Et, ce disant, il descend illico de son étalon, il lui attrape le pied et regarde à l’intérieur du sabot.

    « Y a un clou du ferrage qui est en train de se barrer. Je pense que ça doit lui faire mal. Il faudrait le déferrer ».

    « Tiens, j’ai une idée. On va bientôt arriver à la ferme de Florian. On va se faire payer un coup à boire et se faire prêter des outils pour le déferrer… ».

    « Florian, l’ex de Loïc ? » je demande.

    « C’est ça. C’était un cavalier lui aussi, avant la rupture avec Loïc, il y a un an… non, deux ans déjà, le temps file si vite. En plus, ça me fera plaisir de le revoir, ça fait un moment que je ne l’ai pas vu. ».

    Dans mon for intérieur, je suis curieux de rencontrer ce Florian. Dès que j’en ai entendu parler par Charlène et Martine, j’ai eu de l’empathie pour ce gars qui a vécu une séparation difficile. Je ne le connais pas, et pourtant, j’ai envie de voir comment un homo s’assume à l’âge adulte, j’ai envie de voir comment on se reconstruit après une rupture. J’ai aussi envie de savoir à quoi il ressemble. Et quel genre de mec il peut bien être.

     

    Vous venez de lire un nouvel épisode de Jérém&Nico. 20 heures d'écriture ont été nécessaires pour le réaliser.

    En 2019, j'ai voulu reprendre les 40 premiers épisodes de la saison 1 pour en faire un livre, que je vous présente ici, juste en dessous.

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    Jérém&Nico Livre 1. Jérém, qui est-il ce garçon ?

     

    Jérém&Nico - Tous les épisodes

     

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    Jérém&Nico Livre 1. Jérém, qui est-il ce garçon ?

     

    Jérém&Nico - Tous les épisodes

     

    Après une longue gestation, le premier livre de Jérém&Nico est enfin imprimé et prêt à être expédié.

    "Jérém&Nico Livre 1. Jérém, qui est-il ce garçon ?" reprend les 40 premiers épisodes de l'histoire, enrichis de nombreux passages piochés dans les épisodes plus récents, lorsque ces derniers s’intègrent aux premiers de façon intéressante.

    Il en résulte une toute nouvelle structure narrative, allégée et plus cohérente.
    Jetez un œil pour vous en rendre compte !


    Télécharger « Jerem & Nico - Livre I PROMO 10 épisodes.epub » version pour liseuse, gratuit.

    Tu peux commander ta copie dédicacée en version papier ou epub (pour liseuse) via la plateforme tipeee.com/jerem-nico-s1.

     

    Acheter le livre "Jérém : qui est-il ce garçon?" version epub, 15 euros (envoi par mail), cliquer ICI.

    Acheter le livre papier "Jérém : qui est-il ce garçon?", 30 euros (envoi par la Poste), cliquer ICI.

    Pour me donner un coup de main à partir de 1 euros, cliquer ICI. 


    En achetant le livre papier ou numérique, ou en faisant un tip sur tipeee, tu contribues au travail d’écriture de la suite de l’aventure Jérém & Nico.

    Merci d'avance !

    Fabien.

     

    Un petit aperçu du livre :

     

    Télécharger « Jerem & Nico - Livre I PROMO 10 épisodes.epub » version pour liseuse, gratuit.

     

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     Tipeee en bref en 47 secondes

     

     

    Tipeee en brefParticiper à l'aventure Jérém&Nico (en 2 minutes chrono !)

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     

     


     

     


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